La structure géologique - Lapadu

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La structure géologique
L'Auvergne tout entière et, par voie de conséquence, le Puy-de-Dôme, appartiennent
au Massif Central français. On retrouvera donc dans l'histoire géologique de ce
département le déroulement des évènements qui ont marqués ce massif. Celui-ci, nous
le rappelons ici, est un des éléments reliques de la grande chaîne d'Europe dite
“hercynienne” dont l'histoire majeure déjà ancienne a été reprise dans des temps plus
récents.
Il Y aura donc lieu de considérer d'abord le bâti fondamental du pays, le socle
hercynien, qui en constitue l'armature de base. Ensuite, il conviendra d'examiner les
formations qui ont pu ultérieurement s'y déposer et qui, de plus en plus proches de
notre temps, ont pu d'autant mieux s'y maintenir. Une date marquera donc cette étude :
la formation de la vieille chaîne du Massif Central français, voici environ 300 millions
d'années avant l'époque actuelle (on marque cette date, comme les autres, par l'unité
de compte en géologie, soit le million d'années, ou M.A.).
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Le socle hercynien
En fait, il est partout, mais il n'affleure naturellement que là où des formations plus
récentes postérieures à l'édification de la chaîne de montagnes ne le recouvrent pas ou
ont ultérieurement disparues, entraînées par l'érosion.
Son territoire de prédilection, ce sont surtout les plateaux du Livradois et du Forez à
l'est, la Combraille au nord-ouest, l'Artense au sud-ouest. Mais sous les amas
volcaniques il peut apparaître, en particulier dans les vallées où l'érosion a déblayé le
matériel volcanique. C'est le cas du vaste plateau de la Sioule, rebord occidental de la
plaine de Limagne où l'on peut voir de larges auréoles de socle affleurer de façon plus
ou moins discontinues.
D'une manière générale, ce socle est formé de gneiss et de granites qui sont liés entre
eux selon des rapports qui sont souvent délicats à préciser mais où l'intrusion granitique
semble avoir la part prépondérante. Les micaschistes, du moins les vrais micaschistes,
sont en principe plus exceptionnels. On le voit, ce socle est profondément cristallin.
Mais par contre, on voit, associées à ces gneiss, des nappes plus ou moins abondantes
de schistes, schistes souvent durcis par une action de contact due précisément aux
granites intrusifs qui ont pu les pénétrer et les cuire en quelque sorte - on parle d'un
“métamorphisme de contact” -. Et, avec ces schistes ainsi durcis et prenant souvent un
aspect corné - aussi parle-t-on de cornes ou cornéennes pour désigner de telles
formations - sont souvent présents des amas de roches chimiquement analogues à des
granites mais dont la structure rappelle bien davantage une structure de roches de
faons ou même de laves épanchées. Ces microgranites - car tel est alors leur nom sont spécialement visibles en Combraille, région de Manzat par exemple, et en
Montagne Bourbonnaise avec un important développement au niveau des
départements voisins de la Loire et de l'Allier.
Quel âge attribuer à ce socle ? Il est difficile de répondre avec certitude, les éléments
paléontologiques manquent a priori puisqu'il s'agit d'un ensemble très intensément
métamorphisé. Les gneiss et sans doute certains granites peuvent être très anciens, et
dater de la base des temps primaires ou même plus anciens encore, ce qui nous
donnerait une date antérieure à 500 M.A. Plus récents seraient les schistes et
microgranites associés, plus précisément immédiatement avant les grands évènements
de l'orogénie hercynienne, ici datée du Carbonifère moyen. La majeure partie des
granites, entre autres ceux qui sont en position intrusive, serait sensiblement de la
même date, encore que certains d'entre eux, à la lumière de mesures très récentes,
seraient peut-être plus anciens et remonteraient un peu dans l'échelle des temps (300 à
350 M.A. ?).
Quoiqu'il en soit, dans le domaine du Massif Central français, l'achèvement de la
grande chaîne hercynienne daterait de la fin du Carbonifère moyen, soit sensiblement
320 M.A. Cette montagne très jeune du être d'un relief imposant et le climat de
l'époque, favorable à une végétation sans doute encore assez primitive quant à ses
représentants (fougères géantes, résineux très primitifs, etc.) mais exubérante quant à
son développement et son foisonnement, a dû couvrir le Massif Central d'un manteau
végétal extrêmement dense et touffu. De là l'origine des bassins houillers dont nous
allons maintenant parler.
