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NADIA BELLAOUI
Présidente du
Mouvement associatif
(ex-CPCA)
CHRISTIAN SAUTTER
Président de France Active
“ L’avenir est bien de déployer, sur les territoires,
une économie répondant aux besoins locaux ”
Quels sont les enjeux actuels du monde
associatif ?
C. Sautter. Aujourd’hui, 80 % de l’économie
sociale et solidaire (ESS) est constituée d’associations. Dans le contexte de raréfaction
des financements publics et de concurrence
des entreprises lucratives, la survie du monde
associatif est indispensable. Nous avons
besoin d’une nouvelle génération d’entrepreneurs sociaux et de développer l’existant car
l’avenir est bien de déployer, sur les territoires,
une économie répondant aux besoins locaux
en complément de l’économie classique.
Pour cela, les associations doivent pouvoir
être accompagnées, se mettre en posture de
coopération et gagner en efficacité.
N. Bellaoui. Dans ce contexte économique
de mutation, les associations, notamment
les plus investies dans le champ économique, doivent considérer qu’elles ont
encore le choix : elles peuvent anticiper les
contraintes et se repositionner en gagnant
collectivement en efficacité. Les associations peuvent inventer des modèles socioéconomiques singuliers, adaptés à leur
projet, aux besoins émergents et proposer
leurs propres critères d’évaluation de leur
utilité sociale. Elles sont déjà les championnes de l’hybridation des ressources
puisqu’elles savent mobiliser des ressources
publiques, marchandes et non monétaires
comme le bénévolat. En résumé, les associations savent apporter des réponses pertinentes et originales aux besoins de la société.
Comment France Active et le Mouvement
associatif peuvent-ils accompagner les
associations au regard de ces enjeux ?
N. Bellaoui. Le Mouvement associatif
apporte deux types de réponses à ces enjeux.
La première consiste à identifier, mettre en
débat et diffuser des outils ou des ressources
dont l’objet est d’accompagner les dynamiques de changement à l’œuvre dans
les associations. La seconde est plus politique : elle consiste à prendre des positions
et à être force de proposition pour que soit
mieux reconnu et encouragé le modèle
entrepreneurial des associations dans notre
pays. Nous nous appuyons pour cela sur
les travaux de prospective et d’observation
produits par nos partenaires. La journée
coorganisée avec France Active illustre
long terme pour faire valoir l’apport des associations à la société.
C. Sautter. Le rôle de France Active est
pluriel. Tout d’abord, nous participons activement aux dispositifs locaux d’accompagnement (DLA) dans près d’un tiers des départements et des régions du territoire. Cette action
permet aux associations de se moderniser afin
de s’adapter au contexte actuel de changement. Elle permet également d’assurer leur
développement dans de bonnes conditions.
En outre, dans le cadre de nos activités, nous
apportons aux associations les financements
nécessaires, issus de l’épargne solidaire, familiale ou salariale. Enfin, nous garantissons les
porteurs de projet auprès des banques. Cette
action est complémentaire des autres intervenants, qu’ils soient issus de la finance ou du
savent apporter
“ Les associations
des réponses pertinentes et originales
aux besoins de la société ”
bien cette double fonction : rassurer les
associations en leur donnant des clés opérationnelles de développement et les inviter à
aller plus loin dans leur réflexion et leur positionnement. Cette exigence nous conduit à
mener en parallèle des actions de lobbying
de court terme en réponse à l’agenda politique ainsi qu’une réflexion politique de plus
secteur public. Le récent appel à projets sur
les pôles territoriaux de coopération économique (PTCE)1 a permis d’identifier plus de
180 projets sur l’ensemble du territoire, ce qui
est plutôt encourageant. 23 de ces initiatives
ont été retenues et France Active sera aux
côtés de ces pôles pour les aider à se structurer, à se développer et à se financer. 
Article extrait de Jurisassociations n° 497 du 15 avril 2014. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
INTERVIEW CROISÉE
1. V. JA no 492/2014, p. 10.
15 avril 2014 - jurisassociations 497
19
LES ASSOCIATIONS,
ACTRICES DE LA
RÉGULATION SOCIALE
résidentielle, zone de commerce, centre
de décision externalisé, mobilité poussée
à l’extrême, la lecture, la compréhension
et la maîtrise du territoire sont un exercice
complexe et délicat.
Les associations occupent une place à part entière dans
l’économie française. Partant de ce constat, Bernard Pecqueur,
qui s’intéresse à l’économie de proximité au regard des
problématiques territoriales et de la globalisation, expose
son point de vue.
Le marché
«
D
ans
l’idée
de
la
crise,
aujourd’hui, le monde associatif a sans doute une carte particulière
à jouer. On pourrait presque parler d’un
“moment associatif”. » Le chercheur nous
livre ainsi sa conception du rôle des associations dans le contexte actuel. Au-delà du
poids qu’elles représentent dans l’économie
française – 1,8 million de salariés, 10 % de
l’activité du secteur privé, 85 milliards de
budget, part importante du travail bénévole1 –, les associations assument, selon le
chercheur, un véritable rôle de régulation.
UN CONTEXTE DE CRISE
Le contexte actuel est bien celui de la
crise des régulations sociales. Et Bernard
Pecqueur relie territoire et économie : si
le territoire est un concours d’acteurs qui,
dans un contexte géographique spécifique, cherchent à résoudre un problème
commun, l’économie est quant à elle asso1. V. V. Tchernonog, Le Paysage associatif français.
