Document d’accompagnement pédagogique - Commémoration Aimé Césaire - 2013/2014
Ministère de l’éducation nationale (DGESCO) Page 1 sur 4
Mission Maîtrise de la langue française / Mission Outre-mer Andorre
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Entretien avec Aimé Césaire sur le théâtre
Le Monde n° 7071, samedi 7 octobre 1967, page 13.
Pour l’ouverture de sa saison 1967-1968, le Théâtre de l’Est parisien accueille, en l’absence
de la Guilde, en tournée aux États-Unis, la compagnie Serreau-Périnetti, qui crée la dernière
œuvre du poète antillais Aimé Césaire, Une saison au Congo. Consacrée au destin
tragique de Patrice Lumumba, cette pièce, qui était parue l’an dernier aux éditions du Seuil,
a été considérablement remaniée par l’auteur.
On retrouvera dans cette nouvelle mise en scène de Jean-Marie Serreau quelques uns des
comédiens de La tragédie du roi Christophe, donnée par un nombre limité de
représentations à l’Odéon en 1965. Douta Seck sera le peuple, représenté par un joueur de
sanza ; Yvan Labejof, Mobutu ; Lydia Ewandé, Pauline Lumumba ; Jean-Marie Serreau, Dag
Hammarskjoeld ; Bachir Touré, Lumumba. Trente représentations d’Une saison au Congo
sont prévues, jusqu’au 12 novembre. Ensuite, la compagnie doit faire une tournée dans les
maisons de culture, avec la pièce de Césaire et celle de Yacine Kateb, créée l’an dernier au
Petit-TNP, Les ancêtres redoublent de férocité. Au printemps, elle se rendra quinze jours au
Piccolo Teatro de Milan, avec Christophe, Un été au Congo, de Césaire, et La femme
sauvage et «Les ancêtres, de Kateb. Puis une tournée est prévue dans les pays de l’Est.
D’autre part, la Comédie-Française a confié à Serreau la mise en scène de la trilogie de
Claudel l’an prochain. Actuellement, il souhaite surtout la constitution d’une compagnie de
caractère international métis, autour d’un répertoire qui, outre Kateb et autour d’un répertoire
qui, outre Kateb et Césaire comprendrait la Haïtien Depestre (avec sa pièce Arc-en-ciel pour
un Occident chrétien), le Guatémaltèque Asturias, le Colombien Buenaventura, la Noire
américaine Adrienne Kennedy (Rais mass, Funnyhouse of the negro). Continuant à faire
office de « tête chercheuse » du théâtre contemporain, il prospecte avec méthode un
nouveau répertoire qui tend à prouver que la liberté d’expression n’est pas un privilège du
monde occidental.
« Kateb et Césaire m’importent autant que Brecht, Beckett ou Ionesco, dit-il, parce qu’ils sont
des poètes en rapport direct avec notre société. Ils sont des habitants de notre langue, mais
non des habitants de l’Hexagone. À un moment où les frontières des grands affrontements
ne sont plus uniquement des frontières territoriales, je me sens, moi, plus l’habitant d’une
langue que l’habitant d’un terroir. »