Les bassins houillers
Attaquées par les pluies et les orages qui s'abattaient sur elles, ces montagnes en
pleine jeunesse s'érodaient rapidement. Des amas d'alluvions, cailloux, blocs, sables et
argiles variés se déversaient dans les bas fonds où des lacs se sont ainsi créés, lacs où
s'accumulaient ces matériaux et qui se sont plus ou moins rapidement comblés.
D'importants débris végétaux étaient mêlés à ces alluvions. On a eu ainsi rapidement
des masses de grès et de conglomérats avec des intercalations de boues végétales qui
ont ultérieurement mûri en charbons. Ce sont là les causes et origines des bassins
houillers du Massif Central, de ceux du Puy-de-Dôme en particulier.
Mais par leur genèse elle-même, il en est résulté que sauf exception, tel le Bassin de
Saint-Étienne, ces bassins sont assez localisés et de structure assez complexe sur le
plan de leur architecture - de leur tectonique -. Ceci complique souvent, sur le plan
pratique, l'exploitation de ces bassins et, également, limite l'importance du tonnage
existant.
Dans le Puy-de-Dôme, nous citerons d'abord le Bassin de Brassac qui est en fait situé
à la limite de ce département et de la Haute-Loire, sur le territoire de laquelle il s'étend
en direction de Brioude. Situé dans le fond méridional de la Limagne, il occupe
pratiquement l'espace compris entre Allagnon et Allier, à l'amont immédiat de leur
confluence, à Auzat-sur-Allier.
Viennent ensuite les bassins de l'ouest : Saint-Éloy et Messeix. Ils correspondent à la
traversée dans le domaine du Puy-de-Dôme d'une gouttière étroite et allongée qui, en
direction générale nord-nord-est, sud-sud-ouest va de Souvigny, à l'ouest de Moulins, à
Decazeville, soit sur une distance de près de 230 km d'alignement. Ce Sillon Houiller car tel est son nom - abrite un chapelet de petits bassins dont font partie ceux cités cidessus. Entre ces deux ci, les plus importants, des indices nombreux existent qui
jalonnent ce sillon si remarquable. Des petits lits de houilles y ont été signalés
(Pontaumur, Puy-Saint-Gulmier, par exemple).
Ces trois bassins, Brassac, Saint-Éloy, Messeix, ont été très largement exploités. Aussi
leurs réserves, sans être totalement épuisées, s'amenuisent très sensiblement, et
surtout correspondent à des secteurs d'exploitation moins facilement accessibles, d'où
une rentabilité économique assez faible. Dans la conjoncture actuelle, et naturellement
sous réserve d'un maintien de celle-ci, ce qui n'est pas évident a priori, il est prévu
d'arrêter leur exploitation dans un avenir assez proche.
Les formations houillères datent de la fin du Carbonifère et leur dépôt a immédiatement
suivi l'édification de la chaîne hercynienne. A côté des grès en dépôts soit grossiers,
soit plus fins, mais toujours détritiques qui forment la majeure partie des couches
intercalant les lits de houille, il est classique d'observer des laves et quelquefois des
tufs. Nous avons donc là le témoin d'un volcanisme d'âge primaire terminal, soit datant
de 250 M.A. environ, nettement plus ancien que le volcanisme récent dont nous
parlerons plus loin. Le Massif Central français a donc, sur le plan de son territoire, une
vieille tradition de volcanisme. Ceci s'ajoutant au fait déjà signalé que dans les
formations du socle on retrouve d'abord les traces des volcans de la partie moyenne du
Primaire, et aussi, plus ou moins intensément modifiés par le métamorphisme, les
restes d'un volcanisme encore plus ancien, mais encore parfaitement discernable. Dans
le Massif Central, les volcans ne datent pas d'hier, on peut le constater dès maintenant.
Les bassins tertiaires
Au cours du long laps de temps qui sépare la fin du Primaire du début des temps
tertiaires aucune formation n'a laissé de traces sur le sol du Puy-de-Dôme. II nous faut
donc faire, dans le temps, un bond de près de 150 M.A. pour retrouver au début de
l'Oligocène, deuxième système de l'Ere tertiaire, à nouveau des formations
sédimentaires.
A cette époque, en effet, le vieux socle hercynien, parfaitement usé par l'érosion qui a
sévi durant cette longue période, subit un rajeunissement sous le contrecoup de
l'érection de la jeune chaîne alpine. Il se soulève, aussi il se casse. Certains
compartiments s'effondrent, formant ainsi autant de bassins de sédimentation où
s'installent des lacs et où se déposent des sédiments. Ceci se passe à l'Oligocène, soit
voici environ 40 M.A.
