UNIVERSITÉ MOHAMMED V – AGDAL FACULTÉ DES SCIENCES RABAT N° d’ordre : 2547 THÈSE DE DOCTORAT Présentée par Sanaâ SAOIABI Discipline : Chimie Spécialité : Matériaux et Environnement Matériaux fonctionnels à base de phosphate de calcium à applications environnementales Soutenue le 28 Octobre 2011 Devant le jury : Président : A. ZRINEH, Professeur à la Faculté des Sciences, Rabat Maroc Examinateurs : T. CORADIN, Directeur de recherche, CNRS- Paris, France, M. HAMAD, Professeur à la Faculté des Sciences, Rabat, Maroc J. NAJA, Professeur et Vice Doyen de la Faculté des Sciences et Technique, Settat Maroc J. L. ACKERMAN, Professeur à Harvard Medical School, Boston, MA USA P. BARBOUX, Professeur à l’Ecole Nationale Supérieure de Chimie de Paris, France A. LAGHZIZIL, Professeur à la Faculté des Sciences, Rabat- Maroc Faculté des Sciences, 4 Avenue Ibn Battouta B.P. 1014 RP, Rabat – Maroc Tel +212 (0) 5 37 77 18 34/35/38, Fax : +212 (0) 5 37 77 42 61, http://www.fsr.ac.ma AVANT PROPOS Les travaux présentés dans cette thèse ont été réalisés au sein du Laboratoire de Chimie Physique Générale à la Faculté des Sciences de Rabat (FSR) - Université Mohammed V-Agdal–Rabat, sous la direction du Professeur Abdelaziz LAGHZIZIL, qui a agréablement assuré l’encadrement de cette thèse avec beaucoup d'intérêt et d'optimisme tout en me laissant une large marge de liberté pour mener à bien ce travail. Je tiens à lui exprimer ma gratitude pour son suivi, sa disponibilité, sa compréhension, son respect des engagements et pour ses encouragements continus. Je le remercie aussi pour sa patience et son sérieux dont il a fait preuve lors des multiples discussions et pour l’intérêt constant qu’il a manifesté pour mes recherches et ses conseils éclairés au cours du développement de ce travail. Sa passion pour la recherche, son esprit innovateur et son dynamisme perpétuel sont exemplaires. Etre son étudiante fut un grand honneur pour moi. Ce travail est réalisé dans le cadre d’une collaboration avec 3 laboratoires : - Le Laboratoire de “Biomaterials Laboratory, Martinos Center, Massachusetts General Hospital and Harvard Medical School Boston, MA, USA”. - Le Laboratoire de Chimie de la Matière Condensée - Collège de France, Université Pierre et Marie Curie, Paris VI, France. - Le Laboratoire de Physique de la Matière Condensée (PMC), Ecole Polytechnique, France. En tant que lauréat Fulbright, je tiens à exprimer mes vifs remerciements et toute ma reconnaissance à tous les membres de la Commission Maroco-Américaine (MACECE) « The Moroccan-American Commission for Educational and Cultural Exchange » et AMIDEAST avec le Fulbright Scholarship Program, pour le support financier, le suivi et leur soutien le long de mes séjours aux USA dans le cadre de la préparation de cette thèse. Je suis particulièrement reconnaissante à Monsieur Jerome L. ACKERMAN Director of Biomaterials Laboratory, Martinos Center, Massachusetts General Hospital and Professor of Radiology at Harvard Medical School in USA, de m’avoir gentiment accueilli parmi son équipe. Je le remercie d’avoir cru à mon projet et d’avoir mis à ma disposition tous les moyens nécessaires pour le mener. Milles merci à Mr Thibaud Coradin, Directeur de recherche au CNRS, et à Mme Sylvie Masse chargée de recherche scientifique au Laboratoire de Chimie de la Matière Condensée de Paris Université Pierre et marie Curie Paris VI- France, pour leur collaboration et l’accueil chaleureux qu’ils m’ont réservé durant mes séjours à Paris. Qu’ils trouvent ici l’expression de ma respectueuse gratitude pour leurs précieux conseils et leurs discussions fructueuses. Un grand merci au Dr. Khalid LAHLIL de l’Ecole Polytechniques de Paris – France pour sa collaboration scientifique, pour l'aide apportée durant mes expériences et pour l’intérêt constant qu’il a porté à ce travail. Mes remerciements les plus sincères s’adressent au président du jury Monsieur le Professeur Abdallah ZRINEH de la Faculté des Sciences, Rabat – Maroc de m’avoir fait l’honneur de présider le jury de cette thèse. Ses discutions scientifiques intéressantes dans le suivi et la réalisation de mes travaux de recherche ont été d’une qualité supérieure. Je suis sensible à l’honneur que me fait Monsieur Jamal NAJA, Professeur et Vice Doyen à la Faculté des Sciences et Techniques de Settat (FSTS), en acceptant d’être rapporteur de ce travail et de faire partie du jury. Qu’il trouve ici l’expression de ma respectueuse gratitude. Mes remerciements s’adressent à Monsieur Mohamed HAMAD, Professeur à la Faculté des Sciences, Rabat – Maroc autant que rapporteur de cette thèse et pour sa présence parmi les membres du jury, afin de juger le contenu de ce travail. Je suis honoré que Monsieur Thibaud. CORADIN, Directeur de recherche au CNRS et responsable de l’équipe de recherche « Biomatériaux et environnement » au Laboratoire de Chimie de la Matière Condensée de Paris – France, ait accepté d’être rapporteur et membre du jury de ce travail. Qu’il trouve ici l’expression de ma respectueuse gratitude. Mes remerciements s’adressent à Monsieur Jerome L. ACKERMAN, Director of Biomaterials Laboratory, Martinos Center, Massachusetts General Hospital and Professor of Radiology at Harvard Medical School in USA d’avoir aimablement accepté de se déplacer pour juger ce travail malgré tous ses engagements et ses nombreuses occupations. Je tiens à remercier Monsieur Philippe BARBOUX, Professeur et responsable des relations industrielles à l’Ecole Nationale Supérieure de Chimie de Paris- France, pour le grand honneur qu’il m’a fait en acceptant d’être membre du jury de cette thèse. Mes remerciements s’adressent à Monsieur Abdelaziz LAGHZIZIL pour l’attention constante avec laquelle il a suivi mes travaux de recherche et pour ses précieuses discussions scientifiques, qu’il soit également très vivement remercié d’avoir accepté d’être membre du jury. De l’autre bout de la terre, mes meilleurs sentiments d’amitié s’adressent : - A tous les membres du Laboratoire de Chimie de la Matière Condensée (LCMC), Paris VI, Jussieu France, et en particulier, G. Laurent, I. Genois, N. Abdoul-Aribi, M. Selmane et L. G. Patrick, qui ont été toujours là pour m'aider au cours de mes stages à l’Université Pierre et Marie Curie, Paris VI France. - A tout le personnel de Martinos Center et Harvard Medical School Boston - USA, et en particulier, Messieurs Wu, Yaotang, Choukri Mekkaoui, David Alcanta, Dionyssios Mintzopoulos et Mme Haihui Cao. - Aux responsables du « Fulbright Student Exchange Program » à Washington DC USA, notamment, Mme Stephanie Whitlatch et Mme Elisa O’Keefe pour leur politique de proximité et leur compétence. Je tiens à remercier les membres de l’UATRS-CNRST, en particulier Messieurs B. Jaber, K. Anouar, M. Benissa et Mlle H. Oauddari, pour leur aide technique à la caractérisation et à l’analyse chimiques de quelques produits présentés dans ce travail. Je souhaite associer à ces remerciements tous ceux qui ont contribué à la réalisation de ce travail en particulier à tous mes compatriotes et mes amis qui ont rendu mes séjours en Amérique et en France si agréables, plein d’encouragement, d’espoir et de compréhensions, aux enseignants-chercheurs et tous mes ami(e)s et collègues du Laboratoire de Chimie Physique Générale et du Département de Chimie de la Faculté des Sciences de Rabat - Maroc, de Martinos Center, MGH et Harvard Medical School de Boston - USA et de LCMC et UPMC de Paris - France. Je désire terminer en remerciant mes sources de joie, de bonheur et de force à mes parents, ma sœur Sarah, mon frère Yahya et mes deux sœurs jumelles Sawsane et Fadwa qui ont joué évidemment un très grand rôle dans cette thèse. Leur soutien moral et matériel m’a été indispensable tout au long de ces années. J’espère que ce travail leur témoigne toute ma reconnaissance et mon estime à leurs égards. Merci de m’avoir soutenue et encouragé pendant les moments de doutes. Sommaire Introduction générale …………………………………………………………….. 1 Partie I : Généralités sur la gestion des métaux lourds et leur élimination par des solides poreux et fonctionnalisés …………………… 5 Chapitre I : Comportement physico-chimique des métaux dans l’environnement …. 7 Introduction ………………………………………………………………………….. 8 I. Toxicité des métaux et leurs conséquences sur les écosystèmes…………………… 8 II. Sources et devenir des contaminants métalliques dans l’environnement…………. 9 II.1. Milieu aquatique………………………………………………………………… 9 II.2. Contamination des sols par les métaux lourds et remédiation…………………. 10 III. Physico-chimiques des réactions à l’interface solide – liquide………………….. 11 III.1. Hydrolyse du métal : cas des ions Pb2+ et Zn2+……………………………….. 11 III.2. Complexation des ions métalliques aqueux…………………………............... 13 III.3. Interactions avec les carbonates et les phosphates……………………………. 14. III.4. Interactions avec les amines et carboxylates………………………………….. 14 III.5. Immobilisation des cations métalliques par une surface……………………… 15 III. 6. Mécanismes d’interaction solide – métal……………………………………. 16 III.6.1. Adsorption …………………………………………………………………… 16 III.6.1. 1.Adsorption non spécifique………………………………………………… 16 III.6.1.2. Adsorption spécifique………………………………………………………. 17 III.6.2. Echange ionique………………………………………………………………. 18 III.6.3. Précipitation à la surface………………………………………………….. 18 IV. Elimination des métaux lourds par les solides poreux ………………………….. 19 IV.1. Les argiles…………………………………………………………………….. 19 IV.2. Les charbons actifs…………………………………………………………… 19 IV.3. La silice poreuse et ses dérivées………………………………………………. 20 IV.4. Les phosphates de calcium……………………………………………………. 20 Conclusion………………………………………………………………………….. 21 Chapitre II : Structure des apatites et fonctionnalisation de leur surface…… 23 Introduction ………………………………………………………………… 24 I. Rappel sur les propriétés structurales des apatites …………………… 24 I.1. Structure des apatites ………………………………………………. 24 I.2. Substitutions dans le réseau de l’apatite……………………………… 25 I.3. Méthodes d’élaboration des apatites………………………………… 26 II. Modification des surfaces des apatites ………………………………… 27 II.1. Apatite à caractère médical……………………………………… 27 II.2. Apatite à plusieurs vocations………………………………………….. 30 II.2.1. Action des organophosphonates…………………………………… 31 II.2.2. Action d’oxydes mésoporeux : ZrO2, Al2O3, SiO2, TiO2………………….. 34 III. Applications environnementales : Apatite hybrides comme agents de dépollution des métaux……………………………………………………………………………. 35 Conclusion…………………………………………………………………………… 36 Partie II : Fonctionnalisation de la surface des apatites à application environnementale…………………… 38 Chapitre III : Synthèse et caractérisation des matériaux à surfaces nanostructurées fonctionnalisées par l’aminotriméthylenphosphonate…………………………….. 39 Introduction………………………………………………………………………… 40 I. Caractéristiques structurales et texturales du phosphate naturel de Benguérir ……. 41 I.1. Echantillonnage ………………………………………………………............... 41 I.2. Caractérisation du phosphate naturel …………………………………………. 41 I.2.1. Examen par diffraction des rayons X………………………………................ 41 I.2.2. Examen par spectroscopie d’absorption IR…………………………................ 43 I.2.3. Analyses chimiques …………………………………………………………… 44 I.3. Propriétés texturales……………………………………………………………... 46 I.3.1. Mesure de la surface spécifique du phosphate naturel par la méthode BET …. 46 I.3.2. Morphologie de l’apatite naturelle par MEB…………………………………. 46 II. Modification de la surface de l’hydroxyapatite par greffage de l’aminotriméthylenphosphonate……………………………………………………. 47 II.1. Données physico-chimiques de l’acide aminotriméthylenphosphonique (AMP).. 48 II.2.Préparation des apatites hybrides à partir du phosphate naturel ………………… 48 II.2.1 L’apatite de référence PNM…………………………………………………… 48 II.2.2 Les apatites hybrides AMP-PNM……………………………………………… 50 II.3. Préparation des apatites hybrides à partir des précurseurs commerciaux ……… 50 II.3.1. L’apatite de référence (HAp)…………………………………………………... 50 II.3.2. Les apatites greffées (AMP-HAp) …………………………………………… 51 II.4. Caractérisation des précipités préparés………………………………………… 52 II.4.1. Examen par diffraction aux rayons X ……………………………………….. 52 II.4.2. Examen par spectroscopie infrarouge IR……………………………………. 58 II.4.3. Examen par spectroscopie RMN- MAS du 31P et du 13C à l’état solide…… 60 II.4.4.Analyses thermiques (ATG/ATD) des apatites greffées……………………. 63 II.4.5. Analyses chimiques…………………………………………………………. 64 III. Analyse volumétrique des apatites greffées…………………………………….. 65 III.1. Mesure de la surface spécifique……………………………………............... 65 III.2. Analyse par microscopie électronique à transmission………………………. 69 Conclusion…………………………………………………………………………… 71 Chapitre IV : Synthèse et caractérisation des composites du système mixte TiO2-apatite……………………….…………………………………… …………. 73 Introduction………………………………………………………………………… 74 I. Généralités sur le photoactif TiO2 et le contexte de son association avec l’apatite… 74 II. Procédure expérimentale……………………………………………………….. 75 II.1. Principe général du procédé sol gel ……………………………………………. 75 II.2. Préparation des composite TiO2-HAp …………………………………………. 76 II.2.1. Cas de l’hydroxyapatite HAp………………………………………................ 76 II.2.2. Cas de la préparation de TiO2 par procédé sol-gel …………………………… 76 II.2.3. Préparation des composites du système mixte TiO2-HAp…………............... 76 III. Résultats et discussions…………………………………………………............. 77 III.1. Examen par diffraction des rayons X ………………………………………… 77 III.2.Examen par spectroscopie RMN- MAS du 31P et 13C à l’état solide…………. 81 III.3.Microscopie électronique à transmission………………………………………. 83 III.4. Mesure de la surface spécifique ………………………………………………. 84 Conclusion………………………………………………………………….............. 88 Partie III : Contribution à l’étude des mécanismes de sorption aux interfaces apatite- soluté…………………………………………………………………… 89 Chapitre V : Etude de la sorption d'ions métalliques aqueux par des surfaces des apatites fonctionnalisées par l’aminophosphonate ………………………………. 91 Introduction ………………………………………………………………………… 92 I. Procédure d’adsorption…………………………………………………................ 92 II. Sorption des métaux par le phosphate naturel …………………………................ 93 III. Immobilisation des ions Pb2+ et Zn2+ par les apatites hybrides ……………….. 93 III.1. Propriétés acido-basiques des solutions durant le processus d’adsorption des ions métalliques par les apatites hybrides…………………………………………… 93 III.2.Origine de la charge de la surface de l’apatite hybride………………………… 97 III.3. Etudes cinétiques des phénomènes d’adsorption des ions métalliques sur les apatites hybrides……………………………………………………………………. 97 III.4. Etude des isothermes d’adsorption……………………………………............ 99 IV. Partie Théorique………………………………………………………………… 104 IV.1. Modèles cinétiques de l’adsorption……………………………………………. 104 a. Modèle cinétique du premier ordre ………………………………………………. 104 b. Modèle cinétique du pseudo second ordre…………………………………………. 104 IV.2. Modèles d’isothermes d’adsorption…………………………………............... 106 a. Modèle de Langmuir……………………………………………………................. 106 b. Isotherme de Dubinin-Radushkevich (D-R). ……………………………………… 108 c. Modèle de Freundlich……………………………………………………………… 109 V. Mécanismes de sorption ………………………………………………………….. 113 Conclusion ………………………………………………………………………….. 116 Chapitre VI : Adsorption des métalloporphyrines hydrosolubles sur les 117 hydroxyapatites poreuses……………………………………………………………. Introduction…………………………………………………………………………… 118 I- Généralités sur les porphyrines et les métalloporphyrines ………………………… 118 II. Préparation des porphyrines [T(p-SO3NH4)PP]M (M=Zn et Pb)…………………. 119 II.1. Cas de la tétraphénylporphyrine (TPP)H2 : ………………………....................... 119 II.2. Cas de la mésotétraparasulfophénylammoniumporphyrine [T(p-SO3NH4)PP]H2 119 II.3 Cas de la porphyrine [T(p-SO3NH4)PP]Zn (ZnP)……………………………….. 121 II.4 Cas de [T(p-SO3NH4)PP]Pb (PbP)……………………………………………… 122 III. Caractéristiques des apatites utilisées ………………………………………….. 124 IV. Processus d’adsorption des métalloporphyrines sur l’hydroxyapatite…............... 125 IV.1. Conditions expérimentales …………………………………………………… 125 IV.2. Etude cinétique d’adsorption des porphyrines ZnP et de PbP sur les hydroxyapatites w-HAp et e-HAp…………………………………………………. 125 IV.3. Isothermes d’adsorption……………………………………………………….. 128 IV.4. Mécanismes d’adsorption …………………………………………………….. 131 IV.4.1. Variation du pH durant le processus d’adsorption…………………………. 131 IV.4.2. Analyse des solides après adsorption par spectroscopie UV- visible du solide 133 CONCLUSION GENERALE …………………………………………………….. 135 REFERENCES…………………………………………………………………… 138 INTRODUCTION GENERALE Au Maroc comme ailleurs, les sources de la pollution des milieux aqueux ou poreux sont généralement d'origine industrielle et agricole. Le choix d’un matériau présentant de bonnes caractéristiques physico-chimiques et l'élimination des métaux lourds et des macromolécules nocives par les processus d’adsorption et photochimique sont parmi les thèmes de recherche d’actualité, intéressés par plusieurs chercheurs dans le monde notamment les industriels. En effet, l’élaboration de nouveaux matériaux de forte porosité permet d’avoir des propriétés physiques intéressantes. Les nanomatériaux sont souvent utilisés dans de nombreux domaines en particulier dans les domaines de la biotechnologie et de la protection de l’environnement. Les apatites présentent des propriétés structurales, d’adsorption et d’échange ionique, qui peuvent contribuer à leur valorisation, elles peuvent être utilisées comme biomatériaux et adsorbants. De nombreuses études sont réalisées pour remédier la pollution qu’ils engendrent. Elles portent, soit sur le remplacement dès l'origine du procédé industriel des métaux toxiques par ceux non toxiques, soit sur leur piégeage in situ. En ce qui concerne ce dernier point, les entités chimiques piégées peuvent également être stabilisées en vu de leur stockage. Cette étape permet de réduire leur biodisponibilité et par conséquent leur toxicité. Depuis plusieurs années, le conditionnement dans les phosphates apatitiques est étudié comme méthode de décontamination des effluents liquides pollués par les éléments de traces. Les apatites sont également envisagées comme matrices de conditionnement des déchets radioactifs, ou encore comme additifs des barrières ouvragées assurant le confinement de ces déchets. Les apatites naturelles ou synthétiques présentent, en effet, l’avantage d’être stables thermiquement, peu solubles et acceptent de nombreux ions ou groupements ioniques dans leur structure. De multiples substitutions sont ainsi possibles sur les sites cationiques, notamment par les cations métalliques. Les métaux lourds sont des éléments naturels, présents dans tous les compartiments de notre environnement : l'air, l'eau et les sols. Malheureusement, l’activité de l’homme a changé leur répartition, leur concentration, et leur spéciation en les rendant ainsi potentiellement dangereux. De plus, les apatites peuvent fixer ou interagir avec les espèces organiques. De nombreux travaux de recherche ont été réalisés dans le but -1- d’éliminer les espèces organiques toxiques (pesticides, colorants, phénol, pyridine, etc…). Par conséquent, les apatites ont l’avantage d’être un bon adsorbant des substances nocives que ce soient organiques ou inorganiques. Cependant, plusieurs matériaux fonctionnalisés et poreux ont déjà fait preuves pour la sorption des entités polluantes. Le greffage des molécules organiques sur la surface des apatites peut améliorer leur propriétés physico-chimiques notamment l’adsorption. Par cette méthode, les apatites hybrides ont l’avantage de complexer les métaux lourds, les colorants, les porphyrines, les pesticides et d’autres molécules organiques toxiques. Grâce à l’activation de leur surface, les apatites présentent aussi des propriétés catalytiques. L’utilisation des hydroxyapatites comme matériaux de décontamination dépend de leur capacité de fixation des ions métalliques, et du mode de piégeage de ces éléments toxiques. Ainsi, il est primordial de définir avec précision le mécanisme de fixation des ions métalliques par les apatites greffées. Ce manuscrit décrit en partie et de façon rigoureuse l’ensemble des processus d’incorporation des ions Pb2+ et Zn2+ par les particules d’hydroxyapatite phosphocalcique fonctionnalisées par l’aminophosphonate. Généralement, les procédés de synthèse des apatites phosphocalciques stéochiométriques sont nombreux et largement étudiés. Il est donc souhaitable de chercher un procédé de production économique d’une part, et d’aboutir à des matériaux de grandes surfaces spécifiques d’autre part. Pour cela, deux voies de synthèse ont été envisagées dans ce travail. La première est basée sur l’utilisation du phosphate naturel marocain, et la deuxième voie de synthèse repose sur l’emploie des précurseurs commerciaux (Ca(OH)2 et NH4H2PO4). Par ailleurs, l’oxyde de titane est bien connu par sa spécificité dans le domaine des réactions de la photodégradation de la matière organique. Son association avec l’apatite poreuse pourra contribuer à l’amélioration de la qualité du procédé de dépollution des eaux usées. En effet, la bonne qualité photochimique de TiO2 et la réactivité de surface de l’apatite avec les substances organiques toxiques activent la dégradation de ces dernières et l’adsorption de leurs métabolites sur la surface poreuse de l’apatite. Dans ce contexte, nous avons préparé et caractérisé différents composites du système mixte « TiO2-apatite » en utilisant un procédé d’élaboration économique et original. En conséquence, le présent mémoire que nous présentons est composé de trois parties: Une mise au point bibliographique initiale constitue la première partie qui est consacrée aux -2- travaux de recherche sur les propriétés physico-chimiques des apatites, et plus particulièrement celles des apatites fonctionnalisées. Elle présente également les réactions chimiques pouvant avoir lieu entre une suspension de particules solides et des espèces organiques et inorganiques, pour conclure que les interactions entre les apatites fonctionnalisées et des cations divalents sont favorisées. Le premier chapitre contient un rappel détaillé sur le devenir des ions métalliques dans les écosystèmes et les procédés d’élimination de ces ions, en particulier par les apatites. Dans le second chapitre de cette partie, nous rappelons les caractéristiques structurales des apatites et les différentes possibilités de substitution ainsi que la modification de leur surface. La deuxième partie de ce manuscrit constitue la première partie expérimentale de ce travail sur la fonctionnalisation de la surface des apatites à application environnementale. Elle est subdivisée en deux chapitres : le chapitre III est consacré à la préparation et la caractérisation des matériaux à surfaces nanostructurées fonctionnalisées par l’aminotriméthylenphosphonate. Nous avons préparé les apatites hybrides organiques inorganiques par deux voies de synthèse basées sur des précurseurs naturels et commerciaux. Les matériaux hybrides ainsi synthétisés ont été caractérisés par différentes techniques physico-chimiques adéquates à savoir, la diffraction des rayons X, l’infrarouge, l’analyse thermique (ATG/ATD), l’analyse chimique et élémentaire, la mesure de la surface spécifique (BET), la RMN de 31 P et 13 C à l’état solide et la microscopie électronique à transmission (MET). L’association de l’apatite avec l’oxyde de titane pour former des composites du système mixte TiO2-Apatite est décrite dans le quatrième chapitre de ce mémoire, montrant la modification des surfaces des matériaux préparés par le procédé sol-gel. Nous avons ensuite cherché à déterminer le pouvoir adsorbant des apatites naturelles et synthétiques fonctionnalisées par l’aminophosphonate. En effet, la troisième partie de ce travail est consacrée d’une part à l’immobilisation des ions métalliques contenus dans des solutions aqueuses et d’autre part à l’étude de l’adsorption des porphyrines hydrosolubles par des apatites poreuses. L’étude relative à l’élimination des ions Pb2+ et Zn2+ par des surfaces des apatites hybrides fait l’objet du cinquième chapitre de ce manuscrit. Les propriétés d’adsorption des porphyrines hydrosolubles sur les apatites poreuses préparées en milieux aqueux et éthanol - eau et l’étude de leurs isothermes d’adsorption sont décrites dans le sixième chapitre de ce travail. -3- Enfin, notre mémoire se termine par une conclusion générale dans laquelle nous soulignons la performance des matériaux préparés vis-à-vis de la fixation des substances nocives contenues dans des solutions aqueuses. -4- Partie I Généralités sur la gestion des métaux lourds et leur élimination par des solides poreux et fonctionnalisés -5- Les métaux lourds sont des micropolluants à l'origine de nuisances même quand ils sont rejetés en quantités très faibles. Leur toxicité se développe par bioaccumulation. L'industrie est responsable de la quasi-totalité des rejets de métaux lourds dans l'eau. La nécessité de réduire ces rejets n'est plus discutée. Leur impact environnemental dépend des réactions chimiques dans le milieu aquatique (réactions liées à l'acidité, l'alcalinité, la température, l'oxygénation...). On distingue une variété de procédés d'élimination des métaux lourds des solutions aqueuses tels que la précipitation, la filtration, l’échange ionique et l’adsorption. Parmi ces procédés, l'adsorption est un traitement efficace par l’utilisation des systèmes poreux et fonctionnalisés. Les apatites sont, en particulier, des systèmes complexes et ont donné preuve à l’élimination des ions métalliques, tels que les Pb2+, des solutions aqueuse. Ainsi dans cette partie, nous rappelons le comportement physico-chimique de l’ion métallique (soluté) dans la solution aqueuse et ses conséquences environnementales ainsi les caractéristiques physiques, structurales et texturales des adsorbants pour interpréter l’immobilisation des polluants à la surface d’un adsorbant. Après avoir passé en revue le comportement des métaux dans le milieu aquatique et leurs conséquences sur la santé humaine, les différentes possibilités de modification chimique des apatites seront exposées dans cette partie. A partir de cet état de l’art, les problématiques soulevées par cette thèse seront énoncées. -6- Chapitre I Comportement physico-chimique des métaux dans l’environnement -7- Introduction Le renforcement des normes de qualité de l’eau entraîne le développement de nouveaux procédés de son traitement. Les ions métalliques peuvent être naturellement en concentration très supérieure à la norme. Pour chacun de ces éléments, les procédés de traitement diffèrent selon la nature de l’eau usée traitée. L’utilisation d’un tel procédé de traitement est basée sur sa fiche technique, caractérisant ses avantages et ses inconvénients. Les procédés peuvent être classiques, membranaires, biologiques ou encore basés sur l’échange ionique ou l’adsorption sélective. Les alternatives en l’absence de traitement sont la recherche de nouveaux matériaux et le développement de nouvelles techniques de traitement. Plusieurs aspects des procédés ont été décrits dans ce travail, qui s’inscrit dans le cadre de cette problématique. Il repose sur des études expérimentales et modélisation de transfert des métaux dans les matrices récepteurs. Dans cette étude biobibliographique, nous identifions les réactions de transferts des ions métalliques dans les solides poreux et évoquer les mécanismes physico-chimiques globaux capables de décrire les phénomènes d’élimination des ions métalliques des solutions aqueuses. Depuis quelques années, les apatites