PRÉFACE : IMMUNOLOGIE 2000
Docteur Alain CHEVAILLER
Article paru dans la Revue Française des Laboratoires 2000, 319 : 14.
PRÉSENTATION DE LA DISCIPLINE
L'immunologie est une discipline qui étudie, en physiologie et en pathologie, le fonctionnement du
système immunitaire, les propriétés de ses effecteurs et de leurs cibles, in vivo et in vitro, leurs applications de
ces dernières en biotechnologie, et les moyens de les stimuler ou de les réprimer [1].
CE QU'A APPORTÉ LE XXE SIÈCLE A LA DISCIPLINE
Après les prémisses de l'ère pastorienne à la fin du siècle dernier qui avait vu l'immunologie
émerger de la microbiologie en rationalisant la découverte de la vaccination de Jenner, le XXe siècle a été celui
de l'établissement de cette science nouvelle par la définition de son objet d'étude : le système immunitaire [2].
Dans un va-et-vient incessant entre pratique expérimentale et pratique théorique, l'immunologie s'est constituée
successivement autour des paradigmes défensif (réponse anti-infectieuse), puis sélectif (sélection clonale) et
enfin cognitif (distinction soi/non-soi) [3]. Saluées par 15 prix Nobel, ses interrogations ont permis et se sont
nourries de la mise au point d'outils qui ont révolutionné et la pratique médicale, et le champ d'investigation
d'autres disciplines scientifiques : des succès de la vaccination à celui des greffes, de la structure des
immunoglobulines à la mécanique recombinatoire génique créatrice de diversité, les exemples sont nombreux
de l'apport fondamental de l'immunologie aux progrès des connaissances biologiques. Sans théorie de la
sélection clonale de Burnet, pas d'anticorps monoclonaux de Köhler et Milstein dont la présence, désormais
triviale dans les méthodes diagnostiques, voire thérapeutiques, se retrouve dans ce terme d'immuno-analyse qui
laisse à penser que tout biologiste, tel Monsieur Jourdain, fait de l'immunologie sans le savoir.
LE TOURNANT 2000
Discipline mixte, fondamentale et clinique, l'immunologie regroupe des professionnels d'horizons
différents : scientifique, médical, pharmaceutique, odontologique et vétérinaire. Cette richesse d'angles de vue
n'en est une que si l'on maintient l'unicité d'une vision globale apportée par la connaissance détaillée de la
physiopathologie du système immunitaire. Si le territoire de l'immunologie fondamentale est peu ou prou
reconnu, celui de l'immunologie médicale est encore en pleine évolution [4].
Au terme de ce siècle, le mode de fonctionnement du système immunitaire commence à être mieux
perçu, grâce aux progrès de l'immunologie fondamentale. Le système immunitaire, contrairement aux autres
appareils de l'organisme, tels que les appareils cardio-vasculaire ou locomoteur par exemple, n'a pas
d'individualité anatomique et temporelle stricte. Il est constitué d'un ensemble de cellules qui se répartissent
entre différents compartiments : organes lymphoïdes proprement dits (thymus, moelle osseuse, rate, ganglions),
voies de circulation (sang, lymphe) et autres tissus non lymphoïdes. On peut cependant le concevoir comme un
réseau d'opérateurs traitant des informations et possédant une branche afférente de reconnaissance d'antigènes
identifiés comme potentiellement agressifs, et une branche efférente effectrice, d'élimination de ces antigènes.
L'immunologie, en cela, ressemble à la cybernétique, puisqu'il y est question de communication et de langage
[5]. L'importance des mécanismes de recombinaison génique dans la création des répertoires B et T, des
mécanismes d'apoptose dans l'établissement de la tolérance et l'obtention de la cytotoxicité [6], des mécanismes
de présentation des antigènes par les cellules dendritiques, des mécanismes de communication cellulaire par les
cytokines est désormais bien établie. D'une meilleure connaissance de tous ces processus découlera une
meilleure compréhension de pathologies dans lesquelles sont impliqués des dysfonctionnements de ces différents
phénomènes.
L'immunologie médicale [1] est une discipline mixte, biologique et clinique, dont l'objet est le
diagnostic et la prise en charge de maladies à physiopathologie dysimmunitaire. Ces maladies peuvent être
regroupées en sept grandes thématiques : les maladies auto-immunes, l'immunologie de transplantation
d'organes et de greffe de tissus, les déficits immunitaires primitifs, le SIDA et les infections des
immunodéprimés, les syndromes lymphoprolifératifs et les cancers, l'immunothérapie et les vaccinations, les