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Thème 3 : Dynamique des grandes aires continentales : L’Asie du Sud et de l’Est : les
enjeux de la croissance
Etude de cas Mumbai : moderni, inégalités
Introduction :
L’étude de cas porte sur la ville de Mumbai. Elle est d’un côté extrêmement moderne,
c’est le principal centre économique et culturel de l’Inde, un pays émergent. Et d’un
autre côté, elle est extrêmement inégalitaire au point où on dit que « deux villes
distinctes y existent en une ». Elle illustre donc bien le fait qu’actuellement, la
modernisation et la croissance économique d’un territoire s’accompagnent souvent d’un
accroissement des inégalités en son sein.
Problématique : En quoi les dynamiques territoriales de Mumbai reflètent-elles
à la fois la modernité de la ville et les profondes inégalités qui l’affectent ?
Plan du cours :
1. Une métropole moderne en pleine mutation
2. Les inégalités à Mumbai
I. Une métropole moderne en pleine mutation
a. Contexte historique
Mumbai est colonisée dès le XVIe siècle par les Portugais puis elle est cédée
aux Anglais en 1661 jusqu’à l’Indépendance de l’Inde en 1947. La convoitise
des grandes puissances s’explique par la situation géographique favorable de la
ville. Tournée vers l’Afrique et l’Europe, elle est considérée comme la « Porte
de l’Inde ». Nommée Bombay par les anglais, est renommée Mumbai en 1996.
A l’origine, Mumbai est un ensemble de 7 îlots. Les travaux de drainage et
d’assainissement menés pendant plus de deux siècles aboutissent à la formation
de deux îles reliées entre elles : Bombay au sud et l’île de Salsette au nord. Entre
elles et le continent, se trouve un vaste plan d’eau mieux protégé des moussons
et des tempêtes : Thane Creek ou la Baie de Mumbai. C’est là que se trouve le
port.
La puissance économique de Mumbai provient de son industrialisation précoce
et du commerce:
o Dès 1853, les Britanniques construisent le premier chemin de fer
d’Asie au départ de la ville, ainsi que la première filature de coton de
l’Inde. Par la suite, les filatures et ateliers de tissages se développent, et
les premières banques s’installes.
o En 1869, avec l’ouverture du canal de Suez, l’arrivée des bateaux à
vapeur est facilitée et le commerce avec l’Europe augmente.
o Dans les années 1920, la ville devient la capitale économique du pays.
b. Puissance et insertion à la mondialisation
La puissance de Mumbai repose surtout sur l’économie et le soft power, et moins sur le
hard power qui est surtout concentré à Dehli, la capitale de l’Inde.
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Puissance économique :
Mumbai produit 4 à 5% du PIB de l’Inde. Elle est considérée comme la capitale
économique du pays.
La puissance économique de Mumbai repose historiquement sur le secteur
secondaire.
o Son activité industrielle représente 25% de celle du pays. 40% des
travailleurs déclarés de la ville sont employés dans ce secteur qui
regroupe énormément de secteurs d’activité : chimie, textile,
agroalimentaire (pêcheries), métallurgie, mines… Dans les bidonvilles
où les travailleurs ne sont pas déclarés, l’activité industrielle et artisanale
est aussi très intense.
o Le bidonville de Dharavi est considéré une zone industrielle à part
entière avec un chiffre d’affaire annuel estimé à 400 millions d’euros. Il
abrite 5000 petites entreprises privées (textile, poterie, recyclage et
ferraille, cuir, broderie…), une centaine de restaurants et des milliers de
boutiques.
La puissance économique repose également sur le commerce. 40% du
commerce maritime indien transite par Mumbai, qui perçoit 60% des taxes
douanières du pays !
Actuellement, le secteur tertiaire est devenu plus important que le secteur
secondaire. Il emploie 55% des actifs.
o Les sièges sociaux des plus grandes entreprises indiennes et de
nombreuses FTN étrangères sont installés à Mumbai.
o 70% des transactions financières de l’économie indienne y sont
réalisées. Mumbai abrite la Banque de réserve indienne, la Bourse de
Mumbai, la Bourse nationale d’Inde… C’est le premier centre de
décision du pays en matière économique, mais la ville est aussi très bien
insérée dans les flux financiers de la mondialisation.