sont notamment étudiées en tant que matrices de conditionnement pour stabiliser les déchets radioactifs [1], ou agent de dépollution des eaux et des sols contaminés par les métaux lourds [2-3]. I. Toxicité des métaux et leurs conséquences sur les écosystèmes Bien qu’ils soient des oligo-éléments grâce au rôle important qu’ils jouent dans les différents systèmes biologiques, les métaux tels Zn, Mn, Cu, Ni et Fe peuvent engendrer des effets toxiques lorsqu’ils sont présents en grandes quantités. Cependant, les ions Pb2+, Cd2+, Cr6+ et Hg2+ sont très toxiques même à l’état de traces [3]. Par conséquent, il est indispensable d’éliminer totalement ces ions présents dans les effluents industriels ou de réduire leur quantité au dessous de leurs normes dans différentes eaux (potable, irrigation, piscine, ….). Comme pour d’autres éléments, la toxicité d’un métal dépend étroitement de sa forme physico-chimique et donc de son environnement chimique. A titre d’exemple, le plomb se diffuse rapidement vers les différents organes comme le cerveau, les dents et les os par la circulation sanguine. La demi-vie du plomb dans les tissus mous et dans le sang est de 30 jours environ, mais elle passe de 1 à 10 ans dans les os [4-5]. En général, le plomb dans le corps humain se répartit comme suit : -1 à 2 % dans le sang -5 à 10 % dans les tissus mous (rein, foie, rate) -Plus de 90 % est fixé sur les os. -8- Le plomb a de nombreux effets toxiques sur la santé, qui sont basés sur sa concentration dans le sang ou plombémie sanguine. En effet, ce métal est responsable du saturnisme en cas d’exposition chronique. Il peut provoquer une grande fatigue, des troubles du comportement, de la mémoire, du sommeil, des systèmes immunitaires et reproducteurs, mais ses principaux organes cibles sont le système nerveux, les reins et le sang. En bloquant plusieurs enzymes nécessaires à la synthèse de l’hémoglobine, il entraîne une diminution du nombre de globules rouges en provoquant une anémie. De plus, le plomb passe facilement la barrière placentaire par diffusion, d’où le risque d’exposition prénatale. II. Sources et devenir des contaminants métalliques dans l’environnement II.1. Milieu aquatique Après leur rejet et leur transport jusqu’au milieu aquatique, les ions métalliques vont se distribuer entre les différentes formes dissoutes, complexées ou associées. L’association des métaux avec les systèmes poreux joue un rôle prépondérant dans leur mobilité et leur biodisponibilité via des mécanismes très complexes intervenant dans la mobilisation et la rétention de ces contaminants. La qualité des eaux reste malgré tout le reflet de l’intense activité anthropique et une part importante des cours d’eau, notamment à proximité des agglomérations, risque de ne pas atteindre le bon état écologique prévu par les organismes environnementaux. Les impératifs économiques de productivité et de rentabilité soumis aux industries d'extraction et de transformation des minerais en produits à plus haute valeur ajoutée sont le reflet de pollutions importantes par les métaux lourds, qui sont omniprésents dans notre société moderne [6]. Leur développement a contribué à rendre la vie plus facile par le biais de différentes technologies, mais les dangers afférents et encourus par l'humain et les récepteurs écologiques sont importants. Les concentrations en métaux dans les eaux usées sont très variables et dépendent des activités humaines. Il convient de distinguer les concentrations totales en métaux et les concentrations dissoutes, dont le majeur problème est rencontré dans le cas des ions métalliques libres Men+. La plupart des techniques classiques de traitement des eaux usées reposent sur les principes de précipitation, d’adsorption et d’échange ionique. L’étude du transfert des ions métalliques dans un système poreux nécessite la bonne connaissance de leur géochimie. Les phénomènes de précipitation - dissolution et d’adsorption - désorption exerce une influence déterminante sur la spéciation des métaux et leur mobilité vers la phase solide. -9- II.2. Contamination des sols par les métaux lourds et remédiation Le sol se définit selon le domaine d'intérêt ; c’est une entité bien définie et caractérisée aux plans morphologique, hydrique, minéralogique et biologique alors que le géologue le prend comme tout ce qui recouvre la roche mère [7]. L'approche environnementale décrit le sol à partir des interactions entre ses différents constituants, qu'ils soient inertes (eau, air, minéraux, etc.) ou sous formes d'êtres vivants, végétaux ou animaux. L'étude des sites et sols contaminés par les métaux est un des thématiques de recherche prioritaires. Aujourd'hui, la qualité des sols est soumise d'année en année à des règles plus strictes. La politique de décontamination des terrains fatigués a été instaurée dans divers pays. Les méthodes utilisées pour stabiliser les métaux lourds dans le sol se traduisent par plusieurs phénomènes, dont la majorité se déroule à l'interface adsorbant - espèce chimique susceptible d'être adsorbée. Ce phénomène mis enjeu à la dite interface est connu sous le nom d'adsorption. Les techniques biologiques semblent toutefois les plus prometteuses dans la mesure où elles ne nécessitent pas une excavation lourde (phytoremédiation), parce qu’elles ne nécessitent pas d’injecter dans le sol des solutions qui peuvent avoir un impact négatif sur la flore, les micro-organismes ou l’acidité du sol. De même, parmi les méthodes de stabilisation in situ des ions métallique dans le sol, l’utilisation des phosphates de calcium (apatites) est une méthode courante pour réduire la mobilité des métaux lourds dans les sols contaminés [8-11]. Elle est notamment considérée comme une méthode peu chère et très efficace pour le traitement des sols. L’ajout d’apatites permet la précipitation de certains ions pour former des phases solides phosphato-métalliques peu solubles et géochimiquement stables. A titre d’exemple, l’importante différence de solubilité entre les phases Ca10(PO4)6(OH)2 (Ks=6,62 10-126) [12] et Pb10(PO4)6(OH)2 (Ks=3,98 10-153) [13] sert de force motrice de la dissolution de l’hydroxyapatite. Les phosphates libérés se combinent alors instantanément avec les cations Pb2+ pour former une pyromorphite moins soluble. Il est évident que les phénomènes de complexation et de précipitation sont les majeures réactions de remédiation in situ des sols contaminés par les métaux lourds. La décontamination des sols est un problème très complexe. Chaque technique dispose des avantages et des inconvénients en termes de temps, de coût, de préparation du sol, de transport et d’effets secondaires. Chaque site est unique et demande une meilleure - 10 - combinaison de ces méthodes en tenant compte des caractéristiques physico-chimiques, biologiques et hydrogéologiques du sol. III. Physico-chimiques des réactions à l’interface solide - liquide Les propriétés les plus importantes intervenant dans les réactions de précipitation, de complexation et d’échange ionique sont essentiellement la valence, la configuration électronique, le rayon ionique du cation ainsi que l’aptitude à être ionisé dans la solution. Par exemple, le cation Pb2+ est un acide au sens de Lewis, c'est-à-dire qu’il est susceptible d’accepter un doublet d’électrons provenant d’une base, pour former une liaison covalente. Mais c’est également une espèce chargée susceptible de réagir électrostatiquement avec des ions de signes opposés pour former une liaison ionique [14]. Le type de liaison est important car il permet de juger la stabilité du complexe fixé à une surface donnée. Le mode de fixation sur une surface poreuse est la création de liaisons covalentes entre le matériau et les ions métalliques. Le couplage covalent se fait généralement avec un matériau fonctionnalisé insoluble dans l’eau capable de complexer ou de précipiter les espèces métalliques en solution. Lorsque le matériau est fonctionnalisé par des substances complexantes, l’interaction solide- métal implique des sites favorisant la complexation avec la surface fonctionnalisée qui résulte de deux étapes. Elle consiste en l’activation de la surface peu active du matériau, afin de lui donner une nouvelle réactivité chimique pour retenir une bonne quantité du métal. La nature exacte des réactions chimiques impliquées dépend fortement du type de surface. Par analogie avec les surfaces de silice, les surfaces des apatites possèdent plusieurs sites actifs. Cette partie sera traitée en détail dans le second chapitre de cette partie. III.1. Hydrolyse du métal : cas des ions Pb2+ et Zn2+ En milieux aqueux, les cations métalliques existent sous une forme hydratée. L’attraction et l’organisation des molécules d’eau autour des ions sous l’effet des interactions dipolaires s’exercent sur plusieurs couches. Cependant, il convient de distinguer la première sphère d’hydratation, comprenant les molécules d’eau au contact du cation et des couches les plus éloignées. Par conséquent, l’écriture Me2+ est une simplification pour l’ion divalent hydraté ou complexé [Me(OH2)n]2+ [15]. Dans le cas du plomb, le nombre de coordination n vaut 6, ce qui permet de parler de complexe hexa-aquo [Pb(OH2)6]2+ de symétrie octaédrique. L’ion Pb2+ s’hydrolyse très rapidement. Des calculs de spéciation du plomb dans des eaux de - 11 - rivières montrent que des complexes carbonatés apparaissent prédominants pour des valeurs de pH supérieures à 6,5 et que pour des valeurs de pH inferieures à 6, l’espèce libre Pb2+ devient dominante [16]. Les molécules de la sphère d’hydratation peuvent perdre des protons et laisser place à des oxy et hydroxycomplexes. La réaction s’écrit alors pour un cation divalent Me2+ et de nombre de coordination « n » : Me(H2O)n+2 → MeOH(H2O) (n-1)+ + H+ La réaction est écrite plus simplement : Me2+ + H2O → MeOH+ + H+ Quelques valeurs de pK de métaux sont présentées dans le tableau I-1. Tableau I-1: Constante de première hydrolyse de quelques cations (pK) Cation Pb2+ Zn2+ Cu2+ Ni2+ Cd2+ pK 7,7 9,0 7,7 9,7 10,1 Les réactions de déprotonation s’opèrent successivement jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de molécules d’eau dans la sphère d’hydratation. En écriture simplifiée, on a donc une série d’équilibres du type [17]: Me2+ + H2O → MeOH+ + H+ MeOH+ + H2O → Me(OH)2 + H+ Me(OH)2 + H2O → Me(OH)3- + H+ D’après ces réactions, il apparaît un lien entre le pH et le degré d’hydrolyse du métal. La figure I-1 présente les courbes de distribution de plusieurs espèces Pb2+ hydroxylées en fonction du pH. - 12 - Figure I-1 : Courbe de distribution des espèces Pb2+ hydroxylées en fonction du pH d’après les travaux de S. Montinaro et coll. [7]. III.2. Complexation des ions métalliques aqueux Les cations métalliques peuvent réagir avec des ligands présents dans la phase aqueuse pour former des complexes [18-20]. Les ligands sont des atomes possédant une paire d’électrons libres, généralement des éléments non métalliques et électronégatifs donneurs d’électrons comme O, N, et S. Les réactions de complexation entre un métal divalent et un ligand sont de la forme : Me2+ + L- → L - Me+ Celles-ci sont décrites par la constante de formation KMeL, elle-même définie par rapport aux activités des ions en solution : K MeL [MeL+ ] = [Me 2+ ][L- ] Cette constante de formation, donnée par Ringbom [21], est une mesure de la stabilité du complexe. Le taux de complexation dépend donc de la concentration en métal et en ligand. Deux types de complexes sont distingués : - Le complexe de sphère interne, si le ligand est en contact direct avec le métal ; - Le complexe de sphère externe, si une ou plusieurs molécules d’eau sont interposées entre le métal et le ligand. La détermination de la spéciation des métaux en phase soluble est particulièrement importante car les espèces complexées ainsi formées peuvent à leur tour réagir ou non avec les solides [22]. Par exemple les hydroxy-complexes de métaux s’adsorbent plus fortement - 13 - que les ions libres [23], alors que les complexes formés avec les ions chlorures s’adsorbent moins que les ions libres [24]. III.3. Interactions avec les carbonates et les phosphates L’ensemble des associations se produit le plus souvent lorsque les métaux quittent la solution aqueuse pour interagir avec les groupements présents en solution ou ceux de la surface d’un système poreux [25-27]. Les carbonates et les phosphates jouent un rôle important dont leur surface est le siège de phénomènes de sorption des ions métalliques [2830]. Leur présence dans le système liquide-solide contrôle particulièrement le pH. Cependant, au-delà de l’adsorption à la surface, il peut aussi se produire une précipitation des cations métalliques Me2+ avec les carbonates CO32- [31-33]. Des études ont ainsi montré que le plomb était capable de s’adsorber à la surface de la calcite et d’occuper les sites du calcium, malgré les différences de rayons ioniques entre le plomb et le calcium. D’autres associations sont possibles avec les phosphates. J. O. Nriagu et coll. [34] ont démontré qu’un phosphate de calcium est un minéral stable très peu soluble, et qu’il est capable de fixer les métaux dans les sols selon plusieurs mécanismes. D’autres chercheurs comme G. Sarret et coll. [35] ont étudié la solubilité des phosphates et montré que la formation de certains minéraux affecte non seulement la mobilité du métal, mais également sa phytodisponibilité. III.4. Interactions avec les amines et carboxylates De nombreux travaux de recherche ont permis de mettre en évidence l’affinité des espèces organiques pour complexer les ions métalliques [36-39]. Les métaux se complexent à des matières organiques de poids moléculaires variables. Les interactions entre les cations métalliques et des groupements fonctionnels tels que -COOH (carboxyles), -NH2 (amines), C=O (carbonyles) et -N-H (imines). Le plomb réagirait avec les acides organiques selon les réactions suivantes : R-COOH + Pb2+ → R-COOPb+ + H+ ou R-OH + Pb2+ → R-OPb+ + H+ Avec R-COOH: acide carboxylique; R-OH: alcool ou phénols (ligands organiques). - 14 - D’autres fonctions peuvent fixer des métaux, telles que des acides organiques de faible poids moléculaire (acide acétique, oxalique..), des sucres, des protéines, des phosphates et des phosphonates. III.5. Immobilisation des cations métalliques par une surface D’après B.J. Alloway [40], les cations métalliques et les groupes fonctionnels de la surface solide peuvent interagir selon trois modes pour former (Figure I-2) : * un complexe de surface de sphère interne : l’ion ou la molécule adsorbé est en contact direct avec les groupes fonctionnels de surfaces ; * un complexe de surface de sphère externe : une ou plusieurs molécules d’eau s’interposent entre l’ion et les groupes fonctionnels ; * une nuée d’ions diffus : l’ion hydraté ne forme pas de complexe avec un groupement fonctionnel de la surface chargée, mais neutralise une charge de signe opposé appartenant à la surface adsorbante. Figure I-2 : Modèle d’interface solide-soluté. PIH et PEH désignant respectivement le plan interne et le plan externe de Helmotz. Les complexes de sphère externe et la nuée d’ions diffus sont généralement liés par des forces électrostatiques. Ils sont moins stables que les complexes de sphère interne qui font intervenir des liaisons de type chimique. La charge électrique totale d’un minéral peut se décomposer en deux termes, la charge intrinsèque et la charge de surface variable. Dans le - 15 - premier cas, la charge est conditionnée par la structure et plus particulièrement par les substitutions isomorphes dans le réseau cristallin. Cette charge est fixée et indépendante de la composition de la solution. Dans le deuxième cas, la charge créée par la protonation ou la déprotonation des sites fonctionnels est différente de celle causée par les réactions chimiques entre les groupes fonctionnels de surface et les ions présents dans la solution. Les ions adsorbés peuvent être des ions constitutifs de la structure du solide ou des ions spécifiques. Ces derniers possèdent une affinité pour la surface de nature chimique et non électrostatique. Ils peuvent s’adsorber sur une surface non chargée ou de signe opposé. Cette interaction dépend de la nature de l’ion adsorbé. III.6. Mécanismes d’interaction solide - métal Plusieurs phénomènes physico-chimiques interviennent au cours des transferts du soluté vers la phase solide ou inversement, en particulier l’adsorption, l’échange ionique, la complexation et la précipitation. Ces processus physico-chimiques peuvent intervenir simultanément, avec plus ou moins une grande importance sur l’interaction totale entre les cations métalliques et la phase solide. III.6.1. Adsorption D’une manière générale, l’adsorption se définit comme un processus résultant en une accumulation nette d’une substance à l’interface entre deux phases, selon un arrangement en deux dimensions. Selon les liaisons chimiques mises en jeu, deux types d’adsorptions peuvent être distingués : l’adsorption spécifique et non spécifique. III.6.1.1. Adsorption non spécifique L’adsorption physique non spécifique, correspond à la compensation de la charge de surface du solide par des ions hydratés (contre-ions) situés dans la couche diffuse. Ces derniers ne forment pas de complexes avec les groupes fonctionnels de surface et sont généralement désignés comme des ions indifférents. Cette interaction est conditionnée uniquement par la valence du cation métallique et la charge surfacique de la particule solide. Les liaisons mises en jeu sont faibles et du type électrostatique. Ce mécanisme dépend du pH qui contrôle la valeur et la densité des charges de surface et détermine l’activité des protons qui peuvent entrer en compétition avec les cations métalliques pour accéder aux sites de surface. - 16 - III.6.1.2. Adsorption spécifique L’adsorption spécifique est assimilable à la formation d’un complexe de sphère interne, c'est à dire que le soluté et les sites de surface sont en contact direct. Elle correspond à la mise en place d’une liaison chimique entre les atomes donneurs d’électrons de la surface (ligands de surface) et les solutés accepteurs d’électrons (ions spécifiques); ce qui indique alors la chimisorption. Les trois principaux types de liaisons chimiques entre atomes sont : * Ionique : un transfert d’électrons s’opère entre les atomes, l’attraction électrostatique de ces ions de charges opposées assure la liaison du composé. * Covalente : partage plus ou moins égal d’électrons. * Covalente de coordination : les électrons partagés proviennent d’un seul des atomes partenaires. Compte tenu de la nature des liaisons mises en jeu, les complexes formés sont très stables, rendant les cations difficilement échangeables. Ce type de réaction est donc largement conditionné par la structure électronique du cation métallique et celle des groupes fonctionnels de surface. L’adsorption spécifique est fortement dépendante du pH et reliée à l’hydrolyse des ions métalliques. Les métaux particulièrement capables de former des hydroxy-complexes sont plus spécifiquement adsorbés sur les surfaces déprotonées chargées négativement. Selon Valsami-Jones et col. [41], les cations aisément hydrolysables tels que Pb2+, Zn2+ et Cd2+ peuvent s’adsorber sur les apatites à pH acide. Le processus peut alors procéder par l’adsorption de complexes hydrolysés par la surface : ≡S-OH + [M(OH2)6]z+ → ≡S(-O)n-M(OH2)6-n(z-n)+ + n H3O+ La libération des entités acides a été largement mise en jeu par le suivi du pH au cours du processus d’adsorption sur des surfaces hydroxylées. Ces auteurs ont montré qu’il y a une compétition ente les protons des groupements P-OH situés à la surface des apatites naturelles et synthétiques et les ions métalliques en solution. - 17 - III.6.2. Echange ionique L’échange ionique constitue une étape particulière après l’adsorption. Une réaction d’échange ionique est le remplacement d’un ion adsorbé par un ion de la solution. Elle peut être schématisée par l’équilibre suivant : ≡S-(M2+) + (Me2+)solution → ≡S-(Me2+) + (M2+)solution Avec * ≡S-(M2+) et S-(Me2+)surface sont respectivement les ions M2+ et Me2+ retenus à la surface ≡S du solide avant et après le processus d’échange ionique. * (Me2+)solution et (M2+)solution sont les ions en solution. L’échange ionique est un phénomène de surface qui est par nature stœchiométrique, isoionique ou hétéro-ionique, et pouvant impliquer des réactions de physisorption mais également de chimisorption. Ce processus est largement rencontré lors la rétention des métaux lourds par les apatites qu’elles soient naturelles ou synthétiques [42]. En effet, la libération des ions Ca2+ de la surface de l’apatite vers la solution et la fixation du métal nocif indique la contribution des réactions d’échanges ioniques. Plusieurs facteurs peuvent avoir une influence sur le rendement des réactions d’échanges ioniques en particulier la nature du métal et de la surface de l’adsorbant. En effet, la rétention des ions Zn2+et Cu2+ sur l’hydroxyapatite ne libère pas assez d’ions Ca2+ comparés au cas de l’adsorption du plomb. De même, la fixation des ions métalliques par des surfaces fonctionnalisées par des amines ne favorise pas le processus d’échange ionique. III.6.3. Précipitation à la surface La précipitation est considérée comme le phénomène le plus important, après l’adsorption, parmi l’ensemble des processus de rétention des métaux lourds par les particules solides. Elle conduit à la formation d’une nouvelle phase. La précipitation, généralement après dissolution, correspond au passage d’une espèce de l’état dissous à l’état solide selon l’équilibre général : nMem+(aq) + m Ln-(aq) → MnLm(s) Le précipité formé s’édifie en deux phases : la nucléation (formation du noyau de cristallisation stable) et la croissance du cristal. On distingue alors la nucléation homogène, - 18 - qui correspond à la formation du noyau en solution, et la nucléation hétérogène où le noyau germe sur la surface des particules minérales [43-44]. IV. Elimination des métaux lourds par les solides poreux L’intérêt porté à la contamination des eaux souterraines, des nappes phréatiques et des sols par les métaux lourds et les molécules nocives provenant des déchets industriels est de plus en plus accru, à cause de l’effet indésirable de ces entités chimiques sur la santé des êtres vivants, et sur le déséquilibre des écosystèmes. C’est pourquoi leur élimination s’avère de plus en plus primordiale afin de préserver notre environnement. Il existe plusieurs adsorbants déjà utilisés dans le but d’éliminer les substances nocives issues des effluents industriels. Parmi eux on distingue les argiles, les charbons actifs, la silice poreuse et ses dérivées et les phosphates de calcium. IV.1. Les argiles L’argile est une roche sédimentaire riche en feldspath, composée par une diversité de minéraux spécifiques. Ses composants majeurs sont l’oxyde d’aluminium (environ 40%), l’oxyde de silice (environ 46%) et l’eau (environ 14%). Leur structure feuilletée est sous forme des phylosilicates d’aluminium constitués de couches d’octaèdres Al(OH)6 et de couches de tétraèdres SiO4. Les argiles ont la propriété d’adsorber certains anions et cations échange ionique [45-46]. De nombreux travaux ont montré que les cations s’apprêtent plus que les anions à cet échange ce qui prouve la prédominance des charges négatives sur la surface des particules argileuses. La capacité d’échange cationique dépend de la liaison adsorbat- adsorbant, du temps de contact et surtout de la surface développée. Grâce à leurs propriétés d’adsorption et leur capacité d’échange cationique intéressante, plusieurs types d’argiles sont utilisés dans l’épuration des effluents industriels tels que la montmorillonite, la bentonite et la kaolinite. IV.2. Les charbons actifs Le charbon actif est une poudre noire constituée essentiellement de matière carbonée à structure microporeuse. Le charbon actif fait parti d’une gamme de solides présentant une très grande porosité et une surface spécifique importante variant de 500 à 1500 m2/g. Il peut être obtenu à partir d’un grand nombre de matériaux carbonylés (bois, charbon, noix coco, résidus pétroliers, etc…) suite à des processus de carbonisation suivis des processus d’activation dûment contrôlés. - 19 - Des études sur la capacité d’adsorption du charbon actif vis-à-vis des métaux lourds [47-48], ont montré que le charbon actif sous ses diverses formes, peut adsorber des métaux lourds ayant une concentration initiale inférieure à 10 mg/L. En raison de son coût qui reste relativement élevé, les industriels ont des réserves sur son emploi comme produit pour le traitement de leurs effluents inorganiques ouvrant ainsi la voie à la découverte d’autres adsorbants dérivant de plusieurs sources telles que les déchets agroalimentaires et les phosphates naturelles et synthétiques. L’adsorption sur le charbon actif est actuellement l’un des procédés les plus utilisés pour éliminer les composés organiques ainsi que quelques métaux lourds. IV.3. La silice poreuse et ses dérivées La silice de formule chimique SiO2, peut provenir naturellement de l’écorce terrestre où peut être synthétisée, sous différentes formes, comme décrit dans la littérature. L’une des caractéristiques les plus importantes de la silice est surtout sa porosité. Cette dernière caractéristique a surtout lieu quand les particules discrètes formant la silice sont compactées et cimentées entre elles, laissant des espaces vides et des interstices, connus comme étant les espaces poreux. De nombreuses études ont été réalisées sur l’élimination des métaux lourds par des silices modifiées [49]. IV.4. Les phosphates de calcium De nombreuses études ont été réalisées pour évaluer le pouvoir de rétention des phosphates naturels et les apatites synthétiques vis-à-vis des métaux lourds contenus dans les sols et les eaux. Les propriétés de rétention de ces phosphates de calcium dépendent de leurs caractéristiques physico - chimiques, en particulier le rapport molaire Ca/P, de la structure cristallographique et de la surface spécifique. Ainsi, en fonction du rapport molaire Ca/P, nous pouvons définir plusieurs familles d’orthophosphate de calcium. L’hydroxyapatite Ca10(PO)6(OH)2 de rapport atomique Ca/P égale à 1,67 a été largement étudiée grâce de ses propriétés physico-chimiques intéressantes, notamment la capacité d’adsorption et l’échange ionique. Elles sont capables d’immobiliser différentes espèces inorganiques et organiques [2, 28, 42, 50]. - 20 - Le processus de rétention des métaux nocifs par les apatites qu’elles soient naturelles ou synthétiques fait intervenir les mécanismes suivants : - Le processus d’échange ionique à la surface, - La complexation des ions à la surface en faisant intervenir les groupements P-OH, - La précipitation de quelques composés amorphes métal-phosphate. La détermination d’un tel mécanisme responsable de la rétention est encore difficile, mais il apparaît qu’une combinaison de plusieurs mécanismes peut avoir lieu simultanément. L’étude de la rétention des ions métalliques sur les apatites est conditionnée par plusieurs paramètres à savoir le pH, la température, la concentration initiale du métal, le temps de contact, les rapports molaires métal/Ca et P/métal et la surface spécifique de l’adsorbant. Au cours de cette partie consacrée à la description des méthodes physico-chimiques les plus répondues pour le traitement des substances nocives, nous rappelons que chacune de ces techniques possède ses avantages et ses inconvénients, et qu’elles n’existent pas de techniques universelles permettant de