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Avant propos :
Cet exemple de cours sur le commerce international est une version pour les enseignants. Il est destiné en particulier aux
collègues débutants et contractuels (mais peut être utilisé par les autres), pour mieux matérialiser ce que peut être la
construction d’un cours. Il comporte les éléments à enseigner en fonction du programme actualisé et des instructions
officielles, ainsi que des pistes d’approfondissement destinées aux enseignants (principalement dans les encadrés), qui peuvent
être aussi utilisées ponctuellement en accompagnement personnalisé (approfondissement du cours).
Terminale – Economie
Mondialisation, finance
internationale et intégration
européenne
 Programme :
2.1 Quels sont les fondements du commerce international et de l'internationalisation de la production ?
En partant d'une présentation stylisée des évolutions du commerce mondial et en faisant référence à la notion d'avantage
comparatif, on s'interrogera sur les déterminants des échanges internationaux de biens et services et de la spécialisation.
 Quelles sont les évolutions du commerce mondial en lien avec les théories de l’échange ?
 Quels sont les déterminants des échanges et de la spécialisation ?
On analysera les avantages et les inconvénients des échanges internationaux pour les producteurs comme pour les consommateurs.
On présentera à cette occasion les fondements des politiques protectionnistes et on en montrera les risques. On s'interrogera sur les
effets d'une variation des taux de change sur l'économie des pays concernés.
 Quels sont les avantages et inconvénients des échanges internationaux ?
 Quels sont les effets positifs et les limites du protectionnisme ?
 Quels sont les effets d’une variation des taux de change sur le fonctionnement de l’économie ?
En s'appuyant sur des données concernant le commerce intra-firme et sur des exemples d'entreprises multinationales, on abordera
la mondialisation de la production. On analysera les choix de localisation des entreprises et leurs stratégies d'internationalisation. On
étudiera à cette occasion les principaux déterminants de la division internationale du travail, en insistant sur le rôle des coûts et la
recherche d'une compétitivité hors prix.
 Comment la production s’est-elle mondialisée ?
 Quels sont les explications et les effets des choix de localisation et des stratégies des FMN ?
 Quels sont les déterminants de la DIT : compétitivité prix et hors-prix ?
Notions :
Indicateurs :
-
-
Mondialisation
Commerce international
Internationalisation de la production
Avantage comparatif
Dotation factorielle
Libre-échange / Protectionnisme
Commerce intra-firme
Compétitivité prix
Compétitivité hors-prix
Délocalisation
Externalisation
Firmes multinationales
Spécialisation
Taux d’ouverture
Taux de pénétration
Termes de l’échange
Mécanismes :
-
Les justifications de la spécialisation
Avantages et limites du libre-échange
Avantages et limites du protectionnisme
Impact du taux de change sur les échanges
Processus de multinationalisation des firmes
Le développement des FMN justifié par la compétitivité-prix
Le développement des FMN justifié par la compétitivité hors-prix
Liens avec le programme de 1e :
Acquis de 1ère :
-
Gains à l’échange
1

Lien avec le programme de 1ère ES :
3. La coordination par le marché (3.2 Comment un marché concurrentiel fonctionne-t-il ?)
4. La monnaie et le financement

Lien avec la spécialité EA :
3.1. Qu'est-ce que la globalisation financière ?
 Plan du thème :
Quels sont les fondements du commerce international et de l’internationalisation de
la production ?
1ère partie : Comment le libre-échange la spécialisation ont-ils favorisé la mondialisation des
économies ?
1 – Mise en place et évolution de la mondialisation
2 - Le libre-échange et la spécialisation se justifient par les théories économiques
3 - Le libre-échange génère des pertes et des gains pour le consommateur et le producteur
4 - Le protectionnisme, entre risques et opportunités
5 - Le rôle des taux de change
2ème partie : Comment expliquer l’internationalisation de la production ?
1 – La production se mondialise
2 - Les FMN ont une stratégie de compétitivité prix
3 - Les FMN ont une stratégie de compétitivité hors-prix
4 - L’internationalisation de la production a des effets positifs et négatifs sur les pays d’accueil et d’origine

2
 Pour débuter le thème :


Pourquoi les investissements internationaux sont-ils importants en France ?
Pourquoi Renault produit-il au Brésil et Toyota en France ?
Document 1 Une rue en Chine
1. En quoi cette photo évoque-t-elle la mondialisation ?
2. Pourquoi les entreprises sont-elles présentes dans les pays étrangers ?
Source : http://www.monnuage.fr/photos/point-d-interet/210808/585795
(Attention : il s’agit en fait du restaurant de… Paris, 13ème arrondissement)
Document 2 Croissance du PIB et croissance du commerce (PNUD – 2011)
1. Exprimez les données en gras dans une phrase.
2. Calculez l’évolution de la part des exportations pour la Chine et le Congo. Commentez le résultat.
3. Existe-t-il une corrélation entre le commerce international et la croissance ? Justifiez votre réponse.
Mexique
Chine
Tunisie
Congo
démocratique)
(Rép.
PIB par habitant
(TCAM - en %)
1980-2010
1.1
13.6
4
- 4.6
Exportations de biens et services
(en % du PIB)
1980
2010
11
28
11
27
40
52
17
10
3
Thème 1 :
Quels sont les fondements du commerce international et de
l’internationalisation de la production ?
La mondialisation traduit l’extension de l’économie de marché à l’échelle mondiale. La
mondialisation (parfois qualifiée de globalisation) désigne un processus de développement des échanges, à
travers la création d’un vaste marché mondialisé des biens, services et capitaux (et parfois des travailleurs),
accompagné d’une montée des interdépendances entre les Etats.
La mondialisation de l’économie se traduit donc par la croissance des flux commerciaux, des flux
d’investissement et des flux financiers. Les firmes multinationales (FMN) jouent une part active et controversée
dans ces évolutions, mais les états (et les organisations internationales) n’en sont pas non plus absents. Les
acteurs vont alors agir avec des motivations et des comportements similaires (sur les marchés intérieurs et
extérieurs), même s’il va exister certaines spécificités liées aux politiques commerciales des états et aux taux de
change.
On peut donc se demander pour quelles raisons les échanges se sont-ils développés, avec quels avantages
et quelles limites, et sous l’influence de quels acteurs ?
1ère partie : Comment le libre-échange la spécialisation ont-ils favorisé la mondialisation
des économies ?
Le processus de mondialisation est le résultat de l’accentuation des relations économiques entre les
nations (et entre les firmes – 2e partie). Comment ce processus s’est-il développé ? Comment la théorie
économique l’analyse-t-elle ? Quels sont ses effets sur les producteurs et les consommateurs ? Le
protectionnisme est-il une alternative viable au libre-échange ? Comment les taux de change influencent-ils les
échanges ?
1 – Mise en place et évolution de la mondialisation
Le processus de mondialisation recouvre des aspects multiples qui ont favorisés l’évolution de la structure
des échanges à travers une volonté de libéralisation de l’économie internationale.
1.1 – Le processus de mondialisation
On entend par échange international, l’ensemble des opérations commerciales et financières réalisées
par des agents économiques résidants dans des pays différents. Il comprend les échanges de marchandises, de
services, de capitaux et de travailleurs (qui restent cependant limités).
Le commerce extérieur représente l'ensemble des exportations et des importations de biens enregistrés
dans la balance commerciale. Le commerce international ou commerce mondial correspond à la valeur ou au
volume des échanges de biens et de services entre nations enregistrés dans la balance courante ou des
transactions courantes.
4
Le processus de mondialisation prend plusieurs aspects :
- L’intensification des échanges commerciaux et la hausse du degré d’ouverture des économies.
Depuis 1850, le commerce international a augmenté à un rythme beaucoup plus soutenu que la
production mondiale. Autrement dit, les exportations et le commerce international tirent la
croissance par le haut. Mais, pendant la crise de 2008-2009, on observe un net ralentissement du
commerce mondial qui accompagne celui du PIB mondial.
- Cette internationalisation des échanges de biens et de services a deux effets :
 Une ouverture croissante des économies sur les marchés extérieurs (taux d’ouverture) :
Taux d'ouverture = (Exportations + Importations) / 2 / PIB x 100
 Une interdépendance accrue des économies : les économies sont contraintes d'importer
une part croissante de biens et de services étrangers pour satisfaire leur demande
intérieure. Ceci nous est donné par le taux de pénétration :
Taux de pénétration = Importations / Marché intérieur x 100
Tout ralentissement de la croissance dans un pays se traduit par une baisse des exportations et de la
croissance chez ses partenaires commerciaux.
- La mondialisation passe, ensuite, par des échanges massifs de capitaux. Le stock de capitaux
investis à l’étranger qui représentait 5,2% du PIB mondial pendant les Trente Glorieuses en
représente plus du quart de nos jours.
- D’où le développement d’un système mondial de production autour des firmes multinationales
(FMN), qui sont des firmes qui ont une ou plusieurs filiales à l'étranger. Elles répartissent les
tâches productives sur l’ensemble de la planète en fonction des avantages de chaque pays.
