De février à juillet 2012, une étude de comportement de génisses en prairie s’est déroulée au Centre
des Technologies Agronomiques (CTA) de Strée en collaboration avec l’équipe de Christian Marche,
directeur du centre. Depuis 2005, le CTA a planté plusieurs kilomètres de haies le long de prairies
dans le cadre d’aménagement agro-environnemental. Une prairie jouxtée d’une haie composée d’une
dizaine d’espèces ligneuses indigènes ainsi qu’un troupeau de 12 génisses laitières ont été mis à
disposition par le CTA. Les animaux ont été observés pendant 4 semaines et leur activité de pâturage,
de broutage, de rumination et d’abreuvement ont été répertoriées suivant que les animaux avaient
accès à une haie de ligneux ou pas. Il est important de distinguer le pâturage du broutage: le pâturage
consiste en l’ingestion d’herbe tandis que le broutage désigne la préhension de fourrages ligneux. Des
analyses de détermination de la valeur alimentaire des fourrages ligneux ont été réalisées d’une part
au Centre wallon de Recherches Agronomiques en collaboration avec Virginie Decruyenaere et
d’autre part au sein de l’Unité de Zootechnie de Gembloux Agro-Bio Tech dirigée par le Professeur
André Théwis. Enfin, un examen qualitatif et quantitatif des parasites retrouvés dans les fèces des
bovins étudiés suivant qu’ils aient eu accès ou non à une haie pendant la période d’observation a été
réalisé en collaboration avec le Laboratoire de Parasitologie et Pathologie des maladies parasitaires
du Professeur Bertrand Losson de la faculté de Médecine vétérinaire de l’ULg.
L’étude du comportement des bovins a mis en évidence que l’accès à une haie composée d’arbres et
arbustes influence le comportement de ces animaux en prairie. Des mesures de disponibles herbacés,
exprimés au travers de hauteurs d’herbe, ont démontré que les génisses n’ingèrent des fourrages
ligneux (Figure 1) que lorsque cette biomasse herbacée est faible. Les bovins sont des « paisseurs »,
à savoir que naturellement, leur choix se porte sur l’herbe, tandis que d’autres espèces de ruminants,
telles que les chèvres, sont des animaux « brouteurs » c’est-à-dire qu’ils se nourrissent plutôt de
fourrages ligneux. Cependant, cette étude a montré que lorsque l’herbe se fait plus rare, les bovins
peuvent passer d’un comportement de paisseurs, basé sur l’herbe, à un comportement de brouteurs,
même si les quantités de feuillages ligneux ingérées restent limitées.
Si on s’attarde sur la valeur alimentaire des fourrages ligneux en comparaison aux fourrages
herbacés, on remarque que certains arbres et arbustes présentent une composition chimique et un
potentiel de fermentation dans le rumen (Figure 2) intéressants. Par exemple, le sureau noir présente
un taux en protéines supérieur à 30% du fourrage lorsqu’il est séché, dépassant les deux fourrages
herbacés de référence à savoir le ray-grass et le trèfle blanc (Figure 3). La teneur en protéines
d’autres espèces s’approchent de ces herbes. La fermentation d’un fourrage dans le rumen détermine
la quantité d’énergie que va fournir cet aliment à l’animal. Dans notre cas, le potentiel de fermentation
de plusieurs fourrages ligneux avoisine les valeurs obtenues pour les deux herbes de référence, avec
un maximum atteint par le peuplier noir.
Figure 2 : Teneur en protéines de fourrages herbacés (2) et ligneux (3)
0
5
10
15
20
25
30
35
Peuplier noir Frêne Ray-grass Trèfle blanc Sureau noir
Teneur en protéines (%)