La ville abrite l’élite économique du pays, dont les principales familles
industrielles :
o La famille Tata est à la tête de nombreux secteurs industriels : chimie,
informatique, mines, automobiles (elle vient de racheter Jaguar et Land
Rover). Elle possède 2,5% du PIB indien !!
o La famille Ambini, à la tête de Reliance Industries (énergie, chimie,
textile, distribution, téléphonie, Internet, cinéma) a construit la maison la
plus chère du monde, la « Antilia House » : famille de 6 personnes, tour
de 27 étages, 9 ascenseurs, un parking de 168 places, 600 domestiques…
Mais la classe moyenne indienne, évaluée entre 10 et 15% de la population, et
qui s’affirme depuis les années 1990, est aussi particulièrement concentrée à
Mumbai. Elle se caractérise par des revenus supérieurs à la moyenne et par une
culture propre (méritocratie, éducation anglophone, liens avec les Etats-Unis).
Soft power
La ville a un rôle culturel croissant. C’est un pôle universitaire et
scientifique avec une renommée internationale. Par exemple, l’Université de
Mumbai a des instituts de recherche sur les NTIC, des écoles de commerce,
d’architecture… Autre exemple, l’Institut Tata est renommée pour la recherche
atomique.
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Mais surtout, Mumbai est la capitale indienne du divertissement, à l’instar de
Hollywood aux Etats-Unis. La ville abrite la plupart des studios de films et
télévision indiens dans le quartier de Film City près de l’aéroport. Le terme
Bollywood est ainsi une adaptation d’Hollywood avec le B de Bombay.
L’industrie du film de Mumbai s’exporte énormément, surtout vers les pays
arabo-musulmans, en Asie du sud-est et en Afrique.
Insertion à la mondialisation :
Mumbai est bien insérée dans les réseaux de transport. Elle abrite le principal
port commercial de l’Inde, ainsi que l’aéroport international le plus important.
Elle est connectée à ses périphéries par un réseau de trains de banlieue, et pays
grâce au chemin de fer.
Mumbai est la ville mondiale la plus importante à l’échelle de l’Asie du Sud. Sa
puissance est toutefois limitée par son économie dépendante : beaucoup de son
activité est liée à la sous-traitance et à l’accueil des FTN étrangères délocalisées.
Mumbai est donc le principal point d’ancrage de l’Inde à la mondialisation et le
passage d’une économie secondaire à une économie tertiaire facilite cette
insertion.
c. Les dynamiques territoriales
Les principales dynamiques territoriales de la ville sont dues à la croissance
démographique spectaculaire de sa population : 1 million d’habitants en 1906,
6 millions en 1971, 12 millions en 1991, 21 millions en 2013 et cette croissance
se poursuit !
Comme la ville est sur une île, c’est pourquoi elle a aussi des records mondiaux
de densité : 50'000 habitants par km2, (en comparaison, Genève en a 12'000)
voire de 100'000 h/km2 dans certains quartiers du centre.
La croissance démographique s’explique surtout par l’attractivité économique de
la ville, qui attire des migrants d’autres régions, provoquant un phénomène de
métropolisation.
La majorité des activités sont concentrées au Sud de l’île de Bombay. Le centre-
ville historique, tout au Sud, connaît un problème de manque d’espace qui
provoque une pénurie de logements.
Du coup, la ville s’étend de plus en plus vers les banlieues éloignées du Nord,
de l’Est et du Sud qui débordent sur l’île de Salsette et le continent.
Les aménagements du territoires doivent donc être envisagés à l’échelle de la
région métropolitaine (voir croquis). Depuis 1960-1970, pour contrer le
manque d’espace, le gouvernement de la région a aménagé de l’autre coté de la
Baie de Mumbai, une nouvelle ville, Navi Mumbai. Une bonne partie des FTN
et de leurs sièges sociaux du secteur des NTIC sont installées. Navi Mumbai a
déjà 2,5 millions d’habitants.
II. Les inégalités à Mumbai
a. Les inégalités socio-spatiales
Schématiquement, on peut dire que le Sud et l’Ouest sont plus riches, et que plus
on va vers le Nord et l’Est, plus on trouvera de quartiers pauvres. On parle d’un
gradient de richesse qui diminue du sud au nord et de l’ouest à l’est.
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Tout au Sud on trouve le centre historique, appelé Le Fort. Il abrite les
monuments de l’époque coloniale et des institutions importantes (Hôtel de ville,
Université). Il abrite un quartier d’affaire appelé Nariman Point, mais aussi
une partie du port et la gare centrale qui relie Mumbai au reste de l’Inde.
Autour du Fort, on trouve des quartiers résidentiels aisés.
Au nord du Fort, on trouve la vieille ville indienne et de vieux quartiers
industriels aujourd’hui reconvertis en bureaux et centres commerciaux. Ce sont
des quartiers populaires et ouvriers mais ils tendent à être déplacés vers le nord
pour être remplacés par des sièges sociaux de FTN. Cette zone abrite aussi une
autre partie du port. Toutefois, celui-ci a finalement été agrandit de l’autre coté
de la baie car le Sud de l’île devenait trop petit.
