1. Le Maroc a-t-il une stratégie de développement économique

Le Maroc a-t-il une stratégie
de développement économique ?
Quelques éléments de réflexion
pour un véritable décollage
économique et social
Rapport rédigé par
le Cercle d'Analyse Economique
de la Fondation Abderrahim Bouabid
– Juin 2010 –
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Préambule
Cette contribution a été préparée par les membres du Cercle d’Analyse Économique
de la Fondation Abderrahim Bouabid. Le Cercle d’Analyse Économique est un cercle de
réflexion et de recherche indépendant et non partisan ayant pour mission principale la
promotion d’activités de recherche et d’analyse concernant les sujets ayant trait à l’économie
marocaine.
Les membres du Cercle d’Analyse Économique
Fouad Abdelmoumni
Najib Akesbi
Omar Balafrej
Ali Bouabid
Amine Bouabid
Yasser Charafi
Khalid Elhariry
Kamal El Mesbahi
Najib Guedira
Driss Rachidi
Omar Rharbaoui
Karim Tazi
La Fondation Abderrahim Bouabid
Indépendante dans son fonctionnement, la Fondation Abderrahim Bouabid se donne pour
mission de contribuer au débat public sur les grands problèmes de société, en favorisant la
réflexion susceptible d’en éclairer les enjeux, dans les domaines culturel et scientifique. Pour
ce faire, elle s’associe à des organisations nationales et internationales dans l’optique de mener
des travaux conjoints.
Ses activités s’articulent autour de quatre axes principaux :
- Une activité interne de veille politique confiée au Cercle d’Analyse Politique, dont les
travaux sont publiés dans la collection Cahiers Bleus.
- Une activité récente de veille économique confiée au Cercle d’Analyse Economique.
- Une activité de recherche action au service des réformes, destinée à améliorer la
qualité du débat public. Nous proposons ainsi aux différents acteurs de la scène publique
(gouvernement, administration, parlementaires, syndicats, société civile...) sur un thème
donné, un travail d’analyse assorti de recommandations opérationnelles.
- Une activité de mémoire liée à l’histoire du Maroc contemporain, tournée vers la
collecte et la conservation de documents se rapportant à la vie de feu Abderrahim Bouabid,
ainsi que la diffusion de ses écrits personnels à travers la collection Archifab.
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Synthèse
Ce rapport est le fruit d’un travail collectif des membres du Cercle d’Analyse Économique de
la Fondation Abderrahim Bouabid. Il a pour principal objectif de stimuler la discussion et le
débat sur les grands sujets ayant trait à la politique économique du Maroc, en adoptant une
perspective et un éclairage différents sur la performance économique du pays, et ce en partant
des deux postulats suivants :
Le Maroc est un pays qui doit avoir une ambition forte en matière de développement :
le but des politiques économiques mises en œuvre doit être de réussir le décollage
économique du Maroc de manière à lui permettre en l’espace d’une génération de se
hisser au rang d’un pays à revenu intermédiaire élevé et à fort niveau de développement
humain.
L’évaluation des progrès et des déficiences doit se faire à partir d’une base
intellectuelle honnête et non biaisée. Il est important de se comparer systématiquement
aux concurrents les plus dynamiques pour mesurer ses progrès et de prendre un point de
référence adéquat.
Par ailleurs, le parti pris de cette contribution est de refuser toute vision manichéenne en rejetant
le faux dilemme présenté aux citoyens sincèrement intéressés par la chose publique : applaudir sans
réserve ou se retrouver accusés de " nihilisme ". Autrement dit, nous sommes convaincus que la
critique constructive et le débat d’idées sur la base d’une évaluation sans complaisance de la réalité
sont essentiels à la mise en œuvre d’une stratégie de développement efficace.
Enfin, avant d’entrer dans le vif du sujet, précisons que nous sommes conscients que le Maroc a réalisé
d’importants progrès économiques depuis la fin des années 90. Ceci étant, c’est le rythme et la nature
de ces progrès que nous nous proposons d’analyser car la seule comparaison avec nos performances
passées n’est pas un test suffisamment exigeant au regard des besoins et des potentialités de ce pays.
Une stratégie de développement économique ?
La première partie de ce rapport discute l'existence d’une stratégie de développement économique :
des politiques publiques qui permettraient au Maroc de croître à un rythme tel qu’en l’espace d’une
génération, notre pays puisse devenir un pays à revenu intermédiaire et niveau de développement
humain élevé.