Mesures et évolutions, 2e éd., Éditions Juris / Dalloz, 2013 ;
pour un dossier d’ensemble, v. JA no 486/2013, p. 16 et s.
20
jurisassociations 497 - 15 avril 2014
ciée à la résolution des besoins essentiellement par le marché. Elle fait appel au « vivre
ensemble » et répond à des besoins spécifiques. Or, on observe un fractionnement
des territoires qui implique une disjonction
entre lieux de vie, lieux de consommation
et lieux de production. En d’autres termes,
force est de constater une déconnexion
entre les activités de décision, de production
et le citoyen. Ces formes de scission privent
les individus de leur capacité de choix au
quotidien et viennent largement entamer
la démocratie locale. D’où vient ce que l’on
importe ? Où va ce que l’on produit ? Qui
décide de ce que l’on produit ? Autant de
questions sur lesquelles le citoyen n’a pas de
prise. Cette situation résulte clairement de
la mondialisation de l’économie et induit
un réel problème de régulation au sein des
territoires. Bernard Pecqueur souligne également qu’il est difficile aujourd’hui de parler
de territoire dans le sens le plus complet
du terme. Entre zone de production, zone
LES TROIS CERCLES DE RÉGULATION
DE L’ÉCONOMIE
Traditionnellement, le premier cercle de
régulation de l’économie est le marché :
le libre cours entre l’offre et la demande.
Il semble cependant que cette régulation
rencontre des limites de fonctionnement :
répond-elle aux besoins réels ? Comment
sont prises en compte les spécificités des
territoires et de ses habitants par le secteur
privé ? En effet, la situation de crise décrite
précédemment est bien en correspondance avec la gestion des besoins par cette
économie de marché : ils sont difficilement
satisfaits car ils demeurent loin des préoccupations des entreprises dont le centre de
décision est souvent extérieur au territoire.
Le marché se contracte et a des difficultés
d’autorégulation car il ne correspond plus
aux attentes des populations. Limiter l’économie au seul échange marchand est très
réducteur dans la mesure où celui-ci « ne
fait pas société » et limite donc la construction du « vivre ensemble ».
L’action publique
Le deuxième cercle de régulation est celui
de l’action publique. Il est le fruit de l’intervention de l’État et donc de la volonté de
pallier les manquements du marché. Dans
sa forme extrême, il est représenté par les
décisions de politique publique. Cependant,
ce type d’action se dilue au gré de la décentralisation et du désengagement de l’État
Article extrait de Jurisassociations n° 497 du 15 avril 2014. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
DOSSIER
des ressources publiques affectées à l’action
associative se confirme et il est urgent pour
elles d’imaginer de nouveaux modèles
économiques. Par leurs spécificités, notamment démocratiques, les associations ont
une action de régulation plus en lien avec
le territoire. Aux collectivités territoriales,
qui représentent la démocratie élective,
les associations opposent une démocratie
directe (engagement citoyen, une personne
= une voix). Les associations régulent la
reconnexion des citoyens au monde économique où l’on constate que les centres
de décision sont éloignés. Leur action est
donc non seulement démocratique mais
aussi territorialisée : elles répondent à des
besoins qui peuvent être, certes, nationaux,
mais déclinés et adaptés localement. Elles
peuvent donc faire le lien entre population,
besoins et espace géographique.
Les associations
Les associations constituent le troisième
cercle et apportent une régulation originale aux difficultés des deux premiers : elles
viennent en quelque sorte porter secours aux
régulations habituelles. Le contexte actuel
constitue à la fois une opportunité, mais aussi
une source de difficultés pour ces actrices
du développement local. L’épuisement
UNE ACTION À DÉFINIR
ENTRE ÉCONOMIE DE MARCHÉ
ET ACTION PUBLIQUE…
Le rôle des associations ne peut être
comparé à celui du secteur privé qui, par
son fonctionnement, ne crée pas de lien
durable et social. Bien au contraire, grâce
à l’action associative, le citoyen se sent
investi d’une certaine marge d’action : il
contribue et apporte des solutions à des
besoins qui n’auraient pu être satisfaits
autrement. Il ne faut cependant pas tomber
dans l’écueil d’opposer économie classique
et économie sociale et solidaire (ESS) : il
semble bien que l’ensemble fonctionne
dans un système économique global. Pour
Bernard Pecqueur, l’économie de proximité est celle qui œuvre sur et pour le territoire et se distingue de l’économie globale,
qui implante des centres de production, de
vente et reste donc largement déconnectée
des logiques locales.
Les rapports des associations avec le secteur
public doivent pouvoir muter afin de
garantir l’efficacité de leur action. Entre
subventions pour lesquelles on doit rendre
compte de son activité et commande
publique où l’on répond aux attentes d’une
collectivité, l’intervention associative se
trouve limitée et perd progressivement son
sens. D’acteur avisé, l’association passe
au statut de prestataire dans un « cadre
préformé » par les collectivités. Selon le
chercheur, le critère principal qui devrait
motiver les collectivités territoriales est celui
de la prise en main par le citoyen : un subtil
rééquilibrage du rapport entre collectivités
et associations pourra alors s’opérer.
© grgroup
… AINSI QU’ENTRE FINANCEMENT
PRIVÉ ET PUBLIC
La baisse progressive de la part de l’État
dans le financement des associations oblige
ces dernières à revoir leur modèle économique2 en s’ancrant un peu plus vers la
ressource locale : collectivités et usagers3.
