4
Cartographie de l’occupation des sols à
partir d’images optiques
Jordi Inglada
CESBIO, 18 av. Edouard Belin, bpi 2801, 31401 Toulouse cedex 9, France
4.1. Introduction
Ce chapitre traite dela production de cartes d’occupation des sols à partir
d’imagerie optique. Après une introduction au sujet, les différents types de données
utilisées sont présentés. Les types d’imagerie sont décrits en termes de leurs
résolutions spatiale, spectrale et temporelle. Outre les données de référence que la
cartographie d’occupation du sol requiert pour l’étalonnage des méthodes, les
approches de traitement qui permettent de transformer les pixels des images en
information cartographique puis l’étape incontournable de leur validation
thématique et spatiale sont explicitées. Au cœur de ce chapitre, se placent les
méthodes d’extraction de primitives et les algorithmes de classification les plus
fréquents. Quelques exemples d’application sont illustrés par les cartes d’occupation
des sols qui en ont été produites.
4.1.1.La cartographie par imagerie de télédétection
La production de cartes a été, de longue date, l‘objectif premier des techniques
de télédétection, dès ses débuts photographiques par des moyens aéroportés, ce qui
4 Observation des surfaces continentales par télédétection : Agriculture et Forêt
sollicitait l’interprétation visuelle des photographies aériennes par des cartographes
aguerris [GIR 10]. L’avènement des satellites d’observation de la Terre, avec leur
revisite systématique et leur couverture de grandes surfaces, a permis d’envisager la
production systématique d’images interprétées, voire la production opérationnelle de
cartes.
Il convient de commencer par définir ce qu’est une carte. L’objectif d’une carte
est de permettre une compréhension synthétique et pertinente d’un espace
géographique. La carte constitue ainsi une représentation concise (donc simplifiée),
tout autant qu’efficace (contenant les éléments essentiels et en respectant les règles
de sémiologie graphique) de la nature physique, politique ou sociale de l’espace
choisi.
L’imagerie de télédétection permet d’appréhender des objets physiques,
biologiques et morphologiques qui résultent de facteurs physiques tout autant
qu’humains. Ces objets sont appréhendés par l’analyse de l’occupation des sols qui
désigne la couverture physique (y compris dans ses aspects biologiques, notamment
la végétation) de la surface des terres émergées, décrite aussi en termes de types
d’usages des terres par les sociétés humaines. On parlera aussi de paysage, à travers
lequel on visera à identifier et caractériser des types homogènes de milieux. On
visera ainsi à distinguer les zones artificialisées (bâti, infrastructures), les zones
agricoles, les forêts, les landes, les zones humides, etc.
A la différence des cartes topographiques, qui servent à se repérer dans l’espace,
tout en délivrant certaines de ces informations sur les usages des sols, l’enjeu
principal des cartes d’occupation des sols est de délimiter, d’inventorier et de
comprendre les évolutions et les tendances des typologies de zones au cours du
temps (le changement de forêt en zone artificialisée, par exemple) afin d’en
expliquer les déterminismes et d’en prévoir le devenir. Les cartes d’occupation des
sols constituent donc un outil essentiel pour l’aménagement du territoire ou
l’analyse du changement climatique. Elles sont aussi utilisées en entrée de modèles
décrivant les processus environnementaux (hydrologie, climat, cycles de l’eau et du
carbone).
4.1.2.Occupation et utilisation des sols
Le terme "occupation des sols" englobe souvent 2 aspects différents:
l’occupation proprement dite c’est-à-dire la présence d’objets physiques ou
biologiques identifiés et l’utilisation des sols, c’est-à-dire les usages et les fonctions
de ces objets.
D’un côté, dans certaines applications, on s’intéresse à la vue physionomique du
terrain. On parle alors d’occupation des sols (land cover en anglais). On vise ici à
distinguer les éléments qui forment la structure du paysage sans essayer d’en
Cartographie de l’occupation des sols à partir d’images optiques
identifier la fonction. Dans ce cas, par exemple, une zone agricole ne sera pas
identifiée comme telle, mais plutôt en tant que végétation herbacée ou sol nu
dépendant de son état au moment de la production de la carte.
De l’autre, il est souvent nécessaire d’adopter un point de vue anthropique sur le
paysage, afin de prendre en compte la fonction ou le type d’usage qui est fait de
l’espace. On parle alors d’utilisation des sols (land use en anglais). Dans ces cas,
même si la couverture physique est la même, on souhaitera distinguer par exemple
une zone industrielle d’une zone commerciale, ou un terrain de sport d’une prairie.
Cette distinction, qui est très importante du point de vue de l’utilisateur des
cartes, n’a pas beaucoup d’incidence sur les méthodologies employées pour leur
production. Nous la laisserons donc de côté dans la suite du chapitre.