La mondialisation n’est pas un phénomène nouveau. Depuis le milieu du XIXe siècle, il y a eu au moins
deux vagues de mondialisation :
- La première a commencé vers le milieu du XIXe siècle pour se terminer au début de la Première Guerre
mondiale. Elle est caractérisée par une division traditionnelle du travail entre les pays. Les pays
européens font venir des matières premières de leurs colonies et exportent des produits industriels.
- La seconde a débuté après la Seconde Guerre mondiale et se poursuit aujourd’hui. La croissance du
commerce mondial est plus rapide que celle du PIB mondial. Les firmes multinationales (FMN) se
développent et adoptent peu à peu des stratégies globales avec un développement des marchés
financiers (échanges de capitaux).
1.2 - L’évolution de la structure du commerce international
La structure par produits :
- Alors que les échanges de produits primaires (produits agricoles, minéraux et combustibles)
représentaient la moitié du commerce international de biens et de services en 1913, soit les
deux-tiers du commerce international de marchandises, le poids des produits manufacturés est
devenu majoritaire depuis les années 1950 dans le commerce de biens. En 2011, les produits
manufacturés constituent 54% du commerce mondial de biens et services et les deux tiers du
commerce mondial des biens.
- Les échanges de services (transports, voyages, autres services commerciaux) se sont développés
plus tardivement que les échanges de biens sous l’effet des progrès des techniques
d’information et de communication. Ils représentent aujourd’hui environ 20% des échanges et
progressent à peu près au même rythme que l’ensemble du commerce mondial.
5
La structure par zones géographiques :
- Le commerce mondial est encore largement dominé par les pays développés. Les pays
européens et l’Amérique du Nord réalisait les deux-tiers des échanges mondiaux en 1948 et en
1973. Pour l’Union européenne, les échanges sont essentiellement (à 75%) du commerce à
l’intérieur de l’UE (commerce intra-zone). De nos jours, l’Europe et l’Amérique du Nord
contrôlent encore la moitié du commerce international de biens et de services.
- Cependant, dans la période récente, de nouveaux concurrents sont entrés sur la scène
internationale : les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) représentent désormais
près de 16,8% du commerce mondial de marchandises. La Chine est devenue, en 2010, le premier
exportateur mondial.
- Mais, les autres pays en développement (Afrique et Amérique latine) et les pays en transition (ex
bloc de l’Est) ont vu leur part de marché se réduire. La mauvaise spécialisation de l’Amérique
Latine et de l’Afrique dans les produits primaires et l’effondrement du bloc soviétique expliquent
cette marginalisation du commerce mondial.
- La mondialisation commerciale est donc fortement concentrée sur un petit nombre de pays,
incluant les émergents.
 Trois pays (Chine, Allemagne, Etats-Unis) réalisent à eux seuls 27% des exportations
mondiales de biens.
 Si l’on raisonne par zones géographiques, on peut parler d’une tripolarisation des échanges
mondiaux entre l’Amérique du Nord, l’Europe et l’Asie (triade). A elles trois, elles
concentrent près de 81% du commerce mondial. Pour chaque zone, plus de la moitié des
échanges sont des échanges intra-zone à l’exception de l’Amérique du Nord.
 On peut expliquer leur importance par la multiplication des accords de libre-échange
depuis la création du Gatt et de l’OMC (ALENA, MERCOSUR, ASEAN, etc.). Ces accords
permettent la suppression des droits de douane, la libre circulation des marchandises, des
capitaux et des hommes. Ils favorisent donc les échanges entre les pays concernés par
l’accord.
1.3 - Le développement du libre-échange
Le libre-échange est actuellement privilégié par rapport au protectionnisme, depuis 1945. Ce qui a
favorisé les échanges internationaux, tout comme le développement des moyens de communication.
Un des premiers facteurs de la mondialisation réside dans les innovations technologiques (progrès
technique) en matière de transports et de communication. Les progrès en matière de transports (bateau à
vapeur, avion à réaction, porte conteneur, réseau autoroutier, infrastructure portuaire…) ont permis une
accélération de la circulation des marchandises et une diminution des coûts. De même, les progrès en matière
de communication et d’information (TIC) (télégraphe, téléphone, ordinateurs, Internet…) ont permis de faire
circuler rapidement l’information sur tous les territoires et de réduire considérablement les coûts (Ils ont été
divisés par 64 entre 1960 et 2000).
Le second facteur du développement des échanges a été l’extension du libre-échange. On a assisté ces
cinquante dernières années à une baisse des barrières tarifaires (Droits de douane) et non tarifaires
(Contingentement, normes techniques et sanitaires…) qui touchaient les échanges internationaux.
Les conséquences désastreuses du protectionnisme de l’entre-deux guerre ont poussé après la seconde
guerre mondiale à un mouvement de libéralisation du commerce international. Sous la pression des Etats-Unis et
dans le cadre de l’ONU va ainsi se mettre en place le GATT en 1948 (General Agreement of Tariffs and Trade ;
6
accord général sur les droits de douane et le commerce). Le GATT est un ensemble de négociations afin de
promouvoir le libéralisme commercial et le multilatéralisme.
Le libre-échange interdit les restrictions quantitatives (quota, contingentement de marchandises
importées), qui limitent les quantités des importations autorisées, et met en place des cycles de négociations
(les « rounds ») pour abaisser peu à peu les droits de douane sans pouvoir revenir en arrière (règle de la «
consolidation »). A cela s’ajoute la réciprocité (ou principe du donnant-donnant) : un pays qui reçoit des
avantages commerciaux est tenu d'accorder en retour des concessions équivalentes. Enfin, la loyauté dans les
échanges suppose la prohibition des subventions aux exportations et du dumping (c’est à dire de la vente à un
prix inférieur au coût de production) qui faussent la concurrence. Ces deux règles visent à établir une «
concurrence saine et non faussée ».
Le multilatéralisme : les règles s’appliquent à tous les signataires et ne peuvent pas être négociée de pays
à pays (refus du bilatéralisme). Tout ce qui est accordé à un pays doit l’être aux autres : « clause de la nation la
plus favorisée ». Si la France baisse ses droits de douane sur les produits agricoles provenant du Niger, il doit
automatiquement répercuter cette baisse sur les produits agricoles provenant des autres pays signataires du
GATT.
En 1994 le GATT est donc remplacé par l’organisation mondiale du commerce (OMC), instance qui devient
permanente. Le bilan de ce processus est globalement positif : le niveau moyen des droits de douanes passant
d’environ 40 % en 1947 à environ 4% dans les années 2000. Cette baisse des droits de douane s’est
accompagnée d’une explosion des échanges internationaux avec une hausse de plus de 1 600 % entre ces deux
dates et une hausse de plus de 600 % du PIB réel mondial. Il semble donc y a voir une corrélation positive entre
le développement du libre-échange et la croissance des échanges internationaux.
2 - Le libre-échange et la spécialisation se justifient par les théories économiques
Les théories économiques justifient l’échange international par des avantages fondés sur les différences de
de productivité et/ou de dotation en facteurs de production, qui favorisent une spécialisation. Cependant, les
évolutions récentes des échanges (de produits similaires) semblent remettre en cause ces analyses.
Si généralement on peut souligner que l’échange international est positif (au moins jusqu’à un certain
niveau) avec l’existence de gains à l’échange (principalement à travers les économies d’échelle). Ces gains sont
rarement également répartis et donc certains, pays et/ou groupes d’individus peuvent subir des effets négatifs.
2.1 - Les théories libérales classiques :
 Les avantages absolus d’Adam Smith (économiste libéral – anglais – fin 18ème siècle)
Smith va s’efforcer de montrer que le commerce international, grâce à la Division internationale du
travail (DIT), qui correspond à la spécialisation de chaque pays dans le domaine d'activité où il est le plus
compétitif, peut enrichir les nations (favoriser la croissance). Pour Smith, un pays doit se spécialiser dans la
production pour laquelle ses coûts de production unitaires sont inférieurs à ceux de son concurrent (car sa
productivité est plus élevée). Ceci lui permet d’obtenir des prix plus faibles et donc d’augmenter ses ventes et sa
croissance.
Cette spécialisation doit se dérouler dans un système de libre échange et de libre concurrence. La
spécialisation permet un triple avantage :
 la division internationale du travail (DIT) permet d’économiser du temps de travail.
7
 la production (et donc la croissance) va augmenter car les pays vont pouvoir consacrer les heures
épargnées à une production supplémentaire du bien pour lequel ils sont plus compétitifs.
 Les citoyens vont pouvoir acheter à moindre coût les produits qu'ils ne savent pas fabriquer
avec efficacité, ce qui augmente le pouvoir d'achat de la population.
