Liste Rouge provisoire des Odonates des Antilles françaises et liste des espèces à suivi prioritaire GUADELOUPE et MARTINIQUE Coordination : François Meurgey Comité de pilotage : Gwenaël David, François Meurgey, Lionel Picard, Céline Poiron et Karl Questel Octobre 2012 Ce travail doit être cité de la manière suivante : [MEURGEY F., (Coord.) et al., 2012. Liste Rouge provisoire des Odonates des Antilles Françaises et liste des espèces à suivi prioritaire. Guadeloupe et Martinique Société d’Histoire Naturelle L’Herminier (SHNLH), 57 p.] © Société d’Histoire Naturelle L’Herminier OCTOBRE 2012 Société d’Histoire Naturelle L’Herminier Muséum d’Histoire Naturelle 12, rue Voltaire 44000 Nantes [email protected] http://www.shnlh.org Liste Rouge provisoire des Odonates des Antilles françaises et liste des espèces à suivi prioritaire. Guadeloupe et Martinique Mots clés : ODONATES, ANTILLES FRANCAISES, LISTE ROUGE, UICN. Key words : ODONATA, FRENCH WEST INDIES, RED LIST, IUCN. Résumé : Une Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises est présentée. La méthodologie utilisée suit les modalités d’application nationale du protocole de l’UICN. La démarche adoptée est l’évaluation du statut de chacune des espèces de la faune des Antilles françaises pour obtenir un classement selon les catégories proposées par l’UICN. L’évaluation a été réalisée à partir des conditions d’éligibilité (période de référence, indigénat…), puis au travers de critères « espèces » et « habitats ». Les critères « espèces » regroupent, 1) l’analyse des données du programme ODO-AF, 2) d’autres critères comme la fragmentation des populations, l’endémisme, … Les critères « habitats » ont été ajoutés et prennent en compte les espèces euryèces, qui utilisent des milieux variés, globalement peu ou pas menacés, et les espèces sténoèces, qui se développent dans une gamme plus réduite d’habitats, davantage menacés. Les difficultés rencontrées montrent que la seule utilisation d’une base de données d’inventaire n’est pas suffisante pour une telle évaluation et qu’il est important de compléter l’analyse par l’utilisation de critères à dire d’experts. La Liste Rouge des Odonates menacés de Guadeloupe concerne 28% de la faune des libellules, dont une est en danger critique d’extinction, quatre sont en danger et quatre autres vulnérables. Pour la Martinique, la liste rouge concerne 39% des espèces, soit plus d’un tiers de la faune odonatologique, dont quatre sont considérées comme disparues, trois sont en danger et quatre autres vulnérables. Les espèces en Liste Rouge et celles classées dans la catégorie « Quasi menacé » sont intégrées dans le programme de suivi des espèces prioritaires de la SHNLH. La Liste Rouge des Odonates menacés des Antilles françaises a été établie à la suite du programme régional d'inventaire mené de 2000 à 2012, important travail qui a permis de dresser un inventaire bibliographique complet et de récolter plus de 5 000 données originales. Cette Liste Rouge se veut un outil au service des politiques de préservation des écosystèmes et des espèces. Certaines actions peuvent et doivent être engagées rapidement. Quelques espèces d'Odonates voient en effet leur situation se dégrader de façon évidente au point de rendre très précaire leur conservation dans le patrimoine naturel régional. Cette Liste Rouge est un document provisoire et sera soumis à validation par le Comité Français de l’UICN. _____________________________________ SOMMAIRE PREAMBULE............................................................................................................................................. 1 REMERCIEMENTS .................................................................................................................................... 3 INDEX DES ESPÈCES ................................................................................................................................. 5 1.MÉTHODOLOGIE D'ÉTABLISSEMENT DE LA LISTE ROUGE RÉGIONALE ................................................ 7 1.1 Description du lot de données. ..................................................................................................... 7 1.2 Le principe des critères UICN. ....................................................................................................... 8 1.2.1 Catégories de menace applicables au niveau régional. ......................................................... 8 1.2.2 Critères pour le classement dans les catégories CR, EN et VU. ............................................. 9 1.2.3 Directives pour établir une Liste Rouge régionale............................................................... 11 1.3 Critères retenus pour établir la Liste Rouge ............................................................................... 12 1.3.2 Taxons pris en compte ......................................................................................................... 12 1.3.3 Critères appliqués ................................................................................................................ 12 1.3.4 Procédure adoptée .............................................................................................................. 13 1.3.4.1. Calcul des AOO et des EOO.............................................................................................. 13 1.3.4.2. Ajustement des critères ................................................................................................... 13 1.3.5. Désignation des espèces considérées comme éteintes dans les Antilles françaises (RE) .. 14 2. LISTE ROUGE DES LIBELLULES MENACÉES EN GUADELOUPE ............................................................ 15 2.1 COMMENTAIRES SPECIFIQUES ........................................................................................................ 17 2.1.1 Les espèces de la Liste Rouge .................................................................................................. 17 2.1.2 Les espèces au bord de l'extinction (CR). ............................................................................ 17 2.1.3 Les espèces en danger (EN). ................................................................................................ 18 2.1.4 Les espèces vulnérables (VU) .............................................................................................. 20 2.1.5 Les autres espèces ................................................................................................................... 23 2.1.5.1 Les espèces quasi menacées (NT)..................................................................................... 23 2.1.5.2 Les espèces pour lesquelles les données sont insuffisantes (DD). ................................... 24 2.1.5.3. Les espèces non évaluées (NE). ....................................................................................... 26 3. LISTE ROUGE DES LIBELLULES MENACÉES EN MARTINIQUE ............................................................. 27 3.1 COMMENTAIRES SPECIFIQUES ........................................................................................................ 29 3.1.1. Les espèces de la Liste Rouge ................................................................................................. 29 3.1.1.1 Les espèces éteintes (RE). ................................................................................................. 29 3.1.1.2. Les espèces en danger (EN). ............................................................................................ 29 3.1.1.3. Les espèces vulnérables (VU) .......................................................................................... 31 3.1.3. Les autres espèces .................................................................................................................. 33 3.1.3.1 Les espèces quasi menacées (NT)..................................................................................... 33 3.1.4. Les espèces pour lesquelles les données sont insuffisantes (DD). ..................................... 34 3.1.5. Les espèces non évaluées (NE). .......................................................................................... 35 4. ESPECES A SUIVI PRIORITAIRE ........................................................................................................... 36 5. DISCUSSION ....................................................................................................................................... 38 5.1. Interprétation des résultats ........................................................................................................... 38 Liste des experts et contributeurs ......................................................................................................... 41 6. BIBLIOGRAPHIE CONSULTEE .............................................................................................................. 42 ANNEXE 1 : Tableau synthétique des données par ordre alphabétique des espèces en Guadeloupe . 51 ANNEXE 2 : Tableau synthétique des données par ordre alphabétique des espèces en Martinique. . 52 PREAMBULE En 1987 était publiée la première Liste Rouge des Odonates de France. Cette liste, s’intégrait dans un travail plus global destiné à faire le point sur les connaissances relatives à la faune, aux habitats et aux sources d’informations disponibles (DOMMANGET, 1987). Depuis les années 1980, l’odonatologie française s’est développée de manière spectaculaire. La mise en place de l’Inventaire cartographique des Odonates de France (programme Invod), la naissance de la revue Martinia, la création de la Société française d’Odonatologie, ont de toute évidence largement contribué à l’amélioration des connaissances sur les Odonates de France. Sur un autre plan, les avancées technologiques sur les systèmes d’information géographique, de géoréférencement et l’amélioration des performances des bases de données permettent une toute autre approche de l’inventaire de notre patrimoine biologique. Les bases de données de faune et de flore se multiplient, annonçant une surveillance de plus en plus précise des éléments environnementaux de toute nature. Dans les Antilles…. Les Odonates de France (ainsi que leur étude et prise en compte dans les mesures environnementales de préservation des habitats) sont en général abordés sous l’angle de la faune métropolitaine (98 taxons), séparément des faunes dites « exotiques ». Mais, si l’on considère l’ensemble des espèces qui composent la faune de France (c'est-à-dire des COM compris), nous arrivons au total vertigineux de plus de 440 espèces (Meurgey, 2006a), soit de manière plus imagée 8% de la faune mondiale. C’est dire la responsabilité de la France en matière de conservation de ce groupe d’insectes. Paradoxalement, les connaissances manquent encore sur de nombreux territoires ultramarins, comme les Antilles françaises. Ce manque de connaissances tient en grande partie au trop petit nombre de chercheurs français intéressés par cette discipline dans le passé, et à la pauvreté des collections. De nos jours, la plupart des entomologistes qui désirent étudier les libellules des Antilles doivent avoir recours à une littérature dispersée, souvent en langue anglaise et difficile à obtenir. Celle-ci ne concerne bien souvent pas les Antilles, mais plus généralement le continent américain. La faunistique (répartition des espèces) a été favorisée au détriment de la systématique, de la biologie et de l’écologie, aspects dont la connaissance est un prérequis à toute mesure de protection ou de gestion. La récente publication d’un ouvrage de synthèse sur les Odonates des Antilles françaises apporte désormais une somme de connaissances qui, même si de nombreux aspects de la vie des libellules demeurent peu connus, nous permet de pousser plus loin nos investigations, notamment en ce qui concerne la conservation de cet ordre d’insectes. Le domaine biogéographique néotropical, auquel appartiennent les Antilles, compte aujourd’hui environ 1650 espèces, et la diversité y est telle que de nouvelles espèces pour la science sont décrites chaque année dans les revues scientifiques. L’odonatofaune des Antilles se compose actuellement de 111 espèces, parmi lesquelles une importante proportion d’endémiques. Les îles qui composent les Antilles françaises sont les plus éloignées des foyers de dispersion que sont l’Amérique du Sud et les Grandes Antilles. Elles ont vu se développer au fil du temps une faune et une flore qui leur sont spécifiques et, à beaucoup d’égards, uniques au monde. Parmi les 41 espèces de libellules recensées en Guadeloupe et en Martinique, 5 ne sont présentes que dans cette région du monde, moins grande qu’un département de l’hexagone. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 C’est dans ce contexte que nous avons réalisé ce document. Il n’est pas question ici de dresser à nouveau un bilan faunistique des libellules des Antilles françaises, MEURGEY & PICARD (2011) l’ayant présenté récemment dans leur dernier ouvrage. Ce dernier fait le point sur toutes les espèces de Guadeloupe et de Martinique et apporte en outre des indications sur leur statut que nous intégrons bien évidemment dans ce travail. Liste rouge Conformément à la définition de l’UICN, une Liste Rouge régionale des espèces menacées établit l'état de conservation à l'échelle « nationale », des espèces et sous-espèces présentant les conditions d’évaluation pour déterminer le risque relatif d'extinction de ces dernières en les classifiant selon leur degré de menace. Ces listes ont pour but d’alerter les responsables politiques, les associations et le public sur la disparition de nombreuses espèces et les risques d’extinction de nombreux autres taxons. Elles permettent également de mettre en place un indicateur de la biodiversité et ainsi de suivre dans le temps l’évolution de la classification. Elles sont reconnues aujourd’hui comme un outil fiable pour évaluer les risques de déclin ou d’extinction des espèces et permettre ainsi de favoriser la mise en œuvre des mesures conservatoires aptes à inverser les tendances défavorables. Nous n’abordons pas ici les aspects conservatoires, d’ailleurs traités pour partie sur le plan général et spécifique dans l’ouvrage de MEURGEY & PICARD (2011). Au reste, il semble judicieux dans de nombreux cas de traiter ce sujet primordial à un niveau plus local ; les menaces n’étant pas forcément identiques pour une même espèce selon les endroits. Deux espèces de la Liste Rouge en Guadeloupe. Ischnura capreolus (à gauche) est en nette régression depuis les années 1970, elle fait partie des espèces vulnérables. Tauriphila australis (à droite) n’est connue que d’une seule station de la commune de Sainte-Anne, elle est également classée comme vulnérable. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 REMERCIEMENTS Nous remercions chaleureusement les experts et contributeurs qui ont bien voulu apporter leurs connaissances, leurs remarques, suggestions et corrections à cette liste ; Gwenaël David, Daniel Grand, Michel Papazian, Lionel Picard, Céline Poiron et Karl Questel. Nous souhaitons rendre hommage à nos prédécesseurs qui, avant nous, ont parcouru les milieux aquatiques de la Guadeloupe et de la Martinique, à la recherche des libellules et à qui nous devons une grande part des données recueillies : R. Bénard, J. Bonfils, F. Chalumeau, P. Delattre, A. Delplanque, J. Etienne, R. Lative, L. Matile, J.J. Menier, le R.P. R. Pinchon, F. Starmülhner et S. Therezien. Ainsi que les naturalistes et entomologistes dont les données ont été largement utilisées dans cet ouvrage: F. Deknuydt, J.F. Delasalle, P. Dupont, D.C. Geijskes, C. Goyaud, D. Grand, C. Hofmann, N. Ilbert, J. Menegaux, G. Jacquemin, J. Jérémie, J. Lebrun, J. Legrand, A. Marie, P. Machet, M. Mashaal, S. Pincebourde, O. Prévost, B. Pont, K. Questel, L. Redaud, C. Sautière et F. Sibley et B. Thiebaut. Nous remercions également tous ceux et celles qui nous ont apporté leur aide dans nos recherches, et en premier lieu nos amis Pierre et Claudine Guezennec, Jerrell James Daigle (Floride, USA) qui depuis quelques années nous accompagne dans nos missions aux Antilles. Toute notre gratitude va également aux personnes et aux structures suivantes pour l’aide qu’ elles ont bien voulu nous apporter à différents égards ; Mesdames Lyne-Rose Beuze et Colette Leton au Conseil Général de la Martinique pour avoir favorisé la consultation de la collection du Révérend Père Pinchon; Hervé Magnin, chef du service Biodiversité du Parc National de Guadeloupe à qui nous devons de participer aux activités du Conseil Scientifique du Parc, les gardes moniteurs du Parc National de Guadeloupe, Aline Merle, Patrice Segretier qui nous ont accompagné sur le terrain. Stéphane Di Mauro, technicien au Parc National de Guadeloupe qui a bien voulu nous renseigner sur les populations larvaires des libellules des sources de la Rivière Rouge, Jean-François Maillard de l’ONCFS Martinique, la DIREN Martinique et Jean-Louis Dommanget (Société Française d’Odonatologie) pour nous avoir confié l’étude faunistique des Odonates de l’île, le Parc Naturel Régional de Martinique qui a autorisé et favorisé nos recherches sur la presqu’île de la Caravelle, Alex Calixte responsable de la mise en valeur du patrimoine paysager et naturel de la commune de Sainte-Anne (Martinique) pour avoir pris le temps de nous faire visiter quelques-unes des mares de cette commune. Merci également aux scientifiques et responsables de collections de part le monde, qui nous ont apporté leur aide par le prêt de clichés, d’informations relatives aux collections, mais aussi par des discussions fort instructives ; Jérôme Constant, responsable des collections entomologiques de l’Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique a gracieusement mis à notre disposition les éléments relatifs à la collection de Pierre Rambur ; le Dr Jean Legrand, nous a ouvert les portes des collections de libellules des Antilles du Muséum National d’Histoire Naturelle ; la consultation des types de la collection Kirby, conservés au British Muséum de Londres a été facilitée par le Dr David Goodger ; les discussions et échanges sur la biogéographie et la systématique des libellules que nous avons régulièrement avec Oliver S. Flint Jr. du Smithsonian Institute (Washington, USA), et nos collègues Ken Tennessen, Dennis Paulson, Rosser W. Garrisson, Fred Sibley, Thomas “Nick” Donnelly et Natalia von Ellenrieder ont grandement contribué à préciser certains points douteux. Bill Mauffray a aimablement réalisé des clichés des collections de l’International Odonata Research Institute, FL., USA (IORI) ; la consultation des collections entomologiques de l’INRA station de Duclos en Guadeloupe a été favorisée et accompagnée par Robert Huc et Gérard Chovet. Nous tenons également à remercier nos compagnons de terrain qui - nous ont accompagné lors de nos prospections et à qui nous devons plus d’une intéressante observation - ne nous en tiennent pas rigueur et trouvent ici l’expression de toute notre gratitude : Ronan Bouanchaud, Laurent Charles, Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 Pierre Courtinard, Pascal Dhuicq, Maguy Dulormne, Lionel Dubief, Marc Gayot, Patrick Jean, Félix Lurel, Franck Maddi, Alain Marie, Laurent Malglaive, Jean-François Maillard, Thomas Meurgey, Gaëlle Weber et Thomas Williamson. Enfin, merci à Pierre et Claudine Guezennec pour nous avoir permis d’utiliser leurs photographies. Erythrodiplax berenice, mâle. Guadeloupe, Morne-Rouge, Sainte-Rose, aout 2010. Cl. P& C. Guezennec. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 INDEX DES ESPÈCES Dans la liste qui suit, les différentes îles considérées sont indiquées par les abréviations suivantes : GU : Guadeloupe (Gt : Grande-Terre ; Tb : Terre-de-Bas ; Th : Terre-de-Haut ; Ld : La Désirade ; Mg : Marie-Galante), MA : Martinique, SB : Saint-Barthélémy, SM : Saint-Martin. Cette liste est tirée de « Les libellules des Antilles françaises » (Meurgey & Picard, 2011), les changements intervenus depuis la parution de l’ouvrage ne concernent que la répartition locale des espèces, cette liste est donc entièrement actualisée. Odonata Fabricius, 1793 Zygoptera de Sélys-Longchamps, 1854 Lestidae Calvert, 1901 Lestes Leach, 1815 1. Lestes tenuatus Rambur, 1842 2. Lestes forficula Rambur, 1842 GU (Bt Gt Tb Mg), MA GU (Bt Gt Tb Mg), MA Coenagrionidae Kirby, 1890 Argia Rambur, 1842 3. Argia concinna (Rambur, 1842) Enallagma Charpentier, 1840 4. Enallagma coecum (Hagen 1861) Ischnura Charpentier, 1840 5. Ischnura capreolus (Hagen, 1861) 6. Ischnura hastata (Say, 1839) 7. Ischnura ramburii (de Sélys-Longchamps, 1850) Telebasis de Sélys-Longchamps, 1865 8. Telebasis corallina (de Sélys-Longchamps, 1876) Protoneuridae Tillyard, 1917 Protoneura Sélys in Sagra, 1857 9. Protoneura ailsa Donnelly, 1961 10. Protoneura romanae Meurgey, 2006 GU (Bt) GU (Bt), MA GU (Gt Bt), MA GU (Bt Gt Tb Mg), MA GU (Bt Gt Tb Th Ld Mg), MA, SM, SB GU (Bt Gt Tb Mg) MA GU (Bt Gt) Anisoptera de Sélys-Lonchamps, 1854 Aeshnidae Leach, 1815 Anax Leach, 1815 11. Anax amazili (Burmeister, 1839) 12. Anax concolor Brauer, 1865 13. Anax junius (Drury, 1773) Coryphaeshna Williamson, 1903 14. Coryphaeshna adnexa (Hagen, 1861) Gynacantha Rambur, 1842 15. Gynacantha nervosa Rambur, 1842 Hemianax de Sélys-Longchamps, 1883 16. Hemianax ephippiger (Burmeister, 1839) Rhionaeshna Förster, 1909 GU (Bt Gt Tb Mg) GU (Bt Gt) GU (Bt Gt Mg), MA GU (Bt Gt Tb) MA GU (Gt), SB Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 17. Rhionaeshna psilus (Calvert, 1947) Triacanthagyna de Sélys-Longchamps, 1883 18. Triacanthagyna caribbea Williamson, 1923 19. Triacanthagyna septima (Sélys in Sagra, 1857) Libellulidae Leach, 1815 Brachymesia Kirby, 1889 20. Brachymesia furcata (Hagen, 1861) 21. Brachymesia herbida (Gundlach, 1889) Brechmorhoga Kirby, 1894 22. Brechmorhoga archboldi (Donnelly, 1970) Dythemis Hagen, 1861 23. Dythemis sterilis Hagen, 1861 Erythemis Hagen, 1861 24. Erythemis vesiculosa (Fabricius, 1775) Erythrodiplax Brauer, 1868 25. Erythrodiplax berenice (Drury, 1773) 26. Erythrodiplax umbrata ( Linné, 1758) Macrothemis Hagen, 1868 27. Macrothemis meurgeyi Daigle, 2007 Miathyria Kirby, 1889 28. Miathyria marcella (Sélys in Sagra, 1857) Micrathyria Kirby, 1889 29. Micrathyria aequalis (Hagen, 1861) 310 Micrathyria didyma (Sélys in Sagra, 1857) Orthemis Hagen, 1861 31. Orthemis macrostigma (Rambur, 1842) Pantala Hagen, 1861 32. Pantala flavescens (Fabricius, 1798) 33. Pantala hymenaea (Say, 1839) Tauriphila Kirby, 1889 34. Tauriphila australis (Hagen, 1867) Tholymis Hagen, 1867 35. Tholymis citrina Hagen, 1867 Tramea Hagen, 1861 36. Tramea abdominalis (Rambur, 1842) 37. Tramea basilaris (Palisot de Beauvois, 1805) 38. Tramea binotata (Rambur, 1842) 39. Tramea calverti Muttowski, 1910 40. Tramea insularis Hagen, 1861 GU (Bt) GU (Bt Gt Mg), MA GU (Bt Gt Mg), MA GU (Bt Gt Tb Th Mg), MA GU (Bt Gt Th Ld Mg), MA, SB GU (Bt), MA GU (Bt Gt Mg), MA GU (Bt Gt Tb Th Mg), MA, SB GU (Gt Bt) GU (Bt Gt Tb Th Mg), MA, SM, SB GU (Bt) GU (Bt Gt Tb Mg), MA GU (Bt Gt Tb Mg), MA GU (Bt Gt Tb Mg), MA GU (Bt Gt Tb Th Ld Mg), MA, SM, SB GU (Bt Gt Tb Th Mg), MA, SM, SB GU (Gt), MA, SB GU (Gt), MA GU (Bt Gt Mg), MA GU (Bt Gt Tb Th Ld Mg), MA, SM GU (Gt), MA GU (Bt Gt) GU (Bt Gt), MA, SM GU (Gt Tb) MA Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 1.MÉTHODOLOGIE D'ÉTABLISSEMENT DE LA LISTE ROUGE RÉGIONALE De nombreuses méthodologies ont été développées pour élaborer des listes rouges nationales et régionales (Proess & Gerend, 1998 ; Sternberg & Buchwald, 1999 ; Brock et al., 2003 ; Winterholler, 2003 ; Müller & Steglich, 2004 par ex.). Il découle de cette diversité une certaine hétérogénéité de traitement qui ne facilite pas les comparaisons entre listes. L’UICN établit des Listes Rouges d’espèces animales ou végétales menacées au plan mondial depuis 1963 et a développé une méthodologie qui se veut la plus objective possible pour y parvenir. Pour l’établissement de la liste rouge des libellules menacées dans les Antilles françaises, nous nous sommes appuyés sur les préconisations de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) pour l’élaboration des listes rouges (UICN, 2001) et leurs déclinaisons au niveau régional (Guide pratique pour la réalisation de Listes Rouges régionales des espèces menacées, UICN, 2003 ; UICN, 2011). Nous nous sommes également fortement inspirés de l’établissement de la Liste Rouge des Libellules menacées de Suisse (Gonseth & Monnerat, 2002) pour la réalisation de ce document, ainsi que sur le réseau des observateurs et des experts à travers le monde, en métropole et évidemment aux Antilles. 1.1 Description du lot de données. Une donnée se définit par l'observation d'au moins un individu en un lieu donné en une date donnée par un ou plusieurs observateurs. Les données utilisées sont issues du travail d’inventaire des libellules des Antilles françaises qui a permis la collecte de 4000 données compilées entre 1832 et 2012. Cependant, près de 80 % de ces données ont été collectées durant les dix années d'inventaire régional (2000-2010). Chaque base de données régionale comprenant toutes les données ″anciennes″ (1832-2012) et l'intégralité des données collectées durant les dix années d'inventaire régional entre 2000 et 2012. L’ensemble de ces données est désormais intégré dans une base informatique régionale géoréférencée (Excel) nommée ODO-AF, maintenue et enrichie par la Société d’Histoire Naturelle L’Herminier dans le cadre du programme d’inventaire régional mis en place depuis 2000 en collaboration avec le Parc National de Guadeloupe. Les données utilisées dans ce travail concernent l’examen de 223 références bibliographiques traitant directement des Odonates des Antilles et plus couramment des Odonates de la région Néotropicale, mais qui mentionnent les Petites Antilles. Une autre partie des informations est issue de la consultation et de la révision des collections de la station INRA Duclos en Guadeloupe, de la collection du Muséum National d’Histoire Naturelle, de la collection du Muséum d’Histoire Naturelle de Nantes, de la Florida State Collection of Arthropods et de celles (?) de la collection Pinchon en Martinique. La grande majorité des données (plus de 80%) est issue des travaux de terrain menés depuis 2000 par Gwenaël David et Bénédicte Thiebaut en Martinique durant trois années consécutives, par François Meurgey, Lionel Picard, Céline Poiron et Pierre et Claudine Guezennec en Guadeloupe. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 1.2 Le principe des critères UICN. Les Listes rouges de l’UICN sont basées sur l’estimation de la probabilité d’extinction d’un taxon (dans pas de temps déterminé). Si l’unité taxinomique la plus souvent utilisée est l’espèce, cette estimation peut s’appliquer à toute entité de niveau taxinomique inférieur. Seule l’aire de distribution naturelle du taxon choisi est considérée. Les principaux critères adoptés par l’UICN pour répartir les espèces dans les différentes catégories de menace sont quantitatifs. Ils touchent aux fluctuations d’effectif ou de taille des populations des espèces considérées, à la variation de la surface de leur aire de distribution (aire d’occurrence) ou du nombre d’unités géographiques (stations ou km² par ex.) où elles sont présentes (aire d’occupation). D’autres considérations peuvent également entrer en ligne de compte : la fragmentation de leurs habitats, l’isolement des populations, leur concentration, le niveau de menace qui affecte leur habitat. Il s’agit donc d’ajouter aux critères purement quantifiables des éléments d’appréciation du niveau de menace qui affecte le taxon. 1.2.1 Catégories de menace applicables au niveau régional. Les textes figurant dans ce chapitre et dans le chapitre suivant sont tirés de : Catégories et Critères de l’UICN pour la Liste Rouge Version 3.1 approuvée lors de la 51ème réunion du Conseil de l’UICN. RE (Regionally Extinct – éteint régionalement) Un taxon est dit éteint régionalement lorsqu’il ne survit qu’en captivité ou dans le cadre d’une population (ou de populations) naturalisée(s), nettement en dehors de son ancienne aire de répartition. Un taxon est présumé éteint à l’état sauvage lorsque des études détaillées menées dans ses habitats connus et/ou probables, à des périodes appropriées, et dans l’ensemble de son aire de répartition historique régionale n’ont pas permis de noter la présence d’un seul individu. Les études doivent être faites sur une durée adaptée au cycle et aux formes biologiques du taxon. CR (Critically Endangered – en danger critique d'extinction) Un taxon est dit en danger critique d’extinction lorsque les meilleures données disponibles indiquent qu’il remplit l’un des critères A à E correspondant à la catégorie en danger critique d’extinction et, en conséquence, qu’il est confronté à un risque extrêmement élevé d’extinction à l’état sauvage. EN (Endangered – en danger) Un taxon est dit en danger lorsque les meilleures données disponibles indiquent qu’il remplit l’un des critères A à E correspondant à la catégorie en danger et, en conséquence, qu’il est confronté à un risque très élevé d’extinction à l’état sauvage. VU (Vulnerable – vulnérable) Un taxon est dit vulnérable lorsque les meilleures données disponibles indiquent qu’il remplit l’un des critères A à E correspondant à la catégorie vulnérable et, en conséquence, qu’il est confronté à un risque élevé d’extinction à l’état sauvage. NT (Near Threatened – quasi menacé) Un taxon est dit quasi menacé lorsqu’il a été évalué d’après les critères et ne remplit pas, pour l’instant, les critères des catégories en danger critique d’extinction, en danger ou vulnérable mais Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 qu’il est près de remplir les critères du groupe menacé ou qu’il les remplira probablement dans un proche avenir. LC (Least Concern – préoccupation mineure) Un taxon est dit de préoccupation mineure lorsqu’il a été évalué d’après les critères et ne remplit pas, pour l’instant, les critères des catégories en danger critique d’extinction, en danger, vulnérable ou quasi menacé. Dans cette catégorie sont inclus les taxons largement répandus et abondants. DD (Data Deficient – données insuffisantes) Un taxon entre dans la catégorie « données insuffisantes » lorsqu’on ne dispose pas assez de données pour évaluer directement ou indirectement le risque d’extinction en fonction de sa distribution et/ou de l’état de sa population. Un taxon inscrit dans cette catégorie peut avoir fait l’objet d’études approfondies et sa biologie peut être bien connue, sans que l’on dispose pour autant de données pertinentes sur l’abondance et/ou la distribution. Il ne s’agit donc pas d’une catégorie «menacée». L’inscription d’un taxon dans cette catégorie indique qu’il est nécessaire de rassembler davantage de données et n’exclut pas la possibilité de démontrer, grâce à de futures recherches, que le taxon aurait pu être classé dans une catégorie «menacée». Il est impératif d’utiliser toutes les données disponibles. Dans de nombreux cas, le choix entre données insuffisantes et une catégorie «menacée» doit faire l’objet d’un examen très attentif. Si l’on soupçonne que l’aire de répartition d’un taxon est relativement circonscrite, s’il s’est écoulé un laps de temps considérable depuis la dernière observation d’un taxon, le choix d’une catégorie «menacée» peut parfaitement se justifier. NE (not evaluated – non évalué) Un taxon est dit non évalué lorsqu’il n’a pas été confronté aux critères. La Liste Rouge proprement dite réunit les espèces des catégories EX (éteint), EW (éteint à l’état sauvage) respectivement RE (éteint régionalement), CR (en danger critique d’extinction), EN (en danger) et VU (vulnérable), alors que la liste des espèces menacées réunit celles des catégories CR, EN et VU uniquement. La catégorie NT (quasi menacé) est intermédiaire entre la Liste Rouge et la Liste des espèces non menacées (LC – préoccupation mineure). 