Caractéristiques de l’ensemble des patients étudiés, en fonction de leur degré de
démence établi selon le CDR (Clinical Dementia Rating Scale).
Af 227-2004
©2004 Successful Aging SA
Les lésions microvasculaires du cerveau détectées à
l’autopsie sont-elles liées au degré d’altération des
fonctions cognitives ?
L’impact d’un infarctus cérébral en position
« stratégique » sur l’altération des fonctions cognitives est
bien connu. La présence de petits infarctus, notamment chez
des patients souffrant d’une maladie d’Alzheimer, conduit à
l’aggravation de la démence, et le concept de démence
« mixte » en découle directement. Cependant, l’impact sur
les fonctions cognitives de lésions microvasculaires est
beaucoup plus controversé. En effet, il est très difficile de
caractériser ces microlésions étant donnée leur grande
hétérogénéité. Ainsi, il peut exister des microinfarctus
corticaux, une gliose de la substance blanche, une
démyélinisation de la substance blanche diffuse ou
périventriculaire. Pour déterminer leur rôle dans l’atteinte
des fonctions cognitives, il faut également tenir compte des
dépôts de substance amyloïde corrélés en partie à l’âge, et de
la présence d’une dégénérescence neurofibrillaire, cette
dernière étant fortement liée au déclin cognitif.
Les auteurs de cette étude ont réalisé une autopsie sur 45
malades consécutifs âgés de 63 à 100 ans, pour lesquels le
score CDR (Clinical Dementia Rating Scale) avait été
déterminé dans les 3 mois précédent le décès. Ce score
variait de 0 (démence douteuse) à 3 (démence sévère).
Etaient exclus de l’étude les malades avec un antécédent
d’accident vasculaire cérébral, ou une maladie du système
nerveux central telle qu’une tumeur, une maladie
inflammatoire, une maladie de Parkinson ou une maladie à
corps de Léwy diffus. Les cerveaux étaient analysés tranche
par tranche afin de caractériser, de quantifier et de localiser
les lésions vasculaires suivantes : les microinfarctus, la
gliose de la substance blanche et la démyélinisation de la
substance blanche. Les dépôts de substance β-amyloïde
étaient également localisés et quantifiés. Les éléments de
dégénérescence neurofibrillaire étaient recherchés et en
raison de leur forte association avec une maladie
d’Alzheimer, seuls étaient retenus les cerveaux de malades
pour lesquels leur localisation était le cortex entorhinal. Une
analyse multivariée a été réalisée afin de déterminer les rôles
de chacune de ces lésions, de l’âge et du sexe dans
l’explication de la variance du score de CDR.
L’âge et le degré de dépôts de substance β-amyloïde
expliquaient seulement respectivement 5,4% et 8,0% de la
variance du score CDR. En analyse univariée, les
microinfarctus corticaux, la démyélinisation périventriculaire
et la démyélinisation diffuse de la substance blanche
expliquaient respectivement 36,1% (p<0,01), 10,6%
(p<0,001) et 4,6% (p<0,05) de la variance du CDR. En
analyse multivariée, participent à la variance du CDR l’âge
et les dépôts β-amyloïdes pour 10,4%, les microinfarctus
corticaux pour 19,9%, la démyélinisation périventriculaire
pour 9,7% et la démyélinisation diffuse de la substance
blanche pour 5,4%.
Les forces de cette étude sont le caractère prospectif,
l’existence d’une analyse anatomopathologique et la
caractérisation détaillée des lésions microvasculaires.
D’autre part la détermination du rôle de ces lésions sur la
clinique tenait compte des principales variables confondantes
et ceci en l’absence d’une quantité significative de lésions de
dégénérescence neurofibrillaire. Jusqu’alors, les lésions
vasculaires de la substance blanche étaient correctement
visualisées au moyen de l’IRM cérébrale, sans pourtant
qu’une corrélation satisfaisante puisse être faite avec les
observation en anatomopathologie. L’explication de cette
absence de corrélation tient au fait que l’IRM ne caractérise
ces lésions que de manière grossière. D’autre part, cette
étude a permis d’établir que la démyélinisation
périventriculaire de la substance blanche explique 2 fois
mieux la clinique que la démyélinisation diffuse de la
substance blanche contrairement à ce qui avait été établi avec
les études sur l’IRM cérébrale. Cette étude apporte donc des
précisions importantes pour la mise en place de travaux
ultérieurs, avec cette fois-ci la possibilité de définir
précisément des critères anatomopathologiques des lésions
microvasculaires cérébrales.
L. Lechowski
Hôpital Sainte-Périne, Paris
Kövari E, Gold G, Herrmann FR, Canuto A, Hof PR, Michel JP, Bouras C, Giannakopoulos P. Cortical microinfarcts and
demyelination significantly affect cognition in brain aging. Stroke 2004; 35:410-414.
CDR Age (ans) : moyenne (écart-type) N (femmes/hommes)
0 78,2 (10,6) 13 (8/5)
0,5 83,7 (9,9) 16 (10/6)
1 87,2 (5,3) 5 (2/3)
2 89,8 (6,1) 5 (4/1)
3 86,5 (6,9) 6 (3/3)
Total 83,5 (9,5) 45 (27/18)