Cependant, cette dépendance au contexte
local ne fait qu’aggraver les disparités
Article extrait de Jurisassociations n° 497 du 15 avril 2014. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
en faveur des collectivités territoriales et du
développement local. L’action publique
a pour fonction de cadrer le marché et de
réguler l’efficacité de la réponse aux besoins
des individus. Cette tentative rencontre
néanmoins des limites : issue de décisions de
« technologues » non démocratiques, elle
ne correspond pas forcément aux besoins
ni aux attentes des citoyens. Toutefois, la
prise en compte du contexte et des spécificités locales, l’émergence d’un niveau de
décision plus autonome, la densification
des relations entre acteurs locaux ouvrent
la voie à une diversification des approches
de la régulation par l’action publique. Le
contexte actuel de limitation de ses moyens
vient entraver et réduire son efficacité. Le
deuxième cercle de régulation est bel et
bien en crise.
2. Pour un dossier d’ensemble sur les modèles
économiques, v. JA no 483/2013, p. 16 et s.
V. également en p. 28 de ce dossier.
3. V. Tchernonog, Le Paysage associatif français. Mesures et évolutions, préc., p. 172.
15 avril 2014 - jurisassociations 497
21
DOSSIER
UNE ACTION FACTEUR
D’INNOVATION
Concrètement, la recherche de solutions
par les citoyens d’un territoire constitue un
véritable facteur d’innovation. Le chercheur
cite l’exemple des living labs où l’utilisateur
est aussi collaborateur et acteur des solutions
imaginées. Il détaille également les réponses
qui peuvent être envisagées dans le cadre de
la e-médecine, si importante en milieu rural
et, plus largement, dans les déserts médicaux. Trois possibilités peuvent être ainsi
envisagées :

la délégation : la recherche de solutions
est alors confiée à des spécialistes extérieurs
au territoire ;

la passivité : des médecins étrangers sont
sollicités ;

l’autorégulation : la solution idéale, originale et la plus adaptée où l’on fait converger
expertise technique et besoin du territoire.
L’usager participe alors à la solution en
exprimant ses attentes. Cette reconnexion
avec le contexte local et ses besoins entre
dans le cadre de la reconstruction d’un tissu
humain sur le territoire.
tation. Les nombreuses délocalisations en
cours nous interpellent sur la capacité de
lier performance et entreprises. Dès lors
que ces dernières quittent le territoire, les
conséquences pour le développement
local restent préoccupantes (chômage,
constitution de friches, répercussions
sociales et économiques) : le territoire
n’est plus performant car il n’y a plus de
connexion entre économie, habitants et
espace géographique. Certains territoires
s’affichent davantage comme des lieux de
consommation ou des espaces résidentiels. À cette image partielle et incomplète
du territoire, le chercheur vient opposer
l’importance de l’économie de proximité
à laquelle participent les associations. Le
lien entre économie et territoire demeure
prépondérant.
Les enjeux de cette reconnexion entre individus et territoire sont fondamentaux et les
associations y jouent un rôle essentiel. C’est
tout d’abord un enjeu démocratique car il
permet la maîtrise de sa propre vie dans un
environnement donné, marqué par une
économie locale spécifique. C’est ensuite
un enjeu de lien social car les réponses aux
besoins sont coconstruites et impliquent
du lien, de la mémoire et de la réciprocité.
Ces caractéristiques ne se retrouvent pas
dans l’économie marchande. L’enjeu est
également de réduire la dépendance et de
retrouver une certaine marge d’autonomie
vis-à-vis de décisions extérieures, issues de
technologues ou d’entreprises. C’est enfin
une question de compétitivité du territoire.
L’action des associations vient en quelque
sorte revivifier le territoire par les solutions
adaptées et innovantes qu’elle apporte.
Débattre de la place des associations sur le
territoire, c’est parler de la reprise en main,
par les citoyens, des initiatives qui vont dans
le sens d’un nouveau système de régulation
sociale. L’économie est un subtil équilibre
entre marché privé, régulation publique et
réponse associative. On ne peut opposer les
trois systèmes tant ils regroupent l’ensemble
des parties prenantes d’un territoire dans
des relations d’interdépendance. La question est de chercher de nouveaux modèles,
un nouvel équilibre, mais non de créer
un monde alternatif où ESS et économie
classique seraient en opposition. Le retour
à la proximité se joue au niveau du retour
à la territorialisation : les espaces de vie, de
production, de consommation, de décision
ne se juxtaposent plus mais forment un
ensemble cohérent dans lequel des populations vivent, travaillent et consomment.
Les associations y participent et doivent être
activement reconnues et soutenues par les
autres acteurs du territoire. C’est une question de démocratie, d’équité et d’équilibre
territorial. 
LE TERRITOIRE AU CŒUR
DE L’ACTION
La vision du territoire est partielle dans le
sens où sa performance est souvent mesurée
à la seule aune de la densité et du dynamisme des entreprises qui y sont implantées.
Le contexte actuel de désindustrialisation
montre bien les limites de cette représen-
AUTEUR
TITRE
Bernard Pecqueur
Professeur
à l’Institut de géographie alpine,
université Joseph-Fourier de Grenoble
Propos recueillis par Karine Dziwulski-Debever
TITRE
Chargée de mission,
Centre de ressources DLA Financement –
France Active
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jurisassociations 497 - 15 avril 2014
Article extrait de Jurisassociations n° 497 du 15 avril 2014. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
entre les territoires ainsi qu’entre
public solvable et insolvable. Ici encore, un
rééquilibrage des pouvoirs devrait permettre
d’éviter cet écueil.