Mais, cette analyse est limitée ; comment un pays, qui n’aurait aucun avantage absolu (ses coûts de
production seraient supérieurs à tous ses concurrents) et donc qui ne pourrai pas spécialiser, pourrait-il payer ses
importations puisqu'il n'aurait rien à exporter ?
 Les avantages comparatifs de David Ricardo (économiste libéral – anglais – début 19ème siècle)
Ricardo reprend le modèle d'Adam Smith en l’améliorant. Il va démontrer que les pays ont intérêt à se
spécialiser dans le produit pour lequel il dispose d'un avantage comparatif ou relatif, c'est-à-dire le produit
pour lequel son désavantage est le plus faible ou dans lequel son avantage est le plus élevé (dans le cas où il ne
dispose pas d’avantage absolu). L’avantage comparatif peut se mesurer par le rapport entre la productivité (ou les
coûts) de 2 pays pour un produit donné.
En se spécialisant chaque pays concentre ses ressources sur une seule production (en abandonnant les
autres qu’il importera), ce qui lui permet de devenir compétitif. Chaque pays sera alors gagnant à la
spécialisation et à l’échange grâce aux économies de facteurs qu’il réalisera dans les activités moins
performantes, pour les utiliser de manière plus optimale dans sa « spécialité ».
Spécialisation et coût d’opportunité :
La production d’un bien ou d’un service (et donc la spécialisation) s’effectue en fonction d’un
arbitrage lié au coût d’opportunité. Le choix d’investir et d’embaucher, pour créer ou développer une production, limite
les capitaux et le travail disponibles pour d’autres activités ; ce choix se fait donc implicitement au détriment de certaines
productions ; d’où la logique des avantages comparatifs.
La spécialisation des pays va permettre de concentrer les ressources là où elles seront les plus efficaces, ce qui
permet d’augmenter la production mondiale (et les exportations) de chaque bien et service, améliorant ainsi le niveau de
vie dans chaque pays. D’autant plus que les biens et services non fabriqués seront importés à un prix plus faible que la
production nationale.
Les avantages qui conditionnent la spécialisation proviennent simultanément des salaires relatifs et de la
productivité relative entre les pays. Un pays à salaire relatif élevé dispose aussi d’un niveau de productivité élevé et
inversement ; l’avantage lié à un salaire faible sera donc compensé par un travail moins efficace et inversement. Au final
chacun peut obtenir un avantage en matière de coût (même si les écarts salariaux sont importants), ce qui permet
d’arbitrer dans les choix de production.
L’analyse de Ricardo repose malheureusement sur des hypothèses non vérifiées actuellement,
principalement car le commerce mondial est un commerce intrabranches, alors que selon Ricardo l’échange
s’effectue entre deux pays, avec des spécialisations et des produits différents. Ce type de commerce correspond
à la DIT traditionnelle (Sud exportant des produits primaires, le Nord des produits manufacturés : commerce
interbranches) pas la DIT actuelle (échanges de produits similaires entre pays du Nord : commerce
intrabranches).
Avantage comparatif et idées reçues :
Le modèle des avantages comparatifs fait souvent l’objet de présupposés erronés :
Le libre-échange n’est favorable que si le pays est en capacité d’affronter la concurrence extérieure (lien
productivité / compétitivité) : Il s’agit ici d’une analyse fondée sur l’existence d’un avantage absolu (un pays ne peut
s’insérer dans les échanges car il est moins performant que les autres en termes de productivité) et non sur l’avantage
comparatif. Or l’avantage absolu n’est ni nécessaire, ni suffisant pour déterminer un avantage comparatif : ce n’est pas
uniquement la productivité qui détermine les exportations mais aussi les salaires (voir : spécialisation et coût
d’opportunité). Les différences de salaires entre les pays sont fonction des différences de productivité de tous les secteurs
8
(et pas uniquement de ceux exposés à la concurrence internationale) et donc les différences de salaire compensent les
différences de productivité.
Les pays avancés sont défavorisés du fait de la concurrence des pays à bas coûts (dumping social) : Les faibles
coûts du travail sont accusés d’être responsables d’une concurrence déloyale et donc de pertes de parts de marché (et
d’emplois) dans les pays développés. Ce qui inévitablement débouche sur des préconisations protectionnistes ou sur une
exigence de baisse des salaires et des droits sociaux. Or, comme les salaires reflètent la productivité du pays, l’échange ne
fait qu’inciter chaque pays à se spécialiser encore plus, ce qui améliore encore l’efficacité du travail et donc la productivité,
lui permettant d’augmenter les salaires.
L’échange international pénalise obligatoirement les pays en développement, en favorisant l’exploitation
des travailleurs : Les travailleurs des PED ont des salaires très faibles par rapport à ceux des pays riches, ce qui permet
aussi aux consommateurs de ces mêmes pays riches de gagner en pouvoir d’achat (grâce à des prix plus faibles) ;
l’exploitation du sud enrichie le nord. Or, le choix d’une non-insertion dans l’échange international (autarcie) provoquerait
une situation encore plus dégradée sur le pouvoir d’achat des salariés des PED (baisse des salaires réels), qu’une
participation. Ce qui ne signifie évidemment pas que leur situation actuelle est enviable ou qu’elle ne mérite pas d’être
améliorée…
Il ne faut cependant pas négliger que le modèle ricardien reste daté et simpliste, et qu’il ne
correspond plus exactement à l’économie actuelle, du fait par exemple des barrières protectionnistes (plus ou moins
déguisés), du développement des échanges intrabranches et des coûts de transport, qui dépassent parfois les gains liés aux
coûts de production. D’autant plus qu’il existe un nombre important de biens non échangeables ou non-négociables (au
niveau international).
Il s’agit de produits tels que la terre, qui ne peut pas être échangée au plan international du fait de son immobilité
intrinsèque, la main-d’œuvre qui est soumise à des restrictions administratives qui limitent les mouvements
internationaux, ou encore de biens ou services (SAV automobile, avocat, médecin, coiffeur…) pour lesquels les coûts de
transport sont trop élevés par rapport à leur valeur marchande, ou enfin de denrées extrêmement périssables telles que la
canne à sucre.
Le modèle (et ses vérifications empiriques), même s’il n’explique pas toutes les motivations de l’échange,
permet de constater que les différences de productivité restent importantes dans les relations économiques
internationales, qui sont basées sur des avantages comparatifs et non absolus.
2.2 – Des analyses théoriques complémentaires et renouvelées :
 Le modèle HOS et la dotation des facteurs de production (analyse néo-classique – 20e siècle) :
Ce modèle vise à approfondir l'analyse de Ricardo en expliquant l'origine des différences de coût de
production (et donc des avantages comparatifs) entre les pays.
La théorie de la dotation de facteurs (encore appelée HOS pour Heckscher - Ohlin - Samuelson) peut être
énoncée comme suit : chaque pays dispose d'un avantage comparatif et a intérêt à se spécialiser dans les
produits qui utilisent le facteur de production dont il dispose en abondance (travail ou capital).
On observe alors que les pays fortement dotés en travail (pays à bas salaires) disposent d'une supériorité
dans les productions intensives en main-d’œuvre, telles que le textile par exemple. De même, les pays
fortement dotés en capital disposeront d'un avantage de coûts comparés dans les productions capitalistiques,
telle que la production de produits plus technologiques.
Cependant certaines études montre que parfois la dotation à l’origine de la spécialisation doit être parfois
plus affinée. Aux États-Unis par exemple, la spécialisation semble contradictoire avec le modèle HOS : elle utilise
en priorité le facteur travail ! En fait les EU utilisent plus de travail, mais c’est du travail qualifié, plus intense en
capital humain et qui intègre des capacités de recherche-développement (un travail « fortement dosé en
capital ») ; la contradiction n’est donc qu’apparente. L’échange international de marchandises se révèle donc
être un échange de facteurs abondants contre des facteurs rares.
9
 Paul Krugman et l’explication des échanges intrabranches (nouvelle école keynésienne – 20e siècle) :
Cependant ces théories classiques et néo-classiques ne permettent pas d’expliquer le développement
des échanges de biens similaires ou entre pays bénéficiant de la même dotation en facteurs de production. Le
commerce mondial ne repose pas seulement sur des différences de productivité, de coûts ou de dotations de
facteurs et donc de produits (commerce interbranches). Il repose aussi sur des échanges de produits similaires
(commerce intrabranches) : comment l’expliquer ?
Les échanges interbranches sont des échanges de différences qui résultent de la complémentarité des
économies entre branches différentes (achat de pétrole/vente de voitures). Une branche rassemble l'ensemble
des établissements ou unités de production, qui produisent le même bien ou service. Ce commerce concerne
surtout des pays de niveaux de développement différents, c'est à dire les échanges entre les pays développés et
les pays en voie de développement (échange de biens manufacturés contre des produits primaires). Ceci
correspond à l’ancienne division internationale du travail (ou division traditionnelle), ce qui correspond au
modèle envisagé par Ricardo et par les néo-classiques.
