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Séance des Vendredis du Social du 17 mai 2013 à Saint-Hubert
Les services de santé mentale en province de Luxembourg :
“L’offre de soins et d’aide en ambulatoire”
Introduction
Qu’est-ce que la santé mentale ?
En quoi consiste ce secteur vaste et souvent méconnu que chacun peut être amené à
solliciter pour lui-même ou pour l’un de ses proches ?
Quel suivi peut être donné aux diverses demandes d’aide ou de soins?
Par quel(s) professionnel(s) et par quel(s) moyen(s) ?
Quelles sont les différentes offres en santé mentale en province de Luxembourg ?
Les intervenants de cette séance ont tenté d’apporter des réponses à ces questions.
Synthèse des exposés
1. De la psychiatrie à la santé mentale
Par le Dr Marie-Françoise MEURISSE, Coordinatrice de la Plate-forme de Concertation
en Santé Mentale de la province de Luxembourg
A) Psychiatrie et santé mentale : d’un concept à l’autre
a) Psychiatrie
Le concept de “psychiatrie” met l’accent sur la maladie, la passivité du patient,
l’hospitalisation, le rôle central des professionnels.
b) Santé mentale
Le concept de “santé mentale” met l’accent sur la santé et le bien-être, le fait
que l’usager soit acteur, la “désinstitutionalisation” et le réseau d’intervenants.
c) Effet de cette évolution des concepts
L’évolution de ces concepts suppose une autre perception du “soin”, une
plurali des structures d’aide et de soins, la nécessité de collaboration
intersectorielle, l’estompement des frontières santé/pathologie et entraîne
aussi le paradoxe d’une médicalisation accrue.
B) Historique des dernières décennies en Belgique
- Années 20
1922 : création de la Ligue nationale belge d’hygiène mentale.
1924 : création de dispensaires d’hygiène mentale.
- Années 30
Essor de la psychiatrie biologique (thérapies de chocs,...).
- Années 50
1953: Arrêté royal qui reconnaît et subsidie les dispensaires d’hygiène
mentale. Découverte des neuroleptiques et généralisation de l’utilisation des
médicaments psychotropes.
- Années 70
Deux modèles se développent en parallèle :
la psychiatrie biologique, principalement hospitalière ;
l’hygiène mentale (doublée de l’antipsychiatrie) préconisant des soins en
milieu de vie développement de services de SM et des thérapies familiales.
- Années 80-90: première vague de réformes
Développement des Services de santé mentale et d’autres structures de soins.
Révision du régime de la collocation (Loi du 26 juin 1990 sur la protection des
malades mentaux).
Moratoire sur les lits psychiatriques, catégorisation de ces lits (A-T-K).
Création des maisons de soins psychiatriques et des habitations protégées.
Création des plates-formes de concertation.
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- Années 2000: deuxième vague de réformes
2001 : Note de politique sur les soins de santé mentale (Ministre ALVOET).
Cette note donne une nouvelle vision des soins de santé mentale : soins sur
mesure, participation du patient, accessibilité pratique et financière des soins,
organisation en fonction de groupes cibles,...
2002 :
o Loi relative aux droits des patients,
o Constitution de services de médiation,
o Déclaration interministérielle préconisant la réduction des temps
d’hospitalisation et l’organisation de réseaux de soins centrés sur la
demande du patient.
2005 : Déclaration d’Helsinki sur la santé mentale pour l’Europe et note
politique relative à la santé mentale (Ministre DEMOTTE).
2007 : Mise en œuvre de la note politique du Ministre DEMOTTE
(développement de soins de sanmentale en réseau via des circuits de soins
pour des patients présentant des troubles mentaux chroniques et complexes
grâce à des projets thérapeutiques en concertation autour du patient et en
concertation transversale entre les projets).
2009 : Conférence interministérielle qui reconnaît le besoin d’intensifier la
collaboration intra/extra hospitalier, de diminuer la durée et la fréquence des
hospitalisations et de développer des interventions au domicile.
2010 : Lancement du projet de réforme “107” (CIM du 26 avril 2010).
Principes du projet : diminution des lits hospitaliers et préférence pour les
soins dispensés dans le milieu de vie (collaborations intensifiées entre intra et
extrahospitalier).
