Partie 2 : Pratiques de planification locale
Le débat a montré que le premier cas de figure évoque ce qui se fait depuis longtemps avec les
problèmes que chacun connaît tandis que la seconde option s'inscrit plutôt dans la philosophie
de la décentralisation qui fait le PARI SUR LA CREATIVITE et la responsabilité des acteurs locaux.
La principale source d'inspiration pour agir dans l'environnement de sa commune ne doit-elle pas
être l'analyse de sa propre situation, le bilan de ses propres capacités, l'évolution de ses propres
ambitions ? Ce que l'État central propose dans ses politiques nationales ne vient-il pas alors en
complément ?
Ces questions nous paraissent pertinentes dans la mesure où, au niveau local en tout cas, les
agents des services de l'État, et particulièrement ceux qui sont en lien étroit avec la gestion de
l'environnement, devront probablement redéfinir leur rôle et donc, finalement, se redéfinir eux-
mêmes.
La planification environnementale, une composante en interaction avec
d'autres composantes au sein d'une planification globale
Il est vain, selon nous, de parler d'environnement physique ou biologique isolément des autres
dimensions de la vie des terroirs. Rappelons notre hypothèse de base : les dysfonctionnements
environnementaux (érosion, déforestation, sécheresse) sont les symptômes de
dysfonctionnements sociétaux, c'est-à-dire de dérèglements dans le fonctionnement des
économies, des institutions et des organisations qui fondent les sociétés locales. En termes
simples, nous posons que c'est parce que ça ne va pas entre les hommes que ça ne va pas non
plus entre les hommes, les sols, les plantes et les animaux.
En conséquence, si on veut agir efficacement sur l'environnement, nous pensons qu'il faut
interpeller l'ensemble des composantes des sociétés locales, pour traiter non seulement les
symptômes mais, surtout, les causes et les mécanismes qui les produisent. Il en résulte que la
planification locale environnementale n'est pas environnementale au sens physique ou
biologique du terme, mais sociétale. L'environnement physique ou biologique ne sont cependant
pas négligés, simplement ils sont saisis comme des composantes de cette société, au même
titre que l'environnement économique, social, culturel ou politique.
La planification est donc nécessairement globale et, selon nous, c'est lorsqu'on tente d'isoler telle
composante de telle autre qu'on la rend fragile ou improductive dans le long terme.
Il faut toutefois clairement lever une ambiguïté : travailler dans une logique globale ne signifie
pas faire tout et n'importe quoi : si la planification locale devient un fourre tout sous prétexte
qu'elle doit être globale, on n'aura fait aucun progrès, on sera simplement revenu 20 ans en
arrière à l'époque où le développement dit intégré faisait ses choux gras. Il faut se méfier autant
des planifications "polyglottes" à vocation universelle que des planifications sectorielles. La
question clé n'est pas "Est-ce qu'il y a une composante sociale, économique ou politique à côté
de la dimension environnementale ?", mais plutôt "Est-ce qu'on a suffisamment raisonné la
planification environnementale en termes politiques, économiques ou sociaux ?", ce qui n'est pas
du tout la même chose. L'impasse surgit lorsqu'on ne raisonne l'action de changement
environnemental qu'à travers la seule dimension environnementale, que lorsqu'on aborde les
problèmes de l'érosion en ne regardant que le sol et en ignorant ce qui se passe entre les
hommes autour du sol érodé.
Une des voies prometteuses pour développer la planification environnementale et surtout
l'impact des actions qu'elle organise, consiste donc à la désenclaver par rapport aux autres
dimensions clés que sont l'économie ou le fonctionnement social ou politique. Plus la
planification environnementale est également une planification de mesures ou stratégies socio-
politiques, plus ses impacts environnementaux semblent durables et pertinents.
POINTS DE REPERE POUR PROGRESSER
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Philippe De Leener, "Planification locale, développement local, gestion de l'environnement et
décentralisation : Partie 2", 02/1999, PNAE/CID (Bamako), Club du Sahel (Paris)