Facteurs influençant la performance des systèmes de

La qualité de l’air intérieur dans les grands
bâtiments commerciaux et résidentiels est
toujours une priorité pour les propriétaires,
les concepteurs, les gestionnaires et les
occupants. Les grands bâtiments, qui ne
sont pas couverts dans la partie 9 du Code
national du bâtiment, constituent à ce sujet
un défi plus important que les maisons et
les petits bâtiments. Défi d’autant plus
grand aujourd’hui que l’on utilise dans ces
bâtiments de nouveaux matériaux, meubles,
produits et procédés, sources potentielles
de contamination.
Il existe trois stratégies possibles pour
obtenir une qualité de l’air intérieur
acceptable : la ventilation, le contrôle à la
source et la filtration/épuration de l’air.
Suivant le bâtiment et les caractéristiques
spécifiques de son emplacement, ces
différentes stratégies peuvent être mises
en oeuvre de façon individuelle ou en
combinaison.
La ventilation consiste à fournir un
apport d’air extérieur dans un espace fermé
et à expulser l’air vicié de cet espace. Cette
technique permet de contrôler la qualité de
l’air intérieur en le diluant d’une part avec
de l’air extérieur moins contaminé, et en
retirant d’autre part les agents contaminants
intérieurs avec l’air évacué.
Le contrôle à la source fait référence à
l’utilisation de matériaux de construction et
de meubles écologiques (du bois naturel par
exemple), ainsi que des revêtements de sol,
peintures, adhésifs et produits de nettoyage
à faible taux d’émissivité. La fonction
principale du contrôle à la source est de
conserver le niveau de contamination de
l’air intérieur aussi bas que possible en
réduisant l’utilisation de matériaux et de
produits susceptibles d’émanations gazeuses
(ex. : composés chimiques émissifs).
L’épuration de l’air consiste à appliquer
des techniques de filtration pour supprimer
les agents contaminants de l’air ventilé
(air extérieur) et de l’air intérieur. Elle est
essentielle pour les bâtiments situés dans les
centres urbains ou à proximité d’installations
industrielles pour lesquels la qualité de
l’air extérieur est parfois pire que celle de
l’air intérieur.
La stratégie la plus souvent utilisée et,
dans bien des cas, la seule possible pour les
exploitants d’immeubles est la ventilation.
Une ventilation mécanique coûte cher car il
faut chauffer l’air extérieur en hiver et le
refroidir en été. Pour faire des économies
d’énergie, le système de ventilation doit
être le plus efficace possible. C’est là où
plusieurs facteurs interviennent.
Facteurs influençant la
performance des systèmes de
ventilation dans les grands bâtiments
par C.Y. Shaw
Cet article présente une analyse des résultats de la recherche menée
par l’IRC sur certains facteurs clés qui ont une incidence sur la performance
des systèmes de ventilation installés dans les grands bâtiments. Il traite
des effets de ces facteurs et aboutit sur des lignes directrices pour que ces
systèmes fonctionnent efficacement.
Solution constructive no33
2
Performance des
systèmes de ventilation et
consommation d’énergie
Les facteurs principaux ayant une
incidence sur la performance et
l’efficacité énergétique d’un
système de ventilation sont les
suivants :
Distribution de l’air
Fuite d’air
Évacuation locale
Distribution de l’air
Idéalement, toutes les parties occupées
dans un bâtiment devraient être pourvues
d’une ventilation appropriée. Ce n’est pas
toujours le cas, notamment dans les bâtiments
résidentiels, comme le montre une étude
menée par l’IRC il y a quelques années dans
un immeuble d’habitation de cinq étages.
L’air ventilé dans l’immeuble alimentait
les couloirs. Le concept était le suivant :
la ventilation de chacun des logements se
faisait grâce à la pressurisation des couloirs.
Des ventilateurs d’extraction installés dans
la salle de bains et la cuisine de chaque
logement facilitaient l’approvisionnement
d’air ventilé en diminuant les pressions
internes.
Outre les ventilateurs, les vents et/ou
la température agissent sur les pressions
régnant dans les logements. Les vents qui
soufflent autour et sur un immeuble
entraînent des variations de pression autour
de ce dernier. Les pressions positives se
manifestant sur le côté exposé au vent
augmentent les pressions des logements
situés sur ce même côté de l’immeuble,
tandis que les pressions négatives du côté
abrité diminuent celles des logements du
côté en question. Les différences de
température entre l’intérieur et l’extérieur,
et donc les différences de densité de l’air,
entraînent également des variations de
pression de part et d’autre de l’enveloppe
du bâtiment. C’est ce que l’on appelle l’effet
de cheminée. Lorsque la température
intérieure est supérieure à la température
extérieure, les pressions dans les appartements
augmentent aux étages inférieurs et diminuent
aux étages supérieurs. Les changements de
pression dans les logements à cause des vents,
de la température ou des deux peuvent
avoir des conséquences importantes sur le
mouvement de l’air ventilé.
