Actes de la conférence « Transition énergétique et

Actes de la conférence
« Transition énergétique et
sobriété : enjeux et rôles de
l’échelon territorial »
(30 octobre 2013 à Sciences Po)
SOMMAIRE
Cadrage général : 2
Table ronde n°1 : Transition et sobriété vues par la recherche
Avec :
Interventions 5
Questions en salle : 10
Table ronde n°2 : Transition et sobriété à l’échelon territorial : quelles
initiatives sur le terrain ?
Interventions 14
Questions en salle : 19
Table ronde n°3 : Quelles politiques publiques pour accompagner la mise en
œuvre territoriale de la transition énergétique?
Interventions 22
Questions en salle : 27
Conclusions 30
Cadrage général :
Laurence Tubiana, Directrice de la Chaire Développement durable de
Sciences Po, de l’Iddri, et facilitatrice du débat national sur la transition
énergétique
J’ai le plaisir d’introduire cette journée que la Chaire Développement durable a
organisée aujourd’hui avec des partenaires anciens et nouveaux : SNCF, Proléa, Mc
Donald’s France, EDF et Rexel. La Chaire a développé un partenariat
particulièrement stimulant avec Le Monde, qui n’est pas seulement un journal mais
également un média rayonnant de manière diversifiée.
Cette conférence s’inscrit dans l’année de débat autour de la transition
énergétique. Michel Colombier et moi-même avons beaucoup travaillé autour de ce
débat et bien que l’histoire du débat est encore à faire, je peux vous transmettre ce
que j’y ai vécu.
Ce colloque aujourd’hui permet une réflexion sur la dynamique de transition
énergétique à l’échelon territorial qui est un échelon difficile à définir. Le débat a
duré 8 mois et il fut peu visible à l’extérieur. Cependant, il a été visible pour les
régions et les communes ou autres collectivités locales. Le comité de pilotage a été
extrêmement mobilisé avec Thierry Vial comme secrétaire général. Le débat a
mobilisé 112 personnes de milieux divers, réparties en 8 groupes de travail. Il y a eu
une tension dans ces échanges. Nous avons pris part à une petite équipe connectée
qui a ressenti tout ce qui s’est passé en France. 2000 débats dans toute la France,
c’est exceptionnel. Je me suis impliquée dans le Grenelle de l’environnement,
processus très intéressant mais qui n’a pas fait l’objet de la même appropriation sur
le territoire.
Le débat portait sur la définition de la transition telle que vue par le pays : Que faire
dans la société française à partir d’expériences de terrain ? Une journée citoyenne a
été organisée dans 14 régions avec une centaine de citoyens sélectionnés et revus
selon le protocole des World Wide Views promu par le Danish Board of Technology,
l'équivalent danois de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et
technologiques (OPECST). Nous avons eu énormément de retours sur
l’appropriation territoriale. Elle s’est faite par un corps intermédiaire professionnalisé
dans un débat très animé et très investi.
Nous avons observé un contraste entre les difficultés de s’entendre à Paris et
une plus grande ouverture localement. Au fond, ce qui paraissait impossible à
Paris était déjà en marche en province dans les régions, les agglomérations et les
communes. La notion de sobriété a été complexe à débattre. L’objectif de réduction
de 40% des émissions carbone est déjà intégré au niveau local ; la réduction de la
consommation finale de 50% est une évidence en province, cela semble impossible
à Paris ; sur les questions de financement, un accord est impossible à trouver à Paris
car le taux de retour sur les économies d’énergie apparaît problématique, mais c’est
une évidence dans beaucoup de régions, notamment dans la région des Pays de la
Loire avec une conférence financière locale ; la transition professionnelle est
impossible à Paris mais travaillée localement ; la question de la rénovation du bâti
qui est essentielle car peu de nouveaux bâtiments sont construits, cause de grands
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troubles pour les professions et semble impossible à résoudre à Paris tandis que
localement, l’identification de ce problème associé à la crainte d’être de simples
sous-traitants est un problème mais il n’apparaît pas impossible de le résoudre.