Ainsi, les pays développés exportent essentiellement des biens manufacturés (80% de leurs exportations),
dont la moitié comprend des biens d'équipement à haute technologie. Les pays en développement sont avant
tout spécialisés dans les produits primaires (plus de 40% de leurs exportations) et même certains sont monoexportateurs (80% des recettes d'exportation de la Côte-d'Ivoire proviennent du Cacao et du Café).
L’analyse de Krugman :
Pour Krugman, les théories traditionnelles et la théorie des dotations de facteurs ne permettent donc
pas d’expliquer les échanges intra branches entre PDEM. Il faut prendre en compte l’existence d’économies
d’échelle et l’imperfection de la concurrence liée à la différenciation des produits.
L’environnement de l’entreprise peut être particulièrement favorable à son développement et à la réalisation
d’économies d’échelle. Les infrastructures de transport, les centres de recherche, la présence de sous-traitants spécialisés…
vont générer des externalités favorables à la réduction des coûts (Silicon Valley).
De même l’organisation interne de l’entreprise peut aussi permettre des économies d’échelle, par la constitution
d’oligopoles nationaux. En augmentant leur production pour diminuer les coûts et augmenter leurs profits, certaines
entreprises vont donc décourager de nouveaux concurrents. Parallèlement, elles vont choisir de différencier leurs produits
(gamme, image de marque, contenu technologique…), ce qui va expliquer des échanges croisés de biens similaires mais qui
seront différenciés sur certains éléments (échanges automobiles entre la France et l’Allemagne). Dans ce cadre l’État (ou
un groupe d’Etat) met en place des politiques commerciales stratégiques afin de réduire la dépendance vis-à-vis de
l’extérieur dans des secteurs jugés stratégiques (aéronautique, espace, électronique…) par des subventions et des
commandes publiques, mais aussi par une protection du marché intérieur. Ces politiques protectionnistes sont risquées car
elles peuvent déclencher des conflits commerciaux et modifier l’allocation des ressources (les moyens mobilisés pour les
secteurs stratégiques ne seront pas disponibles pour les autres).
Le libre-échange n’est donc pas aussi avantageux que le décrivent les théories traditionnelles mais il reste
préférable au protectionnisme ; il n’est pas optimal mais reste le « meilleur second choix ».
Les échanges intrabranches sont des échanges de similarité qui résultent de la proximité des économies.
Un commerce intrabranches est un commerce qui concerne des produits similaires mais qui se distinguent, soit
au niveau de leur technologie, soit au niveau de leur marque, soit au niveau de leur qualité.
Ce commerce met en concurrence des pays au niveau de développement similaires (échanges de biens
manufacturés contre d'autres biens manufacturés).
On voit donc surgir une nouvelle division internationale du travail dans laquelle :
- Les pays du Nord échangent entre eux des produits comparables (des produits chimiques, des
médicaments, des biens d’équipement, des automobiles, des produits de télécommunications,
des produits électroniques...mais aussi des produits agricoles et alimentaires). Il représente plus
de la moitié des échanges.
- Les pays du Nord échangent avec les pays émergents des biens manufacturés différents. Les
pays du Sud exportent des produits intermédiaires (acier), des biens de consommation (textile,
10
cuir, habillement, jouet) mais aussi des produits des NTIC (électronique grand public,
télécommunications).
- Les pays du Nord échangent avec le reste des pays du Sud des produits manufacturés contre des
produits primaires car l’ancienne DIT n’a pas totalement disparu.
3 - Le libre-échange génère des pertes et des gains pour le consommateur et le producteur
Pour les économistes libéraux, la division internationale du travail, l’ouverture au commerce
international et le libre-échange favorisent la croissance et le développement des pays. Ils profitent à la fois aux
producteurs et aux consommateurs et ont des effets cumulatifs puissants.
3.1 - Les avantages cumulatifs du commerce et de la spécialisation pour les producteurs :
Pour les producteurs, le développement du commerce international favorise les gains de productivité et
l’innovation (et donc les profits) pour plusieurs raisons :
- D’une part, la spécialisation permet une économie de travail et une hausse de la productivité
globale puisque la firme abandonne ses secteurs les moins productifs pour affecter sa maind’œuvre dans les secteurs les plus productifs. Les coûts unitaires vont diminuer ainsi que les prix.
La compétitivité-prix de l’entreprise va augmenter ce qui va lui permettre de vendre plus sur les
marchés intérieurs et extérieurs Mais, on suppose que les travailleurs peuvent facilement être
transférés d'un secteur à l'autre ce qui n'est pas toujours le cas.
- D’autre part, en s’ouvrant à l’extérieur, la taille du marché augmente ce qui va permettre à
l’entreprise de produire plus, de dégager des effets d’apprentissage (hausse de la productivité
due à la grande série) et des économies d’échelle (l’entreprise réduit ses coûts unitaires en
produisant davantage) qui vont augmenter sa compétitivité-prix.
- Enfin, l’ouverture internationale permet à de nouvelles entreprises d’entrer sur les marchés
nationaux, ce qui accentue la concurrence et fait pression à la baisse sur les prix. Les entreprises
sont donc obligés d’innover pour améliorer les procédés de fabrication, augmenter leur
productivité et réduire leurs coûts unitaires ou pour offrir de nouveaux produits qui leur
permettra d’améliorer leur compétitivité hors-prix ou structurelle. La concurrence de la Chine
dans des produits standards a obligé les firmes occidentales à se spécialiser dans le haut de
gamme.
3.2 - Les avantages cumulatifs du commerce et de la spécialisation pour les consommateurs :
Pour les consommateurs, le développement des échanges de marchandises, le libre-échange et la
spécialisation ont plusieurs avantages :
- D’une part, l’importation de produits moins chers et le renforcement de la concurrence
poussent les prix à la baisse ce qui augmente le pouvoir d’achat des consommateurs qui vont
augmenter leur demande de services internes. Ainsi, les pays occidentaux ont importé des biens
de consommation produit dans les pays émergents (vêtements, ordinateurs, jouets…) ce qui a
augmenté le pouvoir d'achat de leurs consommateurs qui ont pu consommer des services
produits sur place.
11
- D’autre part, l’échange international accroit le choix des consommateurs et leur permet
d’accéder à des produits qui ne sont pas réalisés localement. En effet sans échanges
internationaux les consommateurs n’auraient pas accès à un certain nombre de produits.
3.3 - Les avantages cumulatifs du commerce et de la spécialisation pour tous les pays :
Les échanges internationaux ont des effets cumulatifs qui profitent à tous :
- D’une part, les gains de productivité et l’extension des marchés interagissent et se renforcent
mutuellement. La réduction des coûts unitaires de production dans les entreprises grâce aux
économies d'échelle permet la baisse des prix de vente des biens et services
- D’autre part, le développement des échanges enrichit les pays concurrents ce qui va se traduire,
à terme, par une hausse de nos exportations à condition que notre appareil productif soit
compétitif. La Chine importe, ainsi, de plus en plus de produits de luxe français ou de biens
d'équipement allemands.
- Enfin, les échanges de biens et de services permettent des transferts de technologie qui
bénéficient aux pays en développement et leur permettent un rattrapage. La Chine, par
exemple, copie les technologies occidentales pour se les approprier puis pour les dépasser
Spécialisation
Gain de productivité
Importations à prix plus faible
Baisse du coût unitaire
Baisse des prix
Hausse de la compétitivité prix
Hausse de la demande
Hausse de la production
Economies d’échelle
Extension des marchés
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3.4 - Les limites de l’ouverture :
L’ouverture au commerce international et la spécialisation n’ont pas que des effets positifs pour les pays et
leurs habitants. Les échanges internationaux vont souvent générer entre-autres une réallocation des revenus en
modifiant la répartition des richesses entre groupes sociaux (travailleurs / détenteurs de capitaux) et en limitant
l’accès à l’emploi (et donc les revenus) des travailleurs exposés à la concurrence internationale.
On peut donc noter un certain nombre de limites à l’ouverture au commerce international :
- Tout d’abord, la concurrence entre les pays ne se fait pas à armes égales. Ainsi, les firmes des
pays développées, qui bénéficient d’une avance technologique et d’une taille de marché, qui
leur donne un avantage comparatif tel que les firmes des pays moins développées ne pourront
jamais être concurrentielles et entrer sur le marché. De même, lorsque des subventions à une
entreprise nationale existent, elles peuvent lui donner un avantage qui la conduit à un quasimonopole mondial (Airbus et Boeing) ou qui pénalise ses concurrents. Enfin, les Etats peuvent
dévaluer leur monnaie ce qui rend les produits nationaux automatiquement moins cher sur le
marché mondial et fausse la concurrence.
