Islande
Terre de glace née du feu des volcans
Récit de voyage ou saga islandaise de Bruno et Stéphanie Colicchio
Nous avons eu la chance, Bruno et moi de découvrir l'Islande, ce « Pays de Glace »,
encore sauvage aux paysages contrastés formés par la force des glaciers et le courroux des
volcans ! Nous sommes partis en août 2011 pour un périple de dix jours, encadrés par notre
guide islandaise Rackel, qui nous racontait, dans un excellent français, son pays avec
enthousiasme et bon nombre d'anecdotes. Notre petit groupe a fait le tour de l'île ponctué par
des arrêts sur des sites naturels incontournables. Nous logions dans des fermes-auberges ou
en « guesthouses » nous avons découvert les spécialités culinaires essentiellement à base
de poisson (cabillaud et églefin), d'agneau (sous forme de rillettes, de panceta, de gigot) et de
« skyr » : sorte de « bibeleskaes » islandais. Nous avons échappé (fort heureusement?) au
requin faisandé additionné de Brennivin ou « vin brûlé », sorte d'eau-de-vie à la pomme de terre
aromatisé au carvi !
La carte ci-après retrace notre parcours et nos visites décrites ci-dessous.
Situation géographique et caractéristiques générales
L'île située entre l'Écosse et le Groenland dans l'Océan Atlantique Nord et d'une
superficie de 103 000 km² compte une population d'environ 320 000 habitants [1].
A notre arrivée, nous découvrons et visitons sa capitale, Reykjavik ou « la baie des
fumées », nom donné par les premiers colons qui observèrent les vapeurs liées à l'activité
volcanique de la région.
Il s'agit de la capitale la plus au Nord du monde (64°04' de latitude nord), à proximité du cercle
polaire arctique. Avec les agglomérations, elle regroupe plus de la moitié de la population de
l'Islande. Vers 874, les premiers colons conduits par Ingolfur Arnarson, reconnu comme le
premier scandinave à occuper l'île de façon permanente, s'installèrent à l'emplacement actuel
de la ville après avoir chassé les « papars », moines irlandais, premiers occupants de l'île.
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La ville concentre les infrastructures et les activités (universités, musées, commerces,
institutions politiques,...) : c'est le cœur économique, culturel, industriel et politique du pays. Les
reliefs qui dominent la ville forment une chaîne de montagnes appelée Esja, faites d'un
empilement de coulées de lave basaltique.
L'Islande : île née du feu des volcans
L’Islande a une situation géologique très particulière, unique au monde, qui explique sa
formation ainsi que son activité volcanique et géothermale si importante. L'île est presque
intégralement formée de roches volcaniques ! C'est un véritable terrain de jeu pour les
géologues qui peuvent étudier de nombreux phénomènes et processus géologiques !
L’île, formée voilà 20 millions d'années, est en constante évolution, ne cesse de voir son
visage se transformer au gré des éruptions et ces contours s'agrandir !
En effet, elle est localisée au droit d'une dorsale océanique émergée au milieu de
l'Océan Atlantique. En général, les dorsales forment des chaînes de reliefs au fond des océans,
montagnes sous-marines dont la base se trouve entre 5000 et 6000 m de profondeur sous les
eaux !
Une dorsale ou ride médio-océanique est une frontière entre deux plaques tectoniques
qui s'écartent l'une de l'autre, engendrant de nombreux séismes, avec création de la lithosphère
océanique par remontée de magma à travers les fractures. Les plus importantes manifestations
volcaniques de la Terre trouvent leur origine dans ces zones de divergence !
Dans notre cas, il s'agit de la dorsale médio-atlantique qui sépare la plaque eurasienne
de la plaque américaine. Elles s'éloignent l'une de l'autre en moyenne de 2 cm/an. En résumé,
la partie nord-ouest de l'Islande est sur la plaque américaine et la partie sud-est de l'île est sur
la plaque eurasienne.