Concrètement, la recherche de solutions
“
par les citoyens d’un territoire constitue
un véritable facteur d’innovation ”
DOSSIER
SYNTHÈSE DE LA 2e TABLE RONDE
Portant sur le thème des nouveaux modèles socio-économiques
associatifs, cette deuxième table ronde a permis de mettre
en lumière la pluralité des ressources financières existantes
ainsi que les différentes stratégies adoptées par les acteurs en
adéquation avec leur projet associatif.
L
es aléas économiques et sociaux
légitiment aujourd’hui encore davantage l’action associative au service des intérêts collectifs mis en œuvre dans une perspective durable. Mais ces aléas impactent le
fonctionnement des associations, qui doivent
composer avec leur temps et absorber des
changements conséquents dans un environnement évolutif et instable. On compte bien
sûr parmi ces changements les difficultés
d’accès aux ressources, avec des dépenses
publiques en baisse ou repositionnées sur des
segments particuliers, et des bénéficiaires ou
usagers de fait moins solvables.
Dans ce contexte, il est courant de
conseiller aux associations de diversifier
leurs ressources, notamment en direction
des fonds privés, ou encore de mutualiser
1. Pour un dossier d’ensemble sur les modèles
économiques, v. JA no 483/2013, p. 16 et s.
2. Pour en savoir plus : CPCA, « Contributions à
l’analyse des modèles socio-économiques associatifs – Typologie des modèles de ressources financières », janv. 2014 ; v. JA no 493/2014, p. 11.
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jurisassociations 497 - 15 avril 2014
leurs moyens d’action : autant d’injonctions
complexes à mettre en œuvre. Les associations sont donc amenées à s’interroger sur la
structuration et l’évolution de leur modèle
socio-économique1.
Par modèle socio-économique, on entend
de façon schématique l’ensemble des
ressources – à la fois financières, non monétaires mais valorisables (bénévolat, prêt de
salle) et immatérielles (partenariat, savoirfaire) – dont dispose l’association ainsi que
leur affectation. Il permet de rendre compte
de la globalité des tâches nécessaires à la
mise en œuvre des activités, de l’organisation interne et des interactions de l’association avec son environnement et d’expliquer
ainsi les conséquences budgétaires de ces
choix2.
3. Le DASI, porté par Le Rameau, le Mouvement associatif et l’Avise, permet de bénéficier de mécénat de compétences.
ANTICIPER LES MUTATIONS
« Se remettre en cause tant que nous en
avons encore les moyens » : tel est le point
de vue de Thierry Véclin, directeur général
du Mouvement rural de jeunesse chrétienne (MRJC). Confronté à des difficultés
structurelles, le MRJC a cherché à adapter
son modèle économique avec la stratégie
suivante :

profiter de l’assise financière du mouvement pour prendre le temps d’analyser
la gouvernance, les possibilités de diversification des ressources et la politique
d’investissement ;

construire un trépied de leviers financiers
pour la recherche de ressources, composé
de financements publics en optimisant les
subventions européennes, de financements
privés sur la base d’une charte éthique et
de fonds propres en veillant à redéployer le
patrimoine vers les activités réelles ;

bénéficier d’un accompagnement juridique et financier via le dispositif d’accompagnement des associations à la stratégie et à
l’innovation (DASI)3.
Le MRJC s’est donc appuyé sur ses fonds
propres comme levier financier : un système
d’aménagement et de vente d’une partie du
patrimoine immobilier a permis de dégager
de la trésorerie pour investir en zone rurale,
dans des lieux ou activités innovants destinés
à l’animation du territoire, en partenariat
avec des entreprises et des collectivités
locales. L’autofinancement – en générant
des recettes d’activité et en facilitant au
cofinancement – a ainsi contribué au repositionnement économique du MRJC tout
en renforçant le sens de son action. Une
démarche réussie au cœur de laquelle on
retrouve un fort investissement des bénévoles, qui ont veillé à la cohérence du projet
associatif du mouvement.
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À NOUVEAU CONTEXTE,
QUELS MODÈLES
ÉCONOMIQUES POUR LES
ASSOCIATIONS ?
DIRECTEUR GÉNÉRAL
D’ADESSADOMICILE
FAIRE DES CHOIX CONCERTÉS
Selon Hugues Vidor, directeur général
d’Adessadomicile, « le financement de
la solidarité doit rester un financement
national ». Le secteur de l’aide à domicile,
œuvrant au service des personnes âgées,
des familles et des personnes handicapées,
subit depuis quelques années des difficultés
majeures liées à la diminution des ressources
publiques, en particulier dans le cadre de
la décentralisation du fait d’un défaut de
péréquation des enveloppes de l’État vers les
conseils généraux. Cette situation critique
pose la problématique du financement
public, à lier à des questions de choix de
société. Les fédérations du secteur maintiennent un positionnement clair : la prise
en charge des besoins des plus fragiles doit
continuer de relever de politiques publiques
dans un système de solidarité nationale.