- Les différents types de spécialisations n’ont pas les mêmes effets en termes de croissance et de
développement. En effet, la spécialisation dans des secteurs de pointe va produire des effets
d’entrainement et dynamiser l’économie en développant des compétences, des modes
d’organisation qui serviront à d’autres secteurs pour améliorer la productivité globale. Certains
pays du Sud se sont spécialisés dans la production de matières premières agricoles (café, cacao,
sucre….) et sont donc très dépendants des cours (prix) mondiaux qui reposent sur le climat et la
spéculation. Ces derniers peuvent subir une détérioration des termes de l’échange (rapport du
prix des exportations sur le prix des importations). Leur détérioration indique une difficulté à
financer les importations par les exportations, ce qui implique un recours à l’endettement et
handicape le développement.
Termes de l’échange = indice des prix exportations / indice des prix des importations x 100
Indice > 100 = Amélioration des termes de l’échange. Le pouvoir d’achat des exportations en produits importés s’améliore
Indice = 100 = Equilibre des termes de l’échange. Le pouvoir d’achat des exportations en produits importés se maintient
Indice < 100 = Détérioration des termes de l’échange. Le pouvoir d’achat des exportations en produits importés diminue
- Enfin, la concurrence entre pays émergents et pays développés n’est pas favorable à court
terme pour l’emploi dans ces derniers. Il va se traduire par une destruction d’emplois au Nord,
principalement les emplois peu qualifiés. Ce phénomène est aggravé par la délocalisation d’une
partie de la production dans les pays du Sud dont les coûts salariaux sont très inférieurs. Depuis
les années70, Il existe donc une pression à la baisse du salaire réel des moins qualifiés et un
accès de plus en plus difficile pour eux au marché du travail, malgré la croissance.
La désindustrialisation liée à l’ouverture internationale ?
Les pertes d’emploi liées à l’ouverture internationale sont ciblées dans les secteurs en concurrence
avec les importations, alors que les créations se font dans les activités exportatrices. Il existe cependant un délai et
un coût d’ajustement très élevé. Globalement les effets négatifs en nombre d’emplois semblent cependant limités (13% des
destructions d’emplois depuis 1980).
Les destructions proviennent pour l’essentiel de l’externalisation (vers les services), de l’augmentation de la
demande en faveur du tertiaire et d’une hausse de la productivité industrielle. Il faut cependant prendre en compte le fait
que les destructions (et les créations) sont aussi liées aux performances individuelles des entreprises. De plus, la
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substitution d’une production nationale aux importations (lorsqu’elle est possible) pose aussi des difficultés : hausse des
prix des produits anciennement importés, avec une baisse des revenus réels et de la demande adressée aux autres secteurs
et réduction des ressources disponibles pour le développement des autres secteurs (coûts d’opportunité).
Il semble donc difficile de montrer que le développement des échanges internationaux et le libreéchange se soient systématiquement traduits par des « gains mutuels ». On peut même observer :
- Qu’il n’y a pas de liens obligés entre ouverture et convergence des économies : Les pays
émergents qui se sont développés rapidement (NPI, Chine, Inde) ont su conserver un certain
degré de protection pour préserver leurs industries.
- Qu’il n’y a pas diminution des inégalités de niveau de vie : en effet, si l’on exclut la Chine (20 %
de la population mondiale), qui connaît un rattrapage économique rapide, on constate que les
inégalités entre les niveaux de vie ont, au contraire, tendance à s’accroître à partir du début des
années 80.
L’analyse en termes de facteurs spécifiques :
L’existence d’un avantage lié à l’échange international pour l’ensemble des pays ne signifie pas qu’il
n’existe pas de perdants dans les transformations structurelles (notamment concernant la répartition interne des
revenus et du niveau de vie) qui accompagnent l’ouverture, surtout dans une analyse à plusieurs facteurs de production. À
court terme, la réallocation des ressources entre secteurs provoque un coût et à long terme la demande de certains facteurs
de production est modifiée (à la hausse et à la baisse) du fait du changement (ou de la création) de spécialisation.
Dans l’analyse du modèle à facteurs spécifiques (Samuelson), le travail est considéré comme mobile alors que les
autres facteurs sont considérés comme spécifiques (terres et capitaux), car ils ne sont utilisés que pour la production de
certains biens à court terme (mais peuvent devenir mobiles à long terme).
Dans ce cadre, l’échange international va augmenter le revenu réel du facteur spécifique utilisé pour les
exportations, au détriment du facteur spécifique utilisé pour les biens concurrents des importations. Si les gains sont
globalement supérieurs aux pertes alors le pays pourra redistribuer des revenus à l’ensemble de la population
(par exemple par une fiscalité différenciée) ; ce qui limite l’utilité du recours au protectionnisme. Mais évidemment ces
politiques fiscales ne sont pas obligatoirement réalisées, ce qui justifie l’existence d’entraves au commerce pour tenter de
compenser les déséquilibres gagnants/perdants, alors que l’ouverture semble globalement plus positive.
4 - Le protectionnisme, entre risques et opportunités
Le protectionnisme peut apparaitre comme une alternative au Libre-échange qui permettrait d’en atténuer
les effets négatifs. Si dans certains cas une protection limitée et temporaire peut s’avérer utile, dans de nombreux
cas elle entraîne surtout des pertes.
4.1 - Les principes du protectionnisme :
Le protectionnisme consiste à établir des barrières tarifaires ou non-tarifaires à l’entrée des produits
étrangers sur le territoire national. Il s'agit de protéger la production nationale de la concurrence étrangère. On
distingue trois types de protection :
- Le protectionnisme tarifaire consiste à rendre plus cher les produits étrangers de telle façon que
le consommateur préfère un produit national (droit de douane : une taxe imposée aux produits
importés afin d'accroître leur prix).
- Le protectionnisme non tarifaire vise à limiter la quantité de produits importés. Cela peut être
obtenu de différentes façons :
 Le quota d'importation est une restriction directe sur la quantité d'un bien qui peut être
importée, imposée à tous les importateurs.
14
 Les restrictions volontaires aux exportations (RVE) ou accords d'autolimitation est un
quota « accepté » par le pays exportateur.
 Les normes sanitaires ou techniques que tous les produits (locaux comme importés)
doivent respecter peuvent également être édictées. De telles mesures peuvent aussi viser
en priorité la protection des consommateurs mais il s'agit souvent d'un prétexte utilisé pour
écarter les produits importés.
 Les règles administratives : il s’agit des procédures qui doivent être respectées pour
l’importation (certificats ou justificatifs divers, délai d’attente en douane, identification des
fabricants…). Il peut là aussi s’agir d’une protection déguisée (cas des magnétoscopes
japonais en France au début des années 80)
- Le protectionnisme déguisé est une autre forme d’action qui fausse la libre concurrence
(interdit par l’OMC…) de différentes façons :
 Le dumping : le dumping est une vente à perte, c’est-à-dire une vente à un prix inférieur au
coût moyen de production (proposer sur les marchés étrangers des prix plus bas que sur
son marché domestique). De même, l’absence de cotisations sociales ou de droit du travail
dans les pays émergents est considérée comme du « dumping social ».
 Les subventions et les avantages fiscaux accordés aux firmes nationales permettent de
vendre moins cher le produit à l’étranger (la PAC de l’UE, en subventionnant les
exportations agricoles européennes, empêche les pays en développement d’exporter leurs
produits qui deviennent artificiellement plus chers que les produits européens).
 L’accès aux marchés publics : lorsque l’Etat donne systématiquement la priorité aux
produits nationaux lors des commandes publiques, il interdit l’importation de produits
étrangers équivalents moins chers (l’Armée américaine vient d’annuler une commande à
Airbus pour donner la préférence à Boeing alors qu’Airbus était moins cher).
 Enfin, La manipulation du taux de change qui permet à un pays dont la monnaie est
faible, de favoriser ses exportations (Cas de la Chine dont la monnaie est dite sousévaluée).
Protection tarifaire
Droits de douane
Protection non tarifaire
Quotas – accords d’autolimitation – normes techniques et sanitaires règles administratives
Protection déguisée
Dumping – subventions – avantages fiscaux – accès aux marchés publics…
4.2 - Les avantages du protectionnisme :
Les partisans du protectionnisme ont plusieurs arguments valables pour le justifier (même si pour être
efficace la protection doit être limitée dans le temps et ne pas devenir généralisée) :
- Le protectionnisme éducateur de F. List (1789-1846) : Les pays, qui sont moins développés, ont
l’obligation de protéger de la concurrence leurs « industries dans l’enfance » le temps qu’elles
soient suffisamment fortes pour affronter la concurrence internationale. List n’est donc pas
contre le libre-échange mais il doit se faire « à armes égales » ; d’où un protectionnisme
temporaire (pour ne pas supprimer la concurrence) et sélectif (une branche industrielle). L’Etat
doit donc protéger son industrie pour amorcer son développement. Cet argument peut
s’appliquer aux industries vieillissantes, le temps qu’elles se restructurent pour être
compétitives, et pour ne pas totalement disparaître (sidérurgie).
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- Le protectionnisme offensif en faveur du développement de l’économie nationale. La Chine et les
pays émergents en général adoptent des politiques protectionnistes pour aider leurs industries à
gagner des parts de marché. En retour, les Américains et les Européens subventionnent leur
agriculture et leurs industries en déclin…Le protectionnisme « défensif » est justifié par le
protectionnisme « offensif » des Etats.