A cela s'ajoute la présence d'un point chaud sous le Groenland et sous l'Islande [2] au
droit de la calotte glaciaire Vatnajökull (vaste étendue de glace). Sans la présence de ce point
chaud, l'Islande ne serait pas visible car elle se trouverait au fond de l'océan. Le phénomène
géologique nommé point chaud s'explique par la remontée continue sous forme de « panache »
de matériel chaud et moins dense appelé « diapir mantellique » qui provient généralement du
manteau inférieur. Ce matériel en remontant va fondre par décompression et donner du
magma basaltique. Ce dernier va finalement percer la croûte tel un chalumeau sur une plaque
pour former des volcans dits de point chaud et donner naissance à des archipels volcaniques
tels la chaîne Empereurs- Hawaï.
La présence d'un point chaud sous une dorsale océanique engendre une production de magma
considérable voire une surélévation de la croûte avec un volcanisme accru. La production de
magma liée à l'activité du point chaud et à l'expansion de la dorsale océanique était telle qu'elle
a permis la construction d'une île au-dessus du niveau de la mer : l'Islande. Ce point chaud joue
également un rôle important dans l'ouverture de l'océan atlantique nord.
Aujourd'hui, l'activité volcanique et tectonique se concentrent le long de la ride médio-
atlantique qui s'étend diagonalement de la péninsule de Reykjanes au sud-ouest à la région du
lac Myvatn au nord-est. C'est le long de ce graben (ou fossé d'effondrement) que l'on rencontre
environ 130 volcans actifs, les zones à forte activité géothermique, les failles et qu'ont lieu les
séismes et les éruptions fissurales.
Des phénomènes post-éruptifs tels que sources chaudes, geysers, solfatares et
fumerolles témoignent d'une intense activité souterraine.
Les roches les plus anciennes sont localisées dans la région des fjords de l'est et de
l'ouest. Les montagnes et les plateaux basaltiques trouvent leur origine dans le volcanisme qui
a débuté dès l'ère Tertiaire et ont subi l'érosion glaciaire pendant l' « Âge de Glace ». Curiosité
géologique que l'on a pu observer dans ces régions : les couches ou strates de roches
(empilements de lave, résultat d'éruptions successives) penchent toutes en direction de
l'intérieur du pays ! Il ne s'agit pas d'un plissement lié à phénomène compressif. Les géologues
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expliquent ce pendage des couches par la production continue de lave au milieu du pays : le
poids des couches augmentant au centre de l'île provoquant le relèvement de ces bordures.
Pour conclure, c'est la tectonique des plaques et la présence d'un point chaud qui sont à
l'origine de la naissance de l'Islande et qui contrôlent son évolution actuelle.
L'Islande : Pays de glace
L'île est également un terrain d'étude pour sa morphologie glaciaire. Durant la dernière
période glaciaire, l'Islande a été sculptée par les glaciers. Ces derniers ont notamment creusé
de profondes vallées glaciaires, étroites et aux côtes escarpées, qui se prolongent en dessous
du niveau de la mer et sont remplies à la fois d'eau douce et d'eau de mer : les fjords.
Aujourd'hui, elle comprend des calottes glaciaires, des glaciers actifs, des régions couvertes par
le permafrost et d'autres phénomènes périglaciaires.
Pendant l' « Âge de Glace », l'activité volcanique a continué sous la calotte de glace
pouvant atteindre plus de 1000 m d'épaisseur! La rencontre explosive du magma et de la glace
a donné naissance à des tufs. Le contact brutal entre la lave basaltique chaude et la glace
provoque la vaporisation de l'eau et la pulvérisation de la lave en minuscules fragments vitreux
qui s'accumulent et s'agrègent en une roche légère : le tuf. Il s'agit d'une "hyaloclastite",
littéralement une roche formée d'« éclats de verre ». Certaines éruptions ont transpercé le
bouclier de glace et des coulées de lave se sont mises en place.
A la fonte des glaces qui a commencé voilà 18 000 ans avant notre ère, des montagnes
aux sommets tabulaires, aux flancs abruptes et constituées de palagonites (roches produits de
l’altération des tufs) subsistent, témoins de l'activité volcanique sous-glaciaire. On nomme ces
volcans sous-glaciaires des « tuyas ».