Ce constat constitue un point de départ
pour étudier et proposer des évolutions de
modèles économiques en vue de viabiliser
les structures intervenant dans ce champ
d’activité et d’éviter les inégalités de traitement sur les territoires. De façon concertée,
les préconisations portent sur de nouvelles
modalités de tarification et d’organisation
pour accompagner le travail en coopération.
Face à ces difficultés, la mutualisation
des moyens apparaît en effet comme une
réponse possible pour contenir les coûts tout
en préservant la qualité des services rendus.
Hugues Vidor rappelle la nécessité d’agir
ensemble : « à partir du moment où l’on se
fait confiance, on est capable d’apporter une
réponse commune ».
L
a Fédération nationale Adessadomicile rassemble 400 associations et
organismes gestionnaires à but non lucratif, représentant près de 40 000 salariés
œuvrant dans l’aide, le soin à domicile et les
services à la personne auprès des personnes
âgées, des familles et des personnes malades.
Le secteur de l’aide à domicile est
confronté à de graves tensions budgétaires : quelles en sont les causes ?
Le mode de financement actuel repose à
80 % ou 90 % sur la politique sociale, en particulier celle des conseils généraux qui sont
confrontés à des besoins croissants avec
des recettes en diminution. Le secteur est
donc largement impacté par les contraintes
pesant sur les budgets publics. L’autre difficulté concomitante est la paupérisation de
la population due à la crise : les personnes à
domicile ont de plus en plus de difficultés à
payer le « reste à charge » qui leur incombe.
Comment le secteur est-il impacté par
cette problématique de financement
public ?
Ces difficultés ont avant tout des conséquences sur la politique salariale. Depuis
2009, les salariés n’ont pas bénéficié de
revalorisation de la valeur du point et 40 %
des salariés de la branche sont rémunérés
au niveau du Smic. Cela limite fortement
le développement de l’emploi alors que les
pouvoirs publics affichent une volonté de
professionnalisation pour garantir la qualité
des soins. Ces difficultés économiques ont
généré un nombre important de liquidations judiciaires et fragilisent l’assise financière des structures.
Comment Adessadomicile
contribuer aux évolutions ?
entend
Adessadomicile participe à un collectif qui
rassemble 17 organisations pour proposer,
en concertation avec les parties prenantes
de l’aide à domicile et les pouvoirs publics,
de nouveaux modèles de réglementation et
d’organisation de la tarification sur les territoires.
Par ailleurs, Adessadomicile soutient ses
adhérents sur différents volets (juridique,
économique, formation, etc.) en prenant en
compte les réalités territoriales qui influent
sur leurs modèles économiques afin d’adapter son offre d’accompagnement.
Enfin, la fédération incite les structures à travailler ensemble pour proposer des parcours
de santé appropriés. Dans le cadre d’une
prise en charge globale de la personne, il
peut être pertinent de favoriser des jeux
d’alliance qui peuvent aboutir à des mutualisations sur des fonctions telles que la comptabilité ou les ressources humaines, ou pour
répondre à des appels à projet réglementés
dans le but d’assurer une bonne couverture
des besoins sur un territoire. Dans ces perspectives, le réseau Adessadomicile a un effet
structurant tant au niveau local que national et génère de la complémentarité entre
les acteurs.
Quelle est la position d’Adessadomicile
quant à l’évolution du secteur ?
Le financement de l’aide à domicile doit relever d’un financement national. Les besoins
augmentent et les pouvoirs publics doivent
se saisir de cette problématique pour continuer de garantir le mécanisme de protection
sociale existant.
15 avril 2014 - jurisassociations 497
Article extrait de Jurisassociations n° 497 du 15 avril 2014. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
“ Le financement de l’aide à domicile doit relever
d’un financement national ”
4 QUESTIONS
À...
HUGUES
VIDOR
29
© Sebastian Duda
Ce témoignage illustre la nécessité
des financements publics comme support
indispensable et incompressible pour la
mise en œuvre d’actions d’intérêt général.
L’enquête menée par Viviane Tchernonog
sur l’évolution du paysage associatif français4
indique que le budget des associations, en
2011, provient pour 49 % de financements
publics, avec des différences sectorielles
car il représente entre 80 % et 90 % des
ressources du secteur de l’aide à domicile.
GARDER LE CAP
© Gina Sanders
© Marco Desscouleurs
© カシス
© Olivier Le Moal
« Investir, c’est se donner les moyens d’être
ambitieux », affirme Valérie Daher, directrice de la communication et du développement d’Action contre la faim (ACF). Face
à la baisse des financements publics, ACF
a fait le choix d’investir dans la collecte de
fonds privés, ce qui a nécessité l’ouverture de
bureaux à l’échelle l’internationale. Cette
stratégie a rencontré deux freins de la part
des pouvoirs publics : d’une part, des difficultés pour appréhender de façon globale
les flux financiers générés entre ces structures dédiées et, d’autre part, une approche
habituellement court-termiste qui amenait
à constater en premier lieu des hausses de
charges en considérant les investissements
comme des pertes comptables.
La composition des produits du secteur associatif dépend des secteurs d’activité. La part
des dons et du mécénat dans les ressources
financières du secteur associatif se limitait à
4 % en 2011 mais représentait près de 15 %
des financements pour les associations de
solidarité internationale selon l’enquête
CPCA – France Active menée entre 2009 et
20105. La recherche d’un nouveau modèle
économique est donc à mettre en perspective avec le secteur d’activité et les ambitions
4. V. Tchernonog, Le Paysage associatif français.
Mesures et évolutions, 2e éd., Éditions Juris / Dalloz,
2013, p. 174 ; pour un dossier d’ensemble,
v. JA no 486/2013, p. 16 et s.
30
jurisassociations 497 - 15 avril 2014
5. CPCA / France Active, « Associations, comment faites-vous face à la crise ? », restitution
des résultats de l’enquête en janvier 2012 ; v. JA
no 453/2012, p. 6 et JA no 457/2012, p. 16 et s.
Article extrait de Jurisassociations n° 497 du 15 avril 2014. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
DOSSIER
ciatif à la fois très sollicité et très dense, ont
amené la région à profiter du transfert de
compétences dans la gestion des fonds européens pour favoriser l’accès des porteurs de
projets européens à ce type de financement.
Cela s’avérait d’autant plus pertinent pour
un territoire transfrontalier dont le dynamisme repose notamment sur des projets de
coopération.
La région a donc créé en 2009 un dispositif
d’accompagnement et d’ingénierie pour
promouvoir ces opportunités : le Fonds
régional d’aide aux porteurs de projets euro-
péens (FRAPPE), qui a permis à 60 structures, dont 60 % d’associations, de bénéficier
de financements européens pour un total de
240 millions d’euros.
En 2011, les ressources publiques d’origine européenne représentaient 1,1 % du
financement des associations. La France se
caractérise par une sous-consommation des
crédits européens : il reste donc une marge
de progression. Bien que les modalités de
gestion restent contraignantes, la nouvelle
programmation des fonds structurels européens (2014-2020)6, associée à une gestion
ACCOMPAGNER LES ÉVOLUTIONS
« Aider les porteurs de projets à se saisir
des opportunités de financements européens » : tel est l’objectif du conseil régional
du Nord-Pas-de-Calais, représenté par
Daline Houari, à la direction Europe. Les
caractéristiques sociales du territoire du
Nord-Pas-de-Calais, avec un réseau asso-
se caractérise
“ Le mondeparassociatif
une large capacité d’adaptation,
à l’avant-garde des enjeux sociétaux ”
EXPLICATION DE TEXTES
MODÈLE ÉCONOMIQUE ET FONDS PROPRES
Le modèle économique d’une association se retrouve dans le compte de résultat. Ce document annuel recense l’ensemble des charges et des produits mobilisés par l’activité, produisant le résultat net, c’est-à-dire ce que la structure a gagné (excédent) ou perdu (déficit)
à l’issue de la période comptable. Rappelons que le principe de non-lucrativité propre aux
associations n’interdit pas pour autant la réalisation d’excédents.
Le résultat de l’activité associative est reporté au bilan financier – qui illustre le patrimoine
de l’association – au niveau des fonds propres, c’est-à-dire les réserves qui permettent à
l’association d’investir, de faire face à des décalages de trésorerie ou encore de combler une
perte ponctuelle.
Le modèle économique vient ainsi impacter la capacité d’une association à se développer et
à pérenniser son projet. Au-delà de l’équilibre entre produits et charges, il est donc nécessaire d’intégrer dans les prévisions la capacité à générer des fonds propres en dégageant des
excédents afin de garantir l’autonomie financière de l’association.
6. Pour un dossier d’ensemble, v. JA no 482/2013,
p. 15 et s. et JA no 492/2014, p. 6.
régionalisée et de nouveaux dispositifs de
mise en œuvre, présente des perspectives
intéressantes de leviers de financement
pour les collectivités et, par conséquent,
pour les associations.
Ces exemples ne sont pas exhaustifs car
le monde associatif se caractérise par une
large capacité d’adaptation, à l’avant-garde
des enjeux sociétaux. Toutefois, ces témoignages démontrent que la mise en œuvre
de nouveaux modèles socio-économiques
doit se traduire par la recherche commune
de solutions, en comptant notamment sur
l’appui des pouvoirs publics. Il s’agit d’être
attentif aux évolutions pour se situer à la fois
dans les transitions et dans la durée, savoir
estimer un potentiel d’action et le défendre
de façon concertée pour préserver la pluralité de l’offre associative. 
Article extrait de Jurisassociations n° 497 du 15 avril 2014. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
de l’association. La levée de fonds privés
s’inscrit dans une stratégie à moyen-long
terme nécessitant des fonds propres initiaux
conséquents pour investir notamment dans
l’acquisition de compétences spécifiques.
ACF conseille donc de bien veiller à évaluer
le retour sur investissement escompté, à
communiquer pour rendre lisible cette
stratégie auprès des partenaires, à expliciter et partager en interne ce choix et ses
contraintes.
AUTEUR
Astrid Blomart
TITRE
Chargée de mission,
Centre de ressources DLA Financement –
France Active
15 avril 2014 - jurisassociations 497
31
DOSSIER
© Serg Nvns
SOUTENIR LES ASSOCIATIONS,
UN INVESTISSEMENT «RENTABLE»?
Les associations sont des acteurs économiques qui ont besoin, comme
toute entreprise, de constituer une assise financière et d’investir pour se
développer. Dans un contexte en pleine mutation, soutenir les associations
est plus que jamais nécessaire. L’occasion pour cette troisième table ronde
de souligner la complémentarité de l’action des partenaires.
C
omment garantir et renforcer
l’assise financière des associations ?
Comment s’assurer de l’efficacité du soutien
qui leur est apporté ? Quelles initiatives
concrètes peuvent être mises en œuvre ? En
ces temps de contraction des financements
publics, la question du soutien aux associations et du « retour sur investissement »
qu’on peut en escompter affleure dans tous
les esprits. Les partenaires publics cherchent
à rationaliser et à optimiser leurs financements au monde associatif, les partenaires
32
jurisassociations 497 - 15 avril 2014
privés à mesurer la rentabilité sociale de leur
investissement. En analyse financière, pour
qu’un investissement soit rentable, il faut que
les sommes investies permettent d’améliorer
le résultat dégagé. Regarder l’assise financière d’une association apparaît alors comme
un préalable pour apprécier l’utilité d’un
soutien : l’association doit être suffisamment
solide pour mettre en œuvre son projet. Mais
au-delà des considérations économiques et
financières, l’utilité sociale et l’efficacité de
son action doivent être démontrées.
RENFORCER L’ACCOMPAGNEMENT
Jean-Louis Bancel, président du Crédit
coopératif, a d’abord rappelé que les besoins
du secteur étaient protéiformes compte tenu
de la diversité des associations. Par exemple,
certaines structures à haute intensité capitalistique et de main-d’œuvre présenteront
des besoins de financement à long terme,
ce qui ne sera pas nécessairement le cas
d’associations disposant de peu de capital
immobilier et de peu de personnel. Dans
ce contexte, les différents outils financiers
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SYNTHÈSE DE LA 3e TABLE RONDE
MÉTHODE
tels que les titres associatifs, les financements de Bpifrance, ou encore les outils de
financement participatif ou crowfunding
ne sont pas utilisables par les mêmes structures. L’accompagnement du secteur associatif doit dès lors être renforcé. Le rôle des
têtes associatives de réseau est crucial pour
accompagner leurs mouvements. Il est
également nécessaire de faire en sorte que
ces têtes de réseau œuvrent elles-mêmes à
leur mutation.
La question de fond qui se pose n’est pas
celle de la rentabilité du soutien apporté
aux associations, mais celle de leur efficacité. Même si la question de la mesure du
service rendu en est encore à ses prémices,
le monde associatif doit être en capacité de
rendre des comptes et de démontrer l’utilité
sociale de ses actions.
APPRÉCIER L’UTILITÉ SOCIALE
Pascale Semet, vice-présidente responsable
de la politique de la ville, du logement et
de l’économie sociale et solidaire (ESS) de
la région Auvergne, a expliqué pour quelles
raisons les associations occupaient une place
prépondérante dans l’économie sur le territoire auvergnat. Leur poids est significatif :
elles emploient 42 000 salariés sur les 52 000
que comptent les structures de l’ESS dans
son ensemble. Cela représente plus de 10 %
des emplois de la région. Celle-ci soutient
les associations car elle partage avec elles un
certain nombre de valeurs et une certaine
éthique : les associations sont ancrées dans
l’économie résidentielle, elles créent des
emplois non délocalisables et proposent
des services aux citoyens. La région aide les
associations tout au long de leur parcours
de vie : création, conseil au développement,
difficultés, encadrement technique (appui
aux postes). Elle met en place des politiques
sectorielles (culture, sport, agriculture, etc.)
et s’assure de la pérennité des structures
soutenues. L’approche est transversale : la
région soutient les associations mais également leurs réseaux, les dispositifs locaux
d’accompagnement (DLA) ou Auvergne
Active, le représentant de France Active en
Auvergne, dont le rôle d’accompagnement
est déterminant.
Pascale Semet a insisté sur la nécessité
d’apprécier l’utilité sociale des actions mises
en place par les associations et de ne pas
s’intéresser seulement à leur santé économique.
FAIRE LE LIEN ENTRE PARTENAIRES
ET RÉPONSE FINANCIÈRE ADAPTÉE
Jacques-Bernard Magner, sénateur et
président d’Auvergne Active, a précisé
l’action dudit réseau à destination des associations : expertise des projets, apport de
financements, suivi dans le temps. Les structures souffrent de problèmes de trésorerie,
comme nombre d’entreprises lucratives,
et ont besoin de rassurer leurs partenaires
bancaires. Auvergne Active apporte des
réponses financières adaptées au secteur,
marqué par une faible rentabilité et une
faible capacité à mobiliser les partenaires
bancaires. Elle aide ainsi les associations à se
développer dans de bonnes conditions. En
2012, 52 structures de l’économie sociale
et solidaire ont été accompagnées et financées, ce qui a représenté l’aide à la création
ou à la consolidation de plus de 700 emplois
et la mobilisation de 706 000 euros de
concours financiers et de 122 000 euros en
ingénierie d’accompagnement via le DLA,
dans des secteurs d’activité variés en lien
avec les besoins du territoire (services
Évaluer la santé financière d’une association passe par l’analyse de son patrimoine
et de la façon dont il a été financé. Pour
cela, il faut se reporter au bilan.
En premier lieu, l’analyse des fonds propres
est un indicateur de l’assise financière de
l’association. Ils permettent de faire face
aux décalages de trésorerie, de rassurer les
partenaires en matière d’investissement et
de faire face aux imprévus. Or, souvent, les
associations sont sous-capitalisées, c’està-dire que leurs fonds propres ne sont pas
suffisants.
