ANNÉE 5757/1997
DOSSIER SPECIAL
La Foi du Rav Kook
EDITO
2
ete 1997
Vouloir faire connaître la pensée du Rav Abraham Itshak
Ha-Cohen Kook au public francophone est un pari audacieux
que nous avons décidé de relever. En effet, alors que d’autres
pensées sont très bien diffusées au sein de notre communauté,
il devenait plus que nécessaire de combler cette lacune et ce,
à plus d’