Montagne tabulaire Heröubreiö, photo de Seattle Skier
L’Islande et les énergies renouvelables
Les islandais savent aussi trouver des avantages à cette nature hostile. Les énergies
renouvelables représentent un important secteur économique du pays. La quasi-totalité de
l'électricité du pays est produite grâce à l'énergie hydraulique et à l'énergie géothermique.
L'activité géothermique est exploitée comme source d'énergie propre, gratuite et
inépuisable : l'électricité est produite par les vapeurs volcaniques actionnant des turbines et les
eaux chaudes alimentent le chauffage domestique, des piscines, des serres, permettent le
dégivrage des trottoirs en hiver...
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Centrale géothermique vue du ciel
Nos découvertes étape par étape :
Étape 1 : Lieux célèbres au Sud de l'Islande
Le périple commence avec la visite des 3 sites les plus célèbres de l'île : Thingvellir,
Geysir et Gullfoss.
Thingvellir : « les plaines du parlement » et modèle pour l'étude de la dérive des
continents
Nous découvrons le majestueux site de Thingvellir, au sud-ouest de l'Islande, près de la
péninsule de Reykjanes. Thingvellir est un lieu chargé d'histoire : c'est l'emplacement du plus
ancien parlement au monde fondé en 930, lieu de rassemblement originel des islandais fut
proclamé l'indépendance de l'Islande en 1944.
Le site est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 2004. Il abrite
également la résidence d'été du premier ministre d'Islande.
La visite commence par une vidéo expliquant clairement la formation géologique de
l'Islande puis la balade débute sur le point de vue sur le lac d'origine glaciaire Þingvallavatn, le
plus grand lac naturel d'Islande et se poursuit le long de la faille Almannagjá. De nombreuses
fractures sont visibles en surface et remplies d'une eau limpide alimentant le lac et propice aux
activités de plongée.
D'un point de vue géologique, Thingvellir est une plaine d'effondrement, ou graben,
située à la limite des plaques tectoniques américaines et européennes. Cette zone de rifting
s'écarte selon une direction est-ouest à une vitesse moyenne de 3 à 7 mm/an et le sol s'affaisse
de 0,4 mm/an. Soit depuis 9 000 ans environ, la subsidence du sol a atteint 40 m et
l'écartement horizontal 70 m.
L'affaissement du sol engendre l'apparition de fissures et de failles normales dans la
roche basaltique qui se remplissent par les eaux d'infiltrations et de précipitations. La plus
spectaculaire des failles porte le nom d'Almannagjá et mesure 7,7 km de long pour 64 m de
largeur maximale et le rejet maximum de cette faille atteint 30 à 40 m.
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La faille d'Almannagjá délimite la frontière Est de la plaque nord américaine. La frontière
Ouest du graben, limite de la plaque eurasienne, est marquée par une faille équivalente :
Hrafnagjá, longue de 11 km, large de 68 m et dont le rejet maximum est de l'ordre de 30 m.
De nombreux séismes de faibles magnitudes (Ms = 1 à 4 Richter) se produisent le long
de ces déchirures terrestres lorsque la tension accumulée se libère brutalement et provoque
leur déplacement par à coup. Ils provoquent généralement des dommages mineurs. En
moyenne tous les 10 ans, quelques séismes atteignent des magnitudes de l'ordre de 6 et
chaque siècle, un « big one » peut occasionnellement être de l'ordre de 6 à 7 sur l'échelle de
Richter.
La plaine du parc national de Thingvellir est constituée de champs de laves formés
après la période glaciaire suite à trois éruptions majeures. Premier événement : formation du
soubassement de la plaine au cours de l'éruption fissurale de Hrafnabjörg il y a 9 100 ans.
Les coulées de lave successives sont visibles dans l'escarpement de la faille d'Almannagjá.
Faille d'Almannagjà
Second événement : il y a 9 000 ans, construction de l'imposant volcan bouclier Skjaldbreiður,
situé au Nord du parc et dominant le graben, qui a recouvert une superficie de 200 km² avec un
volume estimé à 17 km3 de laves en une seule éruption durant 50 à 100 ans!
La troisième et dernière éruption majeure s'est produite voilà 7 000 ans : la lave remonta à
travers les fissures d'Eldborgir.
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