En animant ce débat localement, nous revenions regonflés en constatant que
localement, des actions sont prises et ne se pose pas la question « Doit-on le
faire ? ». La question ne fait pas question : oui, il faut changer. La précari
énergétique marque l’impossibilité de continuer comme avant. C’est 3.2% du PIB
européen qui part dans les factures d’importation énergétique chaque année.
Localement, la question est « Comment changer ? ». Les débats sont donc
fondamentalement différents. Le changement est en marche avec des territoires loin
d’être égaux. N’est-on pas dans un moment de crises des politiques publiques ? J’ai
pu avoir le sentiment que les corps intermédiaires ne représentent plus la société
française. Comment faire pour que les changements soient traduits dans le débat de
la politique publique ?
J’ai trouvé révélatrice la discussion sur la France en 2025 : nous nous voyons encore
comme une France par le haut alors que nous vivons une période de
bouleversement. Dans le modèle économique traditionnel, nous projetons le passé
dans l’avenir. Mais c’est une France qui n’existera plus, d’la difficulté des
institutions à penser cette transformation profonde qu’on ne connaît pas, alors que
dans la société, beaucoup de choses se préparent, d’où l’intérêt du débat. Il faut
comprendre la difficulté des changements dans la société et l’utilité de l’État
central et des corps intermédiaires pour accompagner ces changements. Les
appareils de l’État ne répondent pas à ce changement en marche. L’objectif du débat
est d’y voir plus clair, ce changement se fait avec ceux qui le font, qui le pensent. Il
existe un « big divide » entre ce que nous pensons à Paris et ce qui arrive dans la
réalité.
Michel Colombier, Directeur scientifique de l’Iddri et membre du groupe
des experts du débat national sur la transition énergétique
Pourquoi ce thème de la sobriété? Il ne recouvre pas l’ensemble de la transition
énergétique.
Une des principales raisons est que ce thème fait l’objet d’un clivage fort à Paris.
C’est l’un des clivages les plus marqués. Ce clivage est de deux natures :
- Il est substantiel : selon l’importance accore à la sobriété dans l’évolution de
la société française, cela va ouvrir des voies différentes pour la transition et
les grands choix énergétiques
- Le clivage s’opère également entre acteurs :il y a des acteurs pour lesquels la
sobriété est une obligation et ceux pour lesquels, c’est aberrant car cela
concerne les comportements, les modes de vie, ce qui est perçu comme une
ligne rouge à ne pas franchir. Il est impossible d’avoir une discussion.
Le débat porte sur les sources d’énergie mais aussi sur la quantité d’énergie dont
nous avons besoin. Mais le système énergétique est plus un paquebot qu’un voilier
car il faut des décennies pour opérer un changement. Il faut donc penser la société
dans 30 à 40 ans. Ces sociétés seront différentes et il y a des irréversibilités, des
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rigidités. Par exemple, les locaux dans lesquels nous sommes aujourd’hui sont
anciens, cependant il y a eu une évolution dans notre manière de les habiter. Les
infrastructures sont plus longues à bouger que les modes de vie.
Pour découpler le lien entre croissance et demande d’énergie, nous parlons souvent
d’efficacité : il s’agit de s’appuyer sur le progrès technique pour développer des
usages plus efficaces. C’est une question que nous savons assez facilement
appréhender, elle renvoie aux notions d’investissement, de rentabilité ou encore de
prise de décision.
Au-delà des techniques, nous avons donc également parlé de sobriété mais sans
avoir une définition commune de ce concept. Elle est souvent définie en négatif : tout
ce qui n’est pas l’efficacité, la technologie. La sobriété ce serait le découplage
entre l’usage et la consommation sans l’efficacité. Ceci renverrait à une notion de
comportement individuel, comme ne pas prendre sa voiture pour faire les courses. La
sobriété serait alors soit une démarche personnelle, éthique et morale soit/et une
démarche de contrainte des individus par les politiques publiques (nous disposons
alors d’instruments comme les normes ou les instruments économiques qui ont aussi
un impact sur les comportements).