Quelques actions peuvent être mises en
place pour augmenter le niveau de fonds
propres et donc la solidité financière :
 la réalisation progressive d’excédents :
bien que le bénéfice n’aille pas à l’encontre
de la non-lucrativité des associations, les
mentalités peinent à changer et il arrive
encore fréquemment que la réalisation
d’excédents aille de pair avec leur reprise
par certains financeurs publics. Cette pratique limite la possibilité de se constituer
des fonds propres ;
 la sollicitation de subventions d’investissement : elles doivent être en lien avec les
investissements envisagés. Elles peuvent
permettre de valoriser le patrimoine immatériel de l’association et de le faire financer
comme un investissement en recherche et
développement ;
 le désinvestissement : il s’agit, par
exemple, de la vente des immobilisations
ou de la récupération de prêts. Il faut
cependant veiller à ce que cela n’ait pas de
conséquences négatives sur l’activité de
l’association ;
 les apports en fonds propres de la part
d’un tiers (avec ou sans droit de reprise),
comme les interventions du réseau France
Active (contrats d’apports associatifs, prêts
participatifs).
La réunion d’un modèle économique viable
et d’une bonne utilisation des solutions de
financement assurera la solidité de l’assise
financière. La structure pourra plus facilement bénéficier de l’ensemble des dispositifs mis en place par les partenaires, rassurés sur sa santé financière.
15 avril 2014 - jurisassociations 497
Article extrait de Jurisassociations n° 497 du 15 avril 2014. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
COMMENT ÉVALUER
L’ASSISE FINANCIÈRE
D’UNE ASSOCIATION ?
33
à la personne, tourisme, culture).
L’activité est particulièrement marquée en
milieu rural.
Au-delà de ses interventions financières,
Auvergne Active fait le lien entre les différents acteurs du territoire que sont les
réseaux associatifs, les banques et collectivités locales ainsi que la Caisse des dépôts et
son programme d’investissements d’avenir.
La région est un partenaire important pour
le financement des temps d’expertise et pour
la dotation des outils financiers, notamment
le Fonds régional d’investissement solidaire
(FRIS) qui permet de bénéficier d’un droit
de tirage auprès de la société d’investissement solidaire France Active, dont les
fonds sont apportés par l’épargne salariale
➜ POUR ALLER PLUS LOIN
◗

CPCA, « Financement – Les associations réussiront-elles leur mutation
économique ? », La Vie associative no 19, oct. 2012.
◗

Guide du CNAR Financement, « Association et financements – Quelles
sont les solutions qui vous conviennent ? », 2011.
solidaire. Il s’agit d’un cercle vertueux : la
région garantit l’épargne, et les épargnants
investissent dans les territoires. En sollicitant
le conseil régional, Auvergne Active affirme
son ancrage local, sa participation au développement du territoire et son intervention
complémentaire de l’action publique.
COMPTABILITÉ
RÉALISER UN AUTODIAGNOSTIC
ÉCONOMIQUE ET FINANCIER
LES FONDS PROPRES
DANS LE BILAN
Chloé Secher, coordinatrice du réseau
Actes If, a fait part de l’expérience de son
réseau dans le développement d’un outil
de solidarité financière. Actes If rassemble
une trentaine de lieux artistiques et culturels
d’Ile-de-France. Il s’agit de petites structures
employant en moyenne cinq salariés et qui
présentent un ancrage territorial fort. Depuis
l’origine, le réseau a toujours travaillé dans
une logique de coopération, de mutualisation et d’échange de pratiques pour faciliter
le développement des structures.
Le réseau a souhaité mettre en place un
fonds de solidarité financière pour faire
face aux problèmes de trésorerie récurrents
de ses adhérents, liés à des délais de versement des subventions qui ont tendance à
arriver tardivement dans l’année alors que
les projets commencent dès le mois de
janvier. L’idée était de permettre aux structures d’emprunter à court terme grâce à ce
Fonds associatifs
(fonds propres,
autres fonds associatifs)
Actif immobilisé
(Immobilisations)
Provisions pour
risques et charges
Fonds dédiés
Dettes moyen
et long terme
Actif circulant
(stocks, créances clients)
Dettes court terme
Trésorerie positive
Trésorerie négative
Actif
Passif
fonds mutualisé. Avant de pouvoir actionner
ce fonds, il fallait évaluer la situation économique et financière des structures. Un outil
d’autodiagnostic a donc été mis en place en
partenariat avec le CNAR Financement,
porté par France Active, afin d’apprécier
la situation des associations et de définir la
nature de leurs besoins de financement.
Une formation collective a été proposée
aux structures pour que celles-ci s’approprient l’outil d’autodiagnostic et soient en
mesure de développer une réflexion sur leur
modèle économique. En définitive, le fonds
mutualisé a été relativement peu utilisé,
mais la démarche a été très profitable : le
réseau s’est doté d’une compétence et a
accompagné les structures sur la question
des modèles économiques et des besoins
de financement. Le principal besoin qui a
émergé est celui de l’accompagnement des
structures.
Les partenaires financiers de la table ronde
se sont accordés à dire que leur soutien
dépendait avant tout de l’utilité sociale des
projets associatifs. Les intervenants ont également pointé l’importance de l’accompagnement. Ce sont les alliances qui sont nouées
entre les différents acteurs, réseaux associatifs, partenaires publics, banques, acteurs de
l’accompagnement et de la finance solidaire
qui permettent d’investir de manière efficace dans les richesses associatives. 
AUTEUR
Cécile Katlama
TITRE
Chargée de mission,
Centre de ressources DLA Financement –
France Active
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jurisassociations 497 - 15 avril 2014
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