De tous ces bassins, le plus grand, c'est la Limagne. Elle commence d'ailleurs plus au
sud, en Haute-Loire, et vers le nord se prolonge sur l'Allier. Mais elle traverse très
largement le Puy-de-Dôme du sud au nord et occupe une part importante du territoire
du département.
La Limagne est comblée par des sédiments dont la succession est celle, très classique
de ce type de bassin de sédimentation : à la base, des grès et arkoses - ou grès
feldspathiques -, dans la partie médiane, des marnes blanches, avec souvent une
épaisseur de terrain assez considérable, enfin des calcaires lacustres occupent le
sommet. Ces derniers sont très souvent en Limagne liés à des concrétions de formes
curieuses rappelant les “choux-fleurs” d'où ce nom qui leur est parfois attribué. En
Limagne, ces sédiments ont pu s'accumuler sur une puissance considérable, plus de
1200 m semble-t-il. Mais elle est déjà en partie déblayée. Et c'est la raison de la
présence de nombreuses buttes témoins qui la parsèment au sud du parallèle de
Clermont. Ces buttes sont dues à la présence de volcanisme postérieur à ces dépôts.
Nous en reparlerons plus tard.
Vers le sud, entre Issoire et Brioude, la Limagne prend un aspect un peu différent : c'est
le Lembron. A la base de la série de terrains, on trouve des niveaux très riches en
oxydes de fer, d'où leur teinte rouge très caractéristique qui dominent largement dans
les terres de ce pays.
D'autres bassins, du même type mais bien plus réduits, existent également dans le
Puy-de-Dôme. Citons le Bassin d'Ambert drainé par la Dore. D'autres, encore plus
petits, se rencontrent sur le socle du Livradois (Sauxillanges, Manglieu, Saint-Dier,
etc.). De même, à l'ouest de la Limagne, sur le socle de la Sioule (Olby, Murol, etc.)
souvent masqués plus ou moins partiellement par des formations volcaniques qui leur
sont plus récentes.
Actuellement la Limagne est drainée par l'Allier. C'est une rivière importante,
responsable de dépôts bien plus récents, ou même actuels, constitués par des
alluvions caillouteuses et sableuses. Celles-ci sont d'âges divers dans l'échelle des
temps très récents néanmoins. Elles se déposent selon des nappes ou terrasses dont
l'altitude relative est d'autant plus basse que l'on se rapproche de la période
contemporaine. Ces nappes de sables et de graviers peuvent prendre une extension
assez importante. Leur importance économique actuelle est considérable car elles sont
à la fois une source de matériaux de construction moderne (bâtiments comme génie
civil) en même temps que le magasin de nappes d'eau considérables pour les
populations riveraines. Une exploitation simultanée n'est d'ailleurs pas sans poser des
problèmes pratiques bien délicats à résoudre car s'il importe sans doute de satisfaire
les besoins en matériaux de construction, il faut aussi préserver au maximum les
ressources en eau des riverains du val d'Allier et surtout veiller à la qualité des eaux
exhaurées.
Le volcanisme
Bien avant le volcanisme récent, le Massif Central avait déjà connu des périodes
d'activité volcanique. Les formations du vieux socle montrent, plus ou moins atteintes
par le métamorphisme général, d'anciennes coulées et tufs ; et ce, aussi bien à
l'Antécambrien que dans le Primaire. Nous avons ainsi indiqué la présence de
formations de ce type dans les bassins houillers. La vocation volcanique du Massif
Central, et plus particulièrement de l'Auvergne, est donc très ancienne.
Mais au début des temps tertiaires, le rajeunissement du vieux socle a eu pour effet,
outre la surélévation et le cisaillement de celui-ci, une réactivation des réservoirs
magmatiques plus ou moins profonds qui ont pu venir au jour. D'où ce volcanisme
tertiaire qui a pu, comme il est logique de l'admettre, durer jusqu'à nos Jours.
Les plus anciennes manifestations sont contemporaines des dépôts des bassins
tertiaires, Limagne en particulier. Ces épanchements de laves ont donné des dépôts
mixtes, mélange de ces laves au sein des sédiments en cours de formation dans le
milieu lacustre. Ce sont les “pépérites”, roches hétérogènes et mixtes où des granules
de lave se sont éparpillés dans une matrice marneuse ou même gréseuse quelquefois.
C'est donc un volcanisme d'âge oligocène par conséquent. Datant d'un Tertiaire encore
reculé, il n'a naturellement laissé aucune trace sur le plan de la morphologie.
• • Le volcanisme de la Comté
C'est encore dans la Limagne et en partie sur le Livradois que nous allons à nouveau
retrouver une phase volcanique.