- Le protectionnisme défensif peut être justifié dans un certain nombre de cas :
 Un déficit extérieur excessif : lorsqu’un pays a un déficit trop élevé, il a tendance à prendre
des mesures protectionnistes pour limiter les importations et rééquilibrer sa balance.
 La protection de l’emploi et du savoir-faire : le commerce Nord/Sud est destructeur
d’emplois. Or, cette disparition des emplois industriels s’accompagne d’une perte de savoirfaire qui freine l’innovation et interdit toute réindustrialisation (L’idée d’une TVA sociale
allait dans le sens d’une protection des emplois industriels).
 Une concurrence déloyale : Ainsi, les entreprises issues d'un pays réglementant
sévèrement les émissions polluantes sont désavantagées par rapport à celles qui sont
installées dans un pays offrant des conditions plus laxistes.
 La souveraineté nationale : l’intérêt de la Nation implique la protection de certains
secteurs d’activité indispensables à l’indépendance nationale (l’agriculture pour nourrir la
population, l’armement pour la défendre, la production culturelle…).
Certaines exception au libre-échange sont acceptées (ou tolérées) par l’OMC (avant par le GATT) sous la
pression des PDEM ou des pays émergents :
- La clause de sauvegarde : un pays, qui aurait un déficit de sa balance courante trop important,
peut augmenter ses droits de douane de façon temporaire (6 mois) pour rééquilibrer sa balance.
- La protection des industries dans l’enfance : les pays en développement ont le droit de protéger
leurs industries par des droits de douane jusqu’à ce qu’elles puissent affronter la concurrence
internationale.
- Les accords régionaux : les pays, qui souhaitent organiser une zone de libre-échange, c’est-à-dire
abolir les droits de douane entre eux, sont autorisés à l’édifier sans accorder les mêmes droits aux
autres pays (le Marché Unique européen, l’Alena, le Mercosur…).
- Le système des préférences généralisées : il permet d’accorder des avantages tarifaires à certains
pays en développement sans que cela bénéficie à d’autres pays (la Convention de Lomé entre l’UE
et les pays africains et caraïbes 1975-2000).
4.3 - Les limites du protectionnisme :
Le protectionnisme n’est pas sans danger pour un pays qui déciderait de telles mesures aujourd’hui. On
peut recenser plusieurs effets pervers :
- Tout d’abord, en préservant les entreprises nationales de la concurrence extérieure, il freine les
efforts de modernisation et d’innovation (pourquoi s’améliorer si on n’a pas de concurrents ?).
Cela nuit aux consommateurs nationaux, car, sans l’aiguillon de la concurrence internationale, la
qualité des produits se détériore et le prix augmente sur le long terme.
- Des mesures protectionnistes unilatérales provoquent, en général, des mesures de rétorsion et
privent les entreprises nationales de leurs débouchés extérieurs, freinant leur activité.
- Le protectionnisme augmente le coût des importations soit parce qu’il augmente les taxes
appliquées aux prix des produits importés soit parce qu’il limite la concurrence entre producteurs
nationaux ; le prix pour les consommateurs augmente et le pouvoir d’achat baisse. C’est le cas
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par exemple des textiles chinois vendus en Europe ou aux Etats-Unis, massivement achetés par les
catégories les plus modestes de la population.
- Les firmes transnationales contournent aisément les frontières nationales. Elles s’implantent
dans les pays protectionnistes en faisant jouer la concurrence entre Etats pour bénéficier
d’avantages fiscaux et sociaux. Elles menacent ainsi les firmes et les productions nationales
directement sur leur territoire
5 - Le rôle des taux de change
Les taux de change peuvent aussi jouer un rôle dans la mondialisation, mais qui est de plus en plus éloigné
de son rôle de « régulateur » des déséquilibres internationaux.
 Les régimes de change :
Le régime des parités fixes, qui obligeait les Etats à défendre le cours officiel de leur monnaie, est
abandonné en 1973. Les "Accords de la Jamaïque" de 1976 légalisent le système des taux de changes flottants.
Le taux de change est désormais fixé librement par le marché des changes en fonction de l’offre et de la
demande de monnaie, sans intervention de la Banque centrale. Les taux de change vont donc fluctuer de façon
importante à partir des années 1970. Ce recours au marché pour fixer les valeurs des monnaies devait permettre,
selon les libéraux, une autorégulation et donc un équilibre. Dans les faits, le système des taux de change
flottants n'assure pas une stabilité monétaire internationale.
Les monnaies varient librement en fonction de l'offre et de la demande. Si une monnaie est surtout
offerte, son taux de change aura tendance à baisser, c'est la dépréciation. Une monnaie surtout demandée
entraînera son appréciation (augmentation du taux de change : la monnaie devient chère). Les taux de change
variant librement, cependant les autorités monétaires peuvent encore intervenir pour limiter l'amplitude des
fluctuations, en achetant (pour augmenter le taux de change) ou en vendant (pour diminuer le taux de change) de
la monnaie.
Source : Manuel Bordas Te ES
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 Les déterminants de l’offre et de la demande de devises :
Les variations à la hausse ou la baisse des monnaies dépendent de l’offre et de la demande de monnaie,
qui varie en fonction :
- Du solde des transactions courantes : un déficit fait baisser la monnaie car l’offre de monnaie
sera supérieure à la demande (et inversement) à cause de la nécessité d’emprunter
- Du différentiel d’inflation entre les pays : l’inflation diminue le pouvoir d’achat de la monnaie et
va donc faire baisser la demande (perte de confiance des investisseurs) et donc sa valeur (et
inversement)
- Des taux d’intérêts : les taux d’intérêt élevés attirent les capitaux (l’épargne mondiale) et font
augmenter la valeur de la monnaie (et inversement).
- De la santé économique du pays : un pays en forte croissance attire les capitaux et favorise la
confiance des investisseurs (et inversement)
- Des anticipations : les opérateurs spéculent sur les marchés financiers (par des achats et des
ventes de titres massives pour réaliser des profits élevés) ce qui fait varier le cours des monnaies à
la hausse ou la baisse.
 Le lien taux de change – échanges extérieurs :
Les taux de change flottants étaient la réponse libérale aux désordres monétaires : D'autre part, la libre
variation des taux de change devait permettre un équilibrage automatique des balances. En effet, un déficit de
la balance des paiements se traduit par une baisse du taux de change qui permet de baisser le prix relatif des
produits, d'où une augmentation des exportations et une diminution des importations et donc un rééquilibrage
de la balance commerciale (et éventuellement de celle des paiements). Le mécanisme inverse joue en cas
d'excédent.
Mais taux de change n'ont pas permis d'équilibrer les échanges internationaux : Dans la balance des
paiements, la balance des mouvements de capitaux joue un rôle non négligeable ; un déficit commercial peut
être compensé par une forte entrée de capitaux, et donc ne pas se traduire par une dépréciation de la
monnaie. Ce fut le cas du dollar entre 1980 et 1985 ; sa valeur augmentait fortement alors que la balance
commerciale américaine était lourdement déficitaire, parce que les taux d'intérêt américains exerçaient un effet
attractif sur les capitaux flottants.
Certaines importations sont incompressibles ; la baisse du taux de change ne permet pas de les diminuer
et va avoir au contraire, un effet de renchérissement de leur coût (pétrole). Il faut donc prendre en compte
l’élasticité des importations (et des exportations) par rapport au taux de change (et par rapport à la demande),
pour évaluer les effets réelles des variations de change.
La compétitivité des pays n'est pas seulement due à des variables conjoncturelles, comme le taux de
change, mais aussi à des phénomènes structurels (compétitivité hors-prix), comme par exemple, une bonne
spécialisation de l'appareil de production. C'est pourquoi dans le passé, l'appréciation du Mark n'a pas empêché
l'Allemagne de cumuler des excédents.
La globalisation financière est censée assurer l'allocation optimale des capitaux : Les besoins et les
capacités de financement sont mis en contact à l'échelle planétaire grâce au passage d'une économie
d'endettement à une économie de marchés financiers. Elle représente donc à la fois une nécessité (financement
des acteurs économiques), mais aussi un risque non négligeable (Crises financières).
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La mondialisation s’est donc effectuée essentiellement avec le développement du libre-échange et
de la spécialisation des économies, produisant à la fois des effets positifs et négatifs, tout comme le
protectionnisme qui est actuellement limité.
Mais les échanges entre nations impliquent aussi les entreprises et en particulier les FMN qui ont renforcé
l’internationalisation de la production.
2ème partie : Comment expliquer l’internationalisation de la production ?
La mondialisation ne se résume pas au seul accroissement du volume des échanges. Elle se
caractérise également par une internationalisation du processus de production. Ce processus est initié par des
firmes multinationales (FMN) ou transnationales (FTN). Elles sont les principaux vecteurs de cette nouvelle
organisation mondiale de la production par le biais d’implantation de filiales à l’étranger.