Cette étude fut conduite en hiver afin
d’évaluer les conséquences maximales de
l’effet de cheminée à l’aide de la méthode
du gaz de dépistage, laquelle requiert
l’injection d’une petite quantité de gaz, SF6,
inoffensif dans la conduite d’amenée.
Des échantillons d’air ont été pris à six
endroits, à chaque étage, pour
mesurer les concentrations de gaz
de dépistage (figure 1). Toute
détection de gaz aux endroits de
prélèvement prouvait que l’air du
système de ventilation arrivait
bien jusque là.
Immédiatement après l’injection
du gaz de dépistage dans le
système de ventilation, les
concentrations ont été relevées
dans cinq des six stations
d’échantillonnage (figure 2). La
concentration était plus élevée
aux logements 208 et 205, suivis
par le 211. Peu ou pas de gaz ne
fut relevé au logement 202. Ces
faits tendent à prouver que les
logements situés d’un côté du
Figure 1. Plan d’étage type
Figure 2. Distribution de l’air extérieur au deuxième étage
(conditions hivernales)
3
couloir étaient beaucoup plus ventilés que
prévu dans la conception du bâtiment. Les
logements situés de l’autre côté (représen-
tés par le 202) ont été peu ou pas ventilés
car les pressions étaient assez élevées pour
empêcher l’air d’entrer par le couloir.
Il semble donc que ces logements ne
bénéficiaient d’une ventilation que par le
biais des fuites d’air (voir discussion
ci-après). Comme l’air ventilé doit être
préchauffé en hiver, les logements de ce
type demandent davantage d’énergie pour
chauffer ces fuites d’air. Leurs occupants,
confrontés à des courants d’air froid,
seraient obligés pour leur confort de régler
le thermostat à une température plus élevée
et donc d’augmenter leur consommation
d’énergie.
Fuites d’air
Une fuite d’air est une infiltration d’air au
travers de l’enveloppe du bâtiment. Sa
quantité dépend du niveau d’étanchéité à
l’air de l’enveloppe du bâtiment et de la
différence de pression de part et d’autre de
cette enveloppe, créée principalement par
les vents et les différences de température
entre l’intérieur et l’extérieur.
Les bâtiments présentant des fuites d’air
coûtent plus cher à chauffer et sont plus
difficiles à ventiler de façon adéquate que
les bâtiments relativement étanches à l’air.
La figure 3 montre des relevés d’étanchéité
à l’air effectués il y environ 25 ans dans
différents types de bâtiments, dont huit
immeubles de bureaux. Cinq d’entre eux ont
été à nouveau testés 20 ans plus tard afin
de déterminer si les valeurs de l’étanchéité
à l’air avaient changé. Un de ces bâtiments
a présenté une augmentation de 40 % de
son étanchéité à l’air, due à de récentes
rénovations (figure 4). Les chiffres enregistrés
en matière de consommation d’énergie
pendant ces trois mêmes mois d’hiver, avant
et après les rénovations, ont montré que
ces 40 % d’amélioration de l’étanchéité à
l’air se sont traduits par une économie des
dépenses d’énergie de 11 %. Ces données
prouvent que les concepteurs et les proprié-
taires tirent un avantage indéniable à
connaître le niveau réel d’étanchéité à l’air
de leur bâtiment.
Les courants d’air froid sont généralement
des signes de fuites d’air. Le cas échéant,
une obturation des fissures et des ouver-
tures dans les murs extérieurs et autour
des fenêtres améliorera l’étanchéité à l’air
du bâtiment.
Source de contamination/Ventilation locale
Si des sources importantes de contamination
sont présentes dans un bâtiment et que les
occupants s’en plaignent, le gérant du
bâtiment en question peut être enclin à
augmenter le taux de ventilation de façon
à accélérer le processus de dilution. Une
étude de l’IRC a prouvé qu’une telle
Figure 4. Mesures de l’étanchéité à l’air dans un immeuble
de bureaux après rénovations
Figure 3. Mesures de l’étanchéité à l’air dans
différents types de bâtiments
Solution constructive no33
stratégie est rarement efficace, même
lorsque la consommation d’énergie ne
représente pas une préoccupation majeure.
L’étude s’est déroulée dans un local
abritant plusieurs photocopieuses, local
dont les employés se plaignaient de la piètre
qualité de l’air intérieur. Pour cette étude,
des échantillons d’air furent prélevés au
cours de la journée. Le résultats ont montré
que deux pics importants, indiquant de
hautes concentrations de composés organiques
volatils (COV), se produisaient à 9 h et à
14 h, correspondant exactement aux
périodes où l’on faisait le plus fonctionner
les photocopieuses (voir figure 5).