4.1.3. Les nomenclatures
La légende d’une carte d’occupation des sols est la liste des catégories
cartographiées (classes thématiques). La légende est spécifique à une échelle de
restitution cartographique au format papier (rapport entre une distance sur la carte et
la distance réelle sur le terrain): la classe « bâtiment » ne peut apparaître qu’à des
échelles très fines (c’est-à-dire grandes, telles que 1/10000), mais la classe « zone
urbaine » a moins de sens à ces mêmes échelles. Les objets du paysage peuvent
donc être regroupés selon des classes différentes en fonction de l’application, de
l’échelle, de l’emprise géographique de la carte, des données (imagerie) utilisées
pour la produire mais aussi du thématicien producteur de la carte, de son champ
d’expertise, du budget et du temps alloués pour collecter des références de terrain ou
encore des utilisateurs ou du commanditaire de la carte [LEG 96]. Cependant, la
réalité physique est indépendante de la carte et elle peut être organisée en une
nomenclature ou classification. Ainsi, tandis que la gende de la carte est
déterminée par l’échelle et le type de donnée utilisée,la nomenclature est
indépendante de l’échelle et des ressources utilisées pour produire la carte.
La plupart des nomenclatures sont hiérarchiques, ce qui leur permet d’être
thématiquement exhaustives, comme d’en dériver des légendes spécifiques de façon
cohérente. Ces hiérarchies de classes peuvent être constituées a priori ou a
posteriori. On parle de nomenclature a priori quand on part de concepts abstraits
que l’on détaille au fur et à mesure que l’on descend dans la hiérarchie des classes.
Dans le cas a posteriori, on part de classes concrètes que l’on regroupe de façon
ascendante. Le tableau 4.Error! Reference source not found. présente un exemple
de nomenclature hiérarchique. A partir de cette nomenclature, on peut définir une
légende pour une carte en choisissant le niveau de détail souhaité pour chaque
branche de la hiérarchie. Par exemple, on pourrait choisir une hiérarchie simplifiée
pour des applications forestières (Tableau 4.2).
4 Observation des surfaces continentales par télédétection : Agriculture et Forêt
Niveau dans la hiérarchie
1
2
3
4
5
6
7
Végétation
Terrestre
Agricole
Annuelle
Hiver
B,
Orge
Colza
E
Maïs
Tournesol
Riz
Mixte
Autres céréales
Autres oléagineux
Protéagineux
Semences
Légumineuses
Fourrage
Légumes fleurs
Pluriannuelle
Gel
Prairies temporaires
Canne à sucre
Pérenne
herbacée
Prairies
ligneuse
Vergers
Vignes
Fruits à coque
Oliviers
Autre arboriculture
Semi
naturel
Estives landes
Forêts
Naturel
Caducs
Hêtre
Chêne caduc
Autres feuillus
Persistants
Résineux
Pin sylvestre
Autres pins
Sapin pectine
Autres résineux
Feuillus
Chêne persistant
Mixtes
Ligneux bas
Pelouses
Aquatique
Non
végétation
terrestre
Naturelle
Surfaces
Minérales
Artificielle
Bâti
Routes
Aquatique
Eau
Cours d’eau
Eau libre
Neige
Glace
Tableau 4.1.Exemple de nomenclature hiérarchique.
Cartographie de l’occupation des sols à partir d’images optiques
Terrestre
Agricole
Semi naturel
Naturel
Forêts
Caducs
Hêtre
Chêne caduc
Autres feuillus
Persistants
Résineux
Pin sylvestre
Autres pins
Sapin pectine
Autres résineux
Feuillus
Chêne persistant
Mixtes
Ligneux bas
Pelouses
Aquatique
Tableau 4.2.Exemple de hiérarchie de classes simplifiée.
Cette hiérarchie peut ensuite être aplatie pour élaborer la légende de la carte en
choisissant le niveau le plus détaillé pour chaque branche de la nomenclature:
1. non forêt
2. hêtre
3. chêne caduc
4. autres feuillus
5. pin sylvestre
6. autres pins
7. sapin pectiné
8. autres résineux
9. chêne persistant
10. forêts mixtes
Un des problèmes fréquemment rencontrés par les utilisateurs de cartes
d’occupation des sols est l’impossibilité de comparer facilement des cartes utilisant
des nomenclatures différentes. Afin d’améliorer cette situation, des nomenclatures
standardisées ont été proposées. En Europe, la nomenclature Corine Land-Cover a
été conçue en 1985. Elle propose une nomenclature hiérarchisée en 3 niveaux (5
1 / 31 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !