III Le rôle des Cellules « Natural Killer » (NK) dans l`Immunité anti

III
Le rôle des Cellules « Natural Killer » (NK) dans
l’Immunité anti-pathogènes
Elie Mavoungou
Professeur d’Immunologie
Résumé
Les cellules “tueuses naturelles” ou natural killer (NK) sont des cellules lymphoïdes qui
catalysent une importante activité cytotoxique et produisent de forts taux de cytokines
pro-inflammatoires en réponse aux infections. Au cours d’une infection virale, il est
admis que la cytotoxicité des cellules NK et la production de cytokines sont induites
principalement par les monocytes/macrophages et par les cellules dendritiques. Les
ligands codant virtuellement pour les cellules NK sont actuellement en cours de
description. La production d’interféron gamma (IFNγ) provenant des cellules NK est en
outre essentielle pour le contrôle de plusieurs infections par les protozoaires responsables
de la toxoplasmose, la trypanosomiase, la leishmaniose et du paludisme.
L’activation des cellules NK par les pathogènes protozoaires est également
mobilisée par les cytokines, bien que certaines études récentes suggèrent qu’une
reconnaissance directe des parasites par les cellules NK dérivant des cellules accessoires
ainsi que la signalisation directe, vraisemblablement par l’intermédiaire des récepteurs
NK, soient nécessaires dans le cas des parasites du paludisme (Plasmodium spp.) à
stimuler efficacement ces cellules.
1. Introduction
La résistance de l’hôte contre les virus, les bactéries et les protozoaires
pathogènes dépend d’une interrelation complexe entre les canismes de l’immunité
innée et ceux de l’immunité spécifique ou acquise. En intervenant en première ligne de la
défense de l’organisme, le système de l’immunité innée contribue au contrôle des
infections aiguës par l’augmentation des réponses protectrices contre les parasites qui
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envahissent l’organisme, avant la mise en place de la riposte de l’immunité à médiation
cellulaire par les lymphocytes T et B, communément appelée : l’immunité spécifique. Les
réponses innées stimulent et modulent aussi les réponses de l’immunité spécifique. Les
cellules NK sont bien connues pour jouer un rôle clé dans ces réponses innées rapides [1].
Dans le présent article, nous relatons brièvement la biologie des cellules NK, la
structure de leurs récepteurs, et nous discutons les connaissances actuelles concernant
leur fonction, dans la mise en œuvre de l’immunité innée contre les infections pathogènes
en nous focalisons plus particulièrement sur l’infection palustre due à Plasmodium
falciparum.
2. Biologie des cellules NK
L’identification de la souche lymphocytaire ayant la capacité d’exercer une
activité cytolytique contre certaines cellules tumorales sans aucune stimulation préalable
a conduit à l’utilisation du terme « cellule tueuse naturelle » (en anglais natural killer
cells, ou cellules NK ) [2, 3].
La capacité des cellules NK à percevoir les modifications dans l’expression des
molécules du complexe majeur d’histocompatibilité de classe I (CMH I) à la surface des
cellules infectées avait érapportée il y a plusieurs décennies déjà, par Klaus Kärre et
ses collaborateurs à l’Institut Karolisnka de Stockholm. Dans leur étude, ces auteurs
avaient remarqué que des cellules tumorales de souris n’exprimant pas d’antigènes du
CMH I étaient plus facilement détruites par les cellules NK que d’autres cellules
tumorales qui exprimaient un niveau normal d’antigènes de classe I.
Il est maintenant bien connu qu’en plus de la destruction des cellules transformées
encore dites lignées cellulaires transformées [4], les cellules NK peuvent aussi jouer un
rôle dans le rejet d’allogreffes [5] et dans le contrôle d’une grande variété de pathogènes,
et plus spécialement ceux qui infectent directement les cellules hôtes [6].
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Les cellules NK sont des cellules dites grands lymphocytes granulaires ou LGL de
l’anglais « Large Granular Lymphocytes » qui dérivent de la moelle osseuse et qui chez
l’homme, sont classiquement définies par l’expression à leur surface membranaire de
l’antigène CD56 (une isoforme de la molécule d’adhésion neurale [N-CAM]). Les
cellules NK sont caractérisées également par l’absence de l’expression du marqueur des
thymocytes, l’antigène CD3, et celle des sous unités αβ et γδ du récepteur T (TCR) des
lymphocytes. L’expression d’autres molécules de surface tels le marqueur 7 des
leucocytes (Leu7 encore dénommé CD57), la chaîne β de l’interleukine 2 (IL-2 ou
CD122), et le récepteur B1 des cellules « Killer lectin like » (KLRB1 ou CD61) a été
également utilisé comme marqueur de certaines souches de cellules NK. Toutefois, ces
différentes molécules sont aussi exprimées sur certaines autres sous populations de
cellules T et des cellules NK-T. La caractérisation phénotypique des cellules NK de
souris est plus complexe. Les marqueurs les plus communément utilisés sont, la sous
unité α2 de l’intégrine (DX5 ou CD49b), l’asialo-ganglioside M1 (ASGM1) et le
récepteur P1C des cellules NK (NKR-P1C encore appelé NK1.1). Cependant, les
lymphocytes T CD4+ et T CD8+ peuvent aussi exprimer ces marqueurs [7, 8]. L’ASGM1
par exemple est exprimé par 20 à 30 % de cellules lymphocytaires naïves et par environ
90% de cellules activées [7]. Les anticorps anti-ASGM1 et anti-NK1.1 sont typiquement
utilisés pour la déplétion des cellules NK chez la souris. Cela peut aboutir par mégarde, à
la déplétion simultanée de lymphocytes T exprimant ces marqueurs. Les données des
études testant la déplétion des cellules NK chez la souris nécessitent à cet effet, une
interprétation très prudente.
Les cellules NK représentent approximativement 10 % de cellules mononuclées
du sang périphérique (PBMC), et de 0,4 à 5% de cellules mononuclées des organes
lymphoïdes secondaires [9].
Les mécanismes de cytotoxicité naturelle sont semblables à ceux utilisés par les
lymphocytes T cytotoxiques (CTL) i.e. sécrétion de la protéine formant des pores à la
surface des cellules cibles : la perforine et les protéines induisant l’apoptose : les
granzymes, et/ou l’obligation des récepteurs de mort des cellules cibles [10]. La lyse
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catalysée par les cellules NK a été démontrée dans plusieurs infections virales humaines
et chez les rongeurs [11], cependant, la signification physiologique de la cytotoxicité
naturelle au cours des infections bactériennes et parasitaires est encore matière à débat
[12, 13]. La seconde fonction effectrice majeure des cellules NK est la sécrétion de
cytokines pro-inflammatoires et de chémokines, tels le facteur activateur des
macrophages : l’IFN-γ, le facteur α de nécrose des tumeurs (TNF-α), la lymphotoxine
(LT-α), le facteur stimulant les colonies de granulocyte-monocytes (GM-CSF) et la
protéine inflammatoire des macrophages CCL3 [14, 15].
L’IFN-γ a un rôle crucial dans la résistance de l’hôte contre plusieurs infections.
Il régule plusieurs centaines de gènes associés aux fonctions du système immunitaire et
draine d’autres cellules effectrices vers le site de l’infection [16]. L’IFN-γ active les
macrophages et les neutrophiles, stimule la différenciation des lymphocytes Th1 CD4+,
augmente la présentation des antigènes par les cellules présentatrices en régulant
positivement le CMH et les molécules associées au CMH ; il induit aussi la commutation
des sous classes d’immunoglobuline G (IgG) dans les lymphocytes B, et de ce fait établit
le lien entre les deux principaux acteurs du système immunitaire notamment, l’immunité
innée et de l’immunité spécifique [16]. Désormais, la sécrétion d’IFN-γ par les cellules
NK est considérée comme ayant un rôle important dans la mobilisation de puissantes
réponses immunes contre des classes variées de pathogènes [13, 17].
Les pathones envahissants ou les antines viraux, et des protozoaires d’origine
bactérienne sont capturés par les cellules dendritiques (DCs) ou les
monocytes/macrophages qui libèrent ensuite des cytokines activatrices des cellules NK
[18-22]. LIL-2, l’IL-12, l’IL-15, l’IL-18, le TNF-α et l’IFN-α/β contribuent tous à
l’activation des cellules NK alors que l’IL-4, l’IL-10 et le TGF-β suppriment la fonction
cellulaire de ces mêmes cellules [18, 23]. L’IL-12, qui est une cytokine pro-
inflammatoire principalement produite par des cellules présentatrices d’antigènes
professionnelles, i.e. les macrophages et les cellules dendritiques, est un puissant
inducteur de l’activité cytotoxique des cellules NK, et de la sécrétion d’IFN-γ qui, avec
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l’IL-18 jouent un rôle crucial dans la mobilisation des réponses immunes catalysées par
les cellules NK [24, 25].
3. Les récepteurs des cellules NK
Alors que la stimulation par les cytokines contribue de façon significative à leur
activation, les cellules NK ont aussi la capacité de détecter directement les cellules
transformées ou les cellules infectées et de répondre immédiatement à de tels stimuli.
L’engagement d’un répertoire élaboré de ligands via un répertoire complexe similaire de
récepteurs de surface permet aux cellules NK de différencier les cellules hôtes normales
des cellules anormales potentiellement dangereuses et cela sans immunisation préalable.
Une fine balance des signaux inhibiteurs et stimulateurs est maintenue en association
avec l’état d’activation des cellules NK [26].
Un aspect de ce processus est la reconnaissance de la perte de soi, « missing-
self », proposé pour la première fois par Klaus Kärre dans les années 1980. Ce processus
par lequel les cellules NK scrutent la surface cellulaire des cellules cibles potentielles, et
s’activent si les cellules cibles ne peuvent pas fournir des signaux suffisamment forts en
retour [27]. Il est maintenant bien compris que cela serait due au fait que, dans les
conditions physiologiques normales, les cellules NK ont besoin de recevoir un signal
négatif fourni par l’engagement des récepteurs inhibiteurs spécifiques au CMH de classe
I en vue de prévenir leur activation [26, 29]. La régulation gative ou la perte des
molécules du CMH de classe I à la surface des cellules cibles peut rompre la balance des
signaux inhibiteurs et activateurs en faveur de la mobilisation de l’activation des cellules
NK.
Plus récemment, il a été reconnu que les cellules NK reconnaîtraient aussi les
modifications du soi, « altered-self » pour lesquelles les cellules NK peuvent aussi être
activées par les cellules exprimant pourtant un complément de CMH de classe I normal
s’il est suffisamment bien engagé dans les récepteurs d’activation NK par les néo
antigènes. Ces modifications peuvent être induites par le stress, la transformation
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