Andrei Negru 2 24
outre l’Ecole sociologique de Bucarest, reconnue sur le plan international1, des
théoriciens remarquables dont D. Drăghicescu, P. Andrei, E. Sperantia, Tr.
Brăileanu, V. Bărbat, N. Petrescu, avaient été, à côté de D. Gusti, des créateurs de
systèmes sociologiques2, la science roumaine de la société entra pour quelques
décennies dans un cône d’ombre à cause des changements politiques internationaux
et internes survenus après la seconde guerre mondiale. Après l’ « intégration » de
la Roumanie dans le camp socialiste, la sociologie fut considérée comme « science
bourgeose », donc inutile au processus d’édification du nouveau régime et, par
conséquent, brutalement rayée du paysage scientifique et culturel roumain3.
Cependant, la sociologie roumaine continua à survire par des représentants de
marque, membres de l’Ecole sociologique de Bucarest ou sociologues non affiliés,
qui continuèrent leur activité de recherche, dans « l’illégalité », dans différentes
institutions, et stimulèrent l’intérêt pour la sociologie parmi des collaborateurs plus
jeunes4 dont certains contribuèrent pleinement à la relancer pendant les années ’60.
Officiellement réinsérée dans la vie scientifique roumaine lors du IX-e
congrès « historique » du parti communiste roumain de 1965, pour des raisons
plutôt conjoncturelles, la sociologie roumaine réussit à créer, pendant une période
relativement brève, le support institutionnel nécessaire à son développement et à
son affirmation sur le plan interne et international. Le processus
d’institutionnalisation démarra en 1965, avec la création du Centre de recherches
sociologiques de Bucarest, pour continuer par la reprise de l’enseignement
sociologique universitaire (d’abord au sein de l’Université de Bucarest, ensuite
dans celles de Cluj et de Iassy) et par la création d’unités de recherches au sein de
l’Académie des sciences sociales et politiques (les Centres de sciences sociales de
Cluj, Craiova, Iassy, Sibiu, Târgu Mureş et Timişoara), pour finir par la création de
la presse de spécialité, à savoir la revue « Viitorul social », qui eut une parution
ininterrompue jusqu’en décembre 1989.
Le nouveau système sociologique ainsi créé ne fut pas le continuateur de la
sociologie roumaine de l’entre-deux-guerres dont la réalisation institutionnelle la
plus importante avait été l’École sociologique fondée et dirigée par Dimitrie Gusti.
La filiation avec celle-ci ne concerna que la lignée de la « recherche marxiste » où
avait activé entre autres Miron Constantinescu, celui qui eut une contribution
importante dans la « reconstruction du système institutionnel de la sociologie
roumaine détruit pendant la période 1947–1965 »5 et dans le rétablissement du lieu
1 Voir: Maria Larionescu, Contribuţii ale sociologiei româneşti la dezvoltarea sociologiei
ştiinţei, « Viitorul social », LXXVI, nr. 6, 1983, p. 536–540; I. Bădescu, Ecouri americane ale Şcolii
sociologice de la Bucureşti, « Viitorul social », LXXVI, nr. 6, 1983, p. 541–546.
2 Maria Larionescu, Sociologia în România: trecut, prezent, perspective. Forum Sociologie
Românească, „Sociologie Românească”, vol. III, nr. 1, Primăvara 2005, p. 17.
3 C. Zamfir, 9 ipoteze pentru o analiză sociologio-epistemologică a sociologiei româneşti în
perioada comunistă, « Sociologie Românească », vol. III, nr. 1, Primăvara 2005, p. 55.
4 Ibidem, p. 56.
5 Sociologi români. Mică enciclopedie, Ştefan Costea (coord.), Bucureşti, Edit. Expert, 2001,
p. 127.