modalités des interactions entre joueurs, conditions d’espace et de
temps, types d’utilisation des objets...
Le chercheur qui se propose d’étudier les jeux sportifs se trouve
par certains côtés, en position étonnamment favorable. En effet,
alors que dans les situations sociologiques ou linguistiques classi-
ques, l’enquêteur est souvent tenu de mener une longue étude
préalable pour tenter de dégager lui-même au risque de se tromper,
les traits et règles de fonctionnement de la communauté étudiée,
dans le cas du sport les codes essentiels lui sont fournis d’emblée. Et
ces règles, dont il a connaissance « d’entrée de jeu », ne se limitent
pas à la simple régulation de la situation relationnelle, elles en assu-
rent aussi la fondation. C’est-à-dire que le chercheur a entre ses
mains, dès le départ, les éléments constitutifs de la situation cultu-
relle qu’il se propose d’étudier. Il peut alors tenter d’établir la
radioscopie des activités ludosportives qu’il se refuse à considérer
comme de simples « boîtes noires ». Il se donne ainsi pour projet, à
partir d’une solide connaissance des règles et d’une minutieuse
observation des pratiques de terrain, de modéliser les structures de
fonctionnement révélatrices des jeux et des sports.
Cette formalisation peut paraître comme une gageure, car, par
exemple, comment identifier des structures invariantes là où la
variation prolifère ? La mise en modèles veut attester d’une stabilité
dans les jeux. Or, le principe même du spectacle sportif ne repose-
t-il pas sur le caractère instable, unique et imprévisible de chaque
rencontre, sur l’incertitude de son déroulement ?
Les universaux des jeux et des sports
À contre-pied de ces apparences, nous postulons que les
conduites des joueurs s’accomplissent au sein de systèmes d’inter-
action stables qui en spécifient le champ des possibles de façon
nécessairement limitante. Qu’il s’agisse du rugby, du basket, de
l’escrime ou du judo, le sport est un univers fermé ; le sport est un
monde de la clôture. L’immense variété des conduites ludosporti-
ves de surface n’est que la manifestation bigarrée de permanences
qui prennent corps dans des structures profondes. Ces structures
sous-jacentes jouent le rôle de matrices d’engendrement des com-
portements d’action et des événements qui scandent le déroule-
ment du jeu (communications entre joueurs, scores, gain du
match, prise de rôles...). On les retrouve, sous des modalités diffé-
Réseaux dans les jeux et les sports 317