En faisant de la sobriété une stricte démarche individuelle plusieurs difficultés se
posent: doit-on changer les comportements ? La discussion sur l’étalement urbain
illustre cette difficulté. Dans le débat parisien, certains disaient qu’il faut ralentir cet
étalement tandis que pour d’autres, ce serait le sens de l’histoire, ce que les citoyens
veulent. Mais dans le débat local, les élus ne comprennent pas ce questionnement
car c’est une évidence pour eux que l’étalement est un problème et qu’il faut
intervenir. La question est : Comment? Les politiques publiques sont pour l’instant
impuissantes.
Contrairement à d’autres biens comme les produits agricoles qui répondent à un
besoin fondamental (alimentation), l’énergie n’est pas un besoin. Nous consommons
d’abord des services pour répondre à un besoin de confort thermique, d’éclairage. La
société n’a pas besoin de l’énergie en soi mais de services pour la santé, la
mobilité ou la culture. L’énergie n’est qu’une façon de satisfaire ces besoins. La
déconnexion entre la consommation énergétique et les services dépend de la façon
dont nous nous organisons. Par exemple, cela relève moins d’une punition de ne pas
prendre sa voiture quand on travaille à côté et que les commerces sont à proximité.
Le comportement individuel est inscrit dans une infrastructure urbaine et dans un
temps du travail, ce qui a une influence énergétique.
La question « faut-il changer les comportements ? » est imbécile. Évidemment les
comportements changent, nous sommes différents de nos grands-parents. Il faut
donc comprendre ce mouvement et la question devient : comment voulons-nous
influer sur ce changement pour l’inscrire dans le projet de transition énergétique ? A
la dimension individuelle et de contrainte, doit s’ajouter une dimension d’organisation
collective de la sobriété : d’où l’importance des collectivités locales qui sont des
acteurs primordiaux pour façonner notre quotidien, laisser place à nos aspirations et
inventer des solutions.
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C’est la question des infrastructures physiques et institutionnelles qui fait le lien entre
collectivités locales et sobriété, et on peut observer localement de nombreuses
initiatives pour expérimenter des solutions originales. La distinction efficacité/sobrié
apparait alors un peu virtuelle et dans la réalité, toutes ces actions seront un
mélange d’efficacité et de sobriété. Elles viseront à la fois à faciliter les innovations
techniques, à leur donner forme, et à promouvoir de nouvelles approches par les
citoyens. Nous n’allons pas rechercher une distinction systématique mais montrer
que la transition n’est pas seulement la mobilisation d’innovations techniques mais
aussi une ouverture à de nouvelles possibilités.
Cette innovation sociale s’appuie sur l’innovation technique mais elle va lui donner
tout son sens. Nous n’allons pas seulement remplacer nos véhicules par des
modèles électriques, nous allons voir s’insérer des objets nouveaux pour une
nouvelle connectivité humaine visant la satisfaction des besoins dans les villes du
21ème siècle. Il faut penser la sobriété non seulement comme une contrainte
individuelle mais aussi comme un objet collectif qui se développe avec les
communautés locales.
Nous allons étudier dans un premier temps les aspirations des Français en termes
de mode de vie, puis nous aborderons les innovations de terrain. Dans un dernier
temps, nous reviendrons sur les principes communs et les outils collectifs (fiscalité, la
norme, innovation et l’organisation) qui peuvent facilité la mise en œuvre et la
cohérence de la transition.
Table ronde n°1 : Transition et sobriété vues par la recherche
Avec :
Animateur : Didier Pourquery, Rédacteur en chef développement éditorial (Le
Monde)
Philippe Baret, Docteur en sciences agronomiques (Université catholique de
Louvain)
Gaëtan Brisepierre, Sociologue indépendant, spécialisé dans les questions
d’énergie, d’environnement et d’habitat
Damien Demailly, Responsable du programme Nouvelle Prospérité (Iddri Institut
du développement durable et des relations internationales)
Interventions
Didier Pourquery, Rédacteur en chef développement éditorial (Le
Monde)
Le Monde est ravi de s’associer à ce débat car c’est l’un des axes de développement
du journal qui souhaite participer aux débats notamment au débat sur le
développement durable aussi bien ici que dans beaucoup de régions.
La table ronde va consister à regarder à travers le monde de la recherche ce qui se
passe pour déterminer la pertinence du terme de sobriété. Cela existe-t-il vraiment
en pratique ?
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