R. KUNTZMANN et M. MORGEN STRASBOURG Paroisse Cathédrale 6 février 2009 20h30-22h
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1. La manière dont Paul lit l’Écriture
RK
Un chapiteau de l’église Ste Madeleine de Vézelay est dénommé « le moulin mystique » : on
y voit Moïse verser du blé dans un moulin et saint Paul le récupérer dans le sac de l’Évangile.
Vous trouverez cette reproduction sur le site de la cathédrale où nous mettrons le détail de
notre exposé de ce soir, ainsi que des compléments bibliographiques.
L’abbé Sugger de Saint Denis donne la clé de cette sculpture : c’est le passage du blé au pain
véritable.
Pour passer du blé au pain, Paul cite l’AT et le NT, l’un comme source, l’autre comme point
d’arrivée. L’AT lui sert de référent, mais il le cite de façon variée. Ainsi,
• Dans ses 13 Épîtres2, on peut relever 76 citations explicites, introduites par une
formule de citation du genre : « il est écrit », « l’Écriture dit », « Isaïe avait prédit… ».
• Dans 22 cas, on ne trouve pas de formule explicite de citation, mais le lecteur
connaisseur des Écritures ne saurait douter de l’intention de Paul de s’appuyer sur
l’Écriture. Ainsi, Rm 3,20 (polycopié) : voilà pourquoi « personne ne sera justifié
devant lui » renvoie explicitement au Ps. 143,2. Nous nous y attarderons tout à
l’heure.
• Plus difficiles à distinguer sont les « allusions » : imprégné de sa Bible, Paul peut
avoir spontanément utiliser une expression biblique, sans vouloir forcément citer le
passage d’où elle provient.
MM
Certaines citations explicites vont être développées largement. Deux exemples dans le texte
que vous avez sous les yeux :
* Premier exemple en Gal 3,13 (voir le polycopié première page première colonne souligné
et en caractères gras),
Paul dit : « puisqu’il est écrit :’Maudit quiconque est pendu au bois ». À défaut de
connaissance très développée du texte, la marge de notre Bible nous renvoie à Deutéronome
21,22-23 : « Si un homme, pour son péché, a encouru la peine de mort et que tu l’aies mis à
mort et pendu à un arbre, son cadavre ne passera pas la nuit sur l’arbre, tu dois l’enterrer le
jour même, car le pendu est une malédiction de Dieu. Tu ne rendras pas impure la terre, celle
que le Seigneur te donne en patrimoine ».
Dans un cas de ce genre, il faut d’abord se reporter, comme nous venons de le faire, à
l’AT. Il faut ensuite discerner de quoi parle le texte cité, puis cerner le sens de la référence
sous la plume de Paul : pour Gal 3,13, l’AT parle du traitement du cadavre d’un condamné, de
quelqu’un qui est donc ‘maudit’ (malédiction) et que l’on doit enlever le jour même, par
respect de la terre donnée par Dieu, la terre ‘sainte’. Le mot xulos (bois) du Dt ‘pendu au bois’
repris en Ga évoque bien entendu le bois de croix de Jésus : Jésus a accepté cette mort de
maudit exposé aux yeux de tous pour enlever le péché de tous. Dans le mystère de sa mission,
il est allé jusqu’à apparaître comme ‘maudit de Dieu’.
2 Nous considérons ici en bloc les 13 épîtres suivantes : Ro 1 Co 2 Co Ga Eph Phil Col 1Th 2 Th Phm 1 Tim
2 Tim Tt . La critique discute encore de l’origine strictement paulinienne de certaines épîtres. Même les épîtres
qui ne sont pas de la main de Paul, les « deutéro-pauliniennes » se réfèrent selon les mêmes principes aux
Écritures. Pour le présent exposé nous pouvons nous en tenir au corpus d’ensemble, sans plus de distinction.