On note une différence très nette de structure et de morphologie entre la Limagne du
nord du département, au-delà du parallèle de Riom, et celle du sud. Au nord dominent
de vastes plaines consacrées à la culture, avec de larges plateaux surbaissés et
couverts de nappes alluviales anciennes où règnent souvent les bois et les forêts ; au
sud, la Limagne est littéralement hérissée de buttes témoins qui lui donnent un relief
notable : tels les sites de Châteaugay, des Côtes de Clermont, et de Gergovie pour ne
citer que celles proches de l'agglomération clermontoise. Pour donner une idée du
relief, notons que le point culminant de cette Limagne est le Puy de Saint-Sandoux, à
843 m. A ce niveau, l'Allier coule à la cote 355 m. Il y a donc près de 500 m de
dénivelée.
Toutes ces buttes témoins conservent dans leurs flancs les niveaux supérieurs de
l'Oligocène de la Limagne, mais sont couronnées par des plaques de laves qui les ont
ainsi, tel un chapeau, protégées contre l'érosion. On voit également d'anciennes
cheminées, culots de laves refroidies, qui plus résistantes que leur cadre sédimentaire,
émergent au sein des marnes sédimentaires. II y a donc là un volcanisme important qui
d'ailleurs se prolonge sur le domaine cristallin voisin du Livradois. Il correspond assez
bien à la région historiquement appelée Comté d'Auvergne, axée autour de Vic-leComte, d'où le nom donné plus haut à ce volcanisme.
Dans le domaine de la nature des laves rencontrées, ce volcanisme est assez large sur
le plan pétrographique. Celles-ci se caractérisent le plus souvent par le fait que leur
teneur en silice, relativement réduite, a permis la genèse de certains minéraux
caractéristiques, tels par exemple la néphéline ou l'analcime. Leurs correspondants
normaux relèveraient alors des types andésitiques ou basaltiques, plus rarement
trachytiques.
On doit considérer ces éruptions comme s'étant produites à partir de bouches isolées
qui ont dû, dans le temps, fonctionner de façon successive et non simultanée, au moins
quant à l'activité propre de chaque évent. Ce type de volcanisme est dit ponctuel. Il va
s'opposer aux appareils complexes et massifs comme le Cantal ou les Monts Dore que
nous étudierons tout à l'heure.
Pour ce qui est de la date de ces formations, on peut penser au Pliocène, au sens le
plus large du terme. Le début pourrait dater de 10 à 12 M.A. et se placerait ainsi à la fin
des temps miocènes. La fin de ces manifestations se placerait au plus tard vers 2 à
3 M.A.
• • Les Monts Dore
Géographiquement, c'est un seul massif et non des éléments dispersés comme c'était
le cas pour la Comté. Actuellement il culmine au Puy de Sancy, à 1885 m. Cette fois,
c'est un volcan complexe qui par sa structure unique s'oppose aux bouches dispersées
du volcanisme ponctuel. On parlera dans ce cas d'un volcanisme aréal. Une même
structure se retrouve d'ailleurs plus au sud dans le grand massif du Cantal, de
dimensions plus élevées que celles des Monts Dore.
Géologiquement, le volcan complexe des Monts Dote s'étend selon une auréole axée
sur la localité du Mont-Dore qui en occupe à peu près le centre. Ses dimensions sont
les suivantes : du nord au sud - du parallèle d'Aydat à celui d'Église-neuved'Entraygues - on note 30 km ; d'est en ouest, de Champeix à Tauves, 40 km. Mais il
ne s'agit là que des dimensions maximum atteintes par ce massif.
Signalons au passage que le Cantal, de structure très comparable, est bien plus vaste ;
c'est d'ailleurs le volcan complexe le plus étendu d'Europe.
Les produits émis par les Monts Dore sont en vérité extrêmement variés. Il y a sans
doute des laves et de nature très diverse ; on va des rhyolites, laves très claires dont
l'analyse révèle une abondance de silice, soude et potasse, une pauvreté de magnésie
et fer, ainsi que chaux, jusqu'aux basaltes très accusés bien plus appauvris en silice et
alcalins, au contraire riches en chaux, et ferromagnésiens. A côté de ces types très
diversifiés on note une série de teneur relative en silice bien plus basse. De ce fait, il y
a apparition - comme c'était le cas en Comté - de minéraux particuliers tels l'hauyne,
l'analcime, la néphéline, etc. Cette grande diversité des laves est apparue très vite aux
pétrographes qui ont étudié les Monts Dore - et ils sont légion -. Des noms de types
pétrographiques tels doréite, sancyite, ordanchite, etc. ont d'ailleurs été choisis à partir
d'exemples pris dans ce massif.