Une analyse fine de la croissance économique marocaine sur la dernière décennie montre que :
Cette croissance est intervenue dans une conjoncture internationale favorable et avec l’aide de
conditions pluviométriques clémentes.
Le Maroc n’a pas profité de cette conjoncture favorable autant qu’il aurait dû le faire : nos
voisins et concurrents directs ont quasiment tous crû à un meilleur rythme que le nôtre.
La volatilité de la croissance marocaine (même si elle s’est atténuée) demeure forte.
Le niveau des investissements directs étrangers s’est sensiblement amélioré. Ceux-ci restent
néanmoins : a) concentrés dans quelques secteurs; b) peu représentatifs d’une quelconque
meilleure attractivité du pays (forte corrélation des IDE avec la conjoncture internationale,
performance médiocre du Maroc par rapport à ses concurrents).
La productivité et les gains de productivité du Maroc demeurent très faibles.
Le déficit de la balance commerciale atteint des niveaux alarmants (du fait d’un déficit de
compétitivité).
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Enfin, le Maroc régresse ou stagne dans la plupart des classements internationaux.
Malgré tous ces points d’attention, d’aucuns continuent d’utiliser les trois arguments suivants
pour justifier de l’existence d’une stratégie cohérente de développement économique :
Les progrès indéniables en prenant comme point de référence les années 90.
L’effet retard : nous ne verrions pas encore les effets sur la croissance de tous les " chantiers "
initiés récemment.
Le dynamisme du triptyque " tourisme – immobilier – infrastructures ".
Ces trois arguments ne résistent pas à l’analyse, en effet :
Le point de référence utilisé pour la comparaison (les années 90) est peu exigeant. Cette
décennie, post ajustement structurel, a marqué le point bas de la croissance marocaine.
Ajoutons à cela que la seule comparaison qui vaille est celle de nos progrès par rapport à
ceux de nos compétiteurs (la course au progrès se fait entre nations).
L’effet retard, s’il est acceptable jusqu’à une certaine limite, ne peut tout justifier : depuis le
temps, nous devrions être en mesure de déceler au minimum quelques signes annonciateurs,
or peu de choses laissent à penser que c’est le cas (concentration des exportations, déficit
de la balance commerciale, insuffisance des IDE...).
Si le dynamisme du tourisme est à encourager et l’investissement raisonné dans des
infrastructures utiles à développer, il n’en demeure pas moins qu’aucun argument
économique sérieux ne justifie d’en faire l’alpha et l’oméga de la croissance économique.
Quant au secteur de l’immobilier résidentiel, il s’agit là d’un secteur ne générant pas
d’externalités économiques globalement positives.
En conclusion de la première partie, il nous apparaît difficile de trouver des éléments factuels
soutenant la thèse que le Maroc possède effectivement une stratégie de développement
économique. Depuis le début des années 2000, nous n’avons pas réalisé de performances
particulièrement exceptionnelles. Nous avons bénéficié, comme beaucoup, d’une conjoncture
internationale favorable et en avons profité, mais pas mieux que nos concurrents, loin s’en
faut. Le chemin à parcourir reste long : notre croissance demeure beaucoup trop faible, et nos
indicateurs de développement humain insuffisants.
Les méta-contraintes
Pour passer à un palier de croissance supérieur, celui à même d’assurer à la prochaine génération
un niveau de vie meilleur (comparable à celui des Malais par exemple), nous devons nous
interroger sur les causes profondes (méta-contraintes) de cette croissance insuffisante. C’est ce
que nous nous attachons à identifier dans la seconde partie du rapport. Pour ce faire nous
suivons les modèles d’analyse économique dits de recherche des " déterminants profonds de
la croissance " (institutions, géographie, intégration dans l’économie mondiale). Dans le cas
du Maroc, nous laissons de côté les facteurs géographiques et d’intégration dans l’économie
mondiale et identifions deux méta-contraintes principales :
La première méta-contrainte est celle de l’économie politique du pays. Il convient tout d’abord
de reconnaître qu’il n’y pas de relation empirique entre démocratie/autocratie et croissance.
Pour le Maroc, après analyse, nous concluons que l’organisation politique est considérablement
défavorable au développement économique car le pays est bloqué dans un équilibre politique
stable de bas niveau qui ne permet de bénéficier pleinement ni des avantages économiques de
la démocratie, ni de ceux de l’autocratie (dans la mesure où l’autocratie peut avoir des avantages
économiques) :
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