piéger tous les métaux lourds présents dans un effluent industriel. Le choix d’une technique reste lié au coût du processus qui ne doit pas être onéreux. D’ailleurs, les techniques de traitement par adsorption sont avérées les meilleures à adopter puisqu’elles mettent en jeu pour la plupart du temps des produits naturels ou des sous–produits émanant des industries agricoles et agroalimentaires. La disponibilité et l’abondance locale de l’adsorbant sont aussi des facteurs déterminants pour le choix d’une telle application. Différentes matrices sont actuellement utilisées ou en cours du développement du processus de son utilisation, pour stabiliser des déchets provenant de diverses origines : cations métalliques et substances organiques. Parmi celles-ci, les hydroxyapatites sont couramment étudiées pour piéger et stocker les métaux lourds contenus dans les effluents liquides. Notons que les propriétés d’adsorption sont liées aux propriétés structurales. Dans cet aperçu bibliographique, nous présentons ainsi la structure de l’apatite et les substitutions possibles. Conclusion Les études menées jusqu’à présent sur le piégeage des ions métalliques fournissent énormément d’hypothèses, très peu d’entre elles prennent en compte les propriétés - 21 - particulières des techniques de traitement. En fait, les difficultés rencontrées par les auteurs pour déterminer le mécanisme de fixation des ions métalliques par la plupart des adsorbants sont certainement liées à leur manque de connaissance du système solide/solution. Ainsi, la réactivité de la surface des minéraux est très souvent confondue avec celle des sites cristallographiques. Enfin, la plupart des auteurs ont utilisé la technique d’adsorption en colonne ou en batch pour étudier certaines interactions chimiques soluté - solide. La détermination du mécanisme de piégeage des cations métalliques par un système poreux passe nécessairement par la maîtrise de chacun des composants du système, et plus particulièrement l’activation et la caractérisation de la surface du matériau à étudier. La synthèse et la caractérisation fine de nouvelles apatites fonctionnalisées ou hybrides constituent donc une étape essentielle de nos travaux de recherche. - 22 - Chapitre II Structure des apatites et fonctionnalisation de leur surface - 23 - Introduction Les phosphates apatitiques appartiennent à une vaste famille de biomatériaux appliqués en odontologie, oto-rhino-laryngologie, revêtements de prothèses et l’élaboration de substituts osseux. Ils possèdent des propriétés d’adsorption vis-à-vis des composés organiques (acides aminés, protéines, pesticides,…) et inorganiques (métaux lourds, fluorures,…). Ils sont utilisés comme support pour la chromatographie en phase liquide de haute performance (CLHP) lors de la séparation de divers composés biologiques (ADN, ARN). L’ensemble de ces applications peut être en relation avec la réactivité des ions constitutifs du réseau apatitique et les propriétés de surface. Le contrôle de leur surface apparaît très utile afin de maîtriser leurs propriétés d’adsorption qui dépendent essentiellement des sites actifs à la surface du solide. Les traitements de surface, par adhésion ou greffage in situ des molécules, sont des traitements ayant pour but de modifier les propriétés physiques et/ou chimiques des matériaux (Biomatériaux ou Adsorbants), qui engendrent des réactions chimiques à la surface des dits matériaux. Ces modifications chimiques de la surface permettent d’obtenir des propriétés modifiées et souvent améliorées. Parmi celles ci, nous pouvons noter la solubilité du matériau fonctionnalisé, l’accroissement de la charge à la surface, les fortes interactions des molécules surface-liquide, le caractère l’hydrophile/ hydrophobe d’une surface ou d’une entité adsorbée à cette surface, morphologie et homogénéité de la surface modifiée. Dans ce chapitre, nous nous sommes intéressés plus particulièrement à l’adsorption des espèces organiques et inorganiques sur des surfaces modifiées d’apatites. Cependant, il est très utile de donner un bref rappel relatif à la structure des apatites et les substitutions possibles dans le réseau apatitique. L’adhésion et le greffage des molécules organiques à la surface des hydroxyapatites sont aussi discutés dans ce chapitre. I. Rappel sur les propriétés structurales des apatites I.1. Structure des apatites L'apatite cristallise dans le système hexagonal du groupe spatial P6 / m [51-52], 3 caractérisé par un empilement quasi compact des groupements phosphates, qui forme deux types de tunnels parallèles à l'axe c. Le premier coïncide avec l’axe ternaire de la structure. Ces tunnels sont occupés par des ions calcium notés Ca(I). Le second type de tunnel, dont - 24 - l’axe coïncide avec l’axe sénaire hélicoïdal du réseau, est bordé par les atomes des autres ions calcium, notés Ca(II), et occupé par les ions OH-. La taille de ce dernier tunnel (3 Å pour l’hydroxyapatite phosphocalcique, notée HAp) confère aux apatites des propriétés d’échangeurs d’ions. Ces substitutions engendrent des variations de cristallinité, de stabilité thermique et de solubilité. En tenant compte des deux sites cristallographiques des atomes de calcium Ca(I) et Ca(II), on peut donc représenter l’hydroxyapatite phosphocalcique par la formule suivante : [CaI]4[CaII]6(PO4)6(OH)2. Figure II-1 : Projection de la structure de l’hydroxyapatite phosphocalcique sur le plan de base (001), illustrant l’environnement des atomes Ca(I) et Ca(II) dans la pseudo maille de l’apatite. I.2. Substitutions dans le réseau de l’apatite La principale caractéristique de la structure apatitique est d’admettre un grand nombre de substitutions, qui laissent inchangé la structure cristallographique, mais lui confère des propriétés physico-chimiques intéressantes [53-54]. Des substitutions les plus simples et les mieux connues dans le cas de l’apatite concernent les ions OH-, qui peuvent être remplacés, partiellement ou totalement par des ions F- et Cl- pour former respectivement la fluorapatite et la chloroapatite. L’hydroxyde OH peut être remplacé par d’autres groupements bivalents (O2-, S2-, CO32-) ou par des lacunes. La formation de lacunes dans les sites OH peut être très importante surtout dans l’amélioration des propriétés conductrices, catalytiques et - 25 - d’adsorption. Les sites cationiques acceptent de multiples substitutions allant de l’élément monovalent au trivalent avec différentes tailles cationiques. Plusieurs séries d’apatites ont été préparées en particulier la pyromorphite Pb10(PO4)6X2, (X=F, OH, Cl..) [54] et une variété de composés des solutions solides Ca10-xMx(PO4)6(OH)2 (M= Pb, Zn, Cu, Ni… ). La présence des tunnels dans la structure de l’apatite donne à ce matériau des propriétés d’échanges d’ions et d’adsorption. Exemples de substitutions dans la structure apatitique I.3. Méthodes d’élaboration des apatites En raison de nombreuses applications de l’hydroxyapatite, que se soit dans le domaine médical comme substituts osseux ou dans le domaine environnemental comme adsorbant de métaux toxiques, plusieurs méthodes de synthèse ont été mises en œuvre [55-59]. Les synthèses de l’hydroxyapatite s’opèrent soit par voie sèche où les précurseurs sont mélangés à l’état solide ou en milieu humide en utilisant des réactifs en solution. La synthèse chimique par voie humide est la méthode la plus utilisée. Elle regroupe plusieurs techniques, nous ne citons que celles les plus répondues dans la littérature à savoir la double décomposition, la neutralisation, l’hydrothermale et le sol gel. Ces méthodes de synthèse des apatites sont bien décrites dans le mémoire de thèse de S. El Asri [50]. De nombreux paramètres tels que, la température de la réaction de synthèse, le pH de la solution, le temps de maturation doivent être parfaitement contrôlés afin de maîtriser la stœchiométrie des poudres synthétisées. Par ailleurs, la plupart de ces apatites sont parfois modifiées selon leurs applications visées. Néanmoins, la fabrication des apatites mésoporeuses à vocation environnementale - 26 - nécessite l’utilisation d’un protocole expérimental spécial afin d’introduire des modificateurs de surface organiques ou inorganiques. Dans ce contexte, plusieurs études se sont intéressées à la modification de la surface des apatites afin d’améliorer plus particulièrement leurs propriétés d’adsorption et d’échanges ioniques. II. Modification des surfaces des apatites II.1. Apatite à caractère médical Les hydroxyapatites phosphocalciques, utilisées comme biomatériaux, doivent posséder à la fois des propriétés structurales adaptées à la fonction attendue et des propriétés superficielles garantissant l'instauration de relations positives à l'interface implant - tissus. Il faut signaler, tout particulièrement, que l'hydroxyapatite (HAp) présente l'avantage d'être ostéo-conducteur. Elle favorise la repousse osseuse au contact et la colonisation par l'os, mais dont l'agencement spatial en diffère notablement puisque des cristaux d'hydroxyapatite y sont accolés à des fibres de collagène. En outre, les hydroxyapatites poreuses sont biorésorbables. Le principal problème rencontré avec l'HAp est de pouvoir synthétiser une HAp ayant juste la taille de pores idéale pour qu’une bonne colonisation se fasse. On peut greffer dans leur matrice des espèces chimiques ou biologiques capables d’interagir avec le tissu vivant. Nous donnons à titre d’exemple des protéines, des peptides, des polymères ou des cellules, qui peuvent avoir un effet positif en surface. La figure II-2 schématise l’échange des espèces qui peut avoir lieu au contact apatite-solution. Dans le domaine médical, cet échange favorise certaines réactions chimiques au niveau de l’interface « os-implant ». Figure II-2 : Schéma représentatif de l’échange des ions lors du contact apatite -solution - 27 - De nombreuses études ont été axées sur la biocompatibilité et la biofonctionnalité des hydroxyapatites pour adapter chimiquement les surfaces de celles-ci et répondre aux contraintes biochimiques et biomécaniques qui reposent sur des réactions cellulaires ou tissulaires au contact quasichimique avec le tissu osseux. Okazaki et col. [60] ont étudié l’adhésion des substances de l’acide désoxyribonucléique ADN sur une surface d’HAp comme le montre la figure II-3. Le biomatériau ainsi obtenu présente une bonne réactivité entre les ions Ca2+ présents à la surface de l’HAp et les espèces ADN, qui se fixent sous forme d’arbre dendritique. Figure II-3 : Schéma représentatif de l’adhésion des molécules d’ADN à la surface de l’hydroxyapatite phosphocalcique. Une autre étude consacrée à l’adsorption des peptides sur les apatites a pu montrer la modification de la surface de l’apatite par les groupements petitidiques [61-62]. Achokan et col [63] ont aussi préparé selon différentes étapes des nanoapatites avec des surfaces greffées par des molécules combinées par l’acide folique, un acide aminé et un polymère (Figure II-4). - 28 - Figure II-4 : Schéma montrant les différentes étapes de la fonctionnalisation de la surface d’une nanohydroxyapatite nHAp. FA : acide folique, réactif aminé NHS, PEI polymère. De même, plusieurs chercheurs [64-65] ont étudié l’adsorption d’une variété d’acides aminés sur des apatites carbonatées dans le but d’avoir de nouvelles familles de biomatériaux utilisables dans la formulation des os artificiels. Ces auteurs ont ainsi montré qu’avec l’activité de ces acides aminés, les taux d’ostéocalcine sont augmentés sur les matériaux non fonctionnalisés. Ils ont aussi prouvé que les matériaux fonctionnalisés présentent plus de cellules adhérentes et une meilleure prolifération. Par conséquent, la réactivité surfacique des apatites poreuses a reçu une attention particulière grâce aux propriétés physico-chimiques intéressantes des matériaux fonctionnalisés. II.2. Apatite à plusieurs vocations Le greffage des molécules organiques sur la surface des apatites peut améliorer leur réactivité afin de les utiliser dans divers domaines médicaux et environnementaux. Deux méthodes de greffage sont proposées pour aboutir à ces apatites hybrides : • La première méthode consiste à l’adsorption des molécules à la surface de ces apatites, dans ce cas ces molécules sont facilement désorbées vers le milieu extérieur. - 29 - • La deuxième approche est le greffage in situ des molécules organiques par des liaisons covalentes avec les ions disponibles à la surface des apatites. Par cette méthode, les apatites hybrides sont utilisées, en particulier, comme agent fixateurs des éléments toxiques comme les métaux lourds, les colorants synthétiques et d’autres molécules organiques toxiques. Grâce à l’activation de leur surface, les apatites présentent aussi des propriétés catalytiques. II.2.1. Action des organophosphonates De nombreux travaux antérieurs sur la modification de la surface des oxydes (comme SiO2, ZrO2, et TiO2) par les organophosphonates ont été effectués afin d’améliorer leurs propriétés physico-chimiques [66-71]. En revanche, peu de chercheurs qui se sont intéressés à entamer des travaux sur les apatites hybrides organique - inorganique, qui présentent un grand intérêt dans le domaine du développement des propriétés médicales des biomatériaux (adhérence, porosité, biocompatibilité, ostéoconductrice,…..)[72] et environnementales (fixation des substances nocives). La grande réactivité des apatites avec son milieu réactionnel réside en la rétention d’ions ou de molécules, dans leur pouvoir extrême d’échange ionique et de complexation, par l’intermédiaire des groupements HPO42- et Ca-OH superficiels dans des environnements labiles. Plusieurs structures des phosphonates existent dans la littérature (Tableau II-1), mais leur réactivité, et par conséquent leur coût, diffère d’une structure à l’autre [73]. En effet, les aminophosphonates complexent facilement les ions métalliques que se soient du tissu cellulaire comme Ca2+, Mg2+ et Fe2+, ou les métaux lourds (Pb2+, Cd2+, Zn2+, Cu2+, …) qui peuvent être présents dans les rejets liquides. L’association des ions Ca2+ avec les composés phosphonatés (PP) est liée à la nature de la liaison effectuée dans les produits formés Ca-PP, dont la solubilité de ceux-ci diffère selon la nature et la longueur de la chaîne des groupements des phosphonates utilisés (Tableau II-1). - 30 - Tableau II-1 : Structure de quelques phosphonates et leur solubilité en présence d’ions Ca2+. Dans cette étude, l'ordre de l’insolubilité des précipités Ca-PP a été trouvé comme suit: BHMTPMP > PAPEMP > HDTMP>PBTCA > DTPMP > EDTMP > ATMP > HEDP. La présence des phosphonates dans des solutions biologiques ou autres joue un rôle important dans la performance d'inhibition de la formation du CaCO3 [74-75]. Dans d’autres études, l’addition des phosphonates ou aminophosphonates, comme agents dispersants parfaitement biocompatibles, limite l’agglomération des nanocristaux apatitiques par répulsion électrostatique et favorise la formation des suspensions colloïdales, tout en considérant la possibilité de la formation de complexes de type Ca(PP)2 au cours de la précipitation des nanoapatites (Figure II-5). Les résultats de ces études indiquent que les ions Ca2+ réagissent parfaitement avec les phosphonates et/ou aminophosphonates par des réactions de complexation et par conséquent inhibe la formation d’autres composés calciques indésirables. - 31 - Figure II-5 : Cliché de MET d’une apatite phosphocalcique de référence non colloïdale, non dopée, et préparée à 80°C. Plusieurs travaux de recherche se sont intéressés à la combinaison de deux précurseurs phosphorés inorganique et organique [76-77]. D’Andrea et coll. [77] ont pu modifier la surface des hydroxyapatites par fixation des acides n-alkyl et n-fluoroalkylphosphoniques RPO(OH)2 (R = n-C8H17, n-C18H37, et n-C8F17-(CH2)2). Sur la base de cette étude, ils ont montré que le taux de greffage de R-P(O)(OH)2 a un grand effet sur les propriétés de surface des matériaux modifiés. L’établissement des liaisons P-OH de la surface de l’apatite avec le groupement R-PO(OH)2 à greffer, a été aussi confirmé dans cette étude. Suite à l’étude RMN du phosphore à l’état solide, Agougui et col.[78] ont prouvé la présence de liaisons entre les groupements carboxylate et phosphonate de l’acide 2-carboxyléthylenephosphonique (HOOCC2H4PO(OH)2), et la surface de l’apatite. La figure II-6 illustre les types de liaisons proposées pour expliquer l’éventuelle interaction entre les groupements organiques et inorganiques avec la surface de l’apatite. - 32 - Figure II-6 : Mécanisme proposé pour expliquer les interactions des groupements R-P(O)(OH)2 avec la surface de l’apatite. De même, El Hammari et col. [79] ont pu greffer in situ de la matrice apatitique des alkyl et des phénylphosphonates et ont montré que la nature et la longueur de la chaîne carbonée influent largement sur les propriétés de surface des hydroxyapatites préparées à différents taux de greffage. La figure II-7 illustre l’interaction des ions Ca2+ avec les groupements phosphates et phosphonates. Figure II-7 : Mécanisme proposé du greffage de l’organophosphonate sur l’apatite. - 33 - Ces observations présentent un grand intérêt en biologie car elles apportent des éléments nouveaux pour mieux connaître la structure et le comportement des tissus calcifiés, os et dents. Il est en effet bien connu que ces tissus sont constitués d'une trame organique (collagène dans les os, kératine dans l’émail dentaire), étroitement associée à un phosphate de calcium complexe de structure apatitique. La forte liaison qui unit ces deux constituants a été établie tant à l'échelle macroscopique (comportement du collagène est fortement modifié par la présence du phosphate), qu’à l’échelle microscopique (taille des cristallites, porosité, …). II.2.2. Action d’oxydes mésoporeux : ZrO2, Al2O3, SiO2, TiO2 Les matériaux poreux se caractérisent par la modification facile de leur surface [81]. Ils incluent des oxydes de silicium, de zirconium, d’aluminium et de titane. Deux céramiques sont actuellement utilisées comme matériaux de têtes fémorales: l’alumine Al2O3 et la zircone ZrO2. Elles sont utilisées dans les têtes de prothèses de hanche, ainsi qu'en odontologie pour les implants dentaires [81-82]. Ces deux céramiques peuvent être combinées plus particulièrement avec l'hydroxyapatite afin d’améliorer les propriétés de leur réactivité avec le tissu vivant. En effet, les systèmes mixtes « oxyde-HAp » présentent l'avantage d'être ostéoconducteurs, et favorisent la régénération osseuse au contact et la colonisation par l'os. La céramique bio-inerte Al2O3-ZrO2 se caractérise par un mécanisme de renforcement par transformation de phase, qui est à l'origine de ses propriétés mécaniques exceptionnelles [8384]. Cette association est aussi à l’origine d’une excellente biocompatibilité et résistance à l'usure. De même, multiples travaux ont été réalisés sur le système mixte apatite-silice [8586]. Les apatites et les silices modifiées sont parmi les adsorbants les plus exploités actuellement comme le montre, entre autres les travaux de Silva et col. [82] sur l’immobilisation des métaux lourds des solutions aqueuses. Par contre, la combinaison de l’oxyde de titane avec l’apatite « TiO2-Apatite » est bien connue par sa spécificité dans le domaine des réactions de la photodégradation de la matière organique. Plusieurs études ont été aussi réalisées dans le domaine environnemental [87-89]. La présence des pores dans la structure apatitique aussi que la bonne qualité photochimique de TiO2 activent les réactions de la photodégradation des substances organiques. Dans ce contexte, nous allons préparer différents matériaux du système mixte « TiO2-apatite » en utilisant un procédé d’élaboration économique et original (Partie II - chapitre IV). - 34 - III. Applications environnementales : Apatite hybrides comme agents de dépollution des métaux Plusieurs matériaux fonctionnalisés ont déjà fait preuves pour la sorption des entités polluantes, en particulier les zéolites [90-91], le charbon actif [92-93] et la silice [39, 70] qui ont révélé des aptitudes à éliminer les métaux lourds provenant des solutions aqueuses. Le phénomène d’adsorption des métaux lourds par différents matériaux a été développé, en particulier le plomb qui est considéré parmi les éléments les plus toxiques et cancérigènes. Dans ce contexte des efforts significatifs sont déployés pour réduire aux plus bas degrés les concentrations en ions Pb2+ (µg/L) dans les eaux destinées à la consommation humaine. Généralement, les apatites possèdent des tunnels et des sites actifs à leurs surfaces responsables des phénomènes d’adsorption et d’échange ionique [94-96]. De nombreuses études concernant les propriétés d’adsorption des apatites se sont considérablement réalisées ces dernières années, puisque les besoins se sont aussi faits ressentir au niveau des techniques de séparation et d’immobilisation des polluants que ce soient organiques ou inorganiques [97101], dont les groupements P-OH sont responsables de l’adsorption. Ces études ont montré que les substances s’adsorbent d’une façon irréversible sur la surface de l’apatite par l’intermédiaire de leurs groupes P-OH. Divers procédés ont été utilisés pour l’élimination des différents polluants souvent rencontrés dans les eaux naturelles ou usées. Citons par exemple, la précipitation chimique, l’extraction liquide-liquide, l’échange ionique et l’adsorption sur des supports synthétiques ou naturels. La plupart de ces études portent sur l’élimination des polluants par les phosphates naturels et des apatites phosphocalciques pures et cristallisées. Deux travaux de recherches relatifs à la rétention des métaux lourds sur des surfaces d’apatites modifiées ont été engagés. Le premier a été réalisé par Oberto Da Silva et col. [102], qui ont élaboré des apatites greffées par des aminosilanes en vue d’une utilisation pour l’élimination des ions métalliques Cu2+ et Co2+ (Tableau II-3). Ces auteurs ont montré que la capacité de rétention augmente avec le nombre de fonctions amines dans l’aminosilane greffée. Ceci est lié aux réactions de complexation des amines avec les cations métalliques. Par conséquent, ce type de procédé de greffage améliore quelques propriétés physicochimiques en particulier celles de la biocompatibilité avec le tissus cellulaire et de l’adsorption des substances nocives. - 35 - Tableau II-3 : Effet du greffage sur la capacité d’adsorption des apatites modifiées, mené par Oberto da Silva et col. [102]. Apatites greffées Nature de R SBET Capacité de rétention 2 (mmol/g) (m /g) Référence HAp Cu2+ Co2+ - 58,0 0,69 0,30 NH2 15,5 1,50 1,28 11,0 1,80 1,48 5,0 1,98 1,66 HAp-(CH3)3Si(CH2)3R HN(CH2)2NH NH(CH2)2NH-(CH2)2NH Le deuxième travail, mené par Ulusoy et col [103], a été consacré à une étude sur les propriétés d’adsorption d’une apatite modifiée par le polymère polyacrylamide pour la rétention des ions Pb2+, UO22+ et Th4+. Ces études ont montré une bonne efficacité des apatites modifiées par ce polymère vis-à-vis des ions UO22+ et Th4+, contrairement aux ions Pb2+, dont leur capacité de rétention est relativement faible comparée aux valeurs décrites dans la littérature [94-95, 99]. Par contre, aucune étude sur les propriétés d’adsorption des métaux lourds sur des apatites greffées par des phosphonates ou des aminophosphonates n’a été entamée. Dans ce contexte, nous allons préparer des apatites modifiées par des aminophosphonates capables d’immobiliser les ions métalliques. Deux types de précurseurs de calcium et de phosphore ont été utilisés pour élaborer les apatites hybrides en présence des aminophosphonates. Le premier est classique et consiste à utiliser les réactifs commerciaux Ca(OH)2 et NH4H2PO4. Par contre l’utilisation du phosphate marocain permet d’obtenir des précurseurs naturels des dits réactifs. Cette dernière méthode de synthèse est plus économique surtout pour une application environnementale où nous devons avoir une quantité considérable d’adsorbant. Contrairement aux apatites greffées issues du phosphate naturel en présence des aminophosphonates, les hydroxyapatites synthétiques peuvent avoir une double vocation médicale et environnementale. Conclusion Les apatites présentent des propriétés structurales, d’adsorption et d’échange ionique qui peuvent contribuer à leur valorisation. Elles peuvent être utilisées comme biomatériaux et adsorbants. Cette étude bibliographique nous a permis ainsi d’entreprendre une étude sur la - 36 - modification de la surface de l’hydroxyapatite phosphocalcique par les groupements aminophosphonates afin de l’utiliser pour le traitement d’épuration des solutions aqueuses contaminées par des substances nocives en particulier les ions Pb2+. La détermination du mécanisme de piégeage du métal par l’hydroxyapatite phosphocalcique modifiée passe ainsi nécessairement par la maîtrise de chacun des composants du système, et plus particulièrement des caractéristiques de la poudre obtenue. La synthèse et la caractérisation fine de celle-ci constituent donc une étape essentielle de cette étude. - 37 - Partie II Fonctionnalisation de la surface des apatites à application environnementale - 38 - Chapitre III Synthèse et caractérisation des matériaux à surfaces nanostructurées fonctionnalisées par l’aminotriméthylenphosphonate - 39 - Introduction Les procédés de synthèse des apatites phosphocalciques stoechiométriques sont nombreux et largement étudiés [55-59]. Il est donc souhaitable de choisir une méthode de production économique n’engendrant que peu de réactifs moins coûteux d’une part, et aboutir à des poudres de grandes surfaces spécifiques d’autre part. L’objectif des sections présentées dans ce chapitre, relatif à l’étude des synthèses des apatites hybrides organique - inorganique est d’étudier leurs propriétés physico-chimiques selon deux voies de synthèse envisagées dans ce travail : - Synthèse à partir du phosphate naturel - Synthèse à partir des précurseurs commerciaux Ca(OH)2 et NH4H2PO4. Les applications de l’apatite sont basées sur ses propriétés telles que sa composition chimique, sa surface spécifique et la réactivité de sa surface. Ces caractéristiques peuvent se combiner à son aptitude à moduler les interactions physico-chimiques spécifiques par modification chimique de la surface. Par exemple dans le cas présent, il s’agit de moduler les propriétés de surface garantissant une bonne rétention d’espèces métalliques. Parmi les molécules qui peuvent être utilisées pour modifier la surface de l’apatite issue de divers précurseurs, il y a les organoaminophosphonates. La réactivité de cet aminophosphonate visà-vis des ions Ca2+ offre la possibilité d'hétérogénéité des précurseurs organiques via une polymérisation inorganique. Il en résulte la formation d'analogues de phosphates inorganiques, où l'un des atomes d'oxygène des tétraèdres PO4 est remplacé par une composante organique, en l'occurrence des ligands azotés. Cette étude doit permettre d’énoncer les conditions de synthèse optimales et économiquement viables en vue d’une production industrielle d’apatite hybride présentant une surface spécifique élevée qui laisse présager d’une forte réactivité des poudres vis-à-vis des métaux lourds en solution. Avant d’entamer la préparation des apatites hybrides à partir du phosphate naturel, il est souhaitable de rappeler les caractéristiques structurales et texturales du phosphate naturel Marocain, qui sera utilisé. La connaissance au préalable de la nature de composés et d’éléments contenus dans le minerai phosphaté est très importante parce qu’elle permet de déterminer