La myopie des banquiers vue par un ophtalmo

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Hebdomadaire distribué gracieusement à tous les ménages du
Canton de Genève, de l’agglomération de Nyon et de toutes les
autres communes de la Zone économique 11 (Triangle GenèveGland-Saint Cergue). 186 504 exemplaires certifiés REMP/FRP.
Edité par Plurality Presse S.A. Paraît le lundi
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Distribution: Epsilon SA
13 juin 2011 – No 502
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La myopie des banquiers vue par un ophtalmo
Le Salon de la voyance et le Congrès d’ophtalmo se sont tenus dans notre ville à peu de temps l’un de l’autre. Belle occasion
d’examiner la bonne ou mauvaise vue de certains métiers: un médecin a consacré tout son exposé à la myopie des banquiers.
G
rosse surprise face au journaliste,
au guichet du Congrès européen
d’ophtalmologie à Palexpo: en quoi
cette spécialité médicale peut-elle intéresser le grand public? Pourtant, ça saute
aux yeux, et on ne dit pas sans raison «j'y
tiens comme à ma prunelle»: de la myopie
au glaucome… du strabisme à la cécité…
il faut soigner ses yeux. Parfois à l'œil:
Genève est un centre d’excellence en la
matière, depuis qu’Adolphe de Rothschild le
malvoyant a offert un hôpital ophtalmique à
notre ville il y a un siècle et demi. Et quand
le public ne va pas chez l’ophtalmologue, il
fréquente l’opticien: entre ces deux métiers
de la vue, celui de haute volée et celui des
rues basses, le territoire est contesté, et des
tâches réservées jusqu’ici au médecin sont
toujours plus assurés par des optométristes,
voire par des opticiens. Ce n’est pas une
mauvaise chose pour le coût de la santé, si
p o u r e n s av o i r p l u s
Les yeux voient et sont vus: les cosmétiques L'Occitane
ont donné un prix au congrès d'ophtalmologie. La famille
Rothschild a longtemps couvert une part notable des
dépenses sociales des villes qui l'hébergeaient, en particulier Francfort; à Genève, l'hôpital ophtalmique Rothschild
est devenu Auberge de Jeunesse, dans la rue du même
nom. Ce n'est donc pas eux que visait Carlo Bianchetti,
l'orateur vedette de l'article. Gérard Le Roux a écrit «Fumée
verte» sur le dollar et «Fumée rouge» sur le rouble. La
vision a une grande valeur, mais une petite solidité: attention aux boules de neige dure dans les yeux!
Voir aussi soe2011.org, swissglaucome.ch, glaucoma.ch,
mises.org (sans www), bancspublics.ch, ldqr.org, et les
articles «Iconoclasme» et «David Blunkett» sur Wikipedia,
ainsi que les mots clefs «dinosaur auction».
to ut
on pense que la clinique d’ophtalmologie
fait venir le patient une douzaine de fois,
quand le contrôle gratuit à la Journée du
glaucome se fait en deux minutes. Certes,
pour les médecins, mieux vaut trop que
trop peu d’examens, car le public est souvent aveugle face à ses taches... aveugles.
Le glaucome se découvre souvent trop
tard: «Faites-leur peur!», s’écria un professeur genevois au congrès, en parlant des
patients insouciants.
L’œil fixé sur le vide
Pourtant, l’alarme la plus sonore du congrès
fut sonnée par un expert suisse, dont
le discours fut une longue métaphore
sur... l’aveuglement de la finance. Ayant sa
propre clinique, il est bien placé pour voir
les liens entre la crise de sa trésorerie et
les mutations de la médecine. Il pense que
– comme décrit plus haut – l’opticien revu
et corrigé par des formations complémentaires va mettre l’ophtalmologue au rancart.
Mais il attribue l’étranglement financier des
services de santé au grand mensonge de
l’économie: l’émission sans frein de monnaie comme source illusoire de richesse.
Adepte d’une économie alternative libérale, il croit que le papier-monnaie et les
bons du trésor masquent une énorme
inflation – 10% au lieu des 2% officiels
– qui explique la montée de la pauvreté,
et la hausse des actifs solides. On peut
partager ou non les analyses de l’orateur et
de l’école de pensée économique dont il
s’inspire (voir annexe), mais une chose ne
peut être niée: les banques (y compris les
l’ e m p lo i
&
for matio n
•
n
o
502
•
13
j u i n
banques nationales) changent la pierre et
l'or en papier autant que l'inverse, faisant
de la croissance une opération blanche. Les
excès de la finance privée ne sont d'ailleurs
que la pointe émergée du problème, car
de tous les jeux de l’avion, le plus grand
est le budget public. Cette métaphore
ophtalmologique sur la crise financière est
certes tirée par les cheveux: cécité des banquiers, illusions d’optique des statistiques,
et poudre aux yeux des finances publiques.
Pourtant, elle vient à point nommé: qu’un
ophtalmologue risque sa réputation sur
ce parallèle audacieux montre combien la
situation économique est désespérée.
Le trésor et la carte
Et s’il fallait encore une preuve que la
finance est chose trop sérieuse pour être
laissée aux financiers, on la trouverait par
l’absurde au Salon de la voyance, qui s’est
tenu le mois précédent, aussi à Palexpo:
un voyant a dû annuler sa conférence au
dernier moment, pour cause de maladie. Si
un voyant ne peut prévoir sa maladie, un
financier peut-il gérer le trésor? Il a en tout
cas un avantage sur le voyant, et même sur
le prophète: l'erreur du voyant se voit tôt ou
tard, et Dieu est par nature celui qu'on ne
voit pas. Mais si le chiffre sur une pièce est
visible, il est son propre étalon: une thune
vaut cinq francs, mais que vaut un franc?
Pas étonnant que, de nos jours, un os de
dinosaure pèse plus que de l'or... même s'il
est encore caché à mille pieds sous terre. n
Boris Engelson
2011
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