La ventilation assistée est-elle nécessaire ?
Nous avons vu que la ventilation telle qu’utilisée habituellement (insufflations manuelles ou
ventilateur de transport) pendant la RCP présente des risques possiblement supérieurs à
son bénéfice dès lors qu’elle compromet le massage cardiaque23 ou qu’elle est excessive.
A côté de ces modalités conventionnelles, une partie des besoins ventilatoires peut être
assurée par l’effet des compressions thoraciques seules, voire même et/ou par les
phénomènes de gasping.34-39 La ventilation qui résulte du massage thoracique pourrait être
suffisante, au moins initialement bien que les volumes courants générés ainsi soient souvent
faibles. Des études sur des modèles animaux et chez l’homme ont montré que cette
ventilation pouvait permettre un maintien efficace des gaz du sang. L’énorme intérêt d’une
telle approche réside dans le fait qu’elle est complètement synchronisée au massage
cardiaque, qu’elle n’interrompt pas la compression thoracique et qu’elle prévient le risque de
surventilation. Toutefois, des études ont montré que cette ventilation minute produite
uniquement par les compressions thoraciques tend à diminuer après 4-10 minutes de RCP,
risquant de provoquer une insuffisance respiratoire et métabolique.34 Ceci pourrait être en
rapport avec la dégradation de la mécanique ventilatoire observée lors de la RCP prolongée.
Malgré des résultats encourageants de cette approche qui peut être optimisée par différents
systèmes, la ventilation assistée traditionnelle reste recommandée.9,22
Pour les témoins d’un arrêt cardiaque non entraînés aux gestes de premiers secours, les
centres d’appels d’urgence (112) encouragent uniquement la réalisation d’un massage
cardiaque externe chez l’adulte. En effet, la pratique du bouche-à-bouche décourage
régulièrement les témoins.40 Le massage cardiaque seul est préférable à l’absence de
réanimation et cette approche pragmatique est plus facile à expliquer aux témoins par
téléphone.41 Pour les enfants d’âge inférieur à huit ans, l’origine ventilatoire de l’arrêt
cardiaque étant la plus probable, il conviendra toujours de privilégier l’association de
manœuvres circulatoire et ventilatoire.42
Aussi, la nécessité d’une ventilation assistée est essentielle dès le début dans certains cas
comme l’asphyxie ou la noyade.
Alternatives et prospectives
Ces dernières années, plusieurs études ont testé des alternatives à la ventilation
conventionnelle pendant la RCP.
L’utilisation d’une PEP pendant le massage cardiaque semble améliorer l’oxygénation et
réduire le collapsus alvéolaire, sans générer de problèmes hémodynamiques.43,44 Malgré
ces résultats positifs, l’application d’une PEP n’est pas recommandée en raison de crainte de
conséquences physiologiques négatives, en particulier sur le retour veineux.
Dans une étude sur un modèle animal, Brochard et coll. ont comparé l’utilisation d’un
nouveau système de débit continu d’oxygène de 15 l/min (Boussignac CPR tube, Vygon,
Ecouen, France), directement mis en trachée avec une sonde et générant un faible niveau
de PEP, à la ventilation mécanique conventionnelle. Ils ont montré que l’utilisation de ce
nouveau système permettait une amélioration de la circulation pendant la RCP (pression
aortique systolique, débit carotide systolique).45
Quatre ans après, chez 95 patients, les mêmes auteurs ont comparé les effets de
l’insufflation continue à débit d’oxygène utilisant une sonde de Boussignac à une ventilation
à pression positive intermittente. Cette sonde est caractérisée par des canaux qui courent le
long de l’axe longitudinal et qui débouchent dans la lumière au niveau de son extrémité
distale. Le débit d’O2 insufflé se transforme en une pression positive permanente (jusqu’à 10
cmH2O en fonction du débit de gaz) dans les voies aériennes. Cette étude avait montré une
amélioration significative de pH, de PaO2, une meilleure élimination du CO2, moins de
traumatismes thoraciques en rapport avec le massage, mais pas de bénéfice sur la survie
par rapport à la stratégie conventionnelle.46 Ces résultats ont été confirmés par une autre
étude.47