BULLETIN
Technologie, média et
télécommunications
1
VANCOUVER CALGARY TORONTO OTTAWA MONTRÉAL QUÉBEC LONDRES PARIS JOHANNESBURG
Jeudi 28 juin 2012
La guerre des marques dans le cyberespace
Par : Roger Loosley, Sharmela Thevarajaha, Pooja Patel
Bon nombre de sociétés connaissent la valeur de leurs marques, laquelle figure souvent dans leurs bilans, d’où l’importance de
maintenir le caractère distinctif de leurs marques pour assurer leur succès à long terme. Sinon, les consommateurs pourraient à la
longue confondre un produit ou un service d’un concurrent avec celui de la société, ce qui pourrait entraîner une réduction des ventes
pour la société. Cette situation peut s’aggraver lorsque la qualité du produit d’un concurrent est inférieure à celle de la société, causant
ainsi des dommages à la marque, une perte de clientèle et une atteinte à la réputation de la société par ricochet.
Dans le contexte des supermarchés, les clients sont habitués aux produits de « marque maison » qui sont très semblables aux articles
de marque et qui entraînent très peu de confusion. La présentation de la marque maison montre la plupart du temps uniquement
l’article de marque auquel elle souhaite se substituer. Dans le contexte d’une technologie en rapide évolution et des moyens de
communications en apparence illimités, les consommateurs en ligne sont exposés à une myriade de produits, dont aucun ne sera
nouveau pendant longtemps, et faire une distinction parmi les produits et les producteurs en ligne pourrait être plus difficile qu’au
supermarché. Par conséquent, les consommateurs se tournent vers des marques pour se fier à la qualité d’un produit, au moyen de
caractéristiques telles que l’origine, la qualité, le prix ou la nouveauté et utilisent souvent des noms de marques pour leurs recherches
sur Internet.
À mesure que la « guerre des marques » se déplace des tablettes des supermarchés vers le cyberespace, les « règles
d’engagement » existantes doivent être redéfinies. L’affaire récente de Interflora c. Marks and Spencer Plc[1] a fait ressortir cet enjeu
et a démontré qu’au moment de faire la publicité d’un produit, les sociétés ne doivent pas tirer un avantage indu d’autres marques ni
les ternir.
L’affaire Marks & Spencer
Interflora, réseau de livraison de fleurs, a poursuivi Marks and Spencer Plc (« M&S ») pour contrefaçon de marque de commerce, en
invoquant l’enregistrement de diverses maques de commerce pour INTERFLORA portant sur la livraison de fleurs et d’autres services.
M&S a acheté plusieurs Adwords de Google pour Interflora, plusieurs combinaisons d’INTERFLORA, les noms de domaines
d’Interflora, des URL et des variantes proches d’Interflora. Lorsqu’un internaute tape INTERFLORA ou des variantes dans le moteur de
recherche Google, un lien commandité vers une annonce pour le service de livraison de fleurs M&S apparaît. Toutefois, les annonces
de M&S n’affichent pas le nom d’INTERFLORA.
La High Court a soumis des questions à la Cour européenne de justice (« CEJ ») relativement à un certain nombre de points
concernant l’utilisation par un concurrent, dans le cadre d’un service de référencement sur Internet, de mots clés identiques à une
marque de commerce, lorsque la permission d’utiliser la marque de commerce n’avait pas été donnée par son titulaire.
Pour la question de la contrefaçon en vertu de l’alinéa 5(1)a) et de l’alinéa 9(1)a) de la Directive sur les marques de commerce
(89/104/CEE, remplacée depuis lors par la directive consolidée 2008/95/CE) au moyen de l’utilisation de marques de commerce en
tant que mots clés dans la publicité, la CEJ a formulé les observations suivantes :
Atteinte à la fonction d’indication d’origine
La CEJ a estimé que l’élément déterminant était de savoir si un internaute normalement informé et raisonnablement attentif était censé
savoir, compte tenu de la connaissance générale du marché, que le service de livraison de fleurs M&S ne faisait pas partie du réseau
Interflora mais qu’il était plutôt en concurrence avec lui. Si cela ne peut être établi, il devient alors une question de faits de déterminer
si la publicité de M&S permettait à l’internaute de savoir que M&S ne faisait pas partie du réseau Interflora. La CEJ a jugé qu’étant
donné que le réseau Interflora était composé de plusieurs détaillants de taille et de profil commercial différents, il pouvait être difficile
pour un internaute de conclure, sans l’aide de la publicité, si M&S faisait partie ou non du réseau Interflora.
Atteinte à la fonction de publicité
En ce qui concerne la fonction de publicité de la marque de commerce, M&S avait clairement choisi le mot clé INTERFLORA afin de
tirer profit de la marque de commerce d’Interflora. Toutefois, la CEJ n’a pas jugé que cela constituait un motif suffisant pour établir que