Pour déterminer si une ventilation seule
pouvait éliminer ce problème de pollution,
le taux de renouvellement d’air par heure
dans le bâtiment fut multiplié par 6,
passant de 0,5 à 3. Cette action permit de
diminuer le niveau de COV de 50 %, le
faisant passer de 90 p.p.106à 45 p.p.106
(figure 6). Cependant, même réduit, ce niveau
dépassait largement les concentrations entre
0,1 et 5 mg/m3trouvées dans 200 échantillons
prélevés par les chercheurs de l’IRC dans
les immeubles résidentiels et les immeubles
de bureaux canadiens. L’étude a donc
prouvé qu’une ventilation seule ne permet
pas d’obtenir une QAI acceptable dès lors
qu’une source de contamination est
présente. Il est nécessaire de supprimer les
agents contaminants à la source par une
évacuation locale et d’utiliser la ventilation
pour finir d’améliorer la qualité de l’air.
Dans le cas d’une source de contamination
identifiable telle qu’une photocopieuse, le
conduit d’évacuation de la photocopieuse
doit être directement raccordé à l’extérieur.
Contrôle de ventilation
éconergétique
L’American Society of Heating, Refrigerating,
and Air-Conditioning Engineers (ASHRAE)
recommande des taux de renouvellement
d’air dans les bâtiments en fonction du
nombre maximum d’occupants. Pour des
bâtiments qui ne sont généralement occupés
que pendant certaines périodes, des
bureaux, par exemple, qui ne sont occupés
que pendant la journée, le taux de
renouvellement de l’air pourrait être
contrôlé en fonction du nombre d’occupants
à un moment donné. Un système de
ventilation contrôlé à la demande, avec le
CO2généré par les occupants pour index
de contrôle, est une des méthodes qui
pourrait être utilisée dans les immeubles
de bureaux.
Ventilation contrôlée à la demande en
fonction du niveau de CO2
Les études menées dans les immeubles de
bureaux ont prouvé que les concentrations
de CO2augmentent et diminuent en
fonction du nombre d’occupants. Ainsi, il
devrait être possible de contrôler les taux
de renouvellement d’air en fonction des
mesures de concentration en CO2.
Pour que cette méthode soit applicable
comme méthode de contrôle du taux de
renouvellement d’air dans un bâtiment,
les trois conditions suivantes doivent être
respectées :
La concentration en CO2doit être
proportionnelle au nombre réel des
occupants à un moment donné.
La concentration en CO2doit être la
même à tous les étages et les jaugeurs
de CO2doivent pouvoir être placés
facilement aux endroits représentatifs.
La concentration en CO2doit être pro-
portionnelle au taux de renouvellement
d’air du bâtiment.
Pour vérifier ces conditions, l’IRC a mené
une étude dans une tour de bureaux de
22 étages dont le volume intérieur
représentait approximativement 113 700 m3.
4Solution constructive no33
Figure 6. Capacité de dilution de l’air ventilé
Figure 5. Concentration totale de COV dans un
local abritant des photocopieuses
Le bâtiment était équipé de
sept systèmes de soufflage
d’air à volume constant et
deux systèmes de reprise d’air.
Quatre des sept systèmes de
soufflage approvisionnaient les parties
intérieures des étages est et ouest. Les trois
autres systèmes approvisionnaient le
périmètre sud, l’est et la moitié est du
périmètre nord ainsi que l’ouest et la
moitié ouest du périmètre nord.
Les résultats illustrés dans la figure 7
confirment que la concentration en CO2
varie en fonction du nombre des occupants.
Elle est faible au cours de la nuit, commence
à monter le matin lors de l’arrivée des
employés et atteint son apogée aux
environs de midi. Une baisse est notable à
l’heure du déjeuner, puis la concentration
remonte au moment où les employés
reprennent le travail pour atteindre à
nouveau un pic vers 16 h.
Au fur et à mesure du départ
des employés, la concentration
chute de façon continue pour
atteindre son niveau nocturne.
Sur tous les étages testés, la
concentration de CO2mesurée
à différents endroits corres-
pondait étroitement avec la
concentration mesurée au puits
de reprise d’air du même étage,
ce qui laisse penser que cette
dernière mesure serait une
bonne indication de la
concentration de CO2pour
l’étage entier.
Ensuite, une fois prouvé
que les concentrations en CO2
mesurées aux bouches de
reprise de chaque étage étaient
les mêmes d’un étage à l’autre,
des mesures furent effectuées à
la partie supérieure des deux
puits de reprise principaux. La figure 8
illustre comment les mesures en haut des
puits concordent (à 2 % près) avec les
mesures effectuées aux bouches de reprise
de chaque étage, et montre donc que ces
mesures sont représentatives des concen-
trations en CO2dans l’ensemble du
bâtiment. Les résultats indiquent que les
parties supérieures des puits de reprise
sont de bons endroits pour placer les
jaugeurs de CO2.
Enfin, la dernière phase de cette étude
consistait à définir la relation entre la
concentration mesurée de CO2et le taux de
renouvellement d’air. La figure 9 indique
les concentrations de CO2journalières
5
Figure 7. Concentrations types de CO2un jour de
semaine, à différentes heures de la journée
Figure 8. Comparaison entre les concentrations de CO2relevées
à la partie supérieure des puits de reprise et celles mesurées aux
bouches de reprise de chaque étage
Figure 9. Comparaison entre les concentrations de CO2
journalières maximales et moyennes à différents taux de
renouvellement d’air
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