Méthode : projets expérimentaux sur base d’un découpage géographique, d’un
inventaire et de la mobilisation de toutes les ressources, du public cible.
Fonctions de base : prévention, dépistage et soins de base ; traitement
intensif à domicile par des équipes mobiles ; réhabilitation psychosociale ;
soins spécialisés en hôpital, hébergement spécifique.
Risques et difficultés : dispersion des structures d’aides et des autorités
politiques compétentes, insuffisance de moyens, équilibre entre continuité des
soins et respect de l’autonomie.
C) La santé mentale en province de Luxembourg
En province de Luxembourg, il existe 7 SSM (service de san mentale), 1 HP
(hôpital psychiatrique), 3 IHP (initiative d’habitations protégées), 1 SPHG (service
psychiatrique en hôpital général) et 1 MSP (maison de soins psychiatriques).
Les structures de soins sont insuffisantes et inégalement réparties sur le territoire.
Dans notre province, le projet 107 n’a pu être concrétisé par manque de lits
psychiatriques “à geler” mais un travail en seau et des collaborations
intersectorielles se développent.
Par ailleurs, on note une prévalence élevée de consommation d’antidépresseurs et
de psychotropes, de troubles liés à la consommation d’alcool et de suicides.
D) Les Plates-formes de Concertation en Santé Mentale (PFCSM)
ASBL créées par l’AR du 10/07/90 complété par l’AR du 08/07/03.
Elles sont mandatées pour accompagner la restructuration de l’offre de soins, pour
promouvoir la concertation entre le nombre croissant d’acteurs et pour assurer le
lien entre le terrain et l’administration.
Elles ont pour missions de mener une concertation sur les besoins en matière
d’équipements psychiatriques, en matière d’offres de soins, sur la répartition des
tâches et pour la coordination des politiques médicales en santé mentale.
Elles collectent les données en matière de sanmentale en vue de les exploiter.
Elles disposent d’une fonction de médiation.
Concrètement, des commissions travaillent en interne sur base de groupes
cibles (jeunes, adultes, seniors) ; il existe également un service de médiation ainsi
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que des groupes de travail externes (au sein de l’Inter Plates-formes et avec
d’autres associations).
E) Conclusions
L’évolution de la santé mentale est marquée par une extension et une
complexification des modalités de soins et d’aide.
Cette évolution n’est pas sans risque : extension du champ de la santé mentale et
de la médicalisation, dispersion des efforts, rationalisation centrée sur le
quantitatif et tendance à mettre la SM au service d’une normalisation sociale.
Les principaux défis sont : déstigmatiser les troubles mentaux, garantir
l’accessibilité des soins, apporter des soins en réponse aux besoins de la
personne, ne pas négliger la prévention ainsi que préserver un équilibre entre
continuité des soins et respect de l’autonomie ou de la vie privée.
2. Les missions des Services de Santé Mentale de la Province de Luxembourg
(SSM) et les initiatives spécifiques
Par M. Benoît POUSSET, Directeur administratif du SSM de Marche-en-Famenne et
Mme Bénédicte LEGRAND, Directrice administrative du SSM de Bastogne
Il y a quatre Services de Santé Mentale provinciaux dont trois disposent d’un club de
jour.
En parallèle des Services provinciaux, on retrouve également d’autres institutions au
sein de l’Intercommunale de soins de santé Vivalia : le Centre Hospitalier
Psychiatrique La Clairière à Bertrix, deux IHP et la MSP Belle-Vue à Athus.
La Plate-forme de Concertation en Santé Mentale existe depuis 1993.
Les Services de Santé Mentale prônent le principe de liberté du patient (pas de
contrainte).
A) Centres de guidance (Marche, Bastogne, Arlon et Virton)
Ces services ouverts à tous en semaine proposent une guidance psychosociale, un
soutien psychologique ou une prise en charge psychothérapeutique, un soutien
médicamenteux, un appui pour diverses situations, des avis ou conseils et
proposent des examens AWIPH.
Equipe = psychiatre, psychologue, assistant social, logopède,…
La consultation coûte 4 euros (auparavant la gratuité était d’application).
Cependant, le tarif des consultations ne doit pas être un frein pour les patients
(qui ont souvent des revenus précaires).
B) Clubs de jour (Marche, Arlon et Virton)
Ils permettent la réinsertion sociale et le maintien dans le milieu de vie habituel
de la personne via un lieu ouvert (sans obligation de présence) offrant au patient
une vie communautaire et des activités diverses.