Mais ce qui caractérise surtout les Monts Dore, c'est l'abondance des produits explosifs
ou de projection : cendres, brèches, ponces, nuées ardentes... Ils ont pu s'accumuler
selon des volumes considérables. Malgré leur déblaiement intense rendu aisé du fait de
leur cohésion très réduite qui en font une victime de choix sous les assauts des agents
de l'érosion, ce qui reste actuellement de ces matériaux forme encore un tonnage
important de la masse du volcan.
Ces matériaux apparaissent généralement sur les flancs des profondes entailles que
les rivières ont pratiquées. Au contraire, les grands plateaux qui s'étendent entre ces
vallées sont souvent protégés par des carapaces de laves compactes parmi lesquelles
les basaltes semblent avoir une place de choix.
Des recherches géophysiques ont permis d'apporter quelques lumières sur le problème
de l'origine des Monts Dore. Elles ont montré que la partie centrale du socle ancien
supportant le volcan, zone circulaire d'environ 8 à 10 km de diamètre, était effondrée.
Cet effondrement déterminait ainsi une dépression en forme de chaudron - on désigne
effectivement une telle structure par le terme géologique de caldeira - sur les flancs
duquel ont pu migrer jusqu'au jour les éléments magmatiques du sous-sol, permettant
leur effusion en surface ; ceci soit sous forme liquide, telles les laves, soit sous forme
de produits explosifs dus à l'énorme pression des gaz dissous, d'où les matériaux cités
plus haut. Ce type de manifestation volcanique aboutissant à l'entassement de produits
variés sur une aire plus ou moins vaste - et c'est pourquoi on parle de volcanisme
aréal - est connu ailleurs. On citera le Cantal, mais il est également connu dans des
types actifs avec, il faut le préciser, des dimensions qui peuvent être très variables.
Cette caldeira d'effondrement des Monts Dore, remplie d'un matériel explosif meuble et
perméable, sert présentement de roche magasin à des eaux thermales et minérales
issues des profondeurs, d'où son importance dans le cadre du thermalisme de la
Basse-Auvergne. Nous y reviendrons plus loin.
Age des Monts Dore
C'est un problème encore mal précisé dans les détails et des divergences apparaissent,
selon les méthodes de détermination utilisées. Néanmoins on peut très
approximativement donner les grands traits suivants. Les premières manifestations de
ce volcanisme ont pu commencer lors de la fin des temps miocènes, soit environ à
20 M.A. et se terminer au cours des temps pliocènes (au sens large pris pour ce
système), soit vers 5 M.A. Certains auteurs auraient même tendance à rajeunir encore
la fin de la période active du massif montdorien, mais la question reste encore ouverte.
Les Volcans récents des Monts Dore
Sur la bordure orientale du volcan complexe, on voit surgir des appareils isolés bien
plus récents ; ils s'alignent selon une direction méridienne qui prolonge la Chaîne des
Puys. Tels sont les Puys de la Rodde, d'Enfer, de Servières, de Monténard, du Tartaret,
de Montchal. Ils se poursuivent d'ailleurs au-delà vers le sud dans le domaine du
Cézallier. Ces volcans sont en fait des équivalents des appareils de la Chaîne des Puys
à laquelle on doit géologiquement, sinon géographiquement, les rattacher de façon
indiscutable. Ils ont traversé les formations des Monts Dore depuis longtemps refroidies
et solidifiées, et leur âge ne se compte qu'en milliers d'années (environ 5000 pour les
plus récentes manifestations). La morphologie de leurs appareils est encore très bien
conservée et leurs coulées empruntent régulièrement l'actuel réseau hydrographique,
telle la célèbre coulée du Tartaret, encastrée dans le lit de la Couze Chambon. C'est là
une preuve supplémentaire de l'extrême jeunesse de ce volcanisme.
• • Le Cézallier
Au sud-est des Monts Dore, au-delà de la vallée de la Couze Pavin, et jusqu'au niveau
de la vallée de l'Alagnon, dans le département du Cantal, s'étend une zone de hautes
terres dont nous avons déjà dit que l'altitude oscillait entre 1200 et 1300 m. Ces grands
plateaux herbeux et relativement peu boises culminent au Signal du Luguet, à 1555 m,
dans le département du Puy-de-Dôme, mais assez près du Cantal limitrophe.
Géologiquement parlant, ces hautes terres correspondent à un large volcan très aplati
bien que d'altitude relative encore notable. Il est constitué par un empilement de
coulées de laves, parmi lesquelles les basaltes jouent un rôle prépondérant. Sans être
totalement absentes, les formations à caractère explosif dont nous avons vu l'important
développement dans les Monts Dore, occupent ici une place infiniment plus discrète.
L'érosion a entamé beaucoup plus difficilement la cuirasse compacte des laves du
Cézallier et de là cet aspect beaucoup moins disséqué que présente actuellement ce
massif volcanique.
Du point de vue de son âge, le Cézallier se situerait dans les débuts du Pliocène soit à
environ 10 M.A. Mais il ne serait pas impossible que les plus anciennes des formations
de ce volcan soient contemporaines de la fin des temps miocènes et elles
remonteraient ainsi à 15 M.A.
L'origine d'un tel ensemble volcanique est naturellement plus proche du type aréal que
du type ponctuel, mais les émissions ont dû surtout se faire à partir de fissures
allongées dans le socle et non à la suite de constitution de caldeira comme il a été
indiqué dans le cas des Monts Dore. On peut enfin rappeler ici que l'Aubrac, massif
volcanique situé bien plus au sud, doit sans doute avoir une origine comparable. Sa
structure n'est d'ailleurs pas sans rappeler assez fidèlement celle du Cézallier.
Les versants sud et sud-est du Cézallier débordent assez largement les limites
départementales du Puy-de-Dôme et appartiennent ainsi aux départements voisins du
Cantal et de la Haute-Loire.
Les volcans récents du Cézallier
Comme nous l'avons vu à propos des Monts Dore, on retrouve dans le versant nord du
Cézallier quelques volcans à morphologie très fraiche. Ces volcans, bien plus récents,
appartiennent géologiquement eux aussi au système de la Chaîne des Puys. Ils se sont
installés sur l'ancien volcan du Cézallier ; leurs cheminées en traversent les formations.
Tels sont les volcans de Montcineyre, de Malnon, de La Godivelle et de Zanières.
Comme pour leurs voisins du domaine des Monts Dore, leur coulée emprunte le réseau
hydrographique actuel. Leur âge est donc très récent.
• • La Chaîne des Puys
C'est le domaine volcanique qui domine la Limagne entre Combronde au nord et Vic-leComte au sud. On a là une succession de volcans - près de 80 au total - échelonnés
depuis le Gour de Tazenat au nord, jusqu'au site du Lac d'Aydat au sud. Nous avons vu
l'importance de cette chaine sur le plan du relief topographique.
Par suite du caractère très récent de ce volcanisme, la morphologie des diverses
manifestations en a été parfaitement conservée si bien que cette Chaîne des Puys est
le domaine de choix pour l'étude du volcanisme. Géologiquement parlant, elle a été,
particulièrement ces derniers temps, spécialement étudiée.
On y trouvera laves et projections. Mais ici le volcanisme est strictement ponctuel.
Chaque bouche volcanique garde son individualité et ses coulées sont généralement
bien distinctes.
Sur le plan de la pétrographie, on rencontrera en gros des types de laves acides - des
trachytes et des “domites”) -, des andésites - comme la fameuse pierre de Volvic - et
des basaltes, comme ces coulées qui dévalent vers la Limagne au creux des vallées
actuelles. La teinte de ces diverses laves est naturellement variable : les trachytes sont
très clairs, les andésites gris foncé, les basaltes d'un beau noir.
A ces laves sont associées des scories et des cendres formant entre autres les flancs
des volcans et rappelant par leur forme intacte les volcans actifs actuels. On note divers
types : surtout des appareils à cratère analogue au Vulcano italien, quelquefois - et
c'est le cas du Puy-de-Dôme - des formes à extrusion verticale à rapprocher de la
fameuse Montagne Pelée de l'Ile de la Martinique dans les Antilles. Ces appareils sont
installés dans un vaste tapis de cendres et scories volcaniques qui leur sert de
piédestal et dont l'importance sur le plan hydrologique est très grande, comme nous
aurons l'occasion de le signaler bientôt, car il constitue un très vaste réservoir d'eau.
On a repris tout récemment l'étude détaillée de cette chaine et on a pu mettre en
évidence dans ce volcanisme des manifestations particulières : les maars. Connus
ailleurs -le terme en a été défini en Allemagne - leur fréquence a été bien démontrée
dans la Chaîne des Puys.
Ce sont des cratères d'explosion d'assez vaste dimension, découpant le socle, et
souvent occupés par un lac ou comblés par un colmatage. Les exemples en sont
nombreux : Gour de Tazenat, Lac Pavin, dont les lacs sont encore actuels ; la
dépression dite “du Fond de Jaude” à Clermont même en est également une belle
illustration.
Ces phénomènes sont le résultat d'une rencontre brutale d'un magma fondu avec une
nappe d'eau. Si la lave est très riche en silice (un trachyte par exemple), elle peut
provoquer un maar sans qu'il soit indispensable d'invoquer la mise en œuvre d'une
nappe phréatique. Et c'est précisément le cas du Lac Pavin dont l'explosion est la
conséquence du dégazage très brutal d'une lave acide.
Le volcanisme de la Chaîne des Puys a été daté de la fin de l'époque quaternaire, ceci
grâce à des mesures d'âge absolu faites sur des débris végétaux intercalés entre
certaines coulées. II n'est pas exclu que la période historique ait pu être le témoin des
plus récentes manifestations. En tout cas, on a déterminé des périodes de calme dans
le passé de cette chaîne qui ont pu être très largement supérieures à l'intervalle qui
nous sépare des plus récentes éruptions. On doit donc en toute rigueur, considérer que
nous nous trouvons en fait bien plus dans une période de répit que dans une période
d'arrêt définitif de l'activité de ce volcanisme.
Nous signalerons simplement en terminant que ces volcans se continuent vers le sud
par une série d'appareils de même âge installés sur les flancs des Monts Dore er du
Cézallier, ces appareils faisant logiquement partie de l'ensemble de la Chaîne des
Puys, au moins sur le plan de la géologie.
• • La Chaîne de la Sioule
Ce petit chaînon, que nous avons défini précédemment comme s'allongeant en rive
gauche de la Miouze et de la Sioule, est formé par une série de volcans, en un système
de volcanisme également ponctuel.
D'âge nettement antérieur à celui de la Chaîne des Puys, ils montrent des appareils
moins bien conservés er des coulées déjà démantelées. Pétrographiquement parlant, il
y a dans cette chaîne des laves et projections se rattachant aux types basaltiques, dans
leur quasi totalité. Ces roches sont souvent marquées par un léger déficit relatif en
silice (basanites selon le terme pétrographique utilisé). Andésites et trachytes semblent
absents.
On peut dater l'activité de cette chaîne de la fin extrême des temps pliocènes, soit de
2 M.A. environ.
• • Le Forez
Les Monts du Forez recèlent quelques traces de volcanisme comme la butte de
Saillant, dans la haute vallée de l'Ance. Mais ces restes sont tout à fait exceptionnels. Il
s'agit le plus souvent de roches basaltiques.
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Résumé de l'histoire géologique de l'auvergne
Les plus vieilles formations du sous-sol auvergnat sont donc celles qui constituent le
socle. Elles dateraient pour les gneiss et les micaschistes de l'Antécambrien ou des
plus vieux terrains du Primaire. On peut avancer les dates suivantes : de 750 à
450 M.A. Elles ont en outre subi de très importantes transformations puisqu'elles ont
été métamorphisées et transformées précisément en gneiss et micaschistes.
Une autre série, appartenant elle aussi au socle hercynien, mais moins antique, doit
être signalée : ce sont les schistes et roches éruptives associées. On peut les situer
comme appartenant à la fin des temps dévoniens et au début des temps carbonifères,
soit entre 360 et 325 M.A. On a là une des premières phases volcaniques de la région.
C'est à cette dernière époque datant du début du Carbonifère moyen que se plisse et
s'érige la chaîne hercynienne : entre 325 et 300 M.A., Un peu après, ont pu s'installer
les massifs granitiques que l'érosion nous permet de voir actuellement affleurer et dont
l'extension, tant en Forez ou Livradois que sur le plateau de la Sioule ou l'Artense, est
très notable. On considère d'ailleurs que si la majeure partie de ces ensembles
granitiques est liée à l'époque carbonifère, il ne serait pas exclu que quelques uns
soient d'un âge un peu plus ancien, dévonien par exemple.
Immédiatement après se mettent en place les éléments détritiques et houillers dits du
Stéphanien - entre 290 et 260 M.A., si l'on admet que le début du Permien est
également intéressé par ces dépôts -. A ce moment s'installent aussi les laves et tufs
volcaniques liés à ces éléments du Stéphanien. C'est une des phases du volcanisme
auvergnat : 80 à 100 M.A.la séparent de la phase précédente.
Puis durant tout le Secondaire et au début du Tertiaire, soit de 225 à 40 M.A., la chaîne
hercynienne reste passive et subit l'intense érosion des éléments de la dynamique
externe : pluie, vents, etc. Sauf sur ses bordures, pas de trace de sédiments de ces
époques. La montagne auvergnate devient un plateau rasé et très surbaissé, de relief
quasi nul : ce que l'on appelle une pénéplaine.
C'est au début de l'Oligocène que le Massif Central sort de sa torpeur. Il va se rajeunir
et reprendre une activité géologique notable, essentiellement en contrecoup de la
naissance des Alpes.
Ce rajeunissement, nous l'avons déjà dit, se traduit d'abord par le relèvement de la
pénéplaine. C'est lui qui porte le vieux socle à plus de 800 m dans le plateau de la
Sioule et même à plus de 1600 m dans le Forez. Les gorges profondes qui s'incrustent
dans les roches anciennes sont une des conséquences de cet effet de rajeunissement.
Il se traduit ensuite par les cassures qui cisaillent ce socle et déterminent les bassins
d'effondrement. Il va s'y installer des lacs où se sédimenteront des matériaux qui vont
petit à petit les combler. C'est l'origine des formations sédimentaires oligocènes de la
Limagne et des autres petits bassins, tant en Auvergne qu'ailleurs. L'âge se situe à
l'Oligocène, avons-nous dit, soit entre 40 et 25 M.A.
Mais ce jeu du cisaillement du socle a en outre autorisé la sortie au jour des réserves
de magmas fondus contenues dans ce même socle ou immédiatement au-dessous.
Ceux-ci s'épanchent en surface et sont responsables du volcanisme récent du Massif
Central, de l'Auvergne en particulier.
Les premières manifestations de ce volcanisme se sont traduites par la mise en place
de laves associées aux sédiments de la Limagne en cours de formation. Elles sont
donc oligocènes et se situeraient dans le même laps de temps que ces mêmes
sédiments. Ce volcanisme a duré jusqu'à nos jours - nous avons vu ce que l'on devait
déduire de l'examen de la Chaîne des Puys - mais avec des périodes particulières de
paroxysme selon le territoire considéré. Au Miocène ont dû commencer à se bâtir les
grands volcans complexes, soit le Cantal et les Monts Dore, et durer jusqu'au Pliocène,
soit une période approximativement comprise entre 25 et 10 M.A. C'est aussi à ce
moment qu'ont dû fonctionner les volcans de la Limagne et du Livradois - volcanisme
de la Comté -. L'âge de fonctionnement des appareils à simple épanchement fissural,
tel le Cézallier, peut se situer dans la partie médiane du Pliocène.
Parmi les manifestations volcaniques les plus récentes, nous citerons d'abord la Petite
Chaîne des Puys ou Chaîne de la Sioule, qui a dû jouer son rôle à la charnière des
temps Pliocène et du Quaternaire, soit autour de 15 à 2 M.A. Puis la Chaîne des Puys
elle-même, dont on peut imaginer que l'activité ne serait pas terminée et dont en tout
cas on peut imaginer des manifestations qui seraient à rapporter sans doute aux temps
historiques.
Enfin le cycle d'érosion n'a naturellement jamais cessé de fonctionner et continue son
action. Il se traduit par le dépôt des nappes de sables et graviers, puis par les terrasses
déposées surtout en Limagne, la zone basse de la Basse Auvergne. Leur importance
témoigne de l'intensité des actions des éléments de la dynamique externe : pluie, neige,
etc. sur les reliefs actuels.
Tableau des âges absolus des temps géologiques
Eres
Tertiaire
(70)
Systèmes
Date
en M.A.
Evènements en
Basse-Auvergne
Pliocène
10
Volcanisme et actuel
Miocène
25
Oligocène
40
Début du volcanisme
montdorien
Dépôt des fossés
d'effondrement
Premier volcanisme
(pépérites de la Limagne)
Éocène
70
______________________________________________________________
Crétacé supérieur
105
Crétacé inférieur
135
Jurassique
155
Lias
180
Secondaire
(155)
Trias
225
______________________________________________________________
Primaire
(155)
Permien
270
Carbonifère
350
Dévonien
400
Silurien
440
Ordovicien
500
Orogénie hercynienne majeure
suivie des dépôts du houiller
Cambrien
550
______________________________________________________________
Antécambrien
2500
______________________________________________________________
Ces âges sont donnés en millions d'années, par rapport à l'époque présente (âge
0 M.A.). Chaque chiffre correspond à la date du début de chaque système ; les âges
entre parenthèses correspondent à la durée des principales ères géologiques. L'origine
des temps quaternaires peut être située à 1 M.A.
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