On parle de firmes multinationales ou transnationales dès lors qu’une société résidente dans un pays
détient plus de 10% du capital dans une autre société résidente dans un autre pays. La première est appelée
société-mère, la seconde est considérée comme une filiale (si elle est détenue à plus de 50%). Une firme
transnationale possède donc au moins une unité de production à l’étranger et produit grâce à elle hors de son
territoire d’origine.
Quelles stratégies ces FMN développent-elles dans la mondialisation et avec quels impacts sur les nations
d’origine et d’accueil ?
1 – La production se mondialise
Le poids des FTN dans l’économie mondiale est, de nos jours, très important. Elles réalisent 10% du PIB
mondial contre 7% dans les années 1960. Elles sont à l’origine de plus d'un tiers du commerce international
dont 1/3 est un commerce entre les filiales des groupes (commerce intra-firme). Le stock de capital possédé par
les FTN représente 27% du PIB mondial en 2008.
1.1 – Le processus de multinationalisation des firmes :
 Une multinationalisation multiforme :
La multinationalisation s’effectue de plusieurs manières :
- Les exportations constituent le mode d’entrée le plus traditionnel.
- L’investissement direct à l’étranger (IDE) : prise de contrôle de sociétés implantées à l'étranger.
Cela peut prendre trois formes :
 La création d’une filiale à l’étranger
 Une fusion-acquisition par l’achat d’au moins 10% du capital d’une société étrangère.
 La création d’une filiale commune (joint-venture) avec une entreprise locale, ce qui permet
de profiter des ressources du partenaire (capitaux, connaissance du marché…) et de limiter
les risques (Chine).
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- L’externalisation : l’entreprise peut confier une partie ou la totalité de la production à un soustraitant étranger dont les coûts de production sont moins élevés.
- Les franchises consistent à vendre le droit d’utilisation d’un savoir-faire sous la forme d’un contrat
de franchise (ou parfois d’une licence). La firme Mac Donald s’est ainsi implantée dans le monde
sans à avoir à posséder l’ensemble de ses restaurants.
Les FMN ont donc des stratégies et des objectifs diversifiés en fonction des pays et des avantages qu’elles
souhaitent en retirer. Ces objectifs peuvent cependant parfois se cumuler.
Les motivations de localisation des FMN
Stratégie de
rationalisation
Stratégie
d’approvisionnement
Stratégie de
pénétration des
marchés
Stratégie financière
Objectifs recherchés :
Baisse des coûts
Contrôler l’accès aux
matières premières
Produire dans le pays
pour se rapprocher du
marché
Contrôler les firmes en
créant un lien
contractuel de
dépendance
Types d’organisation :
Filiale atelier
Sous-traitance
Filiale primaire
Filiale relais
Franchise
PED + Pays émergents
PED + Pays émergents
PDEM + Pays
émergents
PDEM + Pays
émergents
Stratégie des firmes :
Localisation :
Les FMN s’implantent à l’étranger en développant les investissements directs à l’étranger (IDE). En
revanche, un investissement étranger qui est inférieur à 10% du capital sera considéré comme un investissement
de portefeuille (un placement). Depuis les années 1980, les flux d’IDE s’accélèrent de façon spectaculaire : les
flux des sortants IDE dans le monde ont été multipliés par 70. Aujourd’hui le stock mondial d’IDE représente plus
du quart du PIB mondial, alors qu’au début des années 1980, cette part était de 5% à peine.
Quels sont les principaux constats sur les IDE ?
- Les IDE sont majoritairement issus des pays du Nord et destinés aux pays du Nord, même si les
IDE dans les pays émergents (Chine, Inde) progressent. La mondialisation demeure d’abord
l’affaire des pays riches : à l’origine de 81% des investissements et destinataires de 51%.
- L’Europe est à la fois grand investisseur (plus de 50% du total) et grand récepteur
d’investissements, une évolution qui reflète l’intégration croissante de son économie.
- En revanche, de nombreux PED (et tous les PMA) surtout en Afrique restent à l’écart de ce
phénomène.
- Enfin, depuis les années 1990, les IDE ont essentiellement pris la forme de fusions-acquisitions
(croissance externe).
 Une multinationalisation qui favorise la DIPP :
Les FMN organisent la production à l'échelle mondiale et sont donc à l’origine de la décomposition
internationale des processus productifs (DIPP) : elles vont à la fois externaliser et délocaliser leur production en
la décomposant en segments (Recherche, design, composants, assemblage, logistique, vente, service aprèsvente…) qu’elles localisent dans différents pays en fonction des avantages qu’elles peuvent en retirer. Ainsi, la
conception est souvent réalisée dans les PDEM, alors que la fabrication des composants et l’assemblage sont
localisés dans les pays émergents ou les PED. D’où la création d’un commerce intra-firme (à l’intérieur de la firme
entre les différentes unités de production). Ce commerce intra-firme représenterait un tiers du commerce
mondial.
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A partir de cette base de production mondialisée, les FMN organisent leur stratégie de différenciation
des produits. Même si un certain nombre de FMN propose un produit identique à l'ensemble des consommateurs
de la planète (IPhone, Coca Cola...), elles doivent aussi tenir compte de la diversité des goûts des
consommateurs (glocalisation) et de leur inégal pouvoir d'achat.
La mondialisation est un processus induit par la stratégie de conquêtes de nouveaux marchés des
grandes entreprises. Les firmes déterminent leur stratégie à partir du marché mondial et non des marchés
nationaux. Autrement dit, elles produisent et distribuent des produits globaux conçus pour le marché mondial,
suivant une stratégie de compétitivité-prix et/ou de compétitivité hors-prix.
2 - Les FMN ont une stratégie de compétitivité prix
Le prix est souvent considéré comme le facteur central (mais pas le seul) dans la compétitivité des
entreprises, surtout face à ses concurrents étrangers en provenance des pays émergents.
 Le rôle central du coût de production :
La compétitivité-prix dépend d’abord de la compétitivité-coût. Le coût de production unitaire comprend
le coût des consommations intermédiaires (les matières premières et l’énergie -donc le transport internationalpar exemple), le coût salarial (salaire, cotisations sociales, coût de l’embauche et des licenciements) et le coût du
capital fixe (amortissement) rapportés à la productivité de chaque facteur.
Le coût horaire du travail qui recouvre les salaires nets, les cotisations salariales et les cotisations
employeurs, et La productivité horaire du travail qui correspond à la quantité de produits fabriquée en une heure
de travail ou à la valeur ajoutée réalisée en une heure de travail, vont donc déterminer l’essentiel de la
compétitivité-coût (et de la compétitivité-prix). Les produits allemands ont profité d’une évolution favorable de
la compétitivité coût depuis les années 1990, grâce à une modération des hausses salariales.
 Les autres facteurs de la compétitivité-prix :
La compétitivité-prix dépend ensuite de la politique de prix des entreprises. Les firmes peuvent « faire de
la marge » (marge importante sur peu de produits vendus) ou « faire du volume » (marge faible pour accroître
les quantités vendues). Lorsque le marché est concurrentiel, on fait du volume. Lorsqu'on est en situation de
monopole, on fait de la marge.
Enfin, compétitivité-prix dépend de l’évolution du taux de change. Le prix du bien exporté va être facturé
dans la monnaie du pays d’accueil. Ainsi, une dévaluation (décidée par l'Etat) ou une dépréciation (décidée par le
marché des changes) d'une monnaie nationale par rapport aux monnaies étrangères, c'est-à-dire une baisse du
taux de change se traduit par une baisse des prix à l'exportation pour ce pays : dévaluation (ou dépréciation)
compétitive (2001-2008 : la sous-évaluation du dollar, du yen et du yuan).
Une firme va donc chercher en priorité à :
- Contrôler ses approvisionnements en produits primaires à moindre prix.
- Diminuer ses coûts de production afin d’avoir une forte compétitivité-prix en bénéficiant des
faibles coûts salariaux, tout en limitant ses coûts de transport (hausse du prix du pétrole).
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3 - Les FMN ont une stratégie de compétitivité hors-prix
Une firme détient une compétitivité structurelle ou hors-prix lorsque, à prix équivalent, ses produits sont
mieux adaptés à la demande mondiale. Afin de s’adapter en permanence à l’évolution de la demande, à
l’émergence de nouvelles concurrences et de nouvelles exigences du consommateur, chaque entreprise doit faire
preuve de toujours plus de réactivité pour préserver ses positions sur ses marchés, les développer et en conquérir
de nouveaux (comme le montre l’exemple de l’Allemagne).