Equipe = psychologue, assistant social, éducateur.
Pour exemple, le Club de jour de Marche est accessible 2 jour/sem. (90 patients
depuis la création et une moyenne de 8-9 patients par jour) et a introduit un
dossier de demande de reconnaissance en tant que club thérapeutique.
Pour “entrer au club de jour, la personne passe un entretien préalable
d’admission et est soumis à une période d’essai.
Il est à noter que les patients du Club de jour ne sont pas forcément suivis au
préalable par un Centre de guidance.
C) Service d’accompagnement à domicile : Trait d’Union
Ce service est rattaché au SSM d’Arlon mais se déplace dans toute la province
grâce à une équipe d’assistantes sociales qui se rendent à domicile pour apporter
écoute, soutien et orientation à toute personne ayant une problématique en san
mentale et ne pouvant pas se déplacer.
D) Coordination Deuil Suicide Luxembourg
Deux psychologues (une à Bastogne et une à Marche) coordonnent des groupes
d’entraide et de paroles pour personnes endeuillées.
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Elles travaillent en réseau et collaborent avec d’autres services existants, pour
effectuer un travail de prévention ou organiser des cycles de formation et de
sensibilisation.
E) Centre d’études et de prévention Alcool Drogues (service en suspens)
3. Présentation du service et des spécificités de l’ASBL Service de Santé
Mentale du Nord et du Sud Luxembourg
A) Présentation du service et de l’équipe adulte
Par Mme Nancy WATS, Psychologue et Coordinatrice de l’équipe adulte
Equipe = 1 directrice administrative, 1 psychiatre-directeur thérapeutique, 1
psychologue psychothérapeute-coordinatrice, 1 neurologue psychothérapeute, 4
assistants sociaux (dont 2 sont aussi thérapeutes) et 1 secrétaire.
Le service s’est spécialisé dans les suivis sous contrainte et les bilans AWIPH.
Public pris en charge = adultes, couples, familles (de préférence des personnes
résidant dans l’arrondissement de Neufchâteau).
Le travail s’effectue essentiellement en ambulatoire et ces personnes consultent
surtout pour les difficultés suivantes : troubles de l’humeur, troubles anxieux,
troubles du sommeil, dépression, burn-out, troubles de la personnalité, troubles
de l’alimentation, difficultés de couple, problèmes de dépendances,...
La secrétaire récolte les données administratives. Les assistants sociaux collectent
les demandes et les présentent en réunion d’équipe. Après réflexion et discussion,
les personnes sont orientées vers un thérapeute du service ou vers l’extérieur.
Les consultations consistent en une guidance et une psychothérapie individuelle,
de couple ou de famille ou en un accompagnement psychosocial.
Les professionnels de l’ASBL font des consultations psychiatriques, psychologiques
ou psychosociales, ils effectuent des supervisions d’équipes et individuelles au
bénéfice d’autres professionnels, font un travail de coordination et de réseau avec
les différents acteurs du social, organisent des séances d’information.
Le service s’oriente surtout vers les psychothérapies psychanalytiques,
systémiques, cognitivo-comportementales ou en PNL, ainsi que vers la
pharmacothérapie et les consultations sociales.
Les tarifs sont réglementés par le décret du Service Public de Wallonie en vigueur
(11€/patient/séance augmentation prévue le 01/06/13).
Mais, les problèmes financiers ne doivent pas être un frein à la consultation.
Les permanences ont lieu :
- à Libramont : du lundi au vendredi de 8h30 à 17h,
- à Bouillon et à Saint-Hubert : du mercredi au vendredi de 9h à 18h.
B) Spécificité du SSM de Libramont : prise en charge d’auteurs d’infraction à
caractère sexuel (AICS)
Par Mme Julie ANDREUX, Psychologue et Coordinatrice de l’équipe AICS
Equipe = 1 psychiatre (1/5 temps), 3 psychologues (pour 1,5 ETP) et 1 secrétaire.
Public pris en charge = AICS : viol, outrage aux bonnes mœurs, consultation ou
diffusion de sites pédopornographiques,… (art. 372 à 386 du Code pénal)
pas de profil type (majorité d’hommes).
L’équipe prend également en charge des adolescents AICS en concertation avec
l’équipe “enfants” : prise en charge d’ados dès l’âge de 12 ans en cas de
judiciarisation ou dès l’âge de 16 ans avec ou sans judiciarisation.
Toute prise en charge d’ados est précédée d’une évaluation : entretiens avec le
jeune, avec ses parents, analyse du dossier judiciaire, testing si nécessaire,…
En 2012, l’équipe a géré 113 dossiers, dont 55 nouveaux, soit 26 pour avis
motivés et 29 pour nouveaux suivis.
Toute demande est accueillie et analysée (mais droit de refuser un patient).
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Les patients sont envoyés soit par la magistrature, soit par des juges de la
jeunesse ou des SPJ, soit par le seau médical, ou encore par des services
sociaux. Il s’agit d’une aide sous contrainte (très peu de demandes du patient).
Le service donne des avis motivés sur la pertinence d’un suivi ou non, effectue
des guidances ou des traitements, fait des rapports à l’autorité mandante.
Le service travaille en réseau et en partenariat avec la justice, les équipes de
prison et les maisons de justice.
Le travail débute par une prise de contact et se poursuit par une anamnèse
(scolarité, parcours professionnel, antécédents familiaux/médicaux/judiciaires,…)
qui donne des informations permettant d’élaborer des hypothèses sur le
fonctionnement psychologique du patient, son positionnement par rapport aux
faits, ses attentes ainsi que les pistes et objectifs thérapeutiques.
L’équipe se positionne par rapport aux faits en utilisant des outils spécifiques
d’évaluation (échelles de quantification de la psychopathologie, questionnaire de
personnalité pathologique, tests divers).
Une synthèse est ensuite réalisée en équipe et une planification du traitement est
réalisée par au moins 3 professionnels qui définissent la fréquence du traitement,
le nom du psychologue référent, la présence d’un tiers, les essais thérapeutiques
et la prise en charge pluridisciplinaire en partenariat avec les autres intervenants.
C) Spécificité de l’équipe enfant
Par Mme Claire GRANDJEAN, Assistante sociale de l’équipe enfant
Equipe = 1 médecin-directeur, 1 directrice administrative, 1 psychiatre infanto-
juvénile (= coordinatrice de l’équipe), 4 psychologues (dont 1 neurologue), 1
psychothérapeute, 1 assistante sociale, 1 psychomotricienne, 1 stagiaire-
psychologue et 1 secrétaire.
Les demandes viennent directement de la population ou via un envoyeur du
réseau.
La secrétaire prend les informations administratives et le motif de cette demande.
Ensuite, l’assistante sociale recontacte la personne, investigue au sujet de la
problématique, oriente le demandeur vers un service adéquat (ou un
professionnel qui est déjà intervenu), prend contact avec les partenaires
envoyeurs.
L’équipe se réunit et, face à une demande importante, privilégie certaines
situations (petite enfance, situations complexes, pathologies psychiatriques,...).
Elle contacte ou rencontre les différentes personnes ressources de l’enfant et
porte toute son attention sur cet enfant (son développement, sa souffrance,...).
Plusieurs membres de l’équipe interviennent et un soin multiple est proposé.
Parfois, certains bilans sont effectués soit pour envoyer l’enfant en enseignement
spéciali ou l’orienter vers un Service Résidentiel pour Jeunes (SRJ), soit pour
ouvrir un dossier AWIPH ou encore pour établir un QI.
D’autres orientations sont possibles, suite à des demandes d’avis émanant de
l’Aide à la Jeunesse ou du juge.
Par ailleurs, l’équipe participe au projet Pause-Enfant-Parent de Libin et
Ochamps, lieu d’accueil, de rencontre et de socialisation pour parents ou grands-
parents et leurs enfants ou petits-enfants jusque 3 ans.
L’équipe répond aussi aux demandes de supervisions institutionnelles ou cliniques
dans les crèches, haltes-garderies, ONE,...
L’équipe participe également au projet Caméléon qui rassemble des enfants (6 à
10 ans) qui peuvent parler et jouer autour des questions de la séparation de leurs
parents.
Ce groupe est animé par 2 psychologues les lundis scolaires en fin de journée et
se compose de 2 séances-rencontres entre les enfants et les parents et de 16
séances de groupe avec les enfants.
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