Au nord de cette zone, on trouve un des plus grands bidonvilles d’Asie,
Dharavi (entre 600'000 et 1 million d’habitants). Mais partout dans la région
métropolitaine, des bidonvilles ou slums sont construits partout le territoire
n’est pas aménagé. Ces quartiers informels avec des habitations précaires sont
donc dépourvus des services de base (eau, transports) et abritent 6 millions
d’habitants. 65% des familles ne disposent que d’une pièce dans leur maison.
Juste après Dharavi, on trouve un nouveau centre d’affaires, Bandra Kurla
construit dans les années 1980. Il abrite Film City, l’aéroport et des quartiers
résidentiels et industriels.
Enfin, en général, les catégories aisées de la population habitent sur le littoral,
ce qui fait que l’Ouest de l’île de Bombay est plus riche. Les loyers y sont chers
et c’est là que se trouve l’« Antilia House »
b. Les défis du territoire
De nouveaux espaces
Le principal défi auquel doit faire face Mumbai est le manque de place.
Actuellement, le centre économique historique de la ville n’a plus assez
d’espace pour accueillir les industries et les sièges sociaux des FTN. Deux
principales solutions dominent actuellement : déplacer les bidonvilles du centre
et créer de nouveaux quartiers d’affaires.
Les bidonvilles qui se trouvent au centre de la ville, comme Dharavi, font l’objet
de la convoitise des promoteurs immobiliers car leurs terrains sont idéalement
situés. On parle du re-développement des bidonvilles quand ceux-ci sont
remplacés par des infrastructures modernes :
o En général, les promoteurs immobiliers construisent des tout petits
appartements dans lesquels les habitants des bidonvilles sont relogés
gratuitement, à la périphérie de la ville. En échange, ils obtiennent le
droit de construire sur les terrains des bidonvilles, et font des
appartements de luxe et centres commerciaux.
o Dharavi est l’objet de ce type de convoitises. En 2004 un projet de re-
développement, Dharavi Redevelopment Projet a été mis en place pour
reloger 57'000 familles dans des appartements de 28 m2. Il été rejeté par
les habitants, surtout ceux qui ont leurs entreprises dans le bidonville et
ont besoin leurs locaux et de la proximité des clients du centre-ville.
D’autres politiques d’aménagement favorisent le déplacement des activités
industrielles vers la périphérie et la création de nouveaux centres d’affaires
pour les activités tertiaires. Par exemple, Navi Mumbai est dédié aux NTIC,
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tandis que Bandra Kurla est destiné à devenir un centre financier
international. La bourse nationale des valeurs, celle du diamant et plusieurs
sièges de FTN et Banques s’y s’ont installées récemment.
Les réseaux de transport
Mumbai dispose d’un réseau de transports publics (autobus, trains de
banlieue) mais il est insuffisant et surencombré. 90% des déplacements des
habitants se font dans les transports en commun mais ceux-ci transportent en
moyenne 2.5x leur capacité de voyageurs… Les routes et voies ferrées aussi sont
surchargées, ce qui est aggravé par des inondations pendant la mousson.
Pour améliorer les transports publics, un métro est en phase de construction
(c’est la société Reliance de la famille Ambini qui s’en occupe). Par ailleurs, la
ville est en train de construire des ponts pour déplacer les routes au-dessus de
l’eau. Par exemple, le pont maritime Bandra Worli Sea Link relie Bandra
Kurla au Fort.
Pauvreté et violences
La pauvreté et l’insalubrisont des problèmes importants. Par exemple, l’accès
à l’eau est problématique. Une partie de la population n’est pas raccordée au
réseau d’eau courante, et 44% des toilettes ne sont pas reliées à un réseau
d’égouts (90% à Dharavi où les habitants utilisent les ruisseaux).
Par ailleurs, comme Mumbai est une des villes les plus inégalitaires du monde,
elle est traversée par de nombreuses violences. Par exemple, en 2008, des
djihadistes pakistanais ont attaqué des hôtels de luxe, un café à la mode, un
centre communautaire juif et la gare de la ville, qui sont autant de symboles de
la modernisation…
Conclusion : comme beaucoup de villes mondiales, Mumbai est un symbole de
la puissance de son pays. Ainsi, sa modernité lui permet d’être la vitrine des
succès économiques de l’Inde émergente. Mais son organisation territoriale
reflète également les inégalités de la société.
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