exactement le type de traitement approprié à ce minerai. - 40 - I. Caractéristiques structurales et texturales du phosphate naturel Marocain Les phosphates naturels sédimentaires tiennent leur source des dépôts des excréments d'espèces marines sur fond océanique, généralement formés en zone côtière peu profonde. Les gisements exploités dans plusieurs parties du monde, se présentent avec des propriétés chimiques et physiques très contrastées, et les phosphates marocains sont de loin les plus importants aussi bien en quantité qu'en qualité [104-105]. Les phosphates naturels comportent une variabilité texturale et structurale suivant leurs origines. Le phosphore se trouve combiné sous différentes espèces minéralogiques [105]. Les gisements de phosphates du Maroc se localisent dans un certain nombre de bassins situés dans divers domaines géographiques. Pour réaliser notre objectif, nous nous sommes intéressés à l’étude des phosphates issus d’un nouveau gisement de la mine de Benguérir. La mise en valeur du phosphate de Benguérir permettra de produire de nouveaux matériaux phosphatés à vocation particulière. Le phosphate naturel, pris comme précurseur de base dans la synthèse des apatites hybrides inorganique - organique, doit avoir un profil structural bien déterminé. L’homogénéité de l’échantillon et sa granulométrie doivent être bien maîtrisées. I.1. Echantillonnage Un échantillon du phosphate naturel a subi un traitement préalable pour éliminer les impuretés associées aux minéraux phosphatés. On commence d’abord par la séparation granulométrique qui consiste en un lavage à l’eau selon la technique d’attrition suivi d’un tamisage en trois fractions, F1<100µ m, F2 comprise entre 100 et 400 µm et F3> 400 µm. Seule la fraction F2 riche en phosphate est conservée et séchée à l’étuve. Après cette opération, on procède au broyage avec tamisage qui permet de ramener la granulométrie du phosphate à une zone entre 63 et 125 µm. Cette dimension correspond à une norme couramment utilisée pour les catalyseurs. Ensuite la caractérisation physico-chimique de l’échantillon a été effectuée par différentes méthodes d’analyses qualitative et quantitative. I.2. Caractérisation du phosphate naturel I.2.1. Examen par diffraction des rayons X La diffraction des rayons X est une méthode d’identification des phases d’un composé cristallin. Elle donne des informations sur la pureté, la cristallinité et les valeurs des paramètres cristallographiques. Cette méthode d’analyse a été utilisée pour caractériser les différentes phases cristallines présentes dans le phosphate naturel étudié. L'analyse par diffraction des rayons X a été effectuée sur poudre dans les conditions ambiantes de - 41 - température et de pression. Le diffractomètre des rayons X utilisé est un appareil Philips PW131 équipé d'une anticathode de cuivre (λ=1,5454 Å) et piloté par un ordinateur pour le stockage et le traitement des données. La figure III-1 reporte les diffractogrammes du phosphate naturel étuvé à 100°C (brut) et calciné à 800°C. Les résultats de cette étude cristallographique montrent que les solides phosphatés cristallisent dans le système hexagonal de groupe d’espace P63 /m . Ils sont constitués d’une structure apatitique, comme constituante principale, accompagnée du quartz SiO2 et de la fluorine CaF2 surtout dans le cas du phosphate étuvé. La bonne résolution des pics de diffraction des RX traduit la bonne cristallinité du phosphate naturel. Le traitement thermique à une température de 800°C pendant 3 heures améliore la cristallinité de celui-ci, mais une disparition de quelques raies résiduelles attribuables au quartz-SiO2 que nous avons observé dans le phosphate naturel brut. Ceci est expliqué par la réactivité de SiO2 avec la phase apatitique pour donner une apatite phosphosilicatée [50]. Dans le cas du phosphate naturel étuvé, les paramètres cristallins donnés dans le tableau III-1 sont comparables à ceux de la Francolite. La différence des paramètres cristallins a et c peut s’interpréter en considérant la substitution dans le réseau de l’apatite, des cations Ca2+ par des cations comme Na+, Cd2+, Mg2+…, et également par la substitution partielle des ions phosphates PO43- par les ions carbonates CO32- présents dans le phosphate naturel. Ces substitutions seront par la suite confirmées par d’autres techniques d’analyses en particulier la spectroscopie IR, l’analyse EDAX et les analyses chimiques. Tableau III-1 : Paramètres cristallographiques du phosphate naturel de Benguérir comparés à ceux des apatites naturelles et synthétiques. a (Å) PN étudié Ca10(PO4)6(OH)2 Ca10(PO4)6F2 9,360 9,421 9,372 Froncolite ≤9,360 (variable avec la teneur en CO2 et H2O c (Å) 6,889 6,882 6,888 ≤ 6,890 (variable avec la teneur en CO2 et H2O - 42 - 800°C * * SiO CaF 2 o Brut (étuvé) * 20 2 o 25 * 30 35 40 2 Théta (degré) 45 50 55 Figure III-1 : Diffractogrammes de diffraction aux rayons X du phosphate naturel brut et calciné à 800°C. Une étude par RMN du phosphore réalisée par El Asri et col.[105] a montré que le phosphate naturel de Benguérir étuvé ou calciné ne contient qu’un seul type de phosphore caractéristique de la structure de l’apatite ; ce qui confirme les résultats de diffraction des RX présentés dans ce travail. I.2.2. Examen par spectroscopie d’absorption IR Les spectres infrarouges sont enregistrés à l’aide d’un spectromètre à transformée de Fourier VERTEX 70 (UATRS-CNRTS-Rabat). Le domaine spectral étudié s’étend de 4000 cm-1 à 400 cm-1 avec une résolution de 2 cm-1. Les mesures sont réalisées en transmission au travers de pastilles de KBr dans lesquelles les poudres à analyser sont diluées : une masse de 2 mg de poudre préalablement broyée dans un mortier en agathe est mélangée avec 300 mg de KBr. La pastille est formée en pressant ce mélange dans une matrice en acier. Les analyses spectrométriques sont réalisées à température ambiante. La figure III-2 regroupe les spectres infrarouges du phosphate naturel étuvé à 100°C et calciné à 800°C et met en évidence plusieurs bandes, en particulier celles attribuables aux groupements PO43- et aux ions carbonates CO32- particulièrement pour le produit brut. En - 43 - effet, les bandes d’absorption des ions PO43- se caractérisent par deux domaines d’adsorption situés entre 1100 et 900 cm-1 et entre 500 et 600 cm-1. Le premier correspond aux vibrations symétriques et antisymétriques P-O (ν1+ν3) et le second aux vibrations de la déformation OP-O (ν2+ν4). Les bandes d’adsorption caractéristiques aux carbonates sont situées à 1458, 1430 et 870 cm-1. Aucune bande n’est décelée à 3560 et 630 cm-1, caractéristiques de la vibration des groupements hydroxyles OH que se soient dans le produit étuvé ou calciné. Ce dernier résultat permet de confirmer que le phosphate brut est une apatite carbonatée non hydroxylée. Dans le cas de PN étuvé, des bandes de faibles intensités apparaissent vers 1800, 1640, 790 et 648 cm-1, attribuables à la présence des traces des composés carbonylés dans le phosphate naturel. Figure III-2 : Spectres d’absorption IR du phosphate naturel brut et calciné à 800°C. I.2.3. Analyses chimiques L’analyse élémentaire et quantitative permet de déterminer les principaux éléments constitutifs du phosphate naturel et sa composition aux erreurs expérimentales près. Dans cette partie, nous n’avons dosé que les principaux éléments qui constituent le phosphate naturel. Le calcium et le phosphore ont été dosés à l’aide d’un spectromètre ICP-AES (THERMO FLASH2). Le fluor a été dosé par potentiomètre à électrode spécifique. Les résultats de l’analyse chimique sont regroupés dans le tableau III-2. Le rapport molaire Ca/P =1,97 est supérieur à 1,67 d’une apatite stéochiométrique. - 44 - Tableau III-2 : Composition chimique du phosphate naturel. Eléments Ca P Si F Ca/P % massique 37,8 15,02 1,65 3.01 1,97 La différence observée est due à la présence des ions Ca2+ associés à d’autres anions que les ions phosphates à travers la formation d’autres phases secondaires comme la fluorine CaF2 sans compter des phases mineurs non détectables par diffraction des RX (<4%) . De même, la présence des carbonates détectés par IR affecte le rapport molaire Ca/P par la substitution des ions PO43-. Le pourcentage en fluor est proche de celui d’une fluorapatite phosphocalcique Ca10(PO4)6F2 (3,7%). Ces analyses ont été confirmées par l’analyse dispersive en énergie des RX (EDAX) (Figure III-3). Figure III-3 : Analyse dispersive en énergie des rayons X (EDAX) des éléments chimiques constitutifs du phosphate naturel. Nous trouvons ainsi des éléments majeurs tels que le phosphore, le calcium et l’oxygène et mineurs comme le fluor, le silicium, le soufre et le sodium. Le rapport molaire Ca/P=1,95 et le pourcentage du fluor (2,84%) sont proches de ceux obtenus par les analyses chimiques. Par conséquent, les différentes techniques d’analyses utilisées au cours de cette étude, ont permis de caractériser le phosphate naturel de Benguérir. Le phosphate naturel du minerai étudié est une fluorapatite carbonatée. Cette caractérisation physico-chimique permettra, sans doute, de maîtriser la composition chimique de PN et la nature des impuretés présentes dans le minerai, en vue de son utilisation comme étant un précurseur naturel du calcium et phosphore pour la fabrication de l’apatite [106]. - 45 - I.3. Propriétés texturales I.3.1. Mesure de la surface spécifique du phosphate naturel par la méthode BET. La mesure de la surface spécifique des matériaux étudiés dans ce manuscrit a été réalisée avec un appareil Micromeritics ASAP2010 à 77K qui utilise le procédé d’adsorption en multicouches de gaz d’azote à 77 K selon la théorie de Brunauer, Emett et Teller (BET). Elle repose sur la détermination de la quantité de gaz nécessaire pour fixer une couche monomoléculaire à la surface du solide. La connaissance du volume de ce gaz à fixer nous permet alors de déterminer la surface recouverte et donc l’aire spécifique du matériau étudié. Le solide à analyser doit être évacué de toutes molécules d’eau ou de CO2, qui peuvent être déposées sur la surface de l'échantillon. Pour ce faire, nous procédons à un dégazage de l'échantillon sous vide (à pression réduite < 10-4 Torr) et à une température de 200°C. La figure III-4 donne l’isotherme obtenue pour le cas du phosphate naturel, caractérisée par une augmentation progressive de la quantité adsorbée en fonction de la pression relative pour une valeur de P/P0 inférieure à 0,55. La surface spécifique est de l’ordre de 20 m2/g, valeur très faible 50 3 (cm /g ( STP) Volume d'azote adsorbé comparée à celle des apatites synthétiques [107]. 40 30 20 PN 10 0 0 0,2 0,4 0,6 Pression relative P/P 0,8 1 0 Figure III-4 : Isotherme d’adsorption-desorption de l’azote à 77 K sur le phosphate naturel de Benguérir PN. I.3.2. Morphologie de l’apatite naturelle par MEB La poudre du phosphate naturel est préalablement métallisée avec l’or afin d’assurer les conditions des électrons et aussi d’éviter les effets de charge. La figure III-5 présente les images de la microscopie électronique à balayage (MEB) de la poudre du phosphate naturel à deux agrandissements. Il s’agit des formes irrégulières ou arrondies de l’ordre d’une centaine de - 46 - nanomètres. Cette variété de formes est due à la présence des débris inorganiques et organiques dans le phosphate naturel. La structuration des grains laisse suggérer une porosité faible et ainsi une surface spécifique moins importante, ce qui confirme la valeur déterminée par la méthode BET (20 m2/g). Figure III-5 : Images de MEB du phosphate naturel de Benguérir à deux résolutions différentes Au cours de cette étude, nous avons montré que le phosphate naturel utilisé est une fluorapatite carbonatée qui a une faible surface spécifique par rapport aux apatites synthétiques poreuses et d’une surface modulable, capables d’acquérir des bonnes propriétés de rétention. Pour cela, nous avons opté pour la synthèse des apatites modifiées par leur greffage de l’aminophosphonate moins coûteux. Ainsi, les apatites greffées que nous avons préparées et caractérisées nous serviront de supports pour éliminer les métaux lourds contenus dans les solutions synthétiques (voir la partie III). II. Modification de la surface de l’hydroxyapatite par greffage de l’aminotriméthylenphosphonate Des études préalables de greffage d’acides alkyle et phénylphosphoniques sur des nanoparticules d’apatites ont été déjà réalisées dans notre laboratoire [107-108]. Les résultats importants au cours de ces études nous ont incités à utiliser d’autres phosphonates à caractère complexant, il s’agit alors de l’acide aminotriméthènephosphonique de formule brute N(-CH2PO(OH)2)3 (noté AMP, Figure III-6). La présence de trois fonctions phosphonates et amine - 47 - pourra conduire à des réactions de complexation avec les cations Ca2+ comme elles pourront fixer les ions métalliques en solution aqueuse lors d’une étude des propriétés d’adsorption des matériaux greffés. Les différentes nanoparticules ainsi fonctionnalisées par des chaînes N-CH2-PO32- ont été caractérisées par spectroscopie infrarouge, diffraction des rayons X, microscopie électronique à transmission et analyses chimiques. La mesure de la surface spécifique des nanoparticules a été déterminée par adsorption - désorption d’azote. Les paramètres de greffage ont été optimisés, ce qui nous a permis de synthétiser des nanoparticules avec différents taux de recouvrement. II.1. Données physico-chimiques de l’acide aminotriméthylenphosphonique (AMP) -Synonymes : acide aminométhylènephosphonique - Formule moléculaire brute : C3H12NO9P3 - Poids moléculaire : 299,5 mol/g - Apparence : liquide de couleur transparente. - Point de fusion : -14 °C - Densité : 1,300 - Pureté : solution aqueuse à 50% - Stabilité : Stable dans les conditions standards, de température et de pression. - Réactivité chimique : agent oxydant. O HO P HO N HO P O O P OH OH OH Figure III-6 : Structure de l’aminotriméthylenphosphonique. II.2. Préparation des apatites hybrides à partir du phosphate naturel II.2.1. L’apatite de référence PNM Le principe de notre synthèse est basé sur la réaction de dissolution du phosphate naturel par un acide approprié (HNO3) pour libérer dans la solution particulièrement les entités chimiques Ca2+ et H3PO4. Une masse de 30 g de phosphate naturel collecté du minerai de Benguérir est introduite dans un réacteur de 2 L contenant 500 mL d’eau distillée. La - 48 - réaction de dissolution du minerai est réalisée par l’ajout d’un volume de 20 mL de la solution d’acide nitrique (65%). Le mélange réactionnel est maintenu sous agitation continue à l’aide d’un agitateur magnétique pendant une durée optimale de 3 heures à la température ambiante et à pH=2, valeur optimale pour cette réaction de dissolution [50]. Après dissolution totale du phosphate naturel, le mélange obtenu est filtré sous vide. Le filtrat obtenu est ensuite neutralisé par un volume de 200 mL de l’ammoniaque concentré (25%). Le pH du mélange a été ajusté à un pH = 10 pour éviter la formation des phosphates acides. Le précipité formé est laissé se mûrir sous agitation pendant 48 heures. A l’issue de la maturation, le précipité est filtré sous vide, lavé à l’eau distillée, puis séché dans une étuve à 100°C pendant une nuit. La figure III-7 schématise le protocole expérimental utilisé. Les calcinations sont réalisées sous air dans un four Nabertherm LHT (Allemagne); la rampe de montée en température est fixée à 10°C/min et un temps de palier de 3 h est respecté pour tous les traitements thermiques. Figure III-7 : Protocole de synthèse de l’apatite à partir du phosphate naturel. II.2.2. Les apatites hybrides AMP-PNM - 49 - Le protocole expérimental de la préparation des apatites greffées est similaire à celui décrit dans le cas de la référence PNM, sauf que la quantité du greffon AMP est introduite dans le filtrat en proportion variable par rapport au phosphore inorganique libéré du phosphate naturel sous forme de H3PO4. Le pourcentage de greffage, en terme du phosphore organique, est exprimé par le rapport molaire du phosphore organique et du phosphore total et donné par la relation suivante : Pourcentage de greffage (%) = Porg Ptotal .100 II.3. Préparation des apatites hybrides à partir des précurseurs commerciaux En se basant sur les procédés de synthèse cités dans la littérature pour la préparation d’une hydroxyapatite poreuse en milieu structuré, nous avons utilisé une méthode de synthèse modifiée des hydroxyapatites greffées dont les avantages sont les suivants: - Préparer une apatite à partir d’une phase homogène à la température ambiante possédant une surface spécifique importante (>100 m2/g). - Avoir une hydroxyapatite exempte d’éléments indésirables (NO3-, Cl-), provenant de l’utilisation des sels de calcium. - Utiliser les additifs fonctionnalisés à tête phosphonate, capables de neutraliser le précurseur Ca(OH)2 et de complexer les ions Ca2+. - Favoriser la formation des composés hydrides inorganique - organique par l’établissement des liaisons covalentes dans des conditions opératoires adéquates. L’ensemble de ces privilèges permet de choisir la méthode décrite ci-après. II.3.1. L’apatite de référence (HAp) La méthode utilisée est basée sur la voie de neutralisation modifiée de Ca(OH)2 et NH4H2PO4 en milieu aqueux [107-108]. En effet, Ca(OH)2 présente de bonnes caractéristiques pour l’obtention de nanoparticules d’apatite. Son attaque par l’acide H2PO4conduit à la libération des ions OH- en solution induisant ainsi la basicité nécessaire au milieu réactionnel. La composition des solutions est choisie selon la stoechiométrie de l’équation de la réaction suivante dont le rapport atomique Ca/P = 10/6=1,67. H2O 10 Ca(OH) 2 + 6 NH4H2 PO4 Ca10(PO4)6(OH)2 + 6 NH4OH + 12 H2O T= 25°C - 50 - Deux solutions ont été préparées : Solution A : Dans un ballon de 500 mL, on dissout 14,82 grammes de Ca(OH)2 dans 200 mL d’eau distillée. Le mélange réactionnel est agité pendant 1 h 30 min à la température ambiante. Solution B : On dissout 13,80 g de dihydrogénophosphate d’ammonium NH4H2PO4 dans 100 mL d’eau distillée. En fin, nous ajoutons rapidement la solution B à la solution A. Le mélange est laissé sous agitation magnétique continue à la température ambiante. Après avoir laissé mûrir le précipité obtenu pendant une durée optimale de 48 h, il est filtré à chaud sur Büchner, puis séché à l'étuve pendant une nuit. La poudre obtenue est calcinée dans un four tubulaire à 800°C pendant trois heures. Les produits étuvés et calcinés sont caractérisés par les différentes techniques physico-chimiques adéquates. II.3.2. Les apatites greffées (AMP-HAp) Nous avons procédé au greffage de l’acide aminotriméthylenphosphonique N(-CH2PO(OH)2)3 (AMP) sur la matrice apatitique selon la même méthode de neutralisation décrite dans le cas de l’apatite de référence HAp. Mais au cours de la préparation de la solution B, la solution de l’AMP est additionnée à celle de NH4H2PO4 en proportions variables. Le pH de la solution est contrôlé durant la réaction de formation des produits greffés. Il est toujours basique (pH>10) quelque soit le taux de greffage de l’AMP (Figure III-8); ce qui évite la formation des phosphates acides H2PO4- incorporés dans la structure apatitique. - 51 - 12.5 pH 12 11.5 11 0 5 10 15 20 25 30 Pourcentage de greffage (%) Figure III-8 : Variation du pH du milieu réactionnel lors de la préparation des apatites greffées à différents taux de greffage AMP. II.4. Caractérisation des précipités préparés L’analyse des résultats de la caractérisation des matériaux élaborés par diverses techniques expérimentales permet de déterminer leurs propriétés structurales et texturales. Les techniques que nous avons utilisées sont la diffraction des rayons X (DRX), la spectroscopie infrarouge à transformées de Fourrier (IR-TF), l’analyse chimique, l’analyse thermique (ATG/ATD), la microscopie électronique à transmission (MET) et enfin la mesure de la surface spécifique. II.4.1. Examen par diffraction aux rayons X Les diagrammes de diffraction des rayons X des produits préparés et étuvés soit à partir du phosphate naturel (notés AMP-PNM) ou des précurseurs commerciaux (notés AMPHAp) à différents taux de greffage AMP sont regroupés dans la figure III-9. Dans le cas des produits étuvés quelque soit leur provenance de précurseurs (PNM ou HAp), l’analyse de leurs diagrammes montre que l’incorporation de différents taux d’aminophosphonate n’entraîne aucune altération de la structure apatitique. Les apatites greffées ainsi préparées sont toutes mal cristallisées et constituées d’une phase unique de structure apatitique - 52 - (Figure III-9). Toutes les raies des diagrammes de diffraction des rayons X sont indexées dans le système hexagonal du groupe d'espace P63 /m . (a) 10%AMP-PNM 5%AMP-PNM 2,5%AMP-PNM PNM (référence) PN 20 25 30 35 40 45 50 55 60 2 théta (degré) (b) 15%AMP-HAp 10%AMP-HAp 5%AMP-HAp 5%AMP-HAp 2.5%AMP-HAp HAp (référence) 20 25 30 35 40 45 50 55 2 Théta (degré) Figure III-9 : Diagrammes de diffraction aux rayons X des produits (a) AMP-PNM et (b) AMP-HAp étuvés à 100°C. - 53 - Nous constatons que les raies de diffraction des RX sont relativement larges et que seules les raies les plus intenses sont observées, dont l’intensité décroît lorsque le taux de greffage augmente. Par conséquent, la faible cristallinité de ces apatites modifiées par les molécules AMP nous permet d’identifier la présence de petites cristallites. De plus, la variété de formes des digrammes de diffraction des RX reflète la variation de la taille des cristallites avec le taux de greffage. Cette étude montre que nous avons pu obtenir des particules apatitiques de différentes tailles, ce que nous allons confirmer par la suite par microscopie électronique à transmission (MET). Nous avons évoqué la réactivité des fonctions actives -PO(OH)2 portées par l’acide phosphonique AMP vis-à-vis des ions Ca2+ issus du précurseur commercial Ca(OH)2. A cet effet, nous avons supposé que le précurseur N(-CH2-PO(OH)2)3 peut réagir par la totalité de ses fonctions -PO(OH)2 qui sont au nombre de 3 noté (PIII), comme il ne peut faire intervenir que deux fonctions (PII) ou qu’une seule (noté PI). Pour cela, et dans les mêmes conditions opératoires citées précédemment, nous avons préparé trois matériaux de taux de greffage choisi de 20%, sauf que nous avons utilisé la quantité de l’acide aminophosphonique calculée en se basant sur l’hypothèse suggérée. La figure III-10 reporte les diagrammes de diffraction aux RX correspondants, illustrant l’effet de la réactivité des fonctions -PO(OH)2 contenues dans l’AMP vis-à-vis des ions Ca2+. Les diffractogrammes des RX des produits préparés (I) et (II) présentent des raies de diffraction non apatitiques, comparés à celui de produit (III) de structure apatitique mal cristallisée. L’analyse de ces diagrammes permet de conclure qu’une bonne réactivité des trois fonctions PO(OH)2 de l’AMP avec le calcium et l’excès de l’aminophosphonate altère la structure apatitique. Dans la préparation des apatites AMP-HAp, nous avons tenu compte des trois fonctions phosphonates contenues dans la molécule AMP. L’étude structurale des apatites greffées en fonction de la stabilité thermique des apatites hybrides préparées est présentée et discutée. A titre d’exemple, la figure III-11 illustre le suivi de l’évolution structurale de l’apatite modifiée par un taux de greffage de 2,5% en fonction de la température de calcination. Nous remarquons que sa stabilité thermique diffère selon la nature des apatites hybrides (naturelles ou synthétiques). - 54 - I (1 P) II (2 P) III (3 P) 20 25 30 35 40 45 50 2 Théta (degré) Figure III-10 : Effet de la variation de la quantité du phosphore organique issue des fonctions PO(OH)2 de l’AMP sur l’élaboration des apatites hybrides. D’après la figure III-11 relative aux diagrammes aux RX des apatites naturelles AMPPNM, nous constatons la disparition de la phase apatitique et l’apparition de nouvelles phases à partir de la température de calcination de 600°C, contrairement aux diagrammes RX des produits AMP-HAp issus des précurseurs commerciaux Ca(OH)2 et NH4H2PO4 où la structure apatitique est conservée quelque soit la température de calcination. Ceci est dû évidement à la stoechiométrie des réactifs introduits. Afin de conserver leurs propriétés de surface pour une telle application environnementale, le traitement thermique fait dégrader les sites actifs dans leur surface que ce soient les pores ou les fonctions AMP greffées, et par conséquent il est impérativement non souhaitable de calciner les apatites hybrides de surfaces appropriées pour la rétention des ions métalliques contenus dans les solutions aqueuses. 800 °C 600°C 100 °C 20 25 30 35 40 45 50 55 60 2 Théta (degré) Figure III-11 : Diagrammes de diffraction aux RX de l’apatite greffée par 2,5 % AMP-HAp étuvée à 100°C puis calcinée à 600°C et 800°C. - 55 - A titre comparatif, les diagrammes de diffraction des RX des produits préparés et calcinés à 800°C sont rassemblés dans la figure III-12. Dans le cas des apatites synthétiques AMP-HAp et pour des taux de greffage inférieurs à 10%, les diagrammes présentent une structure apatitique exempte de toutes autres phases. Par contre pour des taux élevés, nous avons décelé des pics de diffraction supplémentaires attribuables à β-Ca3(PO4)2. Les raies de diffraction des rayons X sont fines et reflètent la bonne cristallisation des produits préparés et calcinés à 800°C. Ceci montre que le traitement thermique, à haute température, aboutit à des apatites bien cristallisées et il dépend du taux de greffage. Les diffractogrammes des RX montrent également que la quantité de phases secondaires formées avec les produits AMPHAp augmente nettement avec le taux de greffage AMP. Ces données structurales sont en bon accord avec celles trouvées par El Hammari et coll. [108], qui ont montré que l’utilisation des alkyle et phénylphosphonates, avec un taux de greffage ne dépassant pas 10% aboutit à des hydroxyapatites pures. Contrairement à ce qui précède, le traitement thermique des apatites greffées AMP-PNM fait changer la structure apatitique pour donner le phosphate tricalcique β-Ca3(PO4)2, et par conséquent, il détériore les propriétés de surface jouent un rôle primordial lors de la réactivité des matériaux vis-à-vis des espèces adjacentes pour une telle application médicale ou environnementale. L’analyse de l’ensemble des résultats de diffraction aux RX permet de constater que l’environnement des ions Ca2+ s’est modifié fortement selon l’origine et la nature des précurseurs utilisés (c.à.d à partir du phosphate naturel ou (Ca(OH)2NH4H2PO4)). - 56 - (a) 15 %MP-PNM 10 %AMP-PNM 5 %AMP-PNM 2,5 %AMP-PNM 0 %AMP-PNM 20 25 30 35 40 45 50 55 60 2 Théta (degré) (b) * * * β -Ca (PO ) 3 4 2 20% AMP-HAp * 15% AMP-HAp 10% AMP-HAp 5% AMP-HAp 0% AMP-HAp 25 30 35 40 45 50 2 Théta (degré) Figure III-12 : Diagrammes de diffraction des rayons X des apatites préparées (a) AMP-PNM) et (b) AMP-HAp calcinées à 800°C. - 57 - II.4.2. Examen par spectroscopie infrarouge IR L’évolution des spectres infrarouges des produits est étudiée sur des échantillons préalablement étuvés et calcinés. Les bandes caractéristiques des modes de vibration des groupements des apatites étudiées sont présentées sur la figure III-13. Les spectres des apatites étuvées que ce soient synthétiques AMP-HAp ou naturelles AMP-PNM présentent exactement les mêmes bandes d’absorption. Les principales sont attribuées aux groupements phosphates PO4. Nous notons un léger déplacement de ces bandes, vers les hautes fréquences, en fonction du taux de greffage. Ceci est lié au désordre structural et à la nature de la liaison P-O qui provient aussi bien du phosphore inorganique qu’organique. Il existe très peu d’informations claires sur l’attribution des bandes d’absorption des phosphonates et donc il est très difficile de déterminer avec exactitude les liaisons formées parvenues du phosphore organique (C-P-O) ou inorganique (O-P-O). En effet, l’attribution des bandes relatives aux oscillateurs du phosphonate PO32- dans la structure apatitique hybride est très complexe, du faite de leur chevauchement avec celles des vibrateurs PO4. De faibles bandes à 1540, 1480, 1450, 1416 et 875 cm-1 sont également observées. Elles correspondent sans ambiguïté aux modes de vibration des carbonates CO32- et d’autres groupements carbonylés. Quelques bandes attribuables à la vibration des oscillateurs de phosphonate N(-CH2-PO(OH)2)3 de faible intensité sont observées surtout pour un taux de greffage élevé, en particulier la bande située vers 1486 cm-1 qui est due au vibrateur C-P, bien que celle de N-C soit chevauchée avec les bandes associées aux carbonates et aux phosphates. D’autres bandes de vibrations ont été observées dans le domaine de fréquence 750 cm-1à 870 cm-1 et vers 2000 - 2900 cm-1 attribuables respectivement aux vibrations des liaisons C-C, et C-H. Le traitement thermique progressif entre 400-800°C fait décroître puis disparaître les bandes correspondantes aux vibrations des liaisons alkyles ou nitriles après leur décomposition (Figure III-14) et améliore la résolution des bandes caractéristiques des groupements PO4 et OH dans les apatites synthétiques AMP-HAp. Cependant, la résolution structurale de ces bandes dépend du taux de greffage dont l’intensité décroît lorsque le taux de greffage augmente. Par contre, les produits issus du phosphate naturel AMP-PNM ne présentent pas de bandes caractéristiques de la présence des hydroxyles OH, en plus que les bandes PO4 ne se positionnent pas de la même manière que celles issues des apatites calcinées AMP-HAp ou des apatites étuvées correspondantes. Ce qui explique que le traitement - 58 - thermique altère la structure apatitique des produits préparés à partir du phosphate naturel (AMP-PNM). (a) 10%AMP-HAp 5%AMP-HAp 2,5% AMP-HAp HAp référence 4000 3500 3000 2500 2000 1500 1000 500 1000 500 -1 Fréquence (cm ) (b) 10% AMP-PNM 5% AMP-PNM 2,5% AMP-PNM PNM référence PN 4000 3500 3000 2500 2000 1500 -1 Fréquence (cm ) Figure III-13 : Spectres d’absorption infrarouge des apatites (a) AMP-HAp et (b) AMP-PNM comparés à ceux non greffées. - 59 - (a) Transmittance (%, u.a) 15 %AMP-PNM 10%AMP-PNM 5 %AMP-PNM 2,5%AMP-PNM 0% AMP-PNM 4000 3500 3000 2500 2000 1500 1000 500 -1 Fréquence (cm ) (b) 10%AMP-HAp Transmittance (%) 5%AMP-HAp 2.5%AMP-HAp 0%AMP-HAp (reference) -1 Fréquence (cm ) 4000 3500 3000 2500 2000 1500 1000 500 Figure III-14 : Spectres d’absorption infrarouge des apatites greffées et calcinées à 800°C (a) AMP-PNM et (b) AMP-HAp II.4.3. Examen par spectroscopie RMN- MAS du 31P et du 13C à l’état solide Afin d'obtenir assez d’informations sur le greffage de l’AMP sur les apatites en particulier les environnements du phosphore et du carbone, nous avons procédé à l’étude de ces matériaux apatitiques par spectroscopie de résonance magnétique nucléaire RMN-MAS du 31 P et du 13 C à l’état solide. D’après les résultats de la figure III-15 relatifs à l’analyse RMN-MAS 31P des matériaux greffés, nous notons l’apparition d’un pic supplémentaire vers - 60 - 20 ppm en plus de celui situé à 2,9 ppm caractéristique du phosphore inorganique habituellement détecté dans la structure apatitique. Ce pic additionnel, de faible intensité, n’est attribuable qu’au phosphore organique des groupements des phosphonates comme nous l’avons observé dans les travaux de recherche de El Hammari et coll.[108] lors de l’étude de greffage des alkyls et des phénlyphosphonates au sein de la matrice apatitique. De plus, les spectres RMN-MAS 13 C présentés dans la figure III-16 permet d’identifier des résonances relatives au carbone contenu dans les matériaux greffés. Deux pics de résonance ont été détectés: le premier est de faible intensité situé vers 160 ppm attribuable au carbone du groupement CO32-, tandis que le second situé vers 60 ppm est caractéristique du carbone de la molécule N(-CH2-PO(OH)2)3 greffée dans la structure apatitique. Par conséquent, les résultats de la spectroscopie RMN sont en bon accord avec ceux obtenus par diffraction aux RX et spectroscopie IR, ce qui confirme le greffage de l’AMP in situ dans la matrice apatitique [109]. Figure III-15 : Spectres RMN du phosphore des matériaux greffés (a) AMP-HAp et (b) AMP-PNM, comparés à ceux de référence. - 61 - 60 ppm 160 ppm (b) 10 % AMP-PNM 5 % AMP-PNM 2,5 % AMP-PNM PNM (référence) 200 100 0 -100 -200 ppm Figure III-16 : Spectres RMN du 13C à l’état solide des apatites greffées (a) AMP-HAp et (b) AMP-PNM comparés à ceux de référence. - 62 - II.4.4. Analyses thermiques (ATG/ATD) des apatites greffées Les courbes ATG/ATD sont enregistrées simultanément à l’aide d’un appareil TA Instruments. Les expériences sont réalisées dans des creusets en alumine avec environ 20 mg de poudre. Les vitesses de chauffe sont fixées à 10°C min-1 de l’ambiante jusqu’à 1000°C. Les figures III-17 et III-18 présentent respectivement les courbes ATG et ATD des apatites greffées AMP-PNM avec différentes teneurs du greffon AMP. Notons que toutes les courbes thermogravimétriques des poudres AMP-PNM ou AMP-HAp présentent exactement les mêmes allures, mais elles ne différent que par la valeur de la perte de masse ∆m (Tableau III-3). Les pertes de masses enregistrées dans le domaine de température qui s’étend de l’ambiante à 200°C sont attribuées à la désorption de l’eau de surface. Le second domaine (II) (de 200°C à 600°C) est caractérisé par une perte de masse importante liée à la dégradation de la matière organique surtout celle de l’aminophosphonate. Nous constatons que la perte de masse augmente avec le taux de greffage, ce qui confirme la réactivité de ce greffon avec les ions Ca2+. Au-delà de 800°C, nous notons une perte de masse moins importante relative au départ de l’eau lors des transformations structurales. 100 10% AMP-PNM Exo 96 Endo Perte de masse (%) 98 5% AMP-PNM 94 2,5% AMP-PNM 2,5% AMP-PNM 0%AMP-PNM 92 PNM référence 5%AMP-PNM 10%AMP-PNM 90 200 400 600 800 1000 1200 Température (°C) 200 400 600 800 1000 1200 Température (°C) Figure III-17 : Courbes ATG des Figure III-18 : Courbes d’ATD des apatites apatites greffées AMP-PNM greffées AMP-PNM. Par ailleurs, les courbes ATD relatives aux produits AMP-PNM présentent divers comportements thermiques : un de nature endothermique à une température voisine de 120°C attribuable au départ de l’eau adsorbée à la surface des solides, et les autres de nature - 63 - exothermique, situés au-delà de 380°C selon le taux de greffage AMP, sont dus en même temps à la combustion de la matière organique et à la transformation structurale de la phase apatitique à d’autre phases surtout dans le cas des produits AMP-PNM. Tableau III-3 : Pertes de masses calculées à partir des courbes ATG des apatites greffées AMP-PNM. ∆m (%) ∆m (%) ∆m (%) ∆m (25-200°C) (200-500°) (500-1000°C) totale (%) 2,5% 0,64 4,49 1,73 6,61 5% 2,70 4,92 0,93 8,55 10% 1,80 6,03 1,95 9,78 15% 2,40 7,05 1,95 11,40 Taux greffage de II.4.5. Analyses chimiques Les résultats des analyses chimiques des matériaux étudiés sont regroupés dans le tableau III-4. Dans le cas des apatites naturelles AMP-PNM, le rapport molaire Ca/P décroît de 1,95 (PNM- référence) à 1,53 pour le taux de greffage de 10 % AMP ; cette diminution est due au déficit en calcium dans la matrice du solide par l’addition du phosphore organique en conservant le phosphore inorganique par dissolution d’une quantité constante du phosphate naturel prise initialement pour chaque taux de greffage. Par contre dans le cas des apatites synthétiques AMP-HAp, Les quantité de deux types du phosphore sont prises selon la stoechiométrie de l’équation de la réaction (Ca/P =1,67), et par conséquent le rapport Ca/P des produits préparés augmente légèrement de 1,60 (HAp) à 1,70 pour 20%AMP ; qui reste proche de celui de l’apatite stoechiométrique (Ca/P=1,6). - 64 - Tableau III-4 : Résultats des analyses chimiques des apatites préparées. Apatites hybrides AMP-PNM AMP-HAp % Ca %P %C %N Ca/P 0% 38,66 15,33 0,30 - 1,95 2.5 % 34,31 16,24 0,52 0,20 1,61 5% 34,41 17,10 0,72 0,32 1,55 10 % 34,39 17,39 1,05 0,62 1,53 0% 36,87 17,82 <0,1 - 1,60 2.5 % 35,01 17,04 0,21 0,16 1,58 5% 34,20 16,48 0,51 0,30 1,60 10 % 34,04 15,95 0,75 0,58 1,62 15% 32,46 15,49 0,95 0,75 1,65 20% 34,28 15,59 1,05 - 1,70 III. Analyse volumétrique des apatites greffées III.1. Mesure de la surface spécifique Les surfaces spécifiques sont mesurées par adsorption de N2 à 77K. Les isothermes d’adsorption-désorption de N2 à 77K sur la surface des apatites greffées en AMP comparées à celles des références sont représentées sur la figure III-19. Nous constatons que la présence d’une hystérésis suggère une mésoporosité de la surface des matériaux étudiés dans lesquels se produit une condensation capillaire. Ces isothermes sont de type IV selon la classification de l’IUPAC. Les valeurs de la surface spécifique des apatites préparées en présence de l’aminophosphonate sont données dans le tableau III-5. Tableau III-5 : Surfaces spécifiques, volumes et diamètres des pores des apatites hybrides comparés à ceux des apatites de références. AMP-PNM AMP-HAp 0 2,5 5 10 0 2,5 5 10 20 SBET (m2.g-1) 150 198 148 145 120 159 122 92 80 Dp (nm) 11,5 9,5 25,0 38,0 11 1,8 et 9,5 1,7 10,5 - 65 - 2,2 et 2,0 et 9,5(f) 10,3 et N -sorption (cm /g, STP) (e.a) (a) 15%AMP-HAp 3 10%AMP-HAp 5%AMP-HAp 2 2.5%AMP-HAp HAp référence 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 Pression relative P/P 0 Figure III-19 : Isothermes d'adsorption- désorption de N2 sur les apatites greffées (a) AMPHAp et (b) AMP-PNM comparées respectivement aux références HAp et PNM. - 66 - Plus la valeur de la surface spécifique du solide est grande, plus sa surface est réactive. Cette caractéristique physique est généralement un des facteurs essentiels du processus d’adsorption. La diminution de la surface spécifique des apatites en fonction du taux de greffage est liée à l’arrangement structural de l’aminophosphonate dans la surface du solide. Ces résultats sont en bon accord avec ceux obtenus par Oberto da Silva et coll. [102] lors de l’étude de la modification de la surface de l’hydroxyapatite par des aminosilanes en vue de leur utilisation dans le traitement des eaux usées. Ces auteurs ont montré que la surface spécifique diminue lorsque le greffon est volumineux c'est-à-dire il a assez de fonctions amines comme le montre le tableau III-6. Ceci est explique qu’il une certaine réactivité des fonctions amines avec la surface du solide et par conséquent le greffon minimise les pores en les occupant. Tableau III-6 : Effet du nombre de fonctions amines du greffon sur la capacité d’adsorption de l’apatite greffée [102]. Apatites greffées Nature de R Nombre de SBET fonctions amine (m2/g) Apatite de référence Apatite-(CH3)3Si(CH2)3R - 0 58,0 NH2 1 15,5 HN(CH2)2NH 2 11,0 NH(CH2)2NH-(CH2)2NH 3 5,0 En utilisant la méthode Barrett-Joyner-Halenda (BJH), nous avons aussi exploité des isothermes d’adsorption-désorption de N2 pour déterminer le diamètre des pores situés à la surface des matériaux préparés en présence de l’aminophosphonate AMP (Tableau III-5). Contrairement aux matériaux AMP-PNM, les apatites AMP-HAp présentent une distribution bimodale de pores. D’après le tableau III-5, nous constatons que pour le matériau de référence (HAp) la valeur du diamètre des pores est de l’ordre de 11 nm. Par contre, pour les matériaux modifiés, nous notons que le profil de distribution est quasiment identique surtout pour un taux de greffage supérieur à 2,5%. Parallèlement, dans le cas de la série de matériaux AMPPNM, la population est importante dans le domaine où les pores sont assez larges (de 10 nm à 38 nm). Ces observations confirment que les matériaux sont en partie mésoporeux. Cette étude nous permet de conclure que nous pouvons contrôler la porosité des matériaux préparés - 67 - en variant le rapport aminophosphonate/phosphate et la nature des précurseurs du calcium et phosphore. (a) 0,2 -1 δ V/δ δ rp(cm .g .nm ) 0,15 3 -1 20%AMP-HAp 0,1 10%AMP-HAp 0,05 HAp (référence) 2.5%AMP-HAp 0 10 100 D (nm) p Figure III-20 : Distributions des pores sur les surfaces des apatites hybrides (a) AMP-HAp et (b) AMP-PNM comparées aux références. - 68 - III.2. Analyse par microscopie électronique à transmission La texture et la nature chimique des éléments qui composent les poudres sont mises en évidence par microscopie électronique à transmission (MET) à l’aide du microscope JEOL 2010. Les poudres sont au préalable mises en suspension dans l’éthanol et soumises pendant 3 min aux vibrations ultrasons afin de casser les éventuels agglomérats. La suspension est ensuite déposée sur une grille de cuivre recouverte d’une membrane de carbone. Une analyse chimique des poudres peut être effectuée par spectrométrie à dispersion d’énergie EDAX. Cette étude montre que les apatites que nous avons préparées, sont composées de nanoparticules, dont leur taille varie avec le taux greffage (Figure III-21). Le solide 10%AMP-HAp est caractérisé par une morphologie homogène et de forme régulière dont la taille des particules est comprise entre 8 et 10 nm. En revanche pour un taux de greffage de 20%, nous avons observé deux types de particules, une de forme régulière et l’autre de forme allongée, dont la taille est comprise entre 15 et 20 nm. - 69 - 2,5%AMP-PNM Figure III-21 : Images de la microscopie électronique à Transmission des matériaux apatitiques hybrides AMP-PNM et leurs analyses EDAX. - 70 - 10%AMP-HAp 20%AMP-HAp Figure III-22 : Images de la microscopie électronique à transmission des apatites greffées AMP-HAp à différents taux de l’aminotriméthylènphosphonate. - 71 - Conclusion Nous nous sommes intéressés à l’élaboration et à la caractérisation des hydroxyapatites hybrides inorganique - organique susceptibles de posséder des propriétés de surface intéressantes. Différents pourcentages de greffage de l’acide aminophosphonate AMP ont été introduits dans le réseau apatitique afin de pouvoir étudier leurs effets sur les modifications structurale et texturale de ces matériaux greffés, qui sont nécessaires comme données de base pour interpréter et commenter les principaux résultats d’adsorption obtenus et donnés dans la troisième partie de ce mémoire [110]. L'ensemble de ces résultats permet d'apporter des précisions sur la corrélation entre les propriétés structurale et texturale ainsi que sur le pouvoir de rétention des ions Pb2+et Zn2+. - 72 - Chapitre IV Synthèse et caractérisation des composites du système mixte TiO2-apatite - 73 - Introduction La compréhension et la maîtrise des propriétés des solides à une échelle toujours plus petite constituent un objectif de recherche universel et fondamental dont le but est l’obtention d’un matériau aux propriétés contrôlées. La synthèse des nanomatériaux à taille de grains parfaitement maîtrisée et les caractérisations structurales, morphologiques et chimiques des nanomatériaux sont par conséquent une étape nécessaire à la compréhension de ces phénomènes et sont en relation avec leurs applications soit à l’échelle laboratoire ou industrielle. Le premier objectif de ce chapitre est donc d’obtenir des poudres du système mixte TiO2-apatite de taille nanométrique avec une distribution de pores et de taille les plus étroites possibles. Dans ce but, de multiples protocoles de synthèse de TiO2 ont été rappelés [111]. Certaines synthèses ont été privilégiées en raison soit de leur potentialité de transfert industriel (synthèse en continu) soit de leur simplicité de mise en oeuvre (précipitation). Dans cette étude, la dispersion des grains d’apatite et la gélification de TiO2 ont été activées sous irradiations ultrasons. I. Généralités sur le photoactif TiO2 et le contexte de son association avec l’apatite Jusqu’à présent, le dioxyde de titane semble représenter le solide photoactif qui a donné les meilleurs résultats lors de la photodégradation des polluants organiques aussi bien en phase liquide qu’en phase gazeuse. L’adsorption à la surface du catalyseur est l’étape initiale précédant l’acte photocatalytique. Elle est le siége d’une interaction des molécules à dégrader avec la surface du catalyseur. Ce sont en principe ces molécules à l’état adsorbé qui conditionneraient la vitesse initiale de la photocatalyse [112-114]. Comme toute réaction de dégradation, le transfert des molécules de la phase liquide (ou gazeuse) vers la surface à travers la couche limite, l’adsorption à la surface du photoactif ou la désorption des produits de réaction ainsi que le transfert de produits de la couche limite vers la solution sont les principaux étapes du processus de la photochimie. En effet, le photo-catalyseur ne peut pas fixer des substances organiques nocives en air ou dans l'eau, mais seulement celles qui ont attaché accidentellement [114]. En outre, comme défaut majeur, le photocatalyseur ne peut pas dégrader la matière organique ou autre sans lumière, mais en présence d’une matrice poreuse comme l’apatite, les entités nocives peuvent être absorbées en absence de la lumière et se dégradent par suite. De même, le dioxyde de titane (TiO2) démonte la substance nuisible dégradée selon des réactions photochimiques, puis sera adsorbée par l’apatite qui l’empêche d’être rejetée dans la nature. Par conséquent, pour couvrir les susdits défauts, nous avons - 74 - développé des composites à base du dioxyde de titane (TiO2) avec des suspensions d'apatite comme le montre la figure IV-1. Figure IV-1 : Association de l’apatite avec le photoactif TiO2 et son utilisation pour dégrader photochimiquement les entités chimiques sous rayonnement ultraviolet. Dans cet objectif, l’apatite confère au photoactif TiO2 une autre propriété d’adsorption des polluants organiques initialement en solution ou des métabolites après les réactions photochimiques. La combinaison de l’oxyde de titane avec les suspensions d’hydroxyapatite préformées (HAP) est succinctement abordée dans ce chapitre. Notons que les apatites présentent de bonnes efficacités d’adsorption des polluants organiques et/ou inorganiques présents dans des effluents aussi bien liquide que gazeux. La mise en oeuvre de procédés capables d’éliminer des entités organiques non biodégradables s’avère nécessaire. Dans ce travail, différents gels du système mixte TiO2-HAp ont été préparés par procédé sol-gel et caractérisés par les techniques les plus adéquates. II. Procédure expérimentale II.1. Principe général du procédé sol gel La méthode sol-gel peut être utilisée pour l’élaboration de nombreux composés inorganiques ou hybrides organiques - inorganiques dans une large variété de structures telles que des films minces, des fibres optiques, des verres monolithiques ou encore des nanoparticules calibrées. Les procédés sol-gel sont devenus alors plus attractifs dans les domaines nanotechnologiques et environnementaux. On peut ainsi, via les procédés sol-gel, élaborer - 75 - une grande variété de nanomatériaux sous différentes formes (céramiques, composites, gels poreux, films, etc …). L’optimisation des conditions de synthèse doit être réalisée pour obtenir des composites TiO2-HAp à porosité ordonnée et homogène. Le principe de la préparation des matériaux du système mixte TiO2-HAp repose sur le processus solution - gélification de TiO2 en présence des nanoparticules d’HAp préformées, sous irradiations ultrasons. L’isopropoxyde de titane Ti(OCH(CH3)2)4 ou du butoxyde de titane Ti(O(CH2)3CH3)4 sont les précurseurs les plus utilisés pour synthétiser, par hydrolyse, des nanocristaux de TiO2 étudiés [117-118]. En outre, ce type de précurseur est aussi utilisé lors de la synthèse de pérovskites, BaTiO3 et SrTiO3 [115-116]. II.2. Préparation des composite TiO2-HAp II.2.1. Cas de l’hydroxyapatite HAp Comme nous l’avons décrit dans le chapitre III de cette partie, l’hydroxyapatite phosphocalcique Ca10(PO4)6(OH)2 a été préparée par la méthode de neutralisation de l’hydroxyde de calcium Ca(OH)2 par dihydrogénophosphate d’ammonium NH4H2PO4 en milieu aqueux à la température ambiante. Le précipité obtenu est filtré sous vide et lavé par un mélange eau puis par l’acétone et ensuite étuvé à 100°C pendant une nuit. Les suspensions d’HAp préformés sont dispersées dans l’eau à l’aide d’un bain ultrasons. II.2.2. Cas de la préparation de TiO2 par procédé sol-gel Tout d’abord, l’oxyde de titane TiO2 est préparé à partir d’une solution mère polymérique. On prépare une solution de 17,7g de tétraisopropyl orthotitanate TIPT (70wt%) dans 41,3g de 1-propanol comme solvant. On ajoute ensuite gouttes à gouttes de l'hydroxyde d'ammonium concentré (30%) sous irradiation ultrasons pendant 90 minutes. Dans ces conditions, une goutte d’eau (environ 0,1 ml) est additionnée au mélange réactif afin de favoriser le phénomène d’hydrolyse. Après l’addition d’eau, le pH du mélange est de l’ordre de 8. Ces conditions permettent tout d’abord d’activer la réaction polycondensation que celle d’hydrolyse. Après 2 heures, la gélification de TiO2 s’est produite. Le gel est séché à l’ambiante pendant deux jours et par la suite étuvé à 100°C pendant une nuit. - 76 - II.2.3. Préparation des composites du système mixte TiO2-HAp Le protocole de synthèse mis en place est similaire à celui permettant la synthèse de TiO2 pur. Différentes masses d’apatite HAp (de 0 à 3,268 g) ont été additionnées à un prélèvement de 12 mL de la solution mère de TIPT/1-propanol selon le rapport massique R=TiO2/HAp sous l’effet des irradiations ultrasons. Après une demi heure de sonication du mélange réactionnel, nous ajoutons une quantité d’ammoniaque (30%) convenable, suivie des gouttes d’eau sous irradions ultrasons. Le volume d’eau augmente légèrement avec la masse de l’HAp dispersée dans le gel TiO2. Après l’addition de l’ammoniaque et d’eau, nous avons enregistré des valeurs de pH supérieures à 8, ce qui montre que le milieu réactionnel est basique. Les gels résultants sont séchés à l’ambiante pendant deux jours, puis étuvés à 100°C pendant une nuit comme nous l’avons décrit dans le cas de la préparation de TiO2 pur. Les échantillons ont été nommés d’après le rapport massique R = mTiO2 m HAp . Le tableau IV-1 donne les quantités de l’HAp ajoutées dans 12 mL de la solution mère au cours de la préparation des gels du système mixte TiO2-HAp. Tableau IV-1 : Quantités de l’HAp ajoutées à la solution TTIP sous sonication R Volume de la solution de Masse de l’HAp (g) TiO2 (mL) 0 0,00 0,25 3,268 0,5 12 mL 1,634 1 0,817 2 0,408 4 0,204 De nouveaux traitements thermiques des échantillons étuvés ont été réalisés à 300°C, 500°C et 800°C afin d’étudier leur stabilité thermique et les différents changements structuraux et texturaux produits au cours du traitement thermique. III. Résultats et discussions III.1. Examen par diffraction des rayons X Les diagrammes de diffraction des rayons X des gels préparés à différents rapports massiques R étuvés à 100°C sont regroupés dans la figure IV-2. L’analyse de ces diagrammes - 77 - montre que l’incorporation de différents taux de TiO2 n’entraîne aucune altération de la structure apatitique. Les composites TiO2-HAp préparées sont mal cristallisées et constituées d’une phase unique caractéristique de celle de l’apatite mixée avec la solution TIPT. Par contre, la phase enregistrée pour le gel TiO2 pur, préparé par procédé sol, est amorphe. TiO 2 R4 R1 R0,25 HAp 20 25 30 35 40 45 50 55 60 2 théta (degré) Figure IV-2 : Diagrammes de diffraction des rayons X des gels préparés à différents taux de TiO2 et séchés à 100°C. Nous constatons que les raies de diffraction des matériaux du système mixte TiO2HAp, deviennent plus en plus larges, et leur intensité décroît lorsque le rapport massique R augmente. Cet élargissement des raies de diffraction des RX montre que la taille des particules des composites préparées est nanométrique. L’étude structurale des gels préparés en fonction de la température de calcination est aussi présentée dans cette étude. Lors d'un traitement thermique du gel, différentes réactions peuvent avoir lieu : déshydratation, évaporation et liquéfaction de certaines substances, transformation de phases cristallines, dissolution et cristallisation de nouvelles phases. Il apparaît nécessaire de traiter thermiquement la poudre brute afin d’obtenir des nanoparticules cristallisées de TiO2 surtout lors de son utilisation comme photoactif [119]. Rappelons que le TiO2 existe sous trois formes de structure cristalline : anatase (tétragonale), - 78 - rutile (tétragonale) et brookite (orthorhombique). Il est commercialement disponible selon deux structures cristallines : l’anatase et le rutile, qui sont deux phases tétragonales et présentent un intérêt technologique. Ces différentes structures cristallographiques induisent également des différences de structure électronique, avec en particulier des valeurs de bandes interdites (ou gaps) de 3,20 eV pour l’anatase et 3,02 eV pour le rutile. Par conséquent, les seuils d’absorption correspondent respectivement à des longueurs d’onde de 380 et 410 nm pour ces deux formes d’oxyde de titane. En général, l’anatase est le plus photoactif grâce à une plus grande mobilité des électrons, à une plus petite constante diélectrique et une plus faible densité [118]. L’anatase est cinétiquement stable, c'est-à-dire que sa transformation en rutile à basse température est tellement lente qu’elle peut être négligée. De nombreuses études ont été menées sur TiO2 rutile mais depuis quelques années celles-ci se concentrent sur la structure anatase [120-121]. La suite de cette étude de diffraction des RX portera uniquement sur la recherche de la cristallisation de la forme anatase à une température optimale. La température de traitement thermique choisie ne doit pas être trop élevée pour éviter la croissance des grains et par la suite une perte de porosité [122]. A titre d’exemple, la figure IV-3 illustre le suivi de l’évolution structurale du composite R4 en fonction de la température de calcination. D’après cette étude, nous constatons la diminution de l’intensité des raies de diffraction de la phase apatitique et l’apparition des pics de diffraction relatifs à la phase anatase TiO2 à partir de la température de calcination de 500°C. Cette température minimale de calcination respecte les deux critères suivants : obtenir la structure anatase et limiter le grossissement des nanocristaux, dont la taille de cristallites est inférieures à 15 nm environ, déduites de la largeur à mi-hauteur des principaux pics de diffraction. Rappelons que différents paramètres peuvent influencer sur les propriétés d’adsorption et photochimique en particulier la morphologie des grains, la structure cristalline et la surface des matériaux photoactifs favorisant les interactions avec les espèces chimiques en contact [123]. - 79 - * * TiO -anatase 2 2 théta 24 25 * 26 27 28 800°C 500°C 300°C 100°C 20 30 40 50 60 2 Théta (degré) Figure IV-3 : Diagrammes de diffraction des RX du gel R4 étuvé à 100°C et calciné à 300°C, 500°C et 800°C. Les diagrammes de diffraction des RX des composites préparés et calcinés à 800°C, sont rassemblés dans la figure IV-4. Les raies de diffraction des rayons X relatives aux deux phases HAp et TiO2 sont fines et reflètent la bonne cristallisation des matériaux du système mixte TiO2-HAp à la température de 800°C. Néanmoins, une phase secondaire attribuable au phosphate tricalcique β-Ca3(PO4)2 est apparue, dont la présence de celle-ci explique une certaine réactivité à cause des interactions électrostatiques entre de l’hydroxyapatite HAp et la surface de l’oxyde de titane TiO2 ou par un processus de dissolution de HAp dans la matrice TiO2. - 80 - TiO anatase * 2 ∆ Apatite O β-Ca3(PO4)2 * TiO * * 2 R4 * * ∆ ∆ O∆ ∆ O∆ R1 ∆ ∆O O * ∆∆ ∆∆ ∆ ∆ * ∆∆ * HAp 20 25 30 35 40 45 50 55 2 Théta (degré ) Figure IV-4 : Diagrammes de diffractions des RX de quelques composites du système TiO2HAp calcinés à 800°C. III.2. Examen par spectroscopie RMN- MAS du 31P et 13C à l’état solide D’après les résultats de l’analyse RMN-MAS du 31 P des gels du système mixte TiO2- HAp, nous notons la conservation du pic à 3,0 ppm caractéristique du phosphore inorganique habituellement détecté dans la structure apatitique HAp (Figure IV-5). Ce résultat montre que les particules d’HAp sont seulement dispersées dans le gel TiO2 étuvé soit dans les pores ou à l’intermédiaire des liaisons hydrogènes. Le traitement thermique à 800°C des gels étuvés montre l’apparition d’un pic supplémentaire de faible intensité à 0,7 ppm (Figure IV-6). Ce résultat est en bon accord avec les données de la diffraction des RX. - 81 - 31P CP MAS NMR at 100°C HAp référence R 0,25 R1 R2 R4 35 30 25 20 15 10 5 0 -5 -10 -15 -20 -25 -30 Déplacement chimique (ppm) Figure IV-5: Spectres de la RMN du phosphore 31P à l’état solide des gels étuvés du système TiO2-HAp. Figure IV-6 : Evolution des spectres RMN du calciné à 500°C et 800°C. - 82 - 31 P à l’état solide du gel R4 étuvé et 31P HPDec MAS NMR at 800°C R4 R1 R0.5 R0.25 HAp 35 30 25 20 15 10 5 0 -5 -10 -15 -20 -25 -30 (ppm) Figure IV-7 : Spectres RMN du 31 P à l’état solide des gels à différents valeurs de R et calcinés à 800°C. III. 3 Microscopie électronique à transmission La microscopie électronique à transmission (MET) permet de réaliser des observations morphologiques. Les images qui résultent ont une qualité de définition tridimensionnelle. Sous l'impact du faisceau d'électrons, il y a rétro diffusion d'électrons du faisceau incident, émission d'électrons secondaires de faible énergie, provenant de l'ionisation des atomes de l'échantillon, et émission d'électrons Auger et de rayons X caractéristiques des éléments présents dans l'échantillon. Le détecteur du MEB récupère un mélange en proportion variable d'électrons secondaires et d'électrons rétro diffusés, proportion dépendant de l'énergie primaire, de la distance échantillon - objectif, de l'angle d'incidence du faisceau primaire et du matériau observé. Les électrons secondaires permettent de distinguer les détails de la topographie de surface de l’échantillon. Les électrons rétro-diffusés permettent d'en observer le contraste chimique. - 83 - Cette étude a montré que les composites TiO2-HAp sont composés de nanoparticules, dont leur taille varie avec la teneur de TiO2 et de la température de calcination. Les composites sont caractérisés par une morphologie homogène et de forme régulière dont la taille des particules est entre 5 et 60 nm selon le rapport massique R. Figure V-8 : Images de la microscopie électronique à transmission des composites de TiO2 – HAp (a)-(d) étuvés à différentes températures. Les images que nous avons obtenues par MET des composites TiO2-HAp étuvés et calcinées à différentes températures montrent qu’ils sont fortement agglomérées et denses que l’apatite de référence. Les agglomérats se présentent sous différentes tailles variant de l’ordre de 1µm selon le rapport massique R. III.4. Mesure de la surface spécifique Afin de connaître l’influence des nanoparticules d’apatite sur la porosité des composites TiO2-HAp, nous avons établi les isothermes d'adsorption - désorption de N2 (BET) ainsi que les distributions des pores sur la surface des gels bruts et calcinés. L’analyse de la texture poreuse a été réalisée sur des poudres présentant différentes teneurs en TiO2. L’allure des courbes est sensiblement la même quelle que soit la proportion d’apatite dans le matériau final (Figure IV-10). Elles présentent toutes une boucle d’hystérésis caractéristique d’un matériau mésoporeux. Les valeurs des surfaces spécifiques des gels étuvés et calcinés à 500°C sont données dans le tableau IV-2. Nous notons une augmentation de la surface spécifique avec le rapport R. - 84 - 2 2 (Arb.éch) 3 N -Volume adsorbé (cm /g) TiO 800 600 R=4 400 R=1 R=0,25 200 HAp 0 0 0,2 0,4 0,6 Pression relative P/P 0,8 1 0 Figure IV-10 : Isothermes d'adsorption- désorption de N2 sur les composites TiO2-HAp et celle de référence HAp à 100°C. Nous constatons que la présence d’une hystérésis suggère une mésoporosité de la surface des composites étudiés, dans lesquels se produit une condensation capillaire. Les surfaces spécifiques des matériaux du système mixte TiO2-HAp sont plus importantes que celle de l’apatite de référence HAp (120 m2/g). On observe cependant une évolution de la surface spécifique de l’HAp vers celle de TiO2. Le traitement thermique des gels à 500°C réduit la porosité de ceux-ci et les valeurs de leur surfaces spécifiques sont comprises entre 100 et 120 m2/g légèrement inférieure que celle de TiO2 calciné à la même température. Nous avons aussi déterminé la distribution des pores à l’aide de la méthode BJH. Les courbes de distribution volumique de la taille des pores des composites TiO2-HAp comparées à celle de l’HAp et TiO2 sont illustrées par la figure IV-11. - 85 - Tableau IV-2 : Effet du nombre de fonctions amines du greffon sur la capacité d’adsorption de l’apatite greffée. TiO2-HAp Température (°C) SBET (m2/g) Dp (nm) Vp (cm3/g) HAp R0,25 R0,5 R1 R2 R4 TiO2 100 120 11 35,15 500 60 15 15,85 100 191 2,71 44,06 500 114 4,61 26,2 100 205 2,38 47,12 500 121 4,61 27,932 100 228 1,85 52,38 500 96 4,61 22,23 100 290 1,85 66,72 500 123 4,03 28,4 100 357 1,61 82,06 500 93 4,61 21,49 100 407 3,60 93,58 500 165 8,58 45,72 TiO2 étuvé R0,25 étuvé R1 étuvé HAp étuvé R4 étuvé 0.15 3 -1 -1 δV/δDp( cm .g .nm ) 0.2 0.1 0.05 0 1 10 Diamètre des pores D (nm) 100 p Figure V-11 : Distributions des pores sur les surfaces les apatites greffées TiO2-HAp et celle de référence HAp à 100°C. - 86 - 100°C 0,05 0,04 0,03 p 3 -1 -1 δV/δD (cm .g nm ) 500°C 0,02 0,01 0 1 10 100 Diamètre des pores Dp (nm) Figure IV-12 : Distribution des pores à la surface du composite R1 étuvé et calciné à 100°C et 500°C. D’après la figure IV-12, nous constatons que la taille des pores à la surface des composites croit avec la température de calcination, ceci est lié à la croissance des grains lors d’un traitement thermique. En revanche, on observe une réduction de la taille des pores lorsque le rapport R augmente, comparés aux références HAp et TiO2. Cette variation texturale est liée à la manière de la dispersion des nanoparticules de l’HAp dans la matrice de TiO2 et aux températures de traitement appliquées. Par ailleurs, dans de nombreuses réactions photocatalytiques, il est possible de trouver une relation linéaire entre la vitesse de dégradation et la quantité de substrat adsorbé à la surface du photocatalyseur. Quand on augmente la surface spécifique (aire développée par unité de masse de solide photocatalytique), sans en changer les propriétés de surface, la vitesse de réaction entre les e- et les h+ avec le substrat devient plus rapide du fait du nombre plus important de molécules adsorbées entourant les paires e- et h+. Ainsi, une surface spécifique plus grande permet d’envisager une activité photocatalytique plus importante [124]. - 87 - Conclusion Dans ce chapitre, nous avons pu élaborer et caractériser des composites du système mixte TiO2-HAp, susceptibles de posséder des propriétés physicochimiques intéressantes. Différents composites ont été étudiés afin de pouvoir montrer l’effet de l’addition de l’apatite dans la matrice TiO2. L'ensemble de ces résultats permet d'apporter des précisions sur la corrélation entre les propriétés structurale et texturale afin de les utiliser comme matériaux photoactifs notamment pour la dégradation des substances organiques nocives que nous allons traiter dans les perspectives du présent travail. - 88 - Partie III Contribution à l’étude des mécanismes de sorption aux interfaces apatite- soluté - 89 - Dans le contexte économique et politique actuel de notre pays, les problèmes de traitement des eaux usées revêtent une importance capitale. Le Maroc a engagé un vaste programme dans ce domaine dont le développement doit encore se poursuivre longtemps. Ce choix a permis non seulement de réduire la nocivité des déchets traités, mais également de récupérer quelques produits à valeurs ajoutées et développer certaines techniques de traitement des eaux usées. Pour cela, la caractérisation des surfaces et la maîtrise des mécanismes de sorptions aux interfaces solide - liquide revêt une importance primordiale. Dans un premier objectif, il est recommandé de déterminer le pouvoir adsorbable des systèmes phosphatés envisageables afin d’établir des bases de données fiables. Le deuxième objectif consiste à mieux comprendre les différents mécanismes de sorption mis en jeu à l’échelle atomique. Notons que l’efficacité et la maîtrise des mécanismes de sorption est non seulement nécessaire dans la rétention des substances nocives mais également dans le cadre de la valorisation des ressources naturelles en particulier le phosphate naturel marocain. Notre étude a porté sur la valorisation des matériaux naturels abondants dans notre pays, susceptibles de jouer un rôle important dans les barrières artificielle et naturelle. Plus particulièrement, nous nous sommes intéressés au phosphate naturel et ses dérivés, que nous avons déjà préparés et caractérisés, capables de fixer les cations métalliques en solution aqueuse. Les phosphates naturels et les apatites synthétiques ont été proposés comme matériaux fixateurs de la plupart des métaux lourds grâce à leurs propriétés structurales et texturales telles que leur grande insolubilité, leur porosité et leur capacité à retenir des espèces par substitution d’un des groupements constitutifs de leur réseau cristallin [125-131]. Dans ce cas, la recherche de nouveaux matériaux très abondants et la caractérisation de leurs surfaces ainsi que les mécanismes de sorption aux interfaces « apatite - liquide » demeure l’un des principaux objectifs de notre étude qui doivent permettre de mieux comprendre la relation entre les propriétés physico-chimiques des apatites hybrides et leurs capacités d’adsorption. La surface spécifique des matériaux dérivés du phosphate naturel ou synthétiques dépend sans doute de la composition chimique de ceux-ci et de la méthode de leur préparation adoptée. - 90 - Chapitre V Etude de la sorption d'ions métalliques aqueux par des surfaces des apatites fonctionnalisées par l’aminophosphonate - 91 - Introduction Les apatites jouent un rôle significatif dans une gamme variée de problèmes environnementaux et leurs applications augmentent sans cesse. Les propriétés d’adsorption varient selon la nature de l’apatite et en particulièrement selon la composition de sa surface, sachant que la surface spécifique n’est pas le seul paramètre. De nombreuses expériences ont été réalisées pour étudier le comportement des métaux lourds avec les apatites naturelles et synthétiques. La capacité d’adsorption des matériaux étudiés serait corrélée à la force des liaisons entre l’adsorbant et les éléments métalliques. L’étude relative à ce chapitre est consacrée à la valorisation du phosphate naturel à application environnementale. Une meilleure compréhension des mécanismes de sorption des métaux lourds sur des apatites hybrides dérivées du phosphate naturel et celles synthétiques à partir des précurseurs commerciaux a été entamée. Nous pouvons raisonnablement penser que le remplacement des adsorbants d’apatite synthétique par le phosphate naturel modifié, dont la disponibilité ne poserait pas de difficultés particulières, favoriserait le développement des agents de dépollution des eaux usées. I. Procédure d’adsorption Les solutions aqueuses des ions métalliques (Pb2+ et Zn2+) à différentes concentrations utilisées au cours de cette étude ont été préparées à partir de leurs sels correspondants (M(NO3)2, xH2O). Pour cela, l’adsorption est obtenue par contact entre 0,2 gramme de l’adsorbant et 100 mL de la solution métallique à la température ambiante (25°C). En se référant aux travaux de recherche réalisés dans notre laboratoire surtout ceux de El Asri [50] toutes les expériences d’adsorption effectuées dans le cadre de cette étude ont été effectuées à pH = 5. Après 3 heures de contact apatite- métal, on filtre le mélange et le filtrat est dosé par ICP et/ou par absorption atomique. La quantité du métal adsorbé qa (mg/g) est calculée à partir de la relation suivante : qa = C0 : la concentration initiale du métal (mg/L) C0 - Ce .V m Ce : la concentration du métal à l’équilibre (mg/L) avec : V : le volume de la solution (L) m : la masse de l’adsorbant (g). - 92 - La complexité du problème, auquel nous sommes confrontés, vient du nombre de paramètres à prendre en compte et d’échantillons à analyser. II. Sorption des métaux par les phosphates naturel PN et modifié PNM Dans cette partie, nous allons reproduire les résultats obtenus par El Asri et coll. [50, 132], réalisés dans notre Laboratoire de Chimie Physique Générale sur la rétention des ions métalliques par le phosphate naturel. Ces résultats sont nécessaires à rappeler dans cette étude afin de pouvoir comparer les performances de nos nouveaux matériaux vis-à-vis de leurs capacités d’adsorption par rapport au phosphate naturel pris comme référence. Les capacités maximales indiquées dans le tableau V-1 montre que le phosphate naturel étudié ne présente pas des caractéristiques d’adsorption relativement importantes comparées à celles des apatites citées dans la littérature. Néanmoins, dans le même contexte, l’hydroxyapatite dérivée du phosphate naturel marocain (notée PNM) présente une capacité d’adsorption supérieure à celle du phosphate naturel. Cette amélioration de la performance adsorbable des métaux lourds est liée aux propriétés de surface des phosphates étudiés. En effet, les surfaces spécifiques des phosphates naturel brut PN et modifié PNM sont respectivement 20 m2/g et 150 m2/g, ce qui sont en bon accord avec la variation de leur capacité maximale d’adsorption. Dans le but d’améliorer encore ces propriétés, nous avons procédé par la modification de la surface des adsorbants phosphatés par greffage de l’aminophosphonate que nous avons préparé et caractérisé dans la partie II de ce travail. Tableau V-1 : Surface et capacité maximale d’adsorption des phosphates PN et PNM [50]. SBET (m2.g-1) Capacité d’adsorption (mg.g-1) Pb2+ Zn2+ Cu2+ PN 20 98.5 54 35 PNM 150 350 167 152 III. Processus d’adsorption des ions Pb2+ e Zn2+ sur les apatites hybrides III.1 Propriétés acido-basiques des solutions durant le processus d’adsorption des ions métalliques par les apatites hybrides De nombreuses études ont évoqué l’effet du pH sur le processus de la rétention des métaux lourds des solutions aqueuses par de nombreux solides [133-135]. Le but de ces expériences acido-basiques est de savoir la variation du pH durant le processus d’adsorption - 93 - des ions Pb2+ et Zn2+ sur les matrices phosphatées utilisées. Ceci nous aide à évoquer un mécanisme de la fixation de ces ions par les différents adsorbants. La valeur du pH=5 prise initialement a été convenablement choisie d’une part pour éviter la précipitation des hydroxydes métalliques et de la dissolution de nos poudres et d’autres part pour avoir un milieu comparable à celui de la plupart des rejets industriels dont le pH est dans cet ordre de grandeur. A titre d’exemple, l’évolution du pH de la solution lors de l’adsorption des ions Pb2+ par les apatites hybrides dérivées du phosphate naturel est reportée dans la figure V-1. H O / 0% AMP 2 (PNM reference) 8 7,5 H O / 2,5%AMP-PNM 2 7 H O / 5%AMP-PNM pH 2 Pb / 2,5%AMP-PNM 6,5 Pb / 5%AMP-PNM 6 Pb / 0% AMP-PNM 5,5 5 0 40 80 120 160 200 240 Temps (min) Figue V-1 : Evolution du pH au cours du processus d’adsorption des ions Pb2+ par les apatites hybrides AMP-PNM En absence des ions métalliques, nous observons une augmentation du pH de la solution par rapport à la valeur fixée initialement (pHi = 5) en fonction du temps jusqu’à atteindre à un pH d’équilibre entre 6,90 et 7,90 selon le taux de greffage AMP où il reste stable (Tableau V-2). Cette augmentation de pH est due à la libération des espèces basiques dans la solution. - 94 - Tableau V-2 : pH à l’équilibre des solutions aqueuses avec et sans ions Pb2+ en présence de différents taux de greffage de l’AMP (le pH initial est ajusté à 5 pour chaque solution). Taux de greffage (%) 0 2,5 5 10 sans Pb2+ 7,90 7,08 6,97 6,90 avec Pb2+ 6,01 6,40 6,32 6,30 En présence des ions métalliques, nous constatons une diminution de pH selon le taux de greffage, dont le palier de pH s’établit pour une durée qui ne dépasse pas 20 min. Cela est dû à la complexation des ions métalliques par les groupements anioniques de la surface pour former un complexe de type S≡O-M+. Cette complexation conduit à la libération des protons H+ issus de la matrice adsorbante, ce qui réduit le pH du mélange apatite-métal. En pH acide, les ions H+ sont en compétition avec les cations métalliques pour les sites d’échanges. Les cations hydroxylés MOH+, formés par hydrolyse, ont des liaisons plus fortes avec la surface de l’apatite que les cations métalliques libres M2+. En effet, les propriétés de surface des apatites, telles que la solubilité ou l’affinité à fixer certains éléments toxiques, varient fortement avec la porosité et la composition chimique de celles-ci [135]. Comme pour de nombreux solides poreux, la charge de la surface est un paramètre primordial définissant les caractéristiques du contact solide-soluté [136]. La modification de ce paramètre, que nous avons réalisé par greffage de molécules AMP dans la structure apatitique, est en partie à l’origine de la variation du pH. Par conséquent, l’aptitude de l’apatite greffée de retenir des ions métalliques s’est améliorée à pH acide [50]. Les groupements de surface, S≡-OH, S≡-OH2+ ou S≡-O-, qui apparaissent lors de la mise en contact de l’apatite avec le soluté, développent des interactions avec l’eau et exercent un effet structurant marqué sur le liquide [137-138]. Cet arrangement disparaît progressivement lorsqu’on s’éloigne de la surface. Notons que la présence des espèces phosphate et calcium dans la matrice de l’apatite agit sur les propriétés acido-basiques de la surface de celle-ci comme le montrent les deux équations de la réaction : - 95 - Quant à la description des sites réactifs de la surface utilisés, elle s’inspire des travaux de Wu et coll. [139]. Cette description fait intervenir un site monodentate pour le calcium et deux types de site pour les groupements phosphates : Si la présence de groupements PO3-OH issus de la protonation des groupements phosphates a été mise en évidence par de nombreux auteurs, la présence de groupements CaOH (Ca–O) n’a pas été révélée. Cependant, la solubilité et la stabilité de l’hydroxyapatite en solution ainsi que la présence des impuretés peuvent affecter les mesures du pH à l’équilibre. En effet, la présence des groupements carbonates, phosphonates et amines existants dans la structure des apatites étudiées provoque une déficience en calcium, ce qui favorise un excès de charge négative à la surface susceptibles d’être des sites actifs. L’étude de la variation de pH des solutions en présence des particules phosphatées nous permet de prévoir un mécanisme probable de la complexation des ions M2+ et la libération des espèces acides au cours du processus de l’adsorption, ce qui donne une meilleure propriété adsorbable de l’apatite surtout lorsqu’elle est poreuse ou hybridée. A chaque étape de notre travail, nous avons comparé les résultats obtenus pour les deux types de matériaux hybrides (matériaux dérivés du phosphate naturel (I) et ceux préparés à partir des précurseurs commerciaux (II). D’après les résultats de la variation du pH, nous remarquons que la valeur du pH de la solution AMP-PNM en présence du métal est relativement supérieure à celui du système AMP-HAp / métal. Cette différence est due à la libération instantanée des espèces basiques CO32- issus du phosphate naturel et qui peut affecter le pH de la solution à l’équilibre et par la - 96 - suite favorise la fixation des espèces métalliques surtout les ions Pb2+ favorisée par une bonne précipitation de PbCO3. III.2. Origine de la charge de la surface de l’apatite hybride La nouvelle charge de surface des apatites hybrides étudiées provient soit du greffage des substances chargées soit de la formation de complexes entre un site de cette surface et les espèces en solution. Cette modification de charge est attribuée à la substitution des ions PO43par les molécules AMP ou bien à la création de nouveaux pores dans la structure de la couche superficielle de l’apatite modifiée. Bell et col. [140] ont tenté de préciser la stoechiométrie de la surface et la charge des apatites poreuses qui est encore difficile à maîtriser surtout dans le cas des systèmes complexes tels que ceux préparés à partir du phosphate naturel. Les rapports molaires Ca/P des apatites préparées sont différents de 1,67, et la surface est modifiée, par conséquent la charge de la surface étudiée est liée sans doute aux nombreuses substitutions effectuées provenant du greffage des espèces AMP et de la nouvelle porosité créée. III.3. Etudes cinétiques des phénomènes d’adsorption des ions métalliques sur les apatites hybrides Au cours de cette étude, nous cherchons le temps nécessaire pendant lequel l’équilibre solide - soluté est atteint [141]. L'allure des courbes, illustrées par la figure V-2, permet de mettre en évidence deux zones : * La première partie de la courbe révèle une adsorption rapide avec des taux d'adsorption maximum au bout de 15 à 40 min de contact selon la concentration du métal et la nature de l’adsorbant. * La deuxième partie se présente sous forme d'un plateau au-delà des temps d’équilibres. A ce niveau, il y a un pseudo-équilibre adsorption-désorption au cours duquel les vitesses d’adsorption et de désorption et les cinétiques d'adsorption deviennent relativement plus lentes. D’après la figure V-2, nous constatons pour différents métaux et adsorbants, le temps d’équilibre maximal ne dépasse pas 60 min. Dans le cas du contact des ions Pb2+ avec les apatites AMP-PNM, ce temps est plus rapide, comparé à ceux trouvés dans le cas du phosphate naturel ou de l’apatite de référence (PNM). Cette différence est liée aux propriétés - 97 - de surface de chaque adsorbant et plus particulièrement au nombre de sites actifs présents dans chaque matériau, capables de fixer les ions métalliques en provoquant la saturation de la surface. Dans tous les cas, le pourcentage de rétention des ions Pb2+ atteint moyennement 90%. Cette cinétique de sorption rapide est probablement due à l’action conjointe de la présence des groupements phosphonates et amines et de leur concentration à la surface des apatites hybrides [141]. -1 40 Pb adsorbé (mg.g ) 50 -1 Pb adsorbé (mg.g ) 50 (a) 30 0% AMP-HAP 2,5 % AMP-HAP 5%AMP-HAP 10%AMP-HAP 20 10 40 (b) 30 20 PN 0%AMP-PNM 2.5% AMP-PNM 5%AMP-PNM 10 0 0 0 0 50 100 150 200 50 100 150 200 Temps (min) Temps (min) Figure V-2 : Influence du temps du contact sur l’adsorption des ions Pb2+ aux surfaces des apatites hydrides (a) AMP-HAp et (b) AMP-PNM. (pH = 5, [Pb2+]init = 100 mg.L-1, dose l’apatite = 2 g.L-1, T=25°C). Généralement, les solides poreux au contact des espèces chimiques peuvent se charger en surface suite à une dissolution préférentielle, de l’adsorption d’ions ou par la formation de complexes entre les ions du réseau et les espèces en solution [142]. Dans le cas de l’hydroxyapatite, par exemple, il a été montré que la perte d’ions Ca2+ et PO43– se passe en trois étapes. Après un rapide échange avec la couche d’hydratation (1 à 2 min), des échanges moyennement lents (de l’ordre de 30 min) d’espèces ioniques ont lieu à la surface puis un processus très lent d’incorporation des ions dans le cristal se produit. La sorption des ions Pb2+ et Zn2+ par les apatites hybrides peut être expliquée par un phénomène d’échange rapide de ligands avec les protons de surface. La rétention de ces cations indique l’existence de sites réactionnels porteurs de charges négatives à la surface. Ces charges peuvent provenir de trois types de fonctions anioniques présents dans la matrice hybride, phosphate O-P-O-, phosphonate et amine . - 98 - III.4. Etude des isothermes d’adsorption Dans le but de déterminer la capacité d’adsorption du métal sur les adsorbants dérivés d’apatite naturelle et synthétique, nous avons varié la concentration initiale en métal de 0 à 2000 mg/L. Pour tous les tests d'adsorption réalisés dans ce travail, un temps de contact de 3 heures a été choisi comme temps pour lequel le pseudo équilibre est supposé déjà atteint. Les figures V-3 et V-4 présentent respectivement les isothermes d’adsorption des ions métalliques Pb2+ et Zn2+ sur les apatites hybrides. D’après la classification de Giles, les isothermes sont de type L (classe Langmuir). La forme d’isothermes indique que l’adsorption s’effectue selon un processus de “mouillage” du système mésoporeux et de surface externe en relation avec les propriétés de surface des solides étudiés. (a) 650 5%AMP-HAp 400 10%NTP-PNM 5%NTP-PNM -1 520 2.5%AMP-HAp 2.5%NTP-PNM a -1 300 Pb adsorbé (mg.g ) Pb adsorbé q (mg g ) (b) 10%AMP-HAp 0%AMP-HAp 200 100 390 0%NTP-PNM 260 130 0 0 400 800 1200 1600 0 -1 0 Concentration à l'équilibre C (mg.L ) 200 400 600 800 1000 e 1200 1400 -1 Concentration à l'équilibre C (mg.L ) e Figure V-3 : Effet de la concentration initiale des ions Pb2+ sur le pouvoir de rétention des apatites hybrides (a) AMP-HAp et (b) AMP-PNM (pH = 5, dose = 2g.L-1, T = 25°C) (a) 300 320 10% AMP-PNM 5%AMP-PNM -1 -1 Zn adsorbé q (mg.g ) 5% AMP-HAp 250 Zn adsorbé q (mg g ) (b) 10% AMP-HAp 2.5% AMP-HAp 240 2.5%AMP-PNM a a 200 150 0% AMP-HAp 100 50 160 0%AMP-PNM 80 0 0 0 300 600 900 1200 0 500 1000 1500 2000 -1 -1 Concentration à l'équilibre (mg.L ) Concentration à l'équilibre C (mg.L ) e Figure V-4: Effet de la concentration initiale des ions Zn2+ sur le pouvoir de rétention des apatites - 99 - hybrides (a) AMP-HAp et (b) AMP-PNM (pH = 5, dose = 2g/L, T = 25°C) Si nous comparons les quantités du métal sorbé, rapportées à la surface spécifique des apatites mise en contact, la quantité de Pb retenue, en fonction du taux de greffage, est nettement supérieure à celle du zinc pour chaque taux de greffage. Par contre, quelque soit la catégorie d’apatites, on note une légère différence de la quantité sorbée en comparant les apatites hybrides à 5% et 10%AMP. A première vue, ces résultats indiquent que les apatites hybrides AMP-PNM possèdent une plus grande affinité pour le Pb que le Zn. De plus, les apatites hybrides AMP-PNM issues du phosphate naturel adsorbent mieux que celles synthétiques AMP-HAp. D’après les données du tableau V-3, nous remarquons que la capacité maximale de chaque métal adsorbée augmente avec le taux de greffage des molécules AMP, mais cette augmentation est relativement moins importante pour 10%AMP. Cette différence, en quantité du métal adsorbé entre les apatites hybrides, est due aux fonctions phosphonates et amine présentes à la surface poreuse des matériaux hybrides. Ce qui confère à ces matériaux des caractéristiques adsorbantes meilleures à fixer les espèces cationiques dans les conditions opératoires choisies. Tableau V-3: Corrélation entre les propriétés de surface et d’adsorption des apatites hybrides. SBET (m2.g-1) Capacité d’adsorption (mg.g-1) Pb2+ Taux Zn2+ AMP-PNM AMP-HAp AMP-PNM AMP-HAp AMP-PNM AMP-HAp 0% 150 120 350 250 150 153 2,5 % 198 159 443 382 226 190 5% 148 122 606 400 274 250 10 % 145 92 635 407 300 269 Chiron et coll. [143] ont montré que l’introduction de l’éthylediamine substituée, N-[3(trimethoxysilyl)propyl]-ethylenediamine, dans la matrice de la silice favorise l’élimination des ions Pb2+ et Cu2+ des solutions aqueuses. En effet, la présence des fonctions amines dans la silice hybride fixe les espèces métalliques via les réactions de complexation. De même, d’autres études [144] ont montré que la bonne efficacité des xérogels hybrides aniline/silice - 100 - vis-à-vis de la rétention de quelques métaux, ce qui nous amène à conclure que les fonctions amines greffées à la surface des solides modifient la surface de ces matériaux et par conséquent complexent favorablement les espèces cationiques [143-146]. La modification de la structure et de la surface de l’adsorbant par son association à d’autres groupements (acide, base, polymère,…) a une influence positive sur sa capacité d’adsorption. En raison du coût qui reste relativement élevé pour la plupart des adsorbants synthétiques, les industriels ont des réserves sur son emploi comme produit pour le traitement de leurs effluents inorganiques ouvrant ainsi la voie à la découverte d’autres adsorbants dérivant de plusieurs sources telles que les apatites. Dans ce but, nous avons pu démontrer l’effet de l’introduction des espèces complexantes de l’AMP sur l’élimination des ions Pb2+ et Zn2+ des solutions aqueuses. Les capacités de rétention des ions Pb2+ et Zn2+ par ces apatites hybrides ont été comparées à celle du phosphate naturel. Le greffage des hydroxyapatites par les phosphonates et amines fait augmenter la capacité d’adsorption de celle vis à vis des métaux lourds selon des réactions de complexation entre les groupements phosphonates et amines et les cations métalliques. Nos résultats sont en bon accord avec ceux de Oberto et coll. [102] qui ont élaboré des apatites greffées par des organosilanes en vue de leur utilisation pour l’élimination des ions métalliques Cu2+ et Co2+ (Tableau V-4). Tableau V-4 : Capacité de rétention des ions Cu2+ et Co2+ sur les différentes hydroxyapatites greffées. Apatite greffée Nature du radical R SBET(m2/g) Capacité d’adsorption (mmol.g-1) HAp HAp-(CH3O)3Si(CH2)3R Cu2+ Co2+ - 58 0,69 0,30 R=–NH2 15,2 1,50 1,28 R= –NHCH2CH2NH2 11 1,80 1,48 NHCH2CH2NHCH2CH2NH2 5 1,98 1,66 Ces auteurs ont prouvé que la diminution considérable de la surface spécifique est expliquée par la fixation des groupements organosilanes à la surface de l’HAp en occupant ses pores. Il ressort de ce tableau que même si la surface spécifique des matériaux a diminué d’une façon considérable avec l’augmentation de taux de greffage, l’hydroxyapatite greffée possède une forte capacité de rétention des cations métalliques. Ainsi, cette rétention est de - 101 - plus en plus meilleure lorsque le nombre de fonctions amines greffées est important. Cette étude montre bien que le mécanisme d’adsorption a fait intervenir un paramètre autre que la surface spécifique à savoir la complexation par la fonction amine. Quelques exemples sont donnés dans le tableau V-5 montrant l’efficacité de quelques apatites vis-à-vis de certains métaux lourds. Ainsi, les produits naturels disponibles en grande quantité ou certains déchets industriels ou agricoles peuvent présenter un potentiel adsorbant intéressant pour le traitement des eaux usées. Le choix de ces matériaux doit se faire en fonction de leur pouvoir adsorbant et de la quantité disponible géographiquement. - 102 - Tableau V-5: Capacités d’adsorption des ions Pb2+, Cu2+, Zn2+ par différents adsorbants. adsorbants Phosphate Metlaoui (Tunisie) Phosphate Mazıdağı (Tuquie) Minéraux et phosphate Youssofia résidus Maroc phosphate Bengurir Maroc Manganese nodule leached residue Tourbe Phosphate naturel modifié Apatites synthétiques modifiées hydroxyapatite carbonatée Hydroxyapatite/polyuret hane composite foams Hydroxyapatite poreuse AMP-PNM (0%) AMP-HAp (0%) AMP-PNM (5%) AMP-HAp (10%) Phosphate naturel de Benguérir PN capacité d’adsorption (mg/g) 12,78 (Pb2+) 10,46 (Cu2+) 8,54 (Zn2+) 200,50 (Pb2+) conc. initiale (mg/L) 10-500 10-500 10-500 25-100 pH Réf. 5,0 5,0 5.0 5.0 [147] [148] 10–150 5.0 [149] 100-1500 100 - 1500 100 - 1500 5,0 5,0 5,0 [132] 97,1 (Pb2+) 25,4 (Cu2+) 103,7 (Pb2+) 12,48 (Cu2+) 352 (Pb2+) 166 (Cu2+) 152 (Zn2+) 28 – 220 9.4 – 100 10 - 150 10 - 150 100 - 1500 100 - 1500 100 - 1500 6,0 6,0 4,5 4,5 5.0 5.0 5.0 [150] 94.3 (Pb2+) 142.86 (Cu2+) 150 (Pb2+) 10 - 500 20 - 200 44 -184 6.0 5.0 5.0 [152] [153] [154] 409 (Pb2+) 352 (Pb2+) 150 (Zn2+) 250 (Pb2+) 153 (Zn2+) 606 (Pb2+) 274 (Zn2+) 400 (Pb2+) 250 (Zn2+) 250 (Pb2+) 153 (Zn2+) 50-1500 50-1500 3.0 5.0 [99] 50-1500 5.0 Ce travail 89,29 (Pb2+) 98 (Pb2+) 57 (Cu2+) 35 (Zn2+) 50-1500 50-1500 La modélisation des courbes de sorption des ions Pb2+ et Zn2+ apporte des indications complémentaires concernant le type de complexe formé selon les possibilités d’ajustement ou non des courbes expérimentales. - 103 - [151] [132] IV. Partie Théorique IV.1. Modèles cinétiques de l’adsorption Pour chaque couple métal -apatite, nous avons restreint notre étude à la détermination cinétique des réactions mises en jeu durant le processus d’adsorption étudié en se basant sur les équations de Lagergreen (pseudo premier ordre) et de Ho et Mc Kay (pseudo second ordre). La constante de vitesse d’adsorption du pseudo premier ordre est déduite à partir du modèle établi par Lagergreen [155]. Dans le souci de se rapprocher le plus possible du mécanisme réactionnel réel, Ho et Mc Kay [156] ont opté plutôt pour un modèle cinétique d’ordre 2. Ces modèles mathématiques ont été choisis d’une part pour leur simplicité et d’autre part pour leur application dans le domaine d’adsorption des éléments organiques et inorganiques sur les différents adsorbants naturels et synthétiques. En effet, l’équation de Lagergreen n’est valable, en général, qu’en début du processus d’adsorption. Par contre, l’équation de Ho et Mc Kay est utilisée pour une large gamme de temps lorsqu’on suppose un mécanisme de chimisorption contrairement aux modèles de Langmuir et Freundlich qui seront décrits par la suite. a. Modèle cinétique du premier ordre L’expression de Lagergreen décrivant le modèle cinétique du pseudo-premier ordre, citée récemment dans plusieurs travaux [97, 155], est donnée par l’équation suivante : dqt = K1 ( qe ,1 − qt ) dt (Eq.1) Avec qe,1 et qt (mg/g) sont respectivement les quantités adsorbées du métal à l’équilibre et à l’instant « t », et k1 (min-1) est la constante de la vitesse de la réaction d’adsorption. L’intégration de l’équation (Eq.1) donne : K log (q − q ) = log q − 1 t e t e,1 2,303 (Eq.2) La figure V-5 (a),(b) regroupe les représentations linéaires de log (qe-qt) en fonction du temps relatives à l’adsorption du métal sur les apatites greffées étudiées. Les valeurs de la constante de vitesse k1 ont été déduites à partir des pentes de ces droites. b. Modèle cinétique du pseudo second ordre L’équation du modèle cinétique du pseudo second ordre est de la forme [156] : - 104 - dqt = K 2 (qe , 2 − qt )² dt Eq.(3) Avec k2 la constante de vitesse du second ordre de la réaction d’adsorption, dont la forme linéaire s’écrit comme suit : t 1 t = + qt K 2 q ² e , 2 qe , 2 Eq.(4) Les constantes k2 et qe,2 sont déterminées respectivement à partir de l’ordonnée à l’origine et de la pente de la droite en fonction du temps (Figure V-5(c) et (d)). Le tableau V-6 regroupe les constantes cinétiques à partir des équations (2) et (4) décrivant les modèle cinétiques des réactions du pseudo premier ordre et de pseudo secondordre. D’après les résultats obtenus indiqués dans le tableau V-6, nous remarquons que le modèle du pseudo second ordre est le plus adéquat pour déterminer l’ordre des cinétiques d’adsorption des ions Pb2+ sur les différents adsorbants car son coefficient de corrélation R2 est proche de l’unité et la capacité maximale est voisine à celle expérimentale. Tableau V-6 : Résultats d’application des modèles cinétiques du pseudo premier ordre et du pseudo second ordre pour l’adsorption des ions Pb2+ par les apatites hybrides AMP-HAp et AMP-PNM. Pb / AMP- PNM Pb / AMP- HAp 0% 2,5% 5% 0% 2,5% 5% Pseudo qe,1 (mg.g-1) 51,55 56,19 56,76 39,38 41,47 40,45 premier ordre k1 (min-1) 0,031 0,131 0,156 0,063 0,056 0,050 R2 0,9804 0,9957 0,9923 0,9757 0,9997 0,9996 Pseudo qe,2 (mg.g-1) 50,24 51,97 51,20 51,29 50,99 51,30 second ordre k2 (mg.min-1) 0,007 0,005 0,0109 0,0034 0,0023 0,0025 R2 0,9944 0,9983 0,99911 0,9884 0,9997 0,9996 - 105 - 0 (a) (b) 2 Pb / AMP-PNM Pb / AMP-HAP -0.5 1,6 t -1.5 1,2 e e log(q -q ) 0%NTP t log(q -q ) -1 -2 2.5%NTP 0%AMP - HAP 0,8 2.5 %AMP-HAp -2.5 0,4 5 %AMP-HAp -3 5%NTP 0 -3.5 0 0 10 20 30 40 20 40 50 60 80 100 Temps (min) Time (min) (c) Pb / AMP-PNM 800 (d) Pb / AMP-HAp 4 3,5 600 t/q t -1 t / q (min/(mg.g ) 3 400 2 0%AMP-HAp 2.5%AMP-HAp 5%AMP-HAp 10%AMP-HAp t 0%NTP 2.5%NTP 5%NTP 2,5 200 1,5 1 0,5 0 0 50 100 150 200 Time (min) 0 0 50 100 150 200 Temps (min) Figure V-5 : Représentations linéaires des modèles cinétiques du (a et b) pseudo premier ordre et du (c et d) pseudo second ordre pour l’adsorption des ions Pb2+ par les apatites hybrides AMP-HAp et AMP-PNM IV.2. Modèles d’isothermes d’adsorption Les isothermes adsorption permettent la détermination des capacités maximales théoriques et l’identification du type d’adsorption. Plusieurs modèles d’adsorption à l’équilibre ont été testés : Langmuir [157], Dubinin-Radushkevich [158] et Freundlich [159]. a. Modèle de Langmuir C'est le modèle le plus utilisé pour modéliser les résultats expérimentaux obtenus au cours de l'adsorption des métaux lourds en solution aqueuse. Il n’est théoriquement applicable que dans le cas des sites d’adsorption localisés, homogènes et sans interactions latérales entre les particules adsorbées. Il indique également que la réaction d’adsorption est réversible. - 106 - Le modèle de Langmuir est basé sur l’existence d’un équilibre dynamique entre les molécules qui se fixent et celles qui quittent la surface. Celui-ci peut être défini à l’équilibre par l’équation suivante : qe = β .qm .Ce 1 + b.Ce La linéarisation de cette équation conduit à la relation suivante : Ce 1 Ce = + q a βqm qm Avec : qa : Capacité d’adsorption (mg/g) β : Constante d’équilibre liée à la force d’interaction entre la molécule adsorbée et la surface du solide. qm : exprime la quantité maximale de soluté fixée par gramme de solide dont la surface est considérée comme totalement recouverte par une couche monomoléculaire [160]. Les représentations linéaires des valeurs expérimentales de la capacité d’adsorption des ions Pb2+ et Zn2+ par les différents adsorbants selon le modèle de Langmuir sont illustrées par les figures V-6 et V-7 : L’analyse des paramètres de Langmuir permet d'obtenir par régression linéaire, avec une qualité statistique satisfaisante, les valeurs des constantes (β, Cm, R2) qui sont regroupées dans les tableaux V-7 et V-8. En se basant sur le coefficient de corrélation (R2) des droites des isothermes d’adsorption des deux modèles, nous pouvons conclure que le modèle de Langmuir est le plus probable pour caractériser l’adsorption des ions métalliques par les deux catégories d’apatites hybrides AMP-HAp et AMP-PNM. - 107 - (a) Pb / AMP-HAp (b) 4 6 3,5 5 3 a 2 e 3 Pb / AMP- PNM 2,5 10% AMP 5% AMP 2,5% AMP 0%AMP (HAp) 4 C /q Ce/qa 7 0% AMP (HAp) 2,5% AMP 5% AMP 10% AMP 1,5 2 1 1 0,5 0 0 200 400 600 800 1000 1200 1400 0 1600 0 -1 200 400 600 800 1000 1200 1400 Concentration à l'équilibre C (mg.L ) e -1 Concentration à l'équilibre C (mg.L ) e Figure V-6: Représentations linéaires du modèle de Langmuir relatives à l’adsorption des ions Pb2+ sur les apatites hybrides (a) AMP-HAp et (b) AMP-PNM. (a) 10 Zn / AMP-HAp (b) 10 Zn / AMP-PNM 8 8 6 e e C /q C /q a a 6 4 0% 4 2.5% 0% 5% 2 2.5% 2 10% 5% 10% 0 0 0 0 200 400 600 800 1000 1200 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600 -1 Concentration à l'équilibre C (mg.g ) e -1 Concentration à l'équilibre C e (mg .L ) Figure V-7: Représentations linéaires du modèle de Langmuir relatives à l’adsorption des ions Zn2+ sur les apatites hybrides (a) AMP-HAp et (b) AMP-PNM b. Isotherme de Dubinin-Radushkevich (D-R) Ce modèle a été choisi pour évaluer l'énergie apparente d'adsorption E selon l’équation linéaire de D-R: Lnq a = Lnq D + RT 1 Ln(1 + ) 2 E Ce Où R est la constante des gaz parfait (J.K-1mol-1) et T la température (K). La représentation de Ln qa contre Ln (1+1/Ce), illustré par la figure V-8, donne les valeurs qD et E regroupées dans - 108 - les tableaux V-7 et V-8. Les valeurs d'énergie apparentes d'adsorption calculées montrent qu’il y a une forte attraction « métal – surface ». Nous constatons que l’énergie apparente d’adsorption des ions Pb2+ et Zn2+ sur les apatites issues du phosphate naturel AMP-PNM est de l’ordre de 70 J/mol, une valeur supérieure à celle obtenue dans le cas des apatites synthétiques AMP-HAp (33 J/mol). 2 0,8 Pb / AMP-PNM -1 0,2 a 0 log qa 10% (mmol log qa 5% (mmol log qa 2.5% (mmol log qa 0% (mmol 0,4 log q Ln qa (0%) Ln qa (2.5%) Ln qa (5%) Ln qa (10%) Ln q e Zn ./ AMP-PNM 0,6 1 0 -0,2 -0,4 -2 -0,6 -3 -0,8 0 0,5 1 1,5 2 2,5 log(1+1/C ) -4 e 0 2 4 6 8 10 Ln(1+1/Ce) Figure V-8: Représentations linéaires du modèle de Dubinin-Radushkevich (D-R).relatives à l’adsorption des ions Pb2+ et Zn2+ sur les apatites hybrides c. Modèle de Freundlich C'est une équation empirique largement utilisée pour la représentation pratique de l'équilibre d'adsorption. Toutefois, les expériences ont montré qu’elle décrit bien les résultats d’adsorption des micropolluants par les solides tels que les charbons actifs, les sols et les argiles. Elle se présente sous la forme [159] : q a = K f Ce 1/n Avec : qa : quantité du métal adsorbée par gramme d’adsorbant (mg/g) Ce : concentration de l’ion métallique à l’équilibre (mg/L) 1/n, K : constantes de Freundlich qui caractérisent l’isotherme d’adsorption. f La linéarisation de l’équation précédente conduit à la relation suivante : 1 log qa = log Kf + ( ) log Ce n - 109 - Cette équation empirique tient compte d’une distribution exponentielle des énergies des sites d’adsorption à la surface du solide et d’une adsorption en sites localisés. Le tracé de log qa en fonction de log Ce donne une droite dont les constantes Kf et 1/n sont déduites respectivement de l’ordonnée à l’origine et la pente de la droite (Figures V-9 et V-10). Lorsque la valeur 1/n est proche de l’unité, ceci signifie qu’il y a une répartition constante du métal entre l’adsorbant et la phase liquide. Le coefficient d’adsorption Kf traduit le pouvoir adsorbant. Les constantes 1/n et Kf sont aussi regroupées dans les tableaux V-7 et V-8. Les valeurs de ces constantes indiquent que le modèle de Freundlich n’est pas applicable au processus d’adsorption des ions Pb2+ et Zn2+ sur les apatites étudiées. Pb /AMP-HAP 3 Pb/ AMP-PNM 3 2,5 log q log q a a 2,5 10% AMP 5% AMP 2.5% 0% AMp (HAp) 2 2 0% AMP 2,5% AMP 5% AMP 10% AMP 1,5 1 1,5 0,5 -2 -1 0 1 -1 -0,5 0 0,5 1 1,5 log C 2 2,5 log C 1 2 3 e 3 e Figure V-9 : Représentations linéaires du modèle de Freundlich relatives à l’adsorption des ions Pb2+ sur les apatites hybrides AMP-HAp et AMP-PNM Zn / AMP-PNM 2.5 Zn /AMP-HAP 2.4 2.2 2 a 1.5 log q log q a 2 10% 5% 2,5% 0% 1 0.5 1.8 0%) 2,5% 5% 10% 1.6 1.4 1.2 0 1 -3 -2 -1 0 log C 1 2 3 -3 -2 -1 0 log C 1 e e Figure V-10 : Représentations linéaires du modèle de Freundlich relatives à l’adsorption des ions Zn2+ sur les apatites hybrides. - 110 - 2 3 Tableau V-7: Constantes relatives aux modèles de Langmuir, Dubinin-Radushkevich et Freundlich pour l’adsorption des ions Pb2+ et Zn2+ sur les apatites hybrides AMP-PNM. qmax(exp.) Zn Dubinin-Radushkevich Freundlich (mg/g) qm β R² log qD E R2 1/n log Kf R² 0%AMP-PNM 330 322,11 0,161 0,9998 0,69 63,12 0,9974 0,5857 1,501 0,4829 2.5% AMP-PNM 445 448,1 0,123 0,9998 1,06 65,7 0,9860 0,401 1,673 0,8177 5%AMP-PNM 314 617,9 0,226 0,9999 1,38 82,3 0,9663 0,528 1,983 0,8833 10%AMP-PNM 640 652.0 0,049 0,9966 1,52 73,2 0,9840 0,457 1,733 0,8982 0%AMP-PNM 152 156,4 0,082 0,9994 0,444 57,5 0,9912 0,453 11.60 0,981 2.5%AMP-PNM 224 225,3 0,039 0,9993 0,531 32,6 0,9901 0,440 1,320 0,9955 5%AMP-PNM 280 289,2 0,023 0,9995 0,622 31,9 0,9924 0,496 1,237 0,9960 10%AMP-PNM 300 310,6 0,023 0,9960 0,657 31,7 0,9417 0,244 1,708 0,9534 AMP-PNM Pb Langmuir - 111 - Tableau V-8 : Constantes relatives aux modèles de Langmuir, Dubinin-Radushkevich et Freundlich pour l’adsorption des ions Pb2+ et Zn2+ sur les apatites hybrides AMP-HAp. qmax(exp.) Zn Dubinin-Radushkevich Freundlich (mg/g) qm β R² qD E R2 1/n log Kf R² 0%AMP-HAp 244 246 0,1168 0,9995 398 87,2 0,9956 0,595 1,584 0.8948 2.5%AMP-HAp 360 352 0,038 0,9826 309 78,6 0,9812 0,397 1,603 0.9729 5%AMP- HAp 409 448,91 0,0226 0.9946 297 97,4 0,9701 0,365 1,776 0.8980 10%AMP- HAp 454 439,98 0,0677 0.9992 346 49,7 0,9858 0,320 1,638 0.9128 0%AMP- HAp 150 158,5 0,013 0.9811 0.17 30,7 0,9817 0,346 1,22 0.9760 2.5%AMP- HAp 196 193,6 0,042 0.9995 0.23 31,98 0,9601 0,449 1,278 0.972 5%AMP- HAp 253 251,9 0,087 0.9996 0.39 35,7 0,9539 0,260 1,726 0.9539 10%AMP- HAp 270 297,0 0,013 0.9957 0.45 36,8 0,9916 1,002 0,452 0.9916 AMP-HAp Pb Langmuir - 112 - L'examen des résultats des tableaux V-7 et V-8 montre que les valeurs de la capacité monomoléculaire qm sont en bon accord avec celles expérimentales de la quantité adsorbée des ions métalliques, déduites des paliers de saturation. Les isothermes d’adsorption sont correctement décrites par le modèle de Langmuir. Ces résultats indiquent que l’adsorption de ces ions est de type chimisorption, d’énergies d’adsorption apparente élevée, qui se réalise avec la formation d’une monocouche moléculaire. Ce phénomène est attribué à la solvatation des ions métalliques, agissant sur la formation d’une seule couche métallique à l’interface apatite- métal. Il s’agit donc d’une adsorption localisée sur des sites de même énergie, sans interaction apparente entre les molécules adsorbées. L’adsorption, dans ce cas, semble être favorisée par la présence des groupements phosphonates et amines. La valeur théorique de l’énergie apparente déduite du modèle D-L, relative à l’adsorption des ions Pb2+ et Zn2+ sur les matériaux étudiés, est l’ordre de 70 J/mol et 33 J/mol respectivement pour les ions Pb2+ et Zn2+. Cette différence d’énergie constatée entre les ions métalliques et les types d’apatites hybrides est liée principalement à la nature des liaisons métal – surface et son mécanisme associé, qui sont très différents (Pb-précipitation ou Zn-complexation). Aussi, les groupements phosphonates et/ou amines jouent le rôle des espèces complexantes, ce qui favorise les phénomènes d’adsorption si on les compare aux matériaux de références HAp et PNM, porteurs des groupements P-OH. V. Mécanismes de sorption des apatites Les mécanismes de sorption proposés par plusieurs auteurs sont assez variés et dépendent du soluté utilisé [161]. On trouve : - des substitutions isomorphes (échanges sur les sites cationiques du type Ca2+ ou sur les sites anioniques de type PO43- et OH- avec la possibilité d’une diffusion de l’élément sorbé dans la matrice [162]. - des sorptions par dissolution – précipitation (apparition de nouvelles phases cristallines). Les anions libérés lors de la dissolution de l’apatite contribuent à l’immobilisation de nombreuses espèces métalliques sous la forme de composés peu solubles. - des sorptions en extrême surface qui s’apparenteraient à des complexations (liaison chimique ou électrostatique) favorisées généralement par la taille du cation capable de pénétrer dans le réseau de l’apatite. La distinction entre ces différents phénomènes de sorption est parfois difficile à maîtriser. Par exemple, la précipitation en surface d’une phase secondaire à partir des - 113 - éléments dissous de l’apatite et de l’élément à sorber, ne modifiant par ailleurs ni la forme ou l’aspect ni la structure de l’apatite de départ, mais elle pourrait très bien passer pour un échange d’ions dans la couche superficielle du matériau. Cependant, la libération du calcium en faible quantité par rapport à l’ion retenu montre la participation du mécanisme d’échange ionique. Une bonne variété de mécanismes de sorption sur l’apatite a été proposée par S. El Asri [50] et d’autres auteurs [163-164]. Nous nous contentons de donner, dans le tableau V-9, quelques exemples d’éléments sorbés pour chacun des mécanismes de sorption mentionnés précédemment. On note, en particulier, que pour un même élément, plusieurs mécanismes de sorption peuvent être observés, ce qui peut s’expliquer par les conditions opératoires différentes d’un auteur à l’autre (influence entre autre de la température, du temps de contact entre le solide et le solution, de la concentration initiale en élément à sorber ou bien du pH…). Le fait d’avoir plus de calcium relâché que du métal sorbé peut s’expliquer : * soit par la non-congruence de la solubilité de l’apatite en milieu acide, * soit par un échange du calcium en surface des particules d’hydroxyapatite qui constituent le corps des plaquettes micrométriques et qui n’ont pas été dissoutes. Le mécanisme de sorption serait alors un mélange d’échange d’ions et de dissolution recristallisation. En effet, nous avons mesuré le calcium libéré de la matrice de l’apatite durant la rétention des ions métalliques surtout les ions Pb2+ sur les apatites AMP-PNM, mais les valeurs trouvées sont très faibles par rapport à celles des ions fixés. Ce qui prouve que le mécanisme de sorption des ions Pb2+ par les apatites hybrides étudiées est principalement basé sur des réactions de complexation. De même, la sorption des ions Pb2+ a fait l’objet de nombreuses études. Les résultats indiquent le remplacement de Ca2+ par Pb2+ et la formation en surface d’une apatite pyromorphite [165-166] aussi que Sery et col. [167 ], ont montré que le Pb est incorporé dans les sites Ca(I) et Ca(II) avec une légère préférence à température ambiante. Toutefois, Suzuki et col. [168] et Manjiny et col. [169], n’excluent pas que d’autres processus puissent intervenir comme l’adsorption ou encore la co-précipitation. Selon McGrellis et col. [170], la capacité de fixation de l’apatite et le mécanisme de rétention dépendent de la manière dont sont effectuées les sorptions. Ces auteurs ont tous obtenu à la fois une sorption par échange - 114 - qu’une sorption avec formation de précipités riches en métal, sous forme de baguette d’apatite phopshoplombeuse. Dans notre cas, le mécanisme de la sorption du Zn sur les apatites diffère de celui du Pb où le phénomène de la complexation est prioritaire (Figure V.11). Les études antérieures ont mis en évidence un échange entre les sites H+ et le zinc. La présence d’un maximum de sorption autour d’un pH à l’équilibre compris entre 6-8, valeurs qui coïncident avec le pH de nombreuses eaux souterraines, fait des apatites de bons candidats pour la sorption des métaux en milieu naturel. Figure V-11: Schéma représentatif du processus d’adsorption des ions métalliques sur la surface de l’apatite modifiée par l’AMP. Tableau V-9 : Mécanismes de sorption mentionnés dans la littérature relatifs à l’adsorption des ions métalliques sur les apatites Elément Pb2+ Mécanismes proposés Références - Formation de nouvelles phases solides avec une faible incorporation du Pb [171] dans le réseau [133] -Echange Ca2+ ↔Pb2+ dans le cas de la Francolite. -Echange avec Ca2+ : incorporation dans le réseau au niveau des sites I et II. Cd2+ [167-169] -Diffusion du Cd au niveau des canaux de la structure apatitique. [172] Sorption par dissolution-précipitation et/ou échange ionique [170] -Coprécipitation à la surface avec la précipitation avec les phosphates n’est [173] exclue. F- F- s’échange avec les ions OH- et diffuse dans la structure. - 115 - [174] Conclusion Nous avons étudié le comportement de cette nouvelle génération de matériaux apatitiques greffées par l’aminophosphonate dans l’adsorption des ions Pb2+ et Zn2+. L’étude comparative de l’adsorption de ces ions métalliques sur les deux types d’apatites greffées par l’AMP a montré non seulement l’effet de la surface spécifique, mais la contribution des fonctions phosphonates et amine dans la molécule AMP par son pouvoir complexant. La modélisation du phénomène d’adsorption des ions métalliques sur les apatites hybrides a été aussi étudiée. Nous avons constaté que ces apatites modifiées possèdent effectivement des propriétés adsorbantes importantes voire plus intéressantes que celles des adsorbants décrits dans la littérature. - 116 - Chapitre VI Adsorption des métalloporphyrines hydrosolubles sur les hydroxyapatites poreuses - 117 - Introduction L'adsorption est le phénomène qui consiste en l'accumulation d'une substance à l'interface entre deux phases, basée sur des forces d'attraction intermoléculaires, de nature et d'intensité variées, qui sont responsables de la cohésion des phases condensées, liquides ou solides. On utilise le plus souvent les charbons actifs, mais on dispose aussi d'adsorbants comportant des pores de dimensions moléculaires (comme les zéolites) qui leur confèrent une certaine sélectivité en fonction de la taille et de la forme des molécules. Cependant, les apatites retiennent de nombreuses macromolécules [175-178]. Pour mieux cerner les phénomènes d’adsorption des espèces organiques qui pourraient intervenir et à l’origine des problèmes rencontrés lors des traitements du minerai phosphaté ou lors de la régénération osseuse. A ce titre, nous nous proposons de contribuer à l’étude de la liaison organo-minérale en entreprenant celle de l’interaction entre des hydroxyapatites avec les métalloporphyrines hydrosolubles. Dans un premier lieu, nous donnons une brève description de la synthèse et la caractérisation des porphyrines et des hydroxyapatites utilisées. Dans ce travail, nous nous sommes plus particulièrement intéressés à la fixation des porphyrines métallisées hydrosolubles par les hydroxyapatite préparées de surfaces spécifiques différentes. Nous avons suivi la variation du pH du mélange apatite - porphyrine et la cinétique de l’adsorption. Le processus de l’adsorption a été modélisé selon les modèles de Langmuir et Freundlich. I. Généralités sur les porphyrines et les métalloporphyrines Les porphyrines sont des macrocycles constitués de quatre unités pyridiniques (comportant chacune un atome d’azote) reliées entre elles par des ponts méthylène. Le cycle porphyrinique Cette forte conjugaison en fait des composés très colorés et souvent photosensibles. Elles jouent un rôle essentiel dans les milieux vivants et participent, notamment, au transport et au stockage de l'oxygène (hémoglobine, myoglobine), à l'oxydation de substrats - 118 - (cytochromes) ou encore à la photosynthèse dans les plantes et bactéries photosynthétiques (chlorophylle). Chez l'homme, en raison d'une déficience du système enzymatique au cours de l'une des étapes de la biosynthèse, elles peuvent être également à l'origine d'une grave maladie appelée porphyrie. En outre, les porphyrines peuvent être métallées et le métal se trouve alors au centre de la porphyrine, lié au quatre atomes d’azote. Métalloporphyrine II. Préparation des porphyrines [T(p-SO3NH4)PP]M (M=Zn et Pb) Avant de décrire les méthodes de synthèse de ces porphyrines notées ZnP et PbP prises comme solutés, les réactifs de base sont : - La tétraphénylporphyrine (TPP)H2 - La mésotétraparasulfophénylammoniumporphyrine [T(p-SO3NH4)PP]H2 II.1. Cas de la tétraphénylporphyrine (TPP)H2 : Ce composé s'obtient très aisément par condensation, en quantités équimolaires, du pyrrole et du benzaldéhyde selon la réaction suivante : 4 C4H4NH+ 4 C6H5CHO - 4H2O (TPP) H2 Sous courant d'azote, on porte à reflux une solution équimolaire (0,2 M) de 14 ml de pyrrole et 20 ml de benzaldéhyde dans 500 ml d'acide propénoïque, on garde la solution sous agitation pendant 3 heures. A la fin de la réaction, on recueille après filtration environ 7g de (TPP)H2 brute, ce qui représente un rendement de 23%. La (TPP)H2 brute contient une quantité minoritaire de la tétraphénylchlorine, qui est éliminée par chromatographie sur colonne de silice avec CH2Cl2 comme éluant. II.2. Cas de la mésotétraparasulfophénylammoniumporphyrine [T(p-SO3NH4)PP]H2 Une masse de 3 g (4,87 mM) de la tétraphénylporphyrine (TPP)H2 en poudre, on ajoute 75 mL de H2SO4 concentré dans un ballon monocol équipé d'un réfrigérant à boules. - 119 - Le mélange réactionnel est porté à une température de 100°C sous agitation magnétique pendant 8 heures. Ensuite, on le laisse reposer pendant une nuit à température ambiante. La solution est filtrée sur un creuset filtrant de porosité 2 afin d'éliminer la base libre (TPP)H2 qui n'a pas réagi. Puis on lave avec une faible quantité d'eau. On additionne ensuite 450 mL d'eau distillée chaude, puis on neutralise par l'ammoniaque NH4OH jusqu'au pH=9 sous agitation continue. La solution obtenue est évaporée à sec à la quelle on ajoute 120 mL d'ammoniaque et 1200ml d'éthanol toujours sous agitation. Le milieu réactionnel est maintenu dans un bain tiède pendant trois heures, la porphyrine est solubilisée dans l'éthanol et les dérivés minéraux précipitent. Après évaporation totale de la solution porphyrinique, une chromatographie sur colonne de silice est effectuée afin d'éliminer les impuretés ainsi que la totalité des complexes minéraux, constitués essentiellement par (NH4)2SO4, en utilisant le méthanol comme éluant. Après évaporation des fractions d'élution convenables, le produit [T(p-SO3NH4)PP]H2 obtenu est lavé à l'hexane puis séché dans l'étuve pendant quelques heures. Le rendement de cette synthèse est d'environ 80%. La pureté de cette porphyrine a été vérifiée par la spectroscopie UV - visible (Figure VI-1). - 120 - λ (nm) Bande de Soret 416 Bandes annexes 513, 547, 589, 646 (TPP)H2 T(p-SO3NH4)PP]H2 Figure VI-1 : Structures et données de l’UV- visible de (TPP)H2 et T(p-SO3NH4)PP]H2 II.3. Cas de la porphyrine T(p-SO3NH4)PP]Zn (ZnP) Dans 150 ml de DMF, on dissout une masse de 1,50 g de [T(p-SO3NH4)PP]H2 (1,49.10-3 mol) et 4 g de ZnCl2 (2,98.10-2 mol). Nous notons que tous les réactifs sont solubles dans le DMF à température ambiante. Ensuite, le mélange est porté à reflux dans un dicol maintenu sous atmosphère d'azote. La réaction de métallation est suivie par spectroscopie UV-visible. Lorsque la métallation est achevée, la solution porphyrinique est refroidie à température ambiante puis le solvant est évaporé. Pour éliminer les sels de zinc qui n'ont pas réagi, nous avons procédé par chromatographie colonne de silice en utilisant l'éthanol comme - 121 - éluant. La solution porphyrinique est évaporée à sec et les cristaux rouges briques de la [T(pSO3NH4) PP]Zn récupérés sont lavés plusieurs fois à l'hexane puis séchés dans l'étuve. II.4. Cas de la porphyrine T(p-SO3NH4)PP]Pb (PbP) Nous avons également synthétisé le complexe [T(p-SO3NH4)]Pb. Le mélange de la porphyrine [T(p-SO3NH4)PP]H2 (1,49.10-3 mol) et (CH3COO)2Pb (2,98.10-2 mol) est porté à reflux dans un dicol maintenu sous atmosphère d’azote à la température ambiante. La réaction de métallation est suivie par spectroscopie UV-visible. Lorsque la métallation est achevée, la solution porphyrinique est refroidie à température ambiante puis le solvant est évaporé. La figure VI-2 schématise les porphyrines ZnP et PbP. La pureté des deux porphyrines préparées a été vérifiée par la spectroscopie, dont leurs spectres et les longueurs d’ondes obtenues sont dans les figures VI-3 et VI-4. Les données UV-visible obtenues de ces porphyrines (Tableau VI-1) sont similaires à celles décrites dans la littérature. Figure VI-2 : Représentation moléculaire des métalloporphyrines hydrosolubles tétra[4-(psulfophenyl)porphyrines (M = Zn, Pb). - 122 - Figure VI-3 : données de UV-visible de ZnP dans le DMF Figures VI-4 : données de la spectroscopie UV visible de PbP dans le DMF. - 123 - Tableau V-1 : Caractéristiques UV-visible des porphyrines PbP et ZnP préparées. UV-visible data (λ, nm) bande Soret bandes Q ZnP 430 555, 595 PbP 422 557, 598 H2P 418 514, 551, 592, 645 III. Caractéristiques des apatites utilisées En s'inspirant des méthodes utilisées pour la synthèse des apatites phosphocalciques, deux apatites poreuses ont été préparées par la méthode de neutralisation de l’hydroxyde de calcium Ca(OH)2 par NH4H2PO4 en milieu eau - éthanol pour donner le produit e-HAp et en milieu aqueux (w-HAp). Le tableau VI-2 regroupe les caractéristiques physico-chimiques des hydroxyapatites e-HAp et w-HAp. Tableau VI-2 : Composition chimique et propriétés de surface des apatites e-HAp et w-HAp. Ca/P Tailles des SBET(m2.g-1) cristallites (nm) Volume poreux Diamètre poreux (cm3.g-1) (nm) e-HAp 1,61 12 230 0,55 9 w-HAp 1,60 15 120 0,61 11 Nous constatons que le rapport molaire Ca/P est de l’ordre de 1,61, une valeur légèrement inférieure à celle d’une apatite phosphocalcique stéochiométrique (Ca/P = 1,66). Cette différence est due à la présence des quantités des carbonates, détectés par spectroscopie infrarouge. Notons que ces carbonates peuvent substituer les groupements PO43- et limite la réactivité du calcium introduit avec les phosphates PO43-, ce qui réduit le pourcentage en le rapport Ca/P. L’ensemble de ces résultats obtenus révèlent que l’hydroxyapatite e-HAp possède une surface spécifique (SBET = 230 m2/g) relativement importante par rapport à celle de w-HAp (120 m2/g). Il nous semble ainsi qu’une hydroxyapatite de grande surface spécifique pourrait avoir des propriétés de rétention intéressantes et favorise les attractions dipôle - dipôle à l’interface apatite - porphyrine. Dans ce contexte et sachant que l’hydroxyapatite a toutes les caractéristiques d’être utilisée comme biomatériaux dans la substitution osseuse, nous avons - 124 - pensé à étudier le processus de rétention de ce matériau vis-à-vis des biomolécules qui peuvent avoir des conséquences néfastes ou avantageusement sur le bon fonctionnement de la régénération de l’os. Ainsi, les hydroxyapatites modèles de surfaces spécifiques différentes nous serviront de support pour fixer les métalloporphyrines hydrosolubles décrites précédemment. IV. Processus d’adsorption des métalloporphyrines sur l’hydroxyapatite IV.1. Conditions expérimentales Différentes solutions aqueuses synthétiques des porphyrines sont utilisées au cours de cette étude d’adsorption sur les adsorbants e-HAp et w-HAp. Les expériences d’adsorption ont été obtenues par la mise en contact de 0,2 g de l’apatite (e-HAp ou w-HAp) dans 100 ml de la solution de porphyrine à la température ambiante (T=20°C). La quantité de la porphyrine varie de 0 à 100 µmol/L. Le pH est ajusté à l’aide d’acide nitrique ou de soude. La porphyrine résiduelle dans la solution a été dosée par spectrophotométrie UV-visible au maximum de son spectre d’absorption λmax à l’aide d’un appareil Perkin Belmer II. Il a été vérifié que les porphyrines résiduelles dans les solutions aqueuses, dans les concentrations utilisées de ce travail, ne modifient pas la longueur d’onde du maximum d’adsorption de la porphyrine choisie par rapport à celle obtenue avant le processus d’adsorption. La quantité de la porphyrine adsorbée qa (mg/g) par les deux apatite a été déterminée par déduction entre la quantité initialement prise (C0) dans la solution et à l’équilibre (Ce) après le processus d’adsorption. Les points expérimentaux notés sur les figures sont la moyenne de deux analyses des concentrations résiduelles et parfois de deux essaies. IV.2. Etude cinétique d’adsorption des porphyrines ZnP et de PbP sur les hydroxyapatites w-HAp et e-HAp. Au cours de cette étude, nous nous sommes intéressés à la cinétique d’adsorption des porphyrines ZnP et PbP de concentration de 10 µmol/L, choisie arbitrairement. Les essais sont réalisés à pH = 5. La solution surnageante a été instantanément analysée Les résultats des cinétiques sont rassemblés dans la figure VI-5. Nous constatons que pour une concentration initiale de 10 µmol/L en porphyrine, le temps d’équilibre est rapidement atteint quelque soit la nature de la porphyrine et de l’apatite. Ceci est en relation avec la réactivité des deux porphyrines avec les deux HAps comme il prouve la présence de ces macromolécules dans les - 125 - gisements phosphatés. Les cinétiques d’adsorption et les capacités d’adsorption des porphyrines sur les deux hydroxyapatites sont différentes (Tableau VI-3), ce qui demande une exploitation des résultats expérimentaux à l’aide des modèles cinétiques, qui donnent des valeurs de vitesses d’adsorption. Pour une concentration initiale de 10 µmol.L-1, nous constatons que l’apatite e-HAp adsorbe mieux les deux porphyrines ZnP et PbP que l’apatite w-HAp. La différence est liée au nombre de sites actifs présents dans la matrice e-HAp pour une surface spécifique de 230 m2.g-1 assez importante à celle de w-HAp (120 m2.g-1). Par conséquent, la meilleure porosité de e-HAp favorise l’adhésion des molécules porphyriques via des interactions de charges positives de la surface de l’apatite avec les groupements négatives -SO4- ou avec le doublet de l’amine constitutive de la porphyrine. Les charges positives de la surface ne peuvent provenir que des cations Ca2+, mais l’interaction apatiteporphyrine pourra se faire à travers des liaisons hydrogènes entre les hydroxydes Ca-OH ou PO3-OH avec l’azote pour former un système « Surface-OH ….N-porphyrine », sans exclure l’interaction du métal-porphyrique avec les OH de l’hydroxyapatite, puisque nous avons observé une variation de la capacité d’adsorption de ZnP et PbP sur la même apatite [182]. porphyrine adsorbée (µmol/g) 5 ZnP/e-HAp 4 PbP/e-HAp 3 PbP/w-HAp 2 ZnP/w-HAp 1 0 0 20 40 60 80 100 120 Temps (min) Figure VI-5 : Effet du temps sur la rétention des porphyrines ZnP et PbP sur les hydroxyapatites w-HAp et e-HAp. - 126 - 140 Tableau VI-3 : Temps d’équilibre et capacité de rétention déduites des e-HAp ZnP PbP ZnP PbP 20 30 15 10 3,90 3,00 1,00 1,75 78 60 20 35 Temps à l’équilibre (min) Capacité maximale d’adsorption (µmol.g-1) w-HAp % de rétention Tableau VI-4 : paramètres cinétiques de l’adsorption des porphyrines ZnP et PbP sur les hydroxyapatites e-HAp et w-HAp. ZnP/e-HAp PbP/e-HAp ZnP/w-HAp PbP/w-HAp 3,80 2,98 1,80 1,00 k1(min-1) 0,274 0,218 0,098 0,098 qe,1(µmol.g-1) 3,61 2,90 1,22 1,22 0,9938 0,9869 0,9904 0,9892 k2(min ) 0,219 0,074 0,213 0,344 qe,2(gµmol-1min-1) 3,90 3,25 1,79 1,07 0,9996 0,9988 0,9997 0,9998 Capacité d’adsorption qmax (µmol.g-1) Premier pseudo ordre R2 -1 Second pseudo second R2 1 0 e t log (q -q ) 0.5 -0.5 PbP/e-HAP -1 ZnP/e-HAP ZnP/w-HAP -1.5 PbP/w-HAP -2 0 5 10 15 20 25 30 35 Temps (min) Figure VI-6 : Modèle de Lagergren (premier pseudo ordre) relatif à l’adsorption des porphyrines ZnP et PbP sur les deux hydroxyapatites. - 127 - ZnP/w-HAp 120 t -1 t / q (min.µ µ mol.g ) 100 80 PbP/w-HAp 60 PbP/e-HAp 40 20 ZnP/e-HAp 0 0 20 40 60 80 100 120 140 Temps (min) Figure VI-7 : Modèle du second pseudo ordre relatif à l’adsorption des porphyrines ZnP et PbP sur les deux hydroxyapatites. IV.3. Isothermes d’adsorption Nous avons aussi représenté la quantité adsorbée qa en fonction de la concentration à l’équilibre Ce de la porphyrine (ZnP et PbP) après 3 heures de temps de contact. La figure VI8 montre que la quantité adsorbée en porphyrine augmente avec la concentration à l’équilibre jusqu’à la saturation de tous les sites actifs présents à la surface de l’adsorbant. La plus grande quantité adsorbée à la saturation est obtenue avec le matériau possédant une surface spécifique élevée (e-HAp). - 128 - 10 ZnP / e-HAp a -1 q (µ µ mol.g ) 8 PbP / e-HAp 6 ZnP / w-HAp 4 PbP / w-HAp 2 0 0 5 10 15 20 25 -1 C (µ µmol.L ) 30 35 e Figure VI-8 : effet de la concentration initiale sur l’adsorption des porphyrines sur les hydroxyapatites Le tableau VI-5 regroupe les caractéristiques adsorbantes des porphyrines ZnP et PbP sur les deux hydroxyapatites e-HAp et w-HAp. Tableau VI-5 : pH à l’équilibre et capacités de sorption maximales des porphyrines sur les apatites étudiées. e-HAp w-HAp ZnP PbP ZnP PbP pH à l’équilibre 7,45 7,35 6,45 6,20 Capacité maximale d’adsorption (µmol.g-1) 9,1 6,05 4,26 4,05 Nombres de molécules par unité de surface 2,46 10+16 0,43 10+16 2,7410+16 0,29 10+16 La différence obtenue en quantité adsorbée des porphyrines sur la surface des deux adsorbants est clairement due à la différence de leur surface spécifique qui est parmi les paramètres influençant les propriétés d’adsorption de ces substances porphyriniques contrairement à celles des métaux lourds que nous avons étudiées auparavant. - 129 - L’application des deux modèles de Langmuir (Cm, β) et de Freundlich (Kf et 1/n), déjà décrits dans le chapitre précédemment et illustrés respectivement par les figures VI-9 et VI10, donne des constantes regroupées dans le tableau VI-6. En se basant sur la valeur de la linéarité (R2) des droites des isothermes d’adsorption de deux modèles, nous pouvons conclure que le modèle de Langmuir le plus probable pour caractériser de phénomène de l’adsorption de ZnP et PbP par les apatites poreuses e-HAp et w-HAp. La valeur de la capacité monomoléculaire qm est relativement en bon accord avec la valeur expérimentale de la quantité adsorbée de la porphyrine sur l’hydroxyapatite. Ces résultats peuvent être interprétés par un mécanisme de complexation des porphyrines avec les ions Ca2+, via les sites actifs –SO4- et amines contenues l’espèce porphyrique. La formation des liaisons hydrogènes entre les solutés et les adsorbats peut être discutée. 10 ZnP/e-HAp ZnP / w-HAp PbP/e-HAp PbP / w-HAp 8 e C /q a 6 4 2 0 0 5 10 15 20 25 30 35 40 C (µ µmol/L) e Figure VI-9 : Modèle linéaire de Langmuir relatif à l’adsorption des porphyrines ZnP et PbP sur les deux hydroxyapatites. - 130 - 1 0,8 log q a 0,6 0,4 0,2 PbP / e-HAp PbP / w-HAp ZnP / e-HAp ZnP / w-HAp 0 -0,2 -0,4 -0,5 0 0,5 1 1,5 log C e Figure VI-10 : Modèle linéaire de Freundlich relatif à l’adsorption des porphyrines ZnP et PbP sur les deux hydroxyapatites Tableau VI-6 : constantes déduites des modèles de Langmuir et de Freundlich. Capacité maximale d’adsorption (µmol/g) Langmuir Freundlich qm (µmol.g-1) β R2 n Kf R2 ZnP/e-HAp PbP/e-HAp ZnP/w-HAp PbP/w-HAp 9,10 6,05 4,26 4,03 11,11 0,211 0,9719 1,499 2,065 0,99 6,44 0,46 0,9928 3,571 2,51 0,99 6,30 6,03 0,9694 0,909 2,57 0,96 4,37 0,80 0,9984 2,353 1,62 0,94 IV.4. Mécanismes d’adsorption IV.4.1. Variation du pH durant le processus d’adsorption Au cours du phénomène d’adsorption des porphyrines sur les deux hydroxyapatites, les mesures de pH pour une solution initiale de 10 µmol/L de ZnP et PbP sont effectuées et les résultats de mesure obtenus sont regroupés dans la figure VI-11. D’après la figure VI-11, le pH à l’équilibre est basique lorsque la porphyrique est en contact avec l’apatite w-HAp tandis qu’il est acide dans le cas de e-HAp. Par conséquent, la variation du pH dépend de la nature de l’adsorbant et non pas de celle du soluté. Ceci est lié à la structure et à la texture de ces apatites ainsi qu’à leur réactivité vis-à-vis de la porphyrine. Cependant, il semble que - 131 - l'encombrement stérique de la chaîne latérale des porphyrines étudiées, comme le montre la figure VI-12, joue un rôle dans l'adsorption en diminuant la quantité fixée à la saturation. 7,6 ZnP/ w-HAp pH 7,2 PbP / w-HAp 6,8 ZnP / e-HAp 6,4 PbP / e-HAp 6 0 10 20 30 40 50 Temps (min) Figure VI-11 : Suivi du pH durant le processus d’adsorption. Figure VI-12 : Représentation des interactions proposées dans le système porphyrine – apatite. - 132 - IV.4.2. Analyse des solides après adsorption par spectroscopie UV- visible du solide Cette technique nous permet de confirmer la présence de groupements porphyriniques dans la matrice apatitique et de mettre en évidence le déplacement des bandes d’absorption lorsqu’ils sont adsorbés. Dans le cas des produits ZnP et PbP sorbés, nous observons l’apparition d’une bande d’absorption principale proche à celle de l’espèce isolée, dues à la transition π – π* du porphyrique conjuguée (Figure VI-13). Absorbance (unit.arb) PbP/e-HAp PbP/w-HAp ZnP/e-HAp ZnP/w-HAP 300 400 500 600 700 Longueurs d'ondes (nm) Figure VI-13 : Spectres UV- visible à l’état solide après l’adsorption des porphyrines ZnP et PbP sur les hydroxyapatites. A titre d’exemple, les spectres UV-visible donnés par la figure VI-13 indiquent que les porphyrines ZnP et PbP à l’état isolé absorbent respectivement à 430 nm et à 422 nm, par ailleurs lorsqu’elles sont adsorbées sur e-HAp, leurs bandes se déplacent à 425 et 415 nm (Tableau VI-7). Ce déplacement de bandes d’absorption voisin de 5 nm correspond à l’énergie des liaisons chimiques établies entre les groupements porphyriques et les ions Ca2+ de l’apatite, ce qui explique clairement l’existence des interactions apatite – porphyrine et l’efficacité de l’hydroxyapatite poreuse e-HAp. Le mécanisme que nous avons proposé est - 133 - compatible avec celui confirmé par les résultats de plusieurs travaux de recherche relatifs à l’adsorption des macromolécules sur des supports solides tels que le charbon actif, l’argile et la silice [179-181]. Les résultats obtenus dans ce travail ont permis de montrer que la porphyrine ZnP s’adsorbe mieux sur e-HAp, ce qui lui donne une affinité relativement importante par rapport à w-HAp. Les modèles cinétiques de Langmuir et de Freundlich ont décrit correctement le processus d’adsorption. - 134 - Conclusion générale Les travaux décrits dans ce manuscrit entrent dans le cadre d’une continuité de travaux de recherche menés au Laboratoire de Chimie Physique Générale sur les propriétés physicochimiques des matériaux apatitiques, et principalement la modification de la surface des hydroxyapatites poreuses par greffage in situ des molécules organiques. Au cours de cette étude, nous avons montré qu’il est possible d’obtenir des apatites à surfaces fonctionnalisées et formées de fines particules ayant des surfaces spécifiques importantes. L’objectif de cette étude est de comprendre le mode de fixation des ions métalliques en solution aqueuse par les apatites greffées par l’aminotriméthylènephosphonate (AMP). L’enjeu étant de déterminer si ces poudres peuvent être utilisées comme matériaux de décontamination des ions Pb2+ et Zn2+ dans les effluents liquides. Pour y parvenir nous nous sommes appuyés sur une méthodologie rigoureuse, allant de la synthèse et la caractérisation des apatites greffées par l’AMP à la quantification de la capacité d’adsorption de ces matériaux reliant les propriétés structurales, texturales et d’adsorption. Dans un premier temps, différentes nouvelles apatites greffées ont été synthétisées. Les résultats obtenus, au cours de cette étude relative au greffage in situ des groupements aminométhylenphosphonates dans la structure de l’apatite, nous ont permis de suggérer le lien entre la quantité du phosphore organique et d’amine introduite dans le milieu réactionnel et les caractéristiques structurales et texturales des solides formés. La caractérisation par diffraction des rayons X et spectroscopie infrarouge des matériaux préparés dans différentes conditions de synthèse a montré que la nature et l’origine des précurseurs du calcium et du phosphore ont une grande importance sur la fabrication des nanoapatites greffées par l’AMP, dont leur rapport atomique Ca/P varie selon la voie de synthèse utilisée. Le traitement thermique à 600°C des apatites hybrides étuvées altère la structure apatitique des produits AMP-PNM issus du phosphate naturel quelque soit la teneur du greffon AMP, en conservant celle des apatites synthétiques AMP-HAp, surtout pour des teneurs de l’AMP inférieures à 10%. Pour conserver les propriétés de surface des apatites greffées par l’AMP à vocation environnementale, il n’est pas souhaitable - 135 - de dégrader les molécules d’aminotriméthylènephosphonate, qui peuvent être comme agents complexants des cations métalliques. Dans le même contexte de la dépollution des eaux, l’association de l’hydroxyapatite poreuse avec l’oxyde de titane TiO2 pourra apporter une certaine efficacité aux réactions photochimiques. Pour cela, nous avons préparé différents composites du système mixte TiO2HAp par procédé sol-gel. La caractérisation des produits étuvés et calcinés à différentes températures nous montre qu’à la température de 500°C, la phase anatase TiO2 apparaît, sachant qu’elle est la plus active photochimiquement que celle du rutile. Notons que les tests photochimiques ne sont pas abordés dans ce travail, mais ils seront traités dans nos prochains travaux de recherche en collaboration avec le Laboratoire de Chimie de la Matière Condensée, Université Pierre et Marie Curie - Paris VI – France ( Dr. Coradin). Les expériences d’adsorption ont été ensuite effectuées en tenant en compte les propriétés particulières des apatites greffées en solution. La présence des fonctions phosphonates et amine greffées in situ dans la structure apatitique acquérait des propriétés physico-chimiques inhérentes surtout dans le processus d’adsorption des ions métalliques. Dans cet objectif, nous avons présenté une étude relative à la capacité d'adsorption des apatites greffées par l’AMP vis-à-vis des ions Pb2+ et Zn2+ contenus dans des solutions aqueuses. Le processus d’adsorption a été réalisé en bath à la température ambiante. L’étude cinétique a d’abord permis de montrer qu’un temps de contact maximal de 30 min, entre l’adsorbant et les solutions des ions métalliques, était suffisant pour atteindre l’état d’équilibre. L'adsorption des ions Pb2+ et Zn2+ sur les surfaces d’apatites greffées est importante et dépend de plusieurs facteurs à savoir le temps de contact entre le métal et l’apatite greffée, le pourcentage du greffon AMP contenu dans l’adsorbant et la concentration initiale des ions métalliques en solution. Nous avons conclu que les apatites greffées possèdent une bonne affinité vis-à-vis des cations métalliques, comparée à celle des apatites de référence HAp et PNM. Le suivi du pH durant le processus d’adsorption, les temps d’équilibre d’adsorption, les isothermes d’adsorption et leur modélisation par les modèles de Langmuir, Dubinin-Radushkevich et Freundlich, ont été aussi entamés dans ce travail. En se basant sur les coefficients de corrélation (R2) relatifs à la linéarité des droites des isothermes d’adsorption de ces modèles, nous avons conclu que le modèle de Langmuir est le plus probable pour caractériser l’adsorption des ions Pb2+ par les différents adsorbants. Cette étude a tout d’abord confirmé l’efficacité des apatites pour éliminer les ions Pb2+ et Zn2+ des - 136 - solutions synthétiques polluées. Le taux des ions Pb2+ et Zn2+ adsorbés augmente avec la concentration initiale de ces ions. Cette évolution permet de savoir jusqu'à quelle concentration les ions Pb2+ et Zn2+ peuvent être adsorbés d'une façon maximale par chaque apatite greffée. La quantité de ces ions Pb2+ immobilisés peut atteindre environ 3 mmol./g d’apatite greffée à un taux de 10% AMP mise en jeu. La fixation des cations dépend fortement de la teneur du greffon AMP et de la concentration des ions métalliques en solution. Les valeurs trouvées de capacité d’adsorption d’ions métalliques étudiés sont largement supérieures à celles décrites dans la littérature. Les résultats prometteurs du phénomène d’adsorption des ions Pb2+ et Zn2+ par les apatites greffées, que nous avons synthétisées et caractérisées, nous permettent de penser que ces matériaux apatitiques pourraient être des bons supports pour la décontamination des effluents industriels. L’étude relative à la rétention des porphyrines hydrosolubles sur des hydroxyapatites poreuses à grandes surfaces spécifiques a été aussi entreprise dans ce travail. L’influence de certains paramètres sur la capacité de rétention des porphyrines T(p-SO3NH4)PP]M (M=Zn et Pb) a retenu notre attention. Il aurait été en effet intéressant d’étudier les propriétés de la fluorescence des hydroxyapatites porphyrisées et de préparer une hydroxyapatite en présence de la porphyrine libre T(p-SO3NH4)PP]H2, qui pourra être utile par la suite à la fixation des cations métalliques. - 137 - Références [1] L. Campayo, "Incorporation du Cesium dans des phosphates de structure apatitique et rhabdophane. Application au conditionnement des radionucleides séparés." Thèse de doctorat (2003), Université de Limoges. [2] S. Bailliez "Adsorption du plomb sur des hydroxyapatites et frittage thermique : processus cinétiques et transfert thermique". Thèse de doctorat (2003), Chimie Lyon. [3] DJ. PAIN, C. AMIARD-TRINQUET, Lead poisoning of raptors in France and elsewhere. Ecotoxicol. Environ. Safety, 25 (1993) 183-192. [4] P.KAMINSKY, M. KLEIN, M. DUC, Physiopathologie de l’intoxication par le plomb inorganique. Revue médicale interne, 14 (1993) 163-170. [5] G. 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La fonctionnalisation de la surface de l’apatite par des groupements phosphonates et amine permet de conférer aux dits matériaux un caractère complexant vis-à-vis des cations métalliques. L’étude des propriétés structurales et texturales des apatites greffées a montré que le greffage de l’AMP permet de contrôler la porosité et la composition chimique de la surface des matériaux greffés. Après avoir préparé et caractérisé les apatites greffées par l’AMP, le processus d’adsorption a été réalisé en batch à la température ambiante. Le suivi du pH durant le processus d’adsorption, le temps d’équilibre d’adsorption, les isothermes d’adsorption et leur modélisation par les modèles de Langmuir, Freundlich et Dubinin-Radushkevich, ont été aussi entamés dans ce travail. Dans les conditions opératoires étudiées, il a été montré que l’affinité des apatites greffées naturelles et synthétiques vis-à-vis des ions Pb2+ et Zn2+ est plus importante que celle des apatites non greffées et du phosphate naturel. La plus grande capacité d’adsorption est obtenue pour un taux de greffage de 10% quelque soit l’origine de l’apatite greffée. Dans le même objectif de la décontamination des eaux polluées, nous avons préparé et caractérisé des nanocomposites de l’oxyde de titane activé par des suspensions de l’hydroxyapatite poreuse, capables de piéger et dégrader les polluants organiques. De même, dans le but d’étudier les interactions des macromolécules avec les hydroxyapatites, nous avons essayé de fixer des porphyrines hydrosolubles par deux types d’hydroxyapatites poreuses de surfaces spécifiques différentes. Nous avons constaté que plus la valeur de la surface spécifique de l’hydroxyapatite est élevée plus la rétention de la porphyrine est meilleure. Une corrélation entre les propriétés de surface et d’adsorption de ces matériaux est établie. ___________________________________________________________________________ Mots clés : Hydroxyapatite, greffage, aminotriméthylènephosphonate, adsorption, métaux lourds, porphyrines, - 157 -