 Les facteurs de la compétitivité structurelle :
La compétitivité structurelle ou hors-prix dépend donc d’un certain nombre de facteurs :
- La politique de recherche et d’innovation va permettre une double différenciation des produits :
Une différenciation verticale des produits qui consiste à décliner une gamme de produits pour
satisfaire les besoins de différenciation des clients qui n’ont pas les mêmes revenus (de la Twingo
à l’Espace pour Renault) et une différenciation horizontale des produits qui consiste à
augmenter la variété des produits pour satisfaire la diversité des goûts des consommateurs
(ordinateur de bureau, ordinateur portable, ultraportables,…). Le design entre dans cette logique
de différenciation.
- La politique de la qualité totale va permettre d’avoir un avantage si le produit dure plus
longtemps (avec moins de pannes) et si le service après-vente est efficace (les voitures BMW par
exemple). Ceci passe par : la politique commerciale (publicité, marque…), la formation de la
main-d’œuvre (capital humain, compétences en langues étrangères…) et l’utilisation des TIC :
une meilleure utilisation des TIC dans la gestion des entreprises et leurs relations commerciales
est un facteur de gains plus importants de productivité (facture électronique, plateformes
communes, dématérialisation des commandes ...).
- Enfin, l’appareil productif doit être réactif vis-à-vis des variations de la demande. Ceci implique :
une amélioration de l’organisation de la production et de la gestion (management) de
l’entreprise (principes du Toyotisme, flexibilité) et une bonne implantation à l’étranger pour de
mieux connaître les goûts des consommateurs locaux.
Ainsi les dotations de facteurs ne sont pas « naturelles » mais construites, et reposent sur les stratégies
des firmes et sur celles des Etats, dans un contexte de concurrence imparfaite.
Une firme va donc chercher en priorité à :
- Mieux répondre aux besoins des consommateurs et à leur évolution, en terme de différentiation
et de personnalisation, car elle plus proche d’eux, ce qui lui permet d’être plus réactive (la Logan
est une voiture conçue par Renault pour les pays émergents à partir de composants de la Clio) ;
- Améliorer son image de marque et la qualité des produits, en se donnant une image d’entreprise
efficace et performante ou « mode ».
- Profiter d’une main d’œuvre qualifiée et favoriser la recherche-développement
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4 - L’internationalisation de la production a des effets positifs et négatifs sur les pays d’accueil et
d’origine.
Les FMN ont des effets contrastés (positifs et négatifs) aussi bien sur les pays d’accueil que
d’origine des firmes. En faisant fabriquer ses produits moins chers à l’étranger, la FTN va augmenter le pouvoir
d’achat des populations du pays de la maison-mère et le pouvoir d’achat du pays d’implantation (de manière
plus limitée). Cela se traduira par une augmentation de la demande qui favorisera le développement du
commerce mondial et la croissance.
 Dans le domaine de l’emploi :
La multiplication des implantations de filiales dans les pays disposant de main d’œuvre peu chère et/ ou de
législations du travail plus souples ont fait craindre des destructions d’emplois dans les pays développés ou pour
le moins un manque à gagner en termes de nouveaux emplois. Cependant, il ne faut pas confondre IDE et
délocalisation car tous les IDE ne sont pas des délocalisations. Au sens strict, la délocalisation c’est la fermeture
d’une usine dont les équipements vont être implantés à l’étranger (environ 4 à 5 % des Investissements Directs à
l’Etranger).
Les délocalisations détruisent des emplois à court terme et en créent à long terme dans les pays
développés. Le transfert d’activité vers l’étranger se traduit par des suppressions d’emplois industriels, peu
qualifiés et aisément substituables. Les études ont montré que les délocalisations étaient responsables
seulement de la destruction de 0,5 % des emplois industriels par an. Mais, plus récemment, ce sont des emplois
plus qualifiés dans les services qui ont été touchés (laboratoires d’analyses médicales, services informatiques,
recherche-développement, centre d’appels ou de traitement des données...).
Cependant, les délocalisations créent des emplois à long terme dans les pays développés. La
délocalisation des activités traditionnelles oblige l’entreprise à innover et à se spécialiser dans les secteurs à
plus forte valeur ajoutée ce qui créera des emplois qualifiés et renforcera la compétitivité hors prix de
l’entreprise. Les emplois qualifiés créés se substitueront aux emplois peu qualifiés perdus (mais les créations
seront-elles supérieures aux suppressions ?). De plus, la délocalisation permet d’importer des produits moins
chers ce qui va augmenter le pouvoir d’achat des consommateurs qui vont déplacer leur demande sur des
services produits localement.
Si les délocalisations ont un faible impact sur le volume de l'emploi dans les pays développés, elles ont,
en revanche, des effets sur la structure des emplois et sur les conditions d'emploi de la main-d’œuvre.
- D'une part, ce sont les emplois les moins qualifiés qui sont le plus touchés car ils sont mis en
concurrence avec les salariés peu qualifiés et moins coûteux des pays émergents.
- D'autre part, la recherche de la compétitivité à tout prix débouche sur une augmentation de
l'intensité du travail et du stress. Sur tous ces plans, la mondialisation accroît la pression sur les
travailleurs les plus fragiles et contribue à l’augmentation des inégalités.
Pour les pays d’accueil des FMN, l’implantation procure des avantages en termes de créations d’emplois
mais ces emplois sont souvent des emplois peu qualifiés, flexibles, mal payés et aux conditions de travail
dégradées par rapport aux normes de travail occidentales.
Enfin, le phénomène des délocalisations ne doit pas être exagéré pour plusieurs raisons :
- Les activités stratégiques sont peu délocalisées (recherche, design, direction de l’entreprise,
marketing…) afin d’éviter le copiage et les contrefaçons.
- Un grand nombre d’emplois industriels (bâtiment, agro-alimentaire…) et de services ne sont pas
transférables à l’étranger (services de santé, service d’éducation, services immobiliers…).
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- Il existe aussi des mouvements de relocalisation car la délocalisation n’apporte pas toujours les
effets bénéfiques attendus (coûts de transport élevés avec les prix du pétrole, sous-traitants peu
fiables en qualité)
 En matière d’autonomie économique des Etats-Nations :
Compte tenu de leur puissance, les FMN ont une capacité à influencer les décisions prises par les EtatsNations en matière de politique extérieure et commerciale, de normes sociales (droit du travail) et de normes
environnementales. Ce sont des lobbies puissants qui financent des campagnes politiques, en espérant en retour
des mesures qui leur soient favorables. Elles peuvent ainsi faire du chantage à l’emploi (menace de délocaliser)
pour obtenir une baisse de la fiscalité.
Les pays se trouvent pris entre deux feux : attirer les FMN et/ou soutenir leurs secteurs d’activité
traditionnels.
En matière financière, la perte d’autonomie est encore plus nette. Les capitaux se déplacent rapidement
et facilement d’une place financière à l’autre en fonction des opportunités (intérêts plus élevés, hausse plus
rapide des cours en bourse, faible fiscalité…).
Des bulles spéculatives se forment donc, ce qui facilite les krachs financiers ou boursiers, qui se multiplient
depuis 20 ans, avec des conséquences négatives sur l’économie réelle.
Les Etats es ont perdu le contrôle de ces flux et leur capacité à les réguler est réduite :
- Les mouvements de capitaux deviennent autonomes : les acteurs financiers internationaux s’ils
jugent les politiques menées dangereuses vont transférer leurs capitaux vers un pays jugé
financièrement plus conformes, privant le pays de ressources pour se financer (Grèce). Cela
pénalise la croissance économique et accentue le chômage.
- Les États sont désarmés : les mouvements spéculatifs sur le marché des changes échappent aux
autorités monétaires. Pour être efficace, leur intervention demanderait des réserves de changes
importantes dont elles ne disposent pas obligatoirement ou qui leur coûteraient trop cher.
Certains pays sont donc obligés d’avoir des taux d’intérêt élevés pour attirer les capitaux ce qui
freine les investissements et la consommation (coût du crédit élevé).
Les années 80 ont permis un développement spectaculaire de la finance, à tel point que l'on a parlé d'une
déconnexion entre la sphère de l'économie réelle et la sphère monétaire et financière. Pour lutter contre cette
financiarisation à outrance, certains économistes préconisent une taxation des transactions spéculatives (Taxe
TOBIN), afin de financer le développement des PED et de limiter la spéculation source de crises.
La mondialisation a des conséquences contrastées, mais il semble que les effets positifs restent
supérieurs aux effets négatifs. La spécialisation et le libre-échange sont les fondements de ce mouvement
d’ouverture, qui provient pour l’essentiel de l’action des FMN et de leurs différentes stratégies, qui ont aussi des
effets contrastés sur le fonctionnement de l’économie. Cette situation est accentuée par la perte partielle
d’autonomie des Etats et une financiarisation des échanges internationaux.
La mondialisation paraît irréversible mais, pour limiter l'instabilité qu'elle induit, il semble nécessaire de
mettre en place des instances de régulation ou de coordination supranationales. Ce qui a défaut d’être
réalisable au niveau mondial (ou du moins difficilement), peut l’être au niveau continental comme semble le
montrer partiellement l’exemple de l’intégration européenne (thème 2).

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