1.2.2 Critères pour le classement dans les catégories CR, EN et VU. Les critères adoptés pour la classification des espèces dans les catégories CR, EN et VU sont identiques, seuls les seuils varient. Dans ce qui suit, ne sont repris que les textes concernant la catégorie CR et les seuils correspondants des catégories EN et VU. Un taxon est dit en danger critique d’extinction (respectivement en danger ou vulnérable) lorsque les meilleures données disponibles indiquent qu’il remplit l’un des critères suivants (A à E) et, en conséquence qu’il est confronté à un risque extrêmement élevé (respectivement très élevé ou élevé) d’extinction à l’état sauvage : A. Réduction de la taille de la population prenant l’une ou l’autre des formes suivantes: 1. Réduction des effectifs ≥ 90% (EN 70%; VU 50%) constatée, estimée, déduite ou supposée, depuis 10 ans ou trois générations, selon la plus longue des deux périodes, lorsque les causes de la réduction sont clairement réversibles ET comprises ET ont cessé, en se basant sur l’un des éléments suivants : a) l’observation directe ; b) un indice d’abondance adapté au taxon ; Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 c) la réduction de la zone d’occupation, de la zone d’occurrence et/ou de la qualité de l’habitat ; d) les niveaux d’exploitation réels ou potentiels ; e) les effets de taxons introduits, de l’hybridation, d’agents pathogènes, de substances polluantes, d’espèces concurrentes ou parasites. 2. Réduction des effectifs ≥ 80% (EN 50%; VU 30%) constatée, estimée, déduite ou supposée, depuis 10 ans ou trois générations, selon la plus longue des deux périodes, lorsque la réduction ou ses causes n’ont peut-être pas cessé OU ne sont peut-être pas comprises OU ne sont peut-être pas réversibles, en se basant sur l’un des éléments a) à e) mentionnés sous A1. 3. Réduction des effectifs ≥ 80% (EN 50%; VU 30%) prévue ou supposée dans les 10 années ou trois générations prochaines, selon la période la plus longue (maximum de 100 ans), en se basant sur l’un des éléments b) à e) mentionnés sous A1. 4. Réduction des effectifs ≥ 80% (EN 50%; VU 30%) constatée, estimée, déduite ou supposée, pendant n’importe quelle période de 10 ans ou trois générations, selon la plus longue des deux périodes (maximum 100 ans dans l’avenir), la période de temps devant inclure à la fois le passé et l’avenir, lorsque la réduction ou ses causes n’ont peut-être pas cessé OU ne sont peut-être pas comprises OU ne sont peut-être pas réversibles, en se basant sur l’un des éléments b) à e) mentionnés sous A1. B. Zone d’occupation (B1) ou zone d’occurrence (B2), ou les deux, inférieurs à un des seuils de surface indiqués, et remplir au moins deux des trois sous-conditions a, b ou c : 1. Zone d’occurrence estimée inférieure à 100 km² (EN 5000 km², VU 20000 km²) et estimations indiquant au moins deux des possibilités a) à c) suivantes : a) Population gravement fragmentée ou présente dans une seule localité b) Déclin continu, constaté, déduit ou prévu de l’un des éléments suivants : (i) zone d’occurrence (ii) zone d’occupation (iii) superficie, étendue et/ou qualité de l’habitat (iv) nombre de localités ou de sous-populations (v) nombre d’individus matures c) Fluctuations extrêmes de l’un des éléments suivants : (i) zone d’occurrence (ii) zone d’occupation (iii) nombre de localités ou de sous-populations (iv) nombre d’individus matures. 2. Zone d’occupation estimée inférieure à 10 km² (EN 500 km², VU 2000 km²), et estimations indiquant au moins deux des possibilités a) à c) suivantes : a) Population gravement fragmentée ou présente dans une seule localité. b) Déclin continu, constaté, déduit ou prévu de l’un des éléments suivants : (i) zone d’occurrence (ii) zone d’occupation (iii) superficie, étendue et/ou qualité de l’habitat (iv) nombre de localités ou de sous-populations (v) nombre d’individus matures c) Fluctuations extrêmes de l’un des éléments suivants: (i) zone d’occurrence Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 (ii) zone d’occupation (iii) nombre de localités ou de sous-populations (iv) nombre d’individus matures. C. Population estimée à moins de 250 individus matures (EN 2500, VU 10000) et présentant : 1. Un déclin continu estimé à 25% au moins en trois ans ou une génération, selon la période la plus longue (maximum de 100 ans dans l’avenir) (EN 20% en 5 ans ou 2 générations, VU 10% en 10 ans ou 3 générations), OU 2. Un déclin continu, constaté, prévu ou déduit du nombre d’individus matures ET l’une au moins des caractéristiques (a, b) : a) Structure de la population se présentant sous l’une des formes suivantes: (i) aucune sous-population estimée à plus de 50 individus matures (EN 250, VU 1000) OU (ii) 90% au moins des individus matures (EN 95%, VU 100%) sont réunis en une sous-population. b) Fluctuations extrêmes du nombre d’individus matures. D. Population estimée à moins de 50 individus matures (EN 250). VU: Population très petite ou limitée, sous l’une ou l’autre des formes suivantes : 1. Population estimée à moins de 1000 individus matures. 2. Population dont la zone d’occupation est très réduite (en règle générale moins de 20 km²) ou le nombre de localités très limité (en règle générale 5 au maximum) à tel point que la population est exposée aux impacts d’activités anthropiques ou d’événements stochastiques en une très brève période de temps et dans un avenir imprévisible. Par conséquent, elle pourrait devenir CR ou RE en un laps de temps très court. E. Analyse quantitative montrant que la probabilité d’extinction à l’état sauvage s’élève à 50% au moins en l’espace de 10 ans ou 3 générations (EN 20% en 20 ans ou 5 générations; VU 10% en 100 ans) selon la période la plus longue (maximum 100 ans). 1.2.3 Directives pour établir une Liste Rouge régionale Dans les Listes Rouges établies une distinction claire doit être faite entre les espèces reproductrices et les simples hôtes réguliers (non reproducteurs) de la région considérée. Le moyen le plus sûr d’y parvenir est de réaliser deux listes séparées. Les catégories à utiliser au niveau national ou régional doivent être les mêmes que celles utilisées au niveau mondial à l’exception de la catégorie éteint à l’état sauvage (EW) qui est remplacée par la catégorie éteint régionalement (RE). La catégorie non évaluée s’applique également aux hôtes irréguliers et aux espèces récemment introduites. La procédure proposée passe par deux étapes successives : - la première consiste à évaluer le statut de chaque espèce en appliquant les critères UICN comme si la population considérée était la population mondiale. - la seconde vise à pondérer le résultat ainsi obtenu par la prise en compte de la situation régionale en considérant la dynamique des populations locales des espèces, leur degré d’isolement par rapport aux populations des pays limitrophes, l’évolution de la qualité et du niveau de fragmentation de leur habitat par exemple. Pour chaque espèce, cette seconde étape peut se traduire par son maintien dans la catégorie initialement définie (espèces endémiques ou dont les populations locales sont isolées mais stables par exemple), par son déclassement dans une catégorie de menace moins aiguë (espèces dont les populations locales sont nombreuses et/ou alimentées par les populations des pays limitrophes et/ou en expansion par exemple) ou, dans certains cas, par sa montée dans une Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 catégorie de menace plus aiguë (espèces dont les populations locales sont très rares et/ou très isolées et/ou en forte régression par exemple). 1.3 Critères retenus pour établir la Liste Rouge Les critères de classement des espèces proposés par l’UICN ainsi que les directives d’application de ces critères pour la réalisation de Listes Rouges régionales ont, à l’évidence, été initialement développés pour des vertébrés par des spécialistes de vertébrés. Ce chapitre tend à démontrer que leur emploi pour évaluer le statut des espèces d’autres groupes d’organismes, notamment invertébrés, est possible mais dans certaines limites. 1.3.1 Catégories de menace adoptées Les catégories de menace proposées par l’UICN ainsi que leurs définitions sont cohérentes et parfaitement applicables : RE (regionally extinct – éteint régionalement) CR (critically endangered – en danger critique d’extinction) EN (endangered – en danger) VU (vulnerable – vulnérable) NT (near threatened – quasi menacé) LC (least concerned – préoccupation mineure) DD (data deficient – données insuffisantes) NE (not evaluated – non évalué) 1.3.2 Taxons pris en compte Les textes de l’UICN permettent d’intégrer divers niveaux taxonomiques au traitement des Listes Rouges. Dans le cadre des Antilles françaises, n’ont été intégrés que les taxons de rang spécifique. Pour la Guadeloupe et la Martinique, 100% des espèces ont été évaluées (respectivement 38 et 33 espèces). Nous reprenons les critères de GÄRDENFORS (2000) pour statuer sur la prise en compte des diverses espèces dans la Liste Rouge : 1. L’espèce doit s’être reproduite avec succès dans la région concernée depuis 1800. 2. Si l’espèce y a été introduite de manière passive (transport par exemple), elle doit l’avoir été avant 1900 et sa reproduction subséquente doit y être prouvée. 3. Si l’espèce y a été activement introduite, elle doit l’avoir été avant 1800 et doit y avoir développé certaines adaptations locales. 4. Les espèces apparues par immigration naturelle sont prises en compte dès que leur reproduction régulière dans la région est prouvée. 1.3.3 Critères appliqués Comme cela est résumé au chapitre 1, l’UICN propose cinq familles de critères (A-E) pour classer les espèces dans les différentes catégories de menace envisagées. Trois (A, C, D) font appel à une estimation quantitative, constatée ou prévue, du nombre total (C, D), respectivement de la réduction du nombre total (A), d’individus matures de chaque espèce dans la région considérée. Une Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 quatrième famille (E) fait quant à elle appel à des modèles prédictifs de dynamique des populations exigeant un niveau très élevé de connaissances préalables (courbes de mortalité, taux d’émigration et d’immigration par exemple). En ce qui concerne les invertébrés, il est très rare de disposer de données permettant l’utilisation directe de critères numériques. Les critères relatifs à l’analyse de l’évolution récente de la répartition géographique des espèces (B) et plus particulièrement de leurs zones d’occupation respectives (critère B2 a-c) sont donc privilégiés. 1.3.4 Procédure adoptée La Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises s’est faite en deux étapes : La première a consisté à attribuer un statut à chaque espèce en appliquant les critères UICN (B1, B2 et parfois A) comme si les populations étudiées étaient les populations mondiales. Cependant, l’estimation de l’aire des aires d’occurrence et d’occupation est difficile à l’échelle régionale et ne présente parfois qu’un intérêt tout relatif, notamment en ce qui concerne les espèces lentiques pour lesquelles ces aires devraient davantage s’exprimer en linéaires de cours d’eau qu’en km². Par ailleurs, les zones d’occurrence et d’occupation ne reflètent que partiellement les superficies réellement utilisables par les odonates au sein de leur aire de répartition. A titre d’exemple, une espèce peut avoir des aires de plusieurs centaines de km² mais ne disposer en son sein que de quelques hectares d’habitats favorables. 1.3.4.1. Calcul des AOO et des EOO Nous avons suivi les directives de l’UICN pour le calcul des aires d’occupation de chaque espèce en considérant que celles-ci correspondent à des mailles de 4km², même pour les espèces de rivières et cours d’eau linéaires. En effet, la plupart des espèces de milieux lotiques aux Antilles françaises, même si elles sont observées sur une rivière, n’y sont présentes que sous forme de populations sur des habitats particuliers, souvent séparés les uns des autres par des milieux moins favorables. Dans la plupart des cas, il s’agit donc de stations. Les aires d’occurrence ont été calculées avec le logiciel Qgis en créant des polygones minimums convexes d’angles inférieurs à 180°, donnant la superficie délimitée par une ligne imaginaire la plus courte contenant tous les sites possibles. Dans certains cas, la logique a primé sur le protocole, notamment lorsque des grands espaces de mer se trouvaient contenus dans les aires calculées ; ces surfaces ont été retranchées. De même pour les zones de toute évidence inhabitable pour les odonates (étage montagnard de la Soufrière ou grandes zones densément urbanisées). 1.3.4.2. Ajustement des critères Dans une seconde étape le statut attribué à chaque espèce est revu en fonction des critères supplémentaires suivants : · degré d’isolement des populations des Antilles françaises par rapport à celles des Petites Antilles (B2a) et capacité pou les espèces à échanger des individus d’une île à l’autre (dispersion) ; · évolution des populations sur la base des occurrences annuelles des données collectées durant le programme d’inventaire régional (B2b ii) ; Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 · degré de menace pesant sur les habitats (B2b iii) ; · degré de fragmentation des populations (B2b iv). Nous avons suivi pour l’établissement de cette Liste Rouge, les recommandations de l’UICN en matière d’ajustement des critères au niveau régional : http://www.uicn.fr/IMG/pdf/Schema_ajustement_categories_au_niveau_regional.pdf Les critères ont été ensuite soumis à la validation d’un comité d’évaluation constitué de 7 experts, qui ont commenté, modifié ou corrigé les premiers critères, mais également les textes spécifiques. En outre, les critères ont été confrontés à l’expérience sur ce groupe d’insectes dans les Antilles du comité de pilotage et du groupe d’experts, sur la base des données brutes, mais également sur la base des connaissances de terrain empiriques et de la connaissance des espèces dans une région biogéographie plus large (des Petites-Antilles au continent sudaméricain). Ainsi, nous n’avons tenu compte que des milieux de développement de l’espèce, à l’exception des données concernant un ou quelques adultes observés sur une station. Ces données sont disponibles pour l’ensemble des Antilles Françaises, puisque le travail de terrain durant l’inventaire régional a été axé principalement sur cet aspect de l’écologie des Odonates. Nous pouvons ainsi nous appuyer sur des données fiables sur les milieux de reproduction des espèces en ne tenant pas toujours compte de l’observation d’individus matures, erratiques ou en maturation sexuelle, ne se reproduisant à l’évidence pas dans les milieux concernés par les observations. 1.3.5. Désignation des espèces considérées comme éteintes dans les Antilles françaises (RE) Les directives de l’UICN prévoient qu’une espèce doit être considérée comme éteinte dans une région à partir du moment où plus aucun individu mature n’y est signalé. Or toute extinction doit se référer à un état initial. Dans le cas des Odonates des Antilles françaises, il n’existe d’autres référentiels que les collections et catalogues élaborés depuis le début du 20ème siècle. Sont donc considérées comme éteintes (RE) les espèces n’ayant plus été signalées depuis plus de vingt ans mais pour lesquelles des preuves évidentes attestent de la présence autrefois (individus en collection, citations dans des catalogues régionaux). Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 2. LISTE ROUGE DES LIBELLULES MENACÉES EN GUADELOUPE Nom scientifique Statut régional UICN Répartition et endémisme Ф Protoneura romanae Coryphaeshna adnexa Macrothemis meurgeyi Rhionaeshna psilus Tauriphila australis Erythrodiplax berenice Lestes tenuatus Brechmorhoga archboldi Ischnura capreolus Argia concinna Tramea binotata Micrathyria didyma Lestes forficula Enallagma coecum Ishnura hastata Ischnura ramburii Telebasis corallina Anax concolor Anax junius Triacanthagyna caribbea Triacanthagyna septima Brachymesia furcata Brachymesia herbida Dythemis sterilis sterilis Erythemis vesiculosa Erythrodiplax umbrata Miathyria marcella Micrathyria aequalis Orthemis macrostigma Pantala flavescens Tholymis citrina Tramea abdominalis Pantala hymenaea Tramea calverti Tramea insularis Anax amazili Anax ephippiger Tramea basilaris CR EN EN EN EN VU VU VU VU NT NT LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC DD DD DD DD NE NE NE NE NE NE NE NE NE NE NE NE NE NE NE NE NE LC LC LC LC LC NE NE LC NE LC NE LC NE NE LC NE NE NE LC NE NE LC LC G Néotropical G Néotropical Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical PA Nearctique/Néotropical PA Néotropical Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Néotropical Néotropical Nearctique/Néotropical Néotropical Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Néotropical Pantropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Néotropical Nearctique/Néotropical Afrotropical Afrotropical TOTAL CR 1 EN Statut régional VU NT LC Critères UICN DD NE 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 4 4 2 21 4 1 1 2 B(1+2)ba (i, iii, iv) C2a(i) B(1+2)cb (i,ii, iii) B1ac (i,iii) B1ac (i, ii, iii) B2ab (i, ii) B2a(ii,iii) B2c(ii,iii) A4ace pr. B(1+2)b(i,ii) pr. B2 (i, ii) ---------------------------- (Ф) G : Espèce endémique à la Guadeloupe ; PA : espèces endémiques des Petites Antilles * IUCN 2012. The IUCN Red List of Threatened Species. Version 2012.1. <http://www.iucnredlist.org>. Downloaded on 13 september 2012. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 CHIFFRES-CLES GUADELOUPE Pourcentage d’espèces menacées en Guadeloupe (CR+EN+VU)/ (Nb total d’espèces évaluées - NE) = 25% Meilleure estimation d’espèces menacées en Guadeloupe (CR+EN+VU) / (Nb total d’espèces évaluées – EX – DD) = 28% DD 11% NE 6% CR 2% EN 10% CR EN VU NT VU 11% LC 55% NT 5% LC DD NE Répartition des espèces dans les différentes catégories UICN. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 2.1 COMMENTAIRES SPECIFIQUES 2.1.1 Les espèces de la Liste Rouge 2.1.2 Les espèces au bord de l'extinction (CR). CR Protoneura romanae Meurgey, 2006 Espèce endémique stricte de Guadeloupe (Meurgey, 2006 ; Meurgey & Picard, 2011). En Guadeloupe, P. romanae présente deux noyaux de populations très distincts, éloignés géographiquement mais également d’un point de vue écologique. Quelques populations sur la BasseTerre occupent les zones calmes des rivières forestières et les ravines ombragées, tandis que seulement trois micro-populations fréquentent les forêts marécageuses de Grande-Terre (PetitCanal, Les Abymes, Le Moule). La première découverte d’une population de cette espèce sur la Grande-Terre (Petit-Canal) a eu lieu en 2006, puis les années suivantes deux autres populations (Le Moule et Les Abymes) ont été découvertes. Des recherches dans d’autres sites aux caractéristiques similaires n’ont pas permis de détecter cette espèce. Les populations de la Basse-Terre sont disséminées du Nord au Sud avec un noyau de population autour du Grand-Etang, relativement éloigné des populations plus au Nord. La disparition progressive des forêts marécageuses à Pterocarpus officinalis en Grande-Terre et leur extrême fragmentation qui se poursuit actuellement - malgré les efforts déployés en matière de connaissance et de protection de cet écosytème - isole les quelques populations les unes des autres. Sur la Basse-Terre, les principales populations se situent hors cœur du Parc National et ne bénéficient d’aucune mesure de protection. Dans le cas des populations qui se situent dans les limites du Parc National, la préservation de cette espèce n’est pas toujours assurée. En effet, les larves vivent et se développent dans les zones calmes des rivières à régime torrentiel, et très souvent dans des bassins ou des passages à gué dont les rochers affleurant forment des embâcles. Dans ces milieux la pression exercée par les activités de pique-nique, de passage de randonnée ou bien de baignade, voire de douche contribuent à limiter, et dans certains cas, à détruire, les populations existantes. Pour ces raisons, et aussi du fait de sa répartition mondiale limitée à la Guadeloupe, cette espèce est considérée comme en danger critique d’extinction. LR mondiale NE Population Stable/régression Biogéographie Endémique de Guadeloupe LR régionale Protection réglementaire CR non Fragmentation Habitat oui Fragmenté/régression Tendance relative ↘ Tolérance écologique Sténoèce Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 2.1.3 Les espèces en danger (EN). EN Coryphaeshna adnexa (Hagen, 1861) Espèce largement distribuée du Sud de l’Amérique du Nord (Floride), puis du Mexique à l’Argentine. Largement répandue dans les Grandes Antilles. Dans les Petites Antilles, uniquement présente en Guadeloupe (Meurgey & Picard, 2011). En Guadeloupe, l’espèce est représentée par seulement deux populations de moins de 10 individus (1-5) ; sur Terre-de-Bas des Saintes (Goyaud, 1994 ; Meurgey & Picard, 2011) et Grande-Terre, près de Sainte-Anne (P&.C. Guezennec, comm.pers.). L’envahissement par la laitue d’eau du site de Terre-de-Bas et les menaces plus ou moins à court terme qui mettent en péril le site de Sainte-Anne, sont des menaces objectives qui justifient le classement de cette espèce dans la catégorie « en danger ». LR mondiale NE Population Fluctuante EN Biogéographie Néarctique et néotropicale LR régionale Protection réglementaire EN non Fragmentation Habitat oui Fragmenté/régression Tendance relative ↘ Tolérance écologique Sténoèce Rhionaeshna psilus (Hagen, 1861) Cette espèce est répartie sporadiquement du Sud de l’Amérique du Nord jusqu’en Argentine. Dans les Antilles, elle est recensée de Cuba à Porto Rico. Dans les Petites Antilles, cette espèce n’est connue qu’en Guadeloupe et à la Dominique. Sa distribution guadeloupéenne ne concerne que la Basse-Terre. Deux populations distinctes existent sur la Basse-Terre avec un petit noyau reproducteur situé sur le massif du Houëlmont, au Sud et un groupe de petites populations situées sur le massif de la Soufrière. Les données éparses situées en côte sous-le-vent de la Basse-Terre concernent des individus erratiques. Cette espèce se développe dans des eaux stagnantes à très légèrement courantes (suintements, sources et résurgences, ravines intermittentes et étangs d’altitude temporaires, voire des flaques) au-dessus de 600 mètres d’altitude et jusqu’à 1150 mètres d’altitude. Il s’agit de la seule espèce aux Antilles françaises capable de se développer dans des eaux froides et acides sur le Massif de la Soufrière. Des populations larvaires ont été observées près des sources de la Rivière Rouge dans une eau froide, chargée en dépôts ferreux et avec un pH de 4,5. Dans le sud de la Basse-Terre, une population marginale se développe dans les mares forestières du Houëlmont, à 428 mètres d’altitude. Les populations les plus proches se situent au Venezuela sur le continent et à Porto Rico dans les Grandes Antilles, mais la probabilité d’apport d’individus est faible vers les Petites Antilles. Il est possible que les populations de la Guadeloupe et de la Dominique soient suffisamment isolées pour justifier d’un examen poussé des spécimens collectés et de leur comparaison avec ceux des localités les plus proches connues. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 LR mondiale NE Population Fluctuante EN Biogéographie Néarctique et néotropicale LR régionale Protection réglementaire EN non Fragmentation Habitat oui Stable/régression Tendance relative → Tolérance écologique Euryèce Macrothemis meurgeyi Daigle, 2007 Espèce endémique de Guadeloupe (Daigle, 2007 ; Meurgey & Picard, 2011). En Guadeloupe, l’espèce n’est présente que sur la Basse-Terre où les populations, généralement de moins de 10 individus sont relativement disséminées. Ceci tient à la nature du milieu exploité par cette espèce, constitué par les zones calmes des rivières montagnardes et forestières, à fond couvert d’algues. Ces milieux sont très fluctuants et soumis aux aléas des intempéries (cyclone, ondées tropicales, ravinement) qui modifient continuellement la physionomie de ces milieux. Comme pour Argia concinna cité plus haut, la majeure partie des populations se situe à des altitudes moyennes, le plus souvent situées hors cœur de Parc National et soumises à plusieurs types de menaces d’origine anthropique pouvant impacter directement les populations. Dans les zones calmes des cours d’eau de basse altitude, les larves sont menacées par la pollution d’origine agricole, et surtout domestique. En effet, de nombreuses populations larvaires se développent dans de petites ravines, voire des ruisselets et suintements en zone périurbaine, directement menacées par le lessivage des sols, les pollutions domestiques, l’assèchement, le comblement. La répartition mondiale restreinte de cette espèce et la menace qui pèse sur les milieux de basse altitude en Guadeloupe nous font considérer cette espèce comme en danger. LR mondiale NE Population Fluctuante EN Biogéographie Endémique de Guadeloupe LR régionale Protection réglementaire EN non Fragmentation Habitat oui Fragmenté/régression Tendance relative → Tolérance écologique Sténoèce Tauriphila australis (Rambur, 1842) Cette espèce est distribuée du Mexique au Paraguay. Dans les Grandes Antilles, à Cuba, Haïti, République Dominicaine et Porto-Rico. Dans les Petites Antilles, cette espèce est présente en Guadeloupe (P. & C. Guezennec, comm.pers.) et rare et peu abondante en Martinique. En Guadeloupe, l’unique station connue, la mare Castex sur la commune de Sainte-Anne, consiste en une grande dépression humide, envahie par la jacinthe d’eau (Eichhornia crassipes). Tauriphila australis semble également affectionner les milieux pionniers ou dégradés : carrières en fin d’exploitation, argilières ou réservoirs récemment creusés. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 LR mondiale NE Population Fluctuante Biogéographie Néotropicale LR régionale Protection réglementaire EN non Fragmentation Habitat oui Fragmenté/régression Tendance relative → Tolérance écologique Sténoèce 2.1.4 Les espèces vulnérables (VU) VU Lestes tenuatus (Rambur, 1842) Espèce largement distribuée du Sud de l’Amérique du Nord (Floride), puis du Mexique à l’Argentine. Largement répandue dans les Grandes Antilles. Dans les Petites Antilles, cette espèce est répertoriée de la Guadeloupe à Grenade à l’exception de Saint-Vincent (Meurgey & Picard, 2011). En Guadeloupe, Lestes tenuatus se développe dans les lagunes et mares littorales, les mares en forêt sempervirente saisonnières de la région des Grands Fonds, et atteint 700 mètres d’altitude localement dans les étangs de Capesterre-Belle-Eau. Moins fréquemment, L. tenuatus exploite les zones de résurgence et les forês marécageuses à mangle médaille (Pterocarpus officinalis). Cette espèce présente la particularité de déposer ses œufs dans l’écorce des ligneux qui bordent les zones de reproduction. La fragmentation et la disparition progressive des forêts marécageuses, associées au comblement des mares en zones xérophiles (décharges, urbanisation) justifient de considérer cette espèce comme vulnérable dans les Antilles françaises. LR mondiale NE Population fluctuante VU Biogéographie Néarctique et néotropicale LR régionale Protection réglementaire VU non Fragmentation Habitat oui Stable/régression Tendance relative ↘ Tolérance écologique Sténoèce Brechmorhoga archboldi (Donnelly, 1970) Appartenant à un genre essentiellement néotropical, B. archboldi est uniquement connu de Guadeloupe, de la Dominique et de la Martinique. Cette espèce, décrite à l’origine dans le genre Scapanea, a fait l’objet d’une récente révision qui la place définitivement dans le genre Brechmorhoga (Garrison & von Ellenrieder, 2006). En Guadeloupe, elle est uniquement présente sur la Basse-Terre où elle est répandue, mais jamais abondante, entre 150 mètres et plus de 1000 mètres d’altitude. Les larves se développent dans les eaux courantes, ensoleillées, permanentes et de faible profondeur, mais toujours en milieu forestier. Rivières larges (plus de 3 mètres) avec des bancs de graviers exondés, à fond sableux ou graveleux, parsemées de rochers. Cette espèce affectionne les zones de rapides, les radiers partiellement ombragés par la canopée. Les larves sont la plupart du temps observées en compagnie de crustacés décapodes (notamment Macrobrachium carcinus) et Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 d’un poisson, le Mulet (Agonostomus monticola) dont le régime alimentaire comporte des larves d’Odonates. Le cycle de cette espèce nécessite en plus d’un milieu aquatique adéquat, que soient maintenues des zones ouvertes (clairières, savanes..) à basse ou moyenne altitude lors de la maturation sexuelle des imagos. Cet élément est indispensable, car les adultes quittent rapidement le couvert forestier après l’émergence et se retrouvent, parfois en grand nombre dans les zones ouvertes ou plus ou moins dégagées très en dessous de l’altitude à laquelle ils se reproduisent. En outre, les larves sont sujettes à une dérive larvaire importante en période de crues intenses ou de fortes intempéries. Elles ne se maintiennent plus sur les fonds graveleux, mais suivent le courant pour être retrouvées, parfois quelques centaines de mètres plus bas que leur lieu de naissance. Leur cycle s’achève donc dans ces endroits qui peuvent être soumis à différentes pressions anthropiques et la pollution. Nous considérons cette espèce endémique régionale comme vulnérable dans les Antilles françaises du fait de sa répartition limitée à trois îles dont deux souffrent d’une anthropisation des zones avales des cours d’eau assez importante. LR mondiale NE Population Fluctuante, cyclique VU Biogéographie Endémique des Petites Antilles LR régionale Protection réglementaire VU non Fragmentation Habitat oui Stable/régression Tendance relative → Tolérance écologique Sténoèce Erythrodiplax berenice (Drury, 1773) Espèce largement distribuée du Canada jusqu’au nord de l’Amérique du Sud. Largement répandue dans les Grandes Antilles. Dans les Petites Antilles, cette espèce n’est connue que de quatre stations en Guadeloupe. L’habitat de prédilection de cette espèce est constitué par les eaux saumâtres littorales et marais salants. Dans ces habitats, les larves exploitent lez zones en eau peu profondes, et tolèrent une salinité et une température élevées durant la totalité de leur cycle, les adultes se rencontrent dans les environs immédiats des lieux de reproduction et ont besoin que de larges zones ouvertes à Cypéracées soient présentes au cours de la phase de maturation. La première observation de cette espèce en Guadeloupe remonte à 1972 avec une femelle capturée dans la lagune de la Baie au Moule (Meurgey & Dommanget, 2004). Aucune autre donnée n’est connue jusqu’en 2007, date à laquelle une autre femelle est capturée sur la même station. Des recherches ultérieures dans des habitats similaires ont permis la découverte de petites populations dans les mangroves de Morne-Rouge, à Port-Louis et une importante population sur la lagune de l’îlet Fajou. Nous considérons cette espèce comme vulnérable dans les Antilles françaises dans la mesure où les populations sont isolées les unes des autres et pour deux d’entre elles, soumises à plusieurs menaces directes d’origine humaine. Les capacités de dispersion de cette espèce ne nous sont pas connues, mais il semble que les adultes ne se dispersent pas au-delà de quelques centaines de mètres de leur lieu de reproduction. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 LR mondiale NE Population Fluctuante VU Biogéographie Néarctique et néotropicale LR régionale Protection réglementaire VU non Fragmentation Habitat oui Stable/régression Tendance relative ↘ Tolérance écologique Sténoèce Ischnura capreolus (Hagen, 1861) Cette petite espèce est largement distribuée du Mexique à l’Argentine. Dans les Grandes Antilles, elle est répertoriée de Cuba aux Iles Vierges, puis à Montserrat, en Guadeloupe, Martinique et Sainte Lucie. En Guadeloupe, Ischnura capreolus semble être en régression depuis les années 1970 avec seulement 4 stations connues actuellement contre plus d’une vingtaine entre 1972 et 1990 (Meurgey & Picard, 2011). Les données anciennes montrent une répartition plus étendue qu’aujourd’hui, notamment sur la Grande-Terre où cette espèce était rencontrée plus fréquemment. Les larves se développent dans les eaux stagnantes oligotrophes à mésotrophes ensoleillées semipermanentes ou permanentes jusqu’à 360 mètres et principalement dans les mares ouvertes fréquentées par le bétail. Un piétinement modéré des marais et des berges des mares peu profondes par le bétail est favorable à l’espèce, car il crée des gouilles dans lesquelles les larves se développent. Ce piétinement ne doit cependant pas dépasser un certain seuil, au-delà duquel le milieu n’est plus exploitable. Typiquement, il correspond à une pression moyenne exercée par les vaches au piquet, venant s’abreuver épisodiquement. La progressive régression de cette espèce en Guadeloupe peut être interprétée par la compétition avec Ischnura hastata, espèce moins exigeante et nettement plus répandue qu’I. capreolus. En effet, les données issues de la bibliographie et des collections indiquent une absence totale d’I. hastata avant 1970 en Guadeloupe (alors que cette espèce est plus facilement repérable et d’identification aisée). Le contrôle des stations où l’espèce avait été mentionnée auparavant (quand elles existent toujours) révèle la présence d’I. hastata uniquement. Les deux espèces cohabitent dans des milieux de grandes dimensions, mais I. capreolus est absent des milieux modestes (mais compatibles avec l’écologie de l’espèce) où I. hastata prédomine. LR mondiale NE Population Régression Biogéographie Néarctique et néotropicale LR régionale Protection réglementaire VU non Fragmentation Habitat oui Stable/régression Tendance relative ↘ Tolérance écologique Sténoèce Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 2.1.5 Les autres espèces 2.1.5.1 Les espèces quasi menacées (NT). NT Argia concinna (Rambur, 1842) Espèce endémique de Guadeloupe et de la Dominique (Gloyd, 1942 ; Goyaud, 1994 ; Meurgey, 2010 ; Meurgey & Picard, 2011). Absente de Montserrat et de la Martinique (observations erronées) (Meurgey & Picard, 2011). En Guadeloupe, l’espèce n’est présente que sur la Basse-Terre à des altitudes comprises entre 100 et 1000 mètres, la majeure partie des populations se situant néanmoins entre 500 et 1000 mètres. Ce zygoptère possède peu de capacité à la dispersion et nous n’avons aucune preuve d’échange d’individus entre les deux îles. Les adultes s’éloignent peu des milieux de reproduction, essentiellement forestiers et ne sont jamais observés au-delà de quelques mètres des berges. Les adultes se tiennent toujours très près des zones de reproduction, constituées par les rivières et ravines à régime torrentiel, complètement ou moyennement couverts par la canopée, de 100 mètres à plus de 1000 mètres d’altitude. Dans les milieux de basse et moyenne altitude, les milieux de reproduction sont menacés directement par la pollution d’origine agricole et domestique, le dépôt de macro-déchets, la rectification des berges et surtout la disparition même localement de la ripisylve nécessaire au développement des imagos et à celui des larves. La répartition mondiale restreinte de cette espèce et le fait que la zone d’occupation de l’espèce largement située hors périmètre préservé, justifie son classement dans la catégorie des espèces quasi menacées. NT Tramea binotata (Rambur, 1842) Tramea binotata est répertorié du Sud des U.S.A jusqu’en Argentine. Dans les Antilles, elle est connue des Bahamas, puis de la Jamaïque à Porto Rico et, au-delà d’un grand vide, uniquement à la Guadeloupe où cette espèce a été observée pour la première fois en 1997 (Hofmann, 1999; Meurgey & Picard, 2011), et à la Barbade où les citations sont anciennes et douteuses (Klots, 1932). Peu commune et jamais abondante en Guadeloupe, surtout à basse altitude sur la Basse-Terre. Atteint localement 400 mètres d’altitude dans les massifs du sud de l’île. Une seule mention sur la GrandeTerre, dans la région des Grands-Fonds. Cette espèce se reproduit dans les eaux stagnantes ensoleillées oligotrophes à mésotrophes, permanentes à semi-permanentes depuis la plaine jusqu’à 420 mètres ; mares et étangs littoraux riches en végétation aquatique (Nymphea ampla notamment), mais surtout étangs forestiers du sud de la Basse-Terre riches en massifs d’hélophytes dans lesquels on rencontre les populations les plus importantes. A la différence de Tramea abdominalis, cette espèce n’exploite pas les milieux temporaires. Les populations connues et suivies de T. binotata en Guadeloupe se maintiennent d’année en année mais les données indiquent que son aire d’occupation n’augmente pas, mais reste stable avec une tendance au déclin notamment à cause du comblement et de l’abandon de certaines mares destinées à l’abreuvement du bétail. Les populations des étangs du sud de la Basse-Terre sont moins Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 menacées. Un exemple est celui d’un étang maintenu en eau dans les environs du Grand-Etang de Guadeloupe, puis réaménagé en bassins de production d’ouassous en 2006, qui a fait chuter la population existante auparavant de manière significative. Nous considérons cette espèce comme quasi menacée dans les Antilles françaises sur la base de notre connaissance de la zone d’occupation et des risques réels et avérés de destruction des habitats de plaine. 2.1.5.2 Les espèces pour lesquelles les données sont insuffisantes (DD). Quatre espèces sont considérées comme appartenant à la catégorie DD, dans la mesure où les meilleures données disponibles sont insuffisantes pour mesurer avec justesse leur risque de déclin ou de disparition. DD Anax amazili (Burmeister, 1839) Cette espèce est répartie de façon relativement continue du sud des Etats-Unis (Texas, Louisiane, Floride) à l’Argentine. Dans les Antilles, Anax amazili est recensé de Cuba à Porto Rico, mais connu uniquement de Guadeloupe et de St-Vincent dans les Petites Antilles. Les citations de Martinique et de la Barbade ne sont pas étayées. Rare et peu abondant en Guadeloupe, surtout sur la Grande Terre et, localement, dans les étangs d’altitude du sud de la Basse-Terre. Connu d’une station de Terre-deBas des Saintes, ainsi qu’à Marie-Galante. Seulement sept stations sont connues en Guadeloupe « continentale » et à Marie-Galante avec chacune, moins de 10 individus. Cette espèce est surtout crépusculaire et nocturne ; le nombre d’observations est sans doute sous-estimé par rapport à la réalité. Des recherches ciblées sont à mettre en œuvre (recherches d’exuvies) afin de mieux connaître la zone d’occupation de cette espèce dans les Antilles françaises. Pour ces raisons, nous la classons dans la catégorie DD. DD Pantala hymenaea (Say, 1839) Espèce migratrice, distribuée du Canada au Chili. Dans les Antilles, des Bahamas à la République Dominicaine. Plus rare dans les Petites Antilles, seulement aux Iles Vierges, à St-Barthélémy, en Guadeloupe et en Martinique et à Grenade. En Guadeloupe, cette espèce a été observée en GrandeTerre, dans les prairies d’arrière mangrove de la région du Moule et dans les mares littorales entre 2006 et 2010. En Martinique - où l’espèce a été notée pour la première fois en 2008 - plusieurs individus ont été observés dans la Baie de Fort-de-France et la région de Trois-Ilets. Les données relatives à cette espèce sont trop récentes pour statuer sur l’autochtonie de l’espèce dans les Antilles françaises et ce, et même si des individus ont été observés en comportement de ponte. Pantala hymenaea est connu pour être une espèce migratrice à forte capacité de dispersion dans l’ensemble de son aire de répartition et tend généralement à précéder les fronts pluvieux tropicaux afin de trouver les milieux nécessaires à la reproduction qui sont constitués par des flaques d’eau sur les routes, de petites collections d’eau de pluie de plaine, les mares agricoles et les milieux pionniers (carrières, ornières de chemin …). Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 DD Tramea calverti Muttowski, 1910 Migrateur également, Tramea calverti est répertorié des Etats-Unis à l’Argentine (et les îles Galápagos). Dans les Antilles, il est régulièrement réparti de Cuba aux Iles Vierges, puis à SaintBarthélémy, en Guadeloupe, en Martinique et à Grenade. Espèce rare et sporadique à St-Barthélémy et en Guadeloupe, pouvant être abondante certaines années, dans les milieux littoraux. Très rare en Martinique, connue uniquement de la baie de Fort-de-France et de la région de Trois-Ilets. Cette espèce est cyclique et semble apparaître épisodiquement, précédant les fronts pluvieux au début de la saison des pluies, pour se reproduire. En Juillet 2008, un nombre inhabituel d’imagos matures et immatures a été observé en Guadeloupe, et surtout dans le sud de la Martinique où plus de 20 individus étaient observés simultanément dans les environs de Trois-Ilets. Les adultes ont été observés sur les eaux stagnantes ensoleillées temporaires ou semi permanentes, en zone sèche jusqu’à 100 mètres en Martinique (bassins en zone pâturée et mares forestières). Les différentes observations en Guadeloupe montrent une préférence des imagos pour les étangs littoraux permanents, riches en végétation flottante, avec en périphérie des zones de boisements épars et des pâtures sèches. Les premières observations de T. calverti en Guadeloupe sont récentes et certainement dues à une intensification des prospections, conjuguées à des afflux inhabituels d’individus. De plus, le caractère migrateur et cyclique de cette espèce justifie que nous la classions dans la catégorie « données déficientes ». DD Tramea insularis Hagen, 1861 La répartition mondiale de cette espèce est limitée au sud des Etats-Unis jusqu’au Mexique et aux Antilles. T. insularis est répertorié des Bahamas à Porto Rico. Dans les Petites Antilles, il est connu uniquement en Guadeloupe, Dominique, Martinique et Grenade. Très rare et sporadique en Guadeloupe et en Martinique où les apparitions de cette espèce sont liées aux mouvements à caractère migratoire propres à ce genre. Cette espèce peut très facilement passer inaperçue dans une population d’autres espèces de Tramea si on ne capture pas les individus observés. En Guadeloupe, il semble que cette espèce affectionne les milieux stagnants riches en hélophytes et notamment la jacinthe d’eau (Eichhornia crassipes), l’unique observation a été réalisée sur une mare presque totalement envahie par cette plante. Il est à noter que la larve de cette espèce est toujours non décrite. A notre connaissance, cette espèce ne se reproduit pas dans les Antilles françaises et les données, trop récentes, ne nous permettent pas de statuer ni sur son autochtonie, ni sur la régularité des afflux d’individus. Ces considérations justifient son classement dans la catégorie DD. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 2.1.5.3. Les espèces non évaluées (NE). Deux espèces n’ont pas été évaluées. D’une part, les données sont trop récentes pour que nous puissions avoir une vision de leur statut autochtone ou non dans les Antilles et d’autre part parce que ces deux espèces sont des migrateurs d’origine afrotropicale - dont les apparitions sporadiques et souvent fugaces sont liées à des déplacements migratoires favorisés par les moussons d’est vers les Antilles - et ne font pas partie de la faune néotropicale. Anax ephippiger (Burmeister, 1839) Cette espèce afrotropicale et Eurasienne a été notée pour la première fois dans le Nouveau Monde en Guyane française en février 2003 (Machet & Duquef, 2004). En 2006, une femelle est capturée en janvier à Anse-Bertrand, sur la Grande-Terre de Guadeloupe (Meurgey, 2006). Toujours en 2006, un exemplaire est capturé à Anegada (Iles Vierges Britanniques) par Fred Sibley (Sibley, comm.pers.). Enfin, la troisième capture de cette année 2006 a été réalisée en Dominique où un mâle territorial, vraisemblablement accompagné de deux femelles, a été capturé sur le Freshwater Lake en décembre (Meurgey & Weber, 2007 ; Meurgey, 2007). Voilà qui résume les connaissances sur cette espèce dans les Antilles. L’observation d’individus à l’unité, l’absence de comportements reproducteurs et de preuve de développement larvaire (même si cette espèce peut trouver aux Antilles des milieux qui lui conviennent), nous la font considérer comme un visiteur occasionnel. Tramea basilaris (Palisot de Beauvois, 1805) Cette espèce est rare et épisodique dans les Antilles, observée pour la première fois en Martinique avec plusieurs individus, présentant des comportements de ponte, en 2007 et 2008 dans la partie sud-est de l’île. Très récemment observée en Guadeloupe (octobre 2009) à la Pointe des Châteaux, sur la Grande-Terre. -Ces observations ont toutes été réalisées entre Octobre et Novembre. Cette espèce a déjà été observée dans le Nouveau Monde par le passé. Belle (1988) rapporte l’observation d’un individu sur l’aéroport international de Zanderij, au Surinam, qu’il considérait comme une introduction accidentelle. L’aire de répartition de ce taxon comprend l’Afrique tropicale, Madagascar, le Moyen-Orient, l’Inde, l’Asie du sud-est jusqu’en Malaisie, et le Japon. Tramea basilaris manifeste naturellement dans son aire de distribution une nette propension aux déplacements à caractère migratoire et, comme pour l’espèce précédente, il n’est pas étonnant que quelques individus puissent être déportés par les vents d’est se dirigeant vers les Caraïbes en provenance des côtes d’Afrique. Le caractère « nouveau » de ces observations tient en grande partie au fait que depuis quelques années, l’inventaire régional des odonates nécessite un accroissement des captures pour identification et que, naturellement, les chances d’observer de nouveau taxons en soient améliorées. Il est peu douteux que des individus parviennent plus ou moins régulièrement jusqu’aux Antilles. Bien que des comportements de ponte aient été observés, les données demeurent largement insuffisantes pour statuer sur le caractère reproducteur (autochtonie) de cette espèce. Nous la considérons, pour le moment comme un visiteur occasionnel. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 3. LISTE ROUGE DES LIBELLULES MENACÉES EN MARTINIQUE Nom scientifique Statut régional UICN Répartition et endémisme Ф Erythemis credula Erythrodiplax connata Erythrodiplax unimaculata Tramea onusta Tauriphila australis Ishnura hastata Triacanthagyna septima Protoneura ailsa Gynacantha nervosa Lestes tenuatus Brechmorhoga archboldi Ischnura capreolus Micrathyria didyma Lestes forficula Enallagma coecum Ischnura ramburii Anax junius Triacanthagyna caribbea Brachymesia furcata Brachymesia herbida Dythemis sterilis sterilis Erythemis vesiculosa Erythrodiplax umbrata Miathyria marcella Micrathyria aequalis Orthemis macrostigma Pantala flavescens Tholymis citrina Tramea abdominalis Pantala hymenaea Tramea calverti Tramea insularis Tramea basilaris RE RE RE RE EN EN EN VU VU VU VU NT LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC LC DD DD DD NE NE NE NE LC NE NE NE NE LC NE NE NE NE NE NE LC LC LC NE LC NE LC NE LC NE NE LC NE NE NE LC NE LC Néotropical Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Néotropical Nearctique/Néotropical Néotropical PA Néotropical Nearctique/Néotropical PA Nearctique/Néotropical Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Néotropical Pantropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Nearctique/Néotropical Néotropical Afrotropical TOTAL RE 1 1 1 1 EN Statut régional VU NT LC Critères UICN DD NE 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 4 3 4 1 17 3 1 1 ----B1ac(i, ii, iii) C2a(ii) B(1+2)ab(ii) B1b(iii, iv) B2ac(ii,iii) B2a(ii,iii) B2c(ii,iii) pr. A4ace ---------------------- (Ф) PA : espèces endémiques des Petites Antilles * IUCN 2012. The IUCN Red List of Threatened Species. Version 2012.1. <http://www.iucnredlist.org>. Downloaded on 13 september 2012. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 CHIFFRES-CLES MARTINIQUE Pourcentage d’espèces menacées en Martinique (CR+EN+VU)/ (Nb total d’espèces évaluées - NE) = 34% Meilleure estimation d’espèces menacées en Martinique (CR+EN+VU) / (Nb total d’espèces évaluées – EX – DD) = 39% DD 9% NE 3% RE 12% EN 9% RE EN VU NT VU 12% LC DD NE LC 52% NT 3% Répartition des espèces dans les différentes catégories UICN. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 3.1 COMMENTAIRES SPECIFIQUES 3.1.1. Les espèces de la Liste Rouge 3.1.1.1 Les espèces éteintes (RE). RE Erythemis credula (Hagen, 1861) Espèce néotropicale, largement répandue du Mexique à l’Argentine où elle n’est pas rare et peut même être abondante comme la plupart des espèces de ce genre. Une seule mention signale cette espèce de Martinique (Klots, 1932) où elle n’a jamais été revue depuis, pas plus que dans les autres îles des Petites Antilles. Les localités les plus proches pour cette espèce se situent en Guyane française. RE Erythrodiplax connata (Burmeister, 1839) Espèce néotropicale, répandue en Argentine et au Chili. Une seule mention signale cette espèce de Martinique (Klots, 1932) où elle n’a jamais été revue depuis, pas plus que dans les autres îles des Petites Antilles. Les localités les plus proches pour cette espèce se situent en Guyane française. RE Erythrodiplax unimaculata (De Geer, 1773) Espèce néotropicale très largement répandue de l’Amérique Centrale au Paraguay. Dans les Antilles, mentionnée sans certitude de la Jamaïque. Une seule mention signale cette espèce de Martinique (Klots, 1932) où elle n’a jamais été revue depuis, pas plus que dans les autres îles des Petites Antilles. Les localités les plus proches pour cette espèce se situent en Guyane française. RE Tramea onusta Hagen, 1861 Espèce néotropicale relativement fréquente et parfois abondante de l’Amérique centrale et au Venezuela. Dans les Antilles, distribuée de manière continue de Cuba à Porto Rico (Grandes Antilles). Une seule mention signale cette espèce de Martinique (Klots, 1932) où elle n’a jamais été revue depuis, pas plus que dans les autres îles des Petites Antilles. 3.1.1.2. Les espèces en danger (EN). EN Tauriphila australis (Hagen, 1867) Cette espèce est distribuée du Mexique au Paraguay. Dans les Grandes Antilles, à Cuba, Haïti, République Dominicaine et Porto-Rico. Dans les Petites Antilles, cette espèce est rare et peu abondante en Martinique. En Martinique, les populations connues sont localisées dans la moitié sud de l’île, et liées aux zones humides riches en hélophytes et souvent envahies par la jacinthe d’eau (Eichhornia crassipes) ; marais de la Baie de Fort-de-France, et mares de la région de Sainte-Anne. En Guadeloupe, l’unique station connue, la mare Castex sur la commune de Sainte-Anne, consiste en une grande dépression humide, envahie par la jacinthe d’eau. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 Tauriphila australis semble également affectionner les milieux pionniers ou dégradés : carrières en fin d’exploitation, argilières ou réservoirs récemment creusés. Les milieux exploités par cette espèce en Martinique sont soumis à différentes pressions anthropiques (pollution, aménagement de zones de chasse) et à l’envahissement par deux espèces de végétaux aquatiques ; la laitue d’eau (Pistia stratiotes), la jacinthe d’eau (Eichhornia crassipes) et Hydrilla verticillata. Ces éléments et les données limitées à quatre stations justifient son classement dans la catégorie « en danger ». LR mondiale NE Population Fluctuante EN Biogéographie Néotropicale LR régionale Protection réglementaire EN non Fragmentation Habitat oui Fragmenté/régression Tendance relative → Tolérance écologique Sténoèce Ischnura hastata (Say, 1839) Cette espèce n’est présente en Martinique qu’en une seule station avec une population de moins de 10 individus matures. Cette espèce est répertoriée de Guadeloupe où elle est bien représentée, Montserrat, Antigue et Sainte-Lucie. Le milieu exploité par l’espèce en Martinique se situe dans une zone agricole dédiée à la culture de dachine et peut être amené à disparaître à la suite de travaux agricoles, comblement ou assèchement. Nous considérons, au vu de ces éléments, que cette espèce est en danger en Martinique. LR mondiale NE Population Fluctuante EN Biogéographie Néotropicale LR régionale Protection réglementaire EN non Fragmentation Habitat oui Fragmenté/régression Tendance relative ↘ Tolérance écologique Euryèce Triacanthagyna septima (Selys in Sagra, 1857) Cet Aeshnidae crépusculaire et nocturne est relativement bien distribué du Texas au Brésil et, dans les Grandes Antilles de Cuba à PortoRico. Dans les Petites Antilles, cette espèce est répertoriée de Guadeloupe, Martinique et Sainte-Lucie. Plus fréquente en Guadeloupe, T. septima est rare à très rare en Martinique et à Sainte-Lucie. En Martinique, nous ne connaissons qu’une seule station, dans la région de Trois-Ilets. T. septima se développe dans les eaux stagnantes en forêt xérophile et les ravines intermittentes sous canopée, à l’étage de transition avec la forêt mésophile. L’aire d’occurrence et l’aire d’occupation de cette espèce limitée à une station en Martinique justifient son classement dans la catégorie des espèces en danger, dans la mesure où les milieux stagnants dans lesquels se développe cette espèce sont soumis à d’importantes fluctuations saisonnières, mais également à une pression humaine (assèchement, urbanisation) non négligeable. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 Biogéographie LR mondiale NE Population Fluctuante LR régionale EN Fragmentation oui Néotropicale Protection réglementaire non Habitat Fragmenté/régression Tendance relative ↘ Tolérance écologique Sténoèce 3.1.1. 3 . Les espèces vulnérables (VU) VU Lestes tenuatus Rambur, 1842 Espèce largement distribuée du Sud de l’Amérique du Nord (Floride), puis du Mexique à l’Argentine. Largement répandue dans les Grandes Antilles. Dans les Petites Antilles, cette espèce est répertoriée de la Guadeloupe à Grenade à l’exception de Saint-Vincent (Meurgey & Picard, 2011). Nettement moins fréquente en Martinique qu’en Guadeloupe, les populations restent très fragmentées avec généralement moins de dix individus sur une station. La fragmentation et la disparition progressive des forêts marécageuses, associées au comblement des mares en zones xérophiles (décharges, urbanisation) justifient de considérer cette espèce comme vulnérable. LR mondiale NE Population Fluctuante VU Biogéographie Néarctique et néotropicale LR régionale Protection réglementaire VU non Fragmentation Habitat oui Stable/régression Tendance relative ↘ Tolérance écologique Sténoèce Protoneura ailsa Donnelly, 1961 Espèce endémique de la Dominique, de la Martinique et de Sainte Lucie, ne présentant jamais de populations importantes (les populations sont néanmoins plus importantes dans le nord de l’île que dans le sud) et dont les principales localités sont disséminées entre le nord et le sud de l’île où l’espèce est à la fois plus rare mais également plus menacée quant à ses habitats (pollutions d’origine agricole, urbanisation, rectification des berges, disparition de la ripisylve et urbanisation). Dans le nord de l’île, l’habitat préférentiel consiste en ravines en forêt ombrophile, mais les populations du sud se rencontrent plutôt dans les rivières calmes de basse altitude, à régime fluviatile et souvent en aval des exploitations bananières. Cette espèce ne fréquente, dans les zones d’occurrence, que des milieux de dimensions modestes, le plus souvent de moins de 20m², à eau peu profonde et bordée de réseaux racinaires dans lesquels les larves se tiennent préférentiellement. La répartition très réduite de cette espèce, la fragmentation des populations et les menaces qui pèsent sur les habitats de basse élévation, associées aux très faibles capacités de dispersion des imagos (moins de 10 mètres des zones de reproduction), justifient son classement comme espèce vulnérable. LR mondiale Biogéographie Endémique des Petites Antilles LR régionale Protection réglementaire Tendance relative Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 NE Population Stable/régression VU VU Fragmentation oui non Habitat Fragmenté/régression ↘ Tolérance écologique Sténoèce Gynacantha nervosa Rambur, 1842 Espèce largement distribuée du sud-est de l’Amérique du Nord (Floride), jusqu’au Brésil. Largement répandue dans les Grandes Antilles. Dans les Petites Antilles, uniquement présente en Martinique (Meurgey & Picard, 2011). En Martinique, l’espèce est représentée par seulement deux populations de moins de 10 individus (1-5). Bien que les populations soient très limitées en Martinique, cette espèce est par ailleurs bien représentée dans le domaine néotropical, et des échanges sont peut-être possibles avec d’autres populations du fait de la mobilité de cet Aeshnidae. Dans la région, Gynacantha nervosa se développe dans des milieux temporaires, souvent menacés par la destruction directe ou le comblement (mares forestières, flaques). Les mœurs crépusculaires et nocturnes de cette espèce, liés à son habitat principalement forestier expliquent en grande partie la difficulté de détection des imagos et c’est la recherche des exuvies qui a permis la découverte de cette espèce dans l’île. Des recherches ciblées sont à mettre en œuvre afin de déterminer avec précision la zone d’occupation de G. nervosa dans les Antilles françaises. La fragmentation des populations, associée aux menaces qui pèsent sur ses milieux de reproduction (comblement, assèchement, destruction), militent en faveur d’un classement dans la catégorie VU. LR mondiale NE Population Fluctuante, cyclique VU Néarctique et Néotropicale LR régionale Protection réglementaire VU non Fragmentation Habitat oui Stable/régression Tendance relative ↘ Tolérance écologique Sténoèce Brechmorhoga archboldi (Donnelly, 1970) Appartenant à un genre essentiellement néotropical, B. archboldi est uniquement connu de Guadeloupe, de la Dominique et de la Martinique. Peu répandu, quoique parfois abondant en Martinique, uniquement dans les massifs montagneux du nord de l’île : massif des Carbets et du Morne Jacob, entre 200 et 600 mètres d’altitude. Les larves se développent dans les eaux courantes, ensoleillées, permanentes et de faible profondeur, mais toujours en milieu forestier. Rivières larges (plus de 3 mètres) avec des bancs de graviers exondés, à fond sableux ou graveleux, parsemé de rochers. Cette espèce affectionne les zones de rapides, les radiers partiellement ombragés par la canopée. Les larves sont la plupart du temps observées en compagnie de crustacés décapodes (notamment Macrobrachium carcinus) et d’un poisson, le Mulet (Agonostomus monticola) dont le régime alimentaire comporte des larves d’odonates. Le cycle de cette espèce nécessite en plus d’un milieu aquatique adéquat, que soient maintenues des zones ouvertes (clairières, savanes..) à basse ou moyenne altitude lors de la maturation sexuelle des imagos. Cet élément est indispensable, car les adultes quittent rapidement le couvert forestier après l’émergence et se retrouvent, parfois en grand nombre dans les zones ouvertes ou plus ou moins dégagées très en dessous de l’altitude à laquelle ils se reproduisent. En outre, les larves sont sujettes à une dérive larvaire importante en période de crues intenses ou de fortes intempéries. Elles ne se maintiennent plus sur les fond graveleux, mais suivent le courant pour être retrouvées, parfois quelques centaines de mètres plus bas que leur lieu de naissance. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 Leur cycle s’achève donc dans ces endroits qui peuvent être soumis à différentes pressions anthropiques et la pollution. Nous considérons cette espèce endémique régionale comme vulnérable dans les Antilles françaises du fait de sa répartition limitée à trois îles dont deux souffrent d’une anthropisation des zones avales des cours d’eau assez importante. LR mondiale NE Population stable Biogéographie Endémique des Petites Antilles LR régionale Protection réglementaire VU non Fragmentation Habitat oui stable Tendance relative → Tolérance écologique sténoèce 3.1.3. Les autres espèces 3.1.3.1 Les espèces quasi menacées (NT). NT Ischnura capreolus (Hagen, 1861) Cette petite espèce est largement distribuée du Mexique à l’Argentine. Dans les Grandes Antilles, elle est répertoriée de Cuba aux Iles Vierges, puis à Montserrat, en Guadeloupe, Martinique et SainteLucie. En Martinique, Ischnura capreolus est répandu et parfois abondant, principalement au sud d’une ligne reliant Fort-de-France au Robert. Un noyau de population existe sur le massif des Pitons du Carbet. Les larves se développent dans les eaux stagnantes oligotrophes à mésotrophes ensoleillées semi-permanentes ou permanentes jusqu’à 360 mètres et principalement dans les mares ouvertes fréquentées par le bétail et les milieux faiblement courants de plaine et les annexes humides des rivières à régime fluviatile. Un piétinement modéré des marais et des berges des mares peu profondes par le bétail est favorable à l’espèce, car il crée des gouilles dans lesquelles les larves se développent. Ce piétinement ne doit cependant pas dépasser un certain seuil, au-delà duquel le milieu n’est plus exploitable. D’assez importantes populations sont rencontrées dans les deux stations relictuelles de forêt marécageuse à mangle médaille (Pterocarpus officinalis) que compte encore la Martinique. Les pressions anthropiques exercées sur ces deux stations ; la pollution, le dépôt de déchets, la fragmentation et l’isolement des massifs forestiers, l’urbanisation font peser des menaces directes sur ces populations. Il en va de même pour les rivières de plaine, qui souffrent notamment d’une pollution agricole chronique souvent en amont des stations où l’espèce est présente. C’est pourquoi nous considérons - en plus de la disparition de certaines mares « anciennes » au profit de trous d’abreuvement creusés à la hâte - cette espèce comme quasiment menacée en Martinique. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 3.1.4. Les espèces pour lesquelles les données sont insuffisantes (DD). Trois espèces sont considérées comme appartenant à la catégorie DD, dans la mesure où les meilleures données disponibles sont insuffisantes pour mesurer avec justesse leur risque de déclin ou de disparition. DD Pantala hymenaea (Say, 1839) Espèce migratrice, distribuée du Canada au Chili. Dans les Antilles, des Bahamas à la République Dominicaine. Plus rare dans les Petites Antilles, seulement aux Iles Vierges, à St -Barthélémy, en Guadeloupe, en Martinique et à Grenade. En Martinique - où l’espèce a été notée pour la première fois en 2008 -, plusieurs individus ont été observés dans la Baie de Fort-de-France et la région de Trois-Ilets. Les données relatives à cette espèce sont trop récentes pour statuer sur l’autochtonie de l’espèce dans les Antilles françaises et ce, même si des individus ont été observés en comportement de ponte. Pantala hymenaea est connu pour être une espèce migratrice à forte capacité de dispersion dans l’ensemble de son aire de répartition et tend généralement à précéder les fronts pluvieux tropicaux afin de trouver les milieux nécessaires à la reproduction qui sont constitués par des flaques d’eau sur les routes, de petites collections d’eau de pluie de plaine, les mares agricoles et les milieux pionniers (carrières, ornières de chemin …). DD Tramea calverti Muttowski, 1910 Migrateur également, Tramea calverti est répertorié des Etats-Unis à l’Argentine (et les îles Galápagos). Dans les Antilles, il est régulièrement répartie de Cuba aux Iles Vierges, puis à StBarthélémy, en Guadeloupe, en Martinique et à Grenade. Espèce rare et sporadique à St-Barthélémy et en Guadeloupe, pouvant être abondante certaines années, dans les milieux littoraux. Très rare en Martinique, connue uniquement de la baie de Fort-de-France et de la région de Trois-Ilets. Cette espèce est cyclique et semble apparaître épisodiquement, précédant les fronts pluvieux au début de la saison des pluies, pour se reproduire. En Juillet 2008, un nombre inhabituel d’imagos matures et immatures a été observé dans le sud de la Martinique où plus de 20 individus étaient observés simultanément dans les environs de Trois-Ilets. Les adultes ont été observés sur les eaux stagnantes ensoleillées temporaires ou semi permanentes, en zone sèche jusqu’à 100 mètres en Martinique (bassins en zone pâturée et mares forestières). Les différentes observations en Guadeloupe et en Martinique montrent une préférence des imagos pour les étangs littoraux permanents, riches en végétation flottante, avec en périphérie des zones de boisement épars et des pâtures sèches. Les premières observations de T. calverti en Martinique sont récentes et certainement dues à une intensification des prospections, conjuguée à des afflux inhabituels d’individus. De plus, le caractère migrateur et cyclique de cette espèce justifie que nous la classions dans la catégorie « données déficientes ». Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 DD Tramea insularis Hagen, 1861 La répartition mondiale de cette espèce est limitée au sud des Etats-Unis jusqu’au Mexique et aux Antilles. T. insularis est répertorié des Bahamas à Porto Rico. Dans les Petites Antilles, il est connu uniquement en Guadeloupe, Dominique, Martinique et Grenade. Très rare et sporadique en Guadeloupe et en Martinique où les apparitions de cette espèce sont liées aux mouvements à caractère migratoire propres à ce genre. Cette espèce peut très facilement passer inaperçue dans une population d’autres espèces de Tramea si on ne capture pas les individus observés. Il semble que cette espèce affectionne en Martinique les milieux stagnants arrière-littoraux et notamment en arrière des mangroves, même légèrement saumâtres ; lagunes, étangs et mares d’assez grandes dimensions. A notre connaissance, cette espèce ne se reproduit pas dans les Antilles françaises et les données, trop récentes, ne nous permettent pas de statuer ni sur son autochtonie, ni sur la régularité des afflux d’individus. Ces considérations justifient son classement dans la catégorie DD. 3.1.5. Les espèces non évaluées (NE). Une espèce n’a pas été évaluée. D’une part, les données sont trop récentes pour que nous puissions avoir une vision de son statut autochtone ou non dans les Antilles et d’autre part parce que cette espèce est d’origine afrotropicale - dont les apparitions sporadiques et souvent fugaces sont liées à des déplacements migratoires favorisés par les moussons d’est vers les Antilles - et ne fait pas partie de la faune néotropicale. Tramea basilaris (Palisot de Beauvois, 1805) Cette espèce est rare et épisodique dans les Antilles, observée pour la première fois en Martinique avec plusieurs individus, présentant des comportements de ponte, en 2007 et 2008 dans la partie sud-est de l’île. Ces observations ont toutes été réalisées entre octobre et novembre. Cette espèce a déjà été observée dans le Nouveau Monde par le passé. Belle (1988) rapporte l’observation d’un individu sur l’aéroport international de Zanderij, au Surinam, qu’il considérait comme une introduction accidentelle. L’aire de répartition de ce taxon comprend l’Afrique tropicale, Madagascar, le Moyen-Orient, l’Inde, l’Asie du sud-est jusqu’en Malaisie, et le Japon. Tramea basilaris manifeste naturellement dans son aire de distribution une nette propension aux déplacements à caractère migratoire et il n’est pas étonnant que quelques individus puissent être déportés par les vents d’est se dirigeant vers les Caraïbes en provenance des côtes d’Afrique. Le caractère « nouveau » de ces observations tient en grande partie au fait que depuis quelques années, l’inventaire régional des odonates nécessite un accroissement des captures pour identification. Il est peu douteux que des individus parviennent jusqu’aux Antilles, plus ou moins régulièrement. Bien que des comportements de ponte aient été observés, les données demeurent largement insuffisantes pour statuer sur le caractère reproducteur (autochtonie) de cette espèce. Nous la considérons, pour le moment comme un visiteur occasionnel. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 4. ESPECES A SUIVI PRIORITAIRE L’inventaire des Odonates sur la base de la littérature, puis sur le terrain à partir de 2000 a permis de mieux préciser la répartition des Odonates des Antilles françaises. A l’issue de ce travail se sont dégagées deux tendances contradictoires : le constat du manque de connaissances sur l’écologie et la biologie d’un certain nombre d’espèces, et une prise de conscience générale portant sur la nécessité de conservation du patrimoine biologique qui se développe de plus en plus aux Antilles, notamment grâce aux travaux effectués sur les insectes depuis quelques années. La notion d’évaluation de l’état de conservation des espèces et des habitats devient aujourd’hui une réalité et un impératif pour une gestion raisonnée de notre patrimoine biologique et des espaces protégés. Bien que déjà évoqué par plusieurs auteurs (notamment Dupont, 1997 et 2001), la notion du suivi d’espèces et d’habitats semble devenir un outil indispensable pour assurer leur conservation. La mise en place de protocoles de terrain tenant compte des spécificités de la biologie et de l’écologie des Odonates, de la validation des identifications, sont des conditions primordiales pour la fiabilité des résultats qui seront obtenus. Les Odonates présentent la particularité de disposer à la fois d’un habitat terrestre et d’un habitat aquatique et de constituer un groupe d’insectes particulièrement mobiles (notamment les Anisoptères) que l’on peut observer n’importe où dans ces habitats. Aussi, la présence de l’habitat larvaire dans le site de suivi est fondamentale, comme le fait de s’assurer au préalable du caractère autochtone de l’espèce et de la stabilité de la population dans l’habitat suivi, préalablement inventorié (sur trois années au minimum). Les caractéristiques de ce dernier devront faire l’objet d’un descriptif dont la nature reste à définir précisément dans la mesure où l’objectif principal est le suivi d’espèces mais aussi bien sûr de l’habitat. Un Suivi Odonatologique Régional des Espèces Prioritaires (SOREP) pourrait être mis en place aux Antilles françaises et reposer sur une méthodologie spécifique aux différents taxons concernés qui s’appuie dans la mesure du possible sur des protocoles nationaux et européens dûment expérimentés et validés notamment par la Société Française d’Odonatologie qui a mis au point et anime un Suivi Odonatologique National des Espèces Prioritaires (SONEP). Cette liste est réactualisable en fonction des résultats du suivi et des découvertes. Des suivis locaux sur certaines espèces non concernées par les listes précédentes sont évidemment possibles et même souhaitables pour certaines d’entre elles. La sélection des espèces potentiellement candidates au SOREP a été réalisée à partir de la présente évaluation mais aussi de la publication récente de l’ouvrage « Les libellules des Antilles françaises » (Meurgey & Picard, 2011). Nous avons retenu toutes celles classées en Liste Rouge (catégories VU, EN et CR) à laquelle nous avons ajouté la catégorie Quasi menacé (NT). Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 Espèces Lestes forficula Lestes tenuatus Protoneura ailsa Protoneura romanae Argia concinna Enallagma coecum Ischnura capreolus Ischnura hastata Ischnura ramburii Telebasis corallina Anax amazili Anax concolor Anax junius Anax ephippiger Coryphaeshna adnexa Gynacantha nervosa Rhionaeshna psilus Triacanthagyna caribbea Triacanthagyna septima Brachymasia furcata Brachymesia herbida Brechmorhoga archboldi Dythemis sterilis Erythemis vesiculosa Erythrodiplax berenice Erythrodiplax umbrata Macrothemis meurgeyi Miathyria marcella Micrathyria aequalis Micrathyria didyma Orthemis macrostigma Pantala flavescens Pantala hymenaea Tauriphila australis Tholymis citrina Tramea abdominalis Tramea basilaris Tramea binotata Tramea calverti Tramea insularis SOREP971 SOREP972 OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI OUI UICN NE NE NE NE NE NE NE NE NE NE NE LC LC NE NE LC NE LC NE NE LC NE NE LC NE NE NE LC NE NE NE LC NE NE NE NE LC NE LC NE LR Commentaires OUI OUI OUI OUI Suivi des populations connues et intensification des prospections pour améliorer son statut de répartition. Monitoring des populations connues. Suivi des populations connues et intensification des prospections pour améliorer son statut de répartition. Monitoring des populations connues. Suivi des populations connues et intensification des prospections pour améliorer son statut de répartition. Monitoring des populations connues. Suivi des populations principalement hors cœur de Parc National, monitoring des populations connues. Monitoring des populations connues OUI Prospection ciblées afin de parfaire son statut de répartition, études sur l’écologie larvaire. Monitoring des populations connues. OUI Suivi des populations connues et intensification des prospections pour améliorer son statut de répartition. OUI NNONON NON NON NON Suivi des populations connues et intensification des prospections pour améliorer son statut de répartition. Suivi des populations connues, améliorer son statut de répartition. Etudes à mener sur l’écologie et la phénologie de l’espèce. Suivi des populations connues, améliorer son statut de répartition. Etudes à mener sur l’écologie et la phénologie de l’espèce. Prospections ciblées afin de parfaire son statut de répartition, études sur l’écologie larvaire. Prospections ciblées afin de parfaire son statut de répartition, études sur l’écologie larvaire. OUI OUI Suivi des populations connues, améliorer son statut de répartition. Etudes à mener sur l’écologie et la phénologie de l’espèce. Monitoring des populations connues OUI Suivi des populations connues et prospections en vue d’améliorer la connaissance de sa répartition. Monitoring des populations connues Suivi des populations connues, améliorer son statut de répartition. Etudes à mener sur l’écologie et la phénologie de l’espèce. OUI Suivi des populations connues, améliorer son statut de répartition. Etudes à mener sur l’écologie et la phénologie de l’espèce. NON Suivi des populations connues, améliorer son statut de répartition. Etudes à mener sur l’écologie et la phénologie de l’espèce. Description de la larve. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 5. DISCUSSION 5.1. Interprétation des résultats Nous avons choisi de faire figurer dans le même document les Listes Rouges pour la Guadeloupe et la Martinique, puisque l’inventaire régional sur ces deux îles a été mis en place à la même période, et selon le même protocole, mais également dans le but de rendre possible la comparaison entre les deux îles et d’ajuster les politiques de gestion des espèces et des habitats. L’option choisie -a consisté à privilégier les critères géographiques, zone d’occurrence et zone d’occupation (critère B1 et B2) au détriment des critères quantitatifs, qui varient dans une plus grande proportion. De plus, l’inventaire régional s’est focalisé sur Protoneura romanae, mâle. Guadeloupe, Sainte-Rose, aout 2006. Cl. P&C. Guezennec. Une espèce en danger critique deux points essentiels ; la répartition et la d’extinction dans les Antilles françaises. distribution géographique des espèces, et leur écologie (populations larvaires, exuvies), de sorte que les données dont nous disposons ne concernent pas seulement les imagos dont les capacités de vol peuvent les amener à fréquenter virtuellement n’importe quel habitat aquatique (notamment pour les Anisoptères), mais reflètent le plus fidèlement possible la répartition « écologique » des espèces en Guadeloupe et en Martinique. Cependant, dans le cas d’îles océaniques, il est difficile de se borner à l’application pure et simple des critères UICN. En effet, la connaissance de la répartition et de l’écologie, des espèces dans les deux îles, mais également dans l’ensemble des Petites Antilles, voire sur le continent sudaméricain est indispensable pour mieux percevoir les menaces qui pèsent sur les habitats, mais également la répartition des taxons et surtout leur capacité à échanger des individus et à renouveler les populations (turnover). La dimension « à dire d’experts » prend ici tout son sens, notamment eu égard au fait que les spécialistes de ce groupe dans les Petites Antilles sont peu nombreux en France. Ce travail a fait apparaître quelques difficultés, liées au fait que les deux régions considérées sont des îles océaniques dont la faune et la flore sont encore actuellement soumises à une constante colonisation par des propagules en provenance du continent, mais surtout parce que les espèces présentes dans les différentes îles des Antilles présentent une double fragmentation. La première trouve son origine dans la géographie : les îles sont plus ou moins isolées les unes des autres et la capacité des différentes espèces à échanger des gènes est le plus souvent très faible et dépend de la possibilité des ces espèces à se déplacer, activement ou passivement, d’une île à l’autre ou du continent à une île. Dans le cas de ce travail, cette dimension a été prise en compte en fonction des espèces et de la connaissance que les experts consultés peuvent avoir de ce phénomène. La seconde fragmentation trouve quant à elle son origine dans la disparité, l’éloignement et la discontinuité des habitats sur les îles. En effet, plus que sur un continent, les milieux insulaires sont souvent répartis sur des surfaces réduites. La moindre altération d’un milieu (construction d’une zone urbanisée, assèchement, comblement par exemple) peut avoir des conséquences importantes sur la connectivité des habitats. Cette seconde fragmentation se traduit par l’isolement de petites populations qui se trouvent dans l’impossibilité d’échanger des individus entre elles. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 Dans le cas des Zygoptères, par exemple, Protoneura romanae est endémique de Guadeloupe et la population mondiale est concentrée sur moins de 400km², dont seulement 128km² sont occupés par l’espèce. Une partie des populations se trouve dans les milieux de moyenne altitude de la Basseterre, de manière assez fragmentée et très isolée des quelques micro-populations des forêts marécageuses de la Grande-Terre. Ces dernières sont gravement menacées par la réduction de leur surface, mais surtout par leur déconnectivité. En effet, les massifs forestiers à mangle médaille (Pterocarpus officinalis), bien que représentant la plus grande superficie dans les Petites Antilles (Meurgey & Picard, 2011) sont de plus en plus soumis à la pression de l’urbanisme, de pollutions organiques, chimiques et domestiques et ne subsistent que sous la forme de petits massifs très isolés les uns des autres. Les petites populations qui s’y développent tendent à décliner d’année en année. Mais surtout, l’éloignement important des sites les uns des autres rend tout à fait impossible les échanges de gènes nécessaires à la régénération des populations. Cette espèce est considérée comme en danger critique d’extinction, au moins sur la Grande-Terre. Le cas d’Ischnura capreolus est très intéressant et illustre bien les difficultés liées à l’élaboration d’une liste rouge. En Guadeloupe, cette espèce montre une nette et importante régression depuis les années 1970, quantifiable et observable. Mais en Martinique, cette espèce se maintient relativement bien et les populations fluctuantes ne montrent qu’une légère tendance au déclin. Nous avons classé cette espèce très largement répartie dans le Nouveau Monde et dans les Antilles, dans la catégorie VU en Guadeloupe, mais NT en Martinique. Ce zygoptère montre une capacité de dispersion minime, liée à ses mœurs discrètes. Les imagos ne s’éloignent jamais de plus de 10 ou 15 mètres des milieux de reproduction et ne montrent pas, comme Ischnura hastata une tendance à la dérive favorisée par les courants aériens (les imagos d’I. hastata se rassemblent souvent par plusieurs centaines et se laissent porter par les vents pour se déplacer) (Geijskes, 1967 ; Dunkle, 1990 ; Belle, 1992). Le déclin marqué des populations guadeloupéennes coïncide avec l’accroissement des observations et des occurrences d’I. hastata et l’hypothèse selon laquelle I. hastata, plus ubiquiste et tolérant, remplace I. capreolus dans ses milieux n’est pas à exclure. Pour vérifier ou infirmer cette hypothèse, un suivi régulier des populations d’I. capreolus en Guadeloupe et en Martinique serait à programmer. En Martinique, où les populations d’I. capreolus semblent plus stables et ne montrent pas de déclin marqué, I. hastata est d’acquisition récente dans l’île et représente une intéressante occasion de travailler sur l’hypothèse biogéographique de la colonisation, de la compétition et peut-être de l’extinction de l’un des deux ou leur cohabitation. Un tel travail doit être mené sur un pas de temps suffisamment long et permettrait de tester le modèle prédictif de McArthur et Wilson (1957) sur l’équilibre dynamique des populations insulaires. L’élaboration de cette liste montre également que les critères géographiques, les aires d’occurrence, d’occupation et leur évolution temporelle, tendent à mettre en évidence les espèces les plus rares. Le fait que toutes les espèces endémiques soient concernées par les statuts CR, EN, VU et NT en est une preuve. Dans ce contexte, une attention particulière doit être portée à toutes les espèces qui montrent des signes de régression plus ou moins marqués, quelque soit leur statut dans la liste rouge. La faune odonatologique des Antilles françaises est la plus riche et la plus diversifiée des Petites Antilles (Meurgey & Picard, 2011) et a notamment bénéficié de la création - dès les premiers temps de la colonisation, puis au cours des années 1950 - de nombreuses mares. Ces mares destinées à l’abreuvement du bétail et comme ressource en eau domestique ont permis à une faune plus diversifiée d’Odonates de se développer dans des milieux qui n’étaient que très peu représentés avant cette période. On peut ainsi dire que dans une certaine mesure, l’Homme a contribué à favoriser la biodiversité des Odonates. Mais ce constat est trompeur. En effet, une très grande Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 majorité des espèces d’Odonates dans le monde se développe dans des milieux stagnants et de très nombreuses espèces possèdent une écologie très plastique et capable de s’adapter aux variations hydriques du milieu comme à un certain degré de pollution. Cette richesse ne doit pas faire oublier que la faune originelle de ces îles est inconnue et que très probablement des taxons comme Macrothemis meurgeyi, Protoneura romanae ou Protoneura ailsa sont relativement anciens et que leur endémisme les expose à disparaître dans un temps plus ou moins long en fonction des atteintes aux milieux de développement. Par comparaison, Sainte-Lucie possède 25 espèces de libellules, l’élevage de bovins et caprins y est pratiqué et des milieux stagnants y sont présents. L’île de St-Vincent n’abrite que 11 espèces, dont une endémique commune avec Grenade, mais ne possède quasiment pas de milieux lentiques, sauf les embouchures de rivières ou les vasques temporaires créées par les précipitations. Les espèces les plus courantes y sont également les plus rares ; Argia telesfordi, décrite de Grenade et présente uniquement dans ces deux îles et Dythemis sterilis multipunctata, endémique de SaintVincent. Les autres espèces, pourtant plus ubiquistes et plus aptes à se déplacer, n’y sont que faiblement représentées. Enfin, on rencontre à Grenade 19 espèces. Ce chiffre plus important est directement corrélé à la présence de deux lacs de cratères en permanence en eau, à des mares créées pour l’abreuvement du bétail et à des zones de sources situées sur la côte est de l’île. La corrélation entre présence et nombre d’habitats stagnants sur une île est un facteur à prendre en considération non seulement dans le cadre des travaux de biogéographie, mais également dans l’optique de la conservation de la biodiversité. Ainsi, la disparition progressive des mares et des étangs pourrait à terme provoquer celle d’une grande partie de la faune odonatologique de certaines îles. Si les Antilles françaises doivent assurer la préservation de toutes les espèces qu’elles abritent, elles doivent prioritairement assurer celle des espèces rares et endémiques, dont les populations sont fragmentées ou isolées mais également les espèces plus courantes, mais dont les signes de régression sont à attendre dans les années qui viennent si des mesures ne sont pas prises pour préserver les milieux qu’elles occupent. Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 Liste des experts et contributeurs Coordination François Meurgey Comité de pilotage Gwenaël David Karl Questel François Meurgey Lionel Picard Céline Poiron Compilation des données, cartographie Lionel Picard et Céline Poiron Comité d’évaluation Experts : Gwenaël David Lionel Picard Céline Poiron François Meurgey Contributeurs Françis Deknuydt Daniel Grand Karl Questel Michel Papazian Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 6. BIBLIOGRAPHIE CONSULTEE Abbott J., 2005. 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Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1 ANNEXE 1 : Tableau synthétique des données par ordre alphabétique des espèces en Guadeloupe Nom scientifique Anax concolor Anax ephippiger Anax junius Argia concinna Brachymesia furcata Brachymesia herbida Brechmorhoga archboldi Coryphaeshna adnexa Dythemis sterilis sterilis Enallagma coecum Erythemis vesiculosa Erythrodiplax berenice Erythrodiplax umbrata Ischnura capreolus Ischnura ramburii Ischnura hastata Lestes forficula Lestes tenuatus Macrothemis meurgeyi Miathyria marcella Micrathyria aequalis Micrathyria didyma Orthemis macrostigma Pantala flavescens Pantala hymenaea Protoneura romanae Rhionaeshna psilus Tauriphila australis Telebasis corallina Tholymis citrina Tramea abdominalis Tramea basilaris Tramea binotata Tramea calverti Anax amazili Tramea insularis Triacanthagyna caribbea Triacanthagyna septima Total Statut régional LC NE LC EN LC LC VU EN LC LC LC VU LC VU LC LC LC VU EN LC LC NT LC LC DD CR EN EN LC LC LC NE NT DD NT DD LC LC LR LC LC LC NE NE LC NE NE NE NE LC NE NE NE LC NE NE NE NE LC NE NE NE LC NE NE NE NE LC NE NE LC NE LC NE NE LC NE Nb données 22 2 61 289 47 83 67 8 108 58 167 8 231 20 246 96 238 34 77 26 133 50 216 105 6 48 18 1 75 29 197 2 42 11 13 2 20 10 2866 Nb stations 15 1 53 143 45 59 51 6 78 37 116 5 168 15 163 84 108 22 51 20 99 37 158 81 6 32 14 1 60 26 136 2 16 10 10 1 16 10 1167 AOO Guadeloupe 60km² 4km² 212km² 572km² 180km² 236km² 204km² 24km² 312km² 148km² 464km² 20km² 672km² 60km² 652km² 336km² 432km² 88km² 204km² 80km² 396km² 148km² 632km² 324km² 24km² 128km² 56km² 4km² 240km² 104km² 544km² 8km² 64km² 40km² 40km² 8km² 64km² 40km² EOO Guadeloupe 453km² 4km² 924km² 626km² 970km² 819km² 452km² 121km² 977km² 452 km² 1320 km² 25 km² 1279 km² 322 km² 1267 km² 995 km² 707 km² 376 km² 476 km² 291 km² 824 km² 442 km² 1234 km² 1027 km² 121 km² 392 km² 249 km² 4km² 575 km² 392 km² 1368 km² 8 km² 236 km² 99 km² 266 km² 8 km² 313 km² 128 km² CR EN VU NT LC DD NE 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 4 4 Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises 2 1 1 21 4 Page 1 2 ANNEXE 2 : Tableau synthétique des données par ordre alphabétique des espèces en Martinique. Statut régional LC LC LC VU LC LC RE LC RE LC RE EN NT LC LC LC VU LC LC NT LC LC DD EN EN LC LC NE DD DD RE LC LC Nom scientifique Anax junius Brachymesia furcata Brachymesia herbida Brechmorhoga archboldi Dythemis sterilis sterilis Enallagma coecum Erythemis credula Erythemis vesiculosa Erythrodiplax connata Erythrodiplax umbrata Erythrodiplax unimaculata Gynacantha nervosa Ischnura capreolus Ischnura ramburii Ischnura hastata Lestes forficula Lestes tenuatus Miathyria marcella Micrathyria aequalis Micrathyria didyma Orthemis macrostigma Pantala flavescens Pantala hymenaea Protoneura ailsa Tauriphila australis Tholymis citrina Tramea abdominalis Tramea basilaris Tramea calverti Tramea insularis Tramea onusta Triacanthagyna caribbea Triacanthagyna septima Total LR LC NE LC NE NE NE NE LC NE NE NE LC NE LC NE NE NE LC NE NE NE LC NE NE NE NE NE LC LC NE LC LC NE Nb données 42 55 61 26 54 31 0 97 0 136 0 13 27 143 1 84 17 8 92 69 133 50 4 72 4 22 123 3 2 3 0 26 1 1399 Nb stations 26 35 49 15 40 29 0 68 0 89 0 9 24 109 1 46 10 8 73 26 97 97 4 50 4 16 75 3 2 3 0 8 1 1013 AOO Martinique 104 km² 140 km² 196 km² 60 km² 160 km² 116 km² 0 km² 272 km² 0 km² 356 km² 0 km² 36 km² 96 km² 436 km² 4 km² 184 km² 40 km² 32 km² 292 km² 104 km² 388 km² 388 km² 16 km² 200 km² 16 km² 64 km² 300 km² 12 km² 8 km² 12 km² 0 km² 44 km² 4 km² EOO Martinique 422km² 400km² 344km² 118km² 401km² 240 km² 0 km² 614 km² 0 km² 676 km² 0 km² 42 km² 281 km² 696 km² 8 km² 357 km² 70 km² 34 km² 555 km² 264 km² 697 km² 427 km² 38 km² 357 km² 82 km² 283 km² 815 km² 12 km² 8 km² 14 km² 0 km² 44 km² 4 km² RE EN VU NT LC DD NE 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 4 1 3 Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises 4 1 17 Page 1 3 1 Programme réalisé sous l’égide de la Société d’Histoire Naturelle L’Herminier Liste Rouge des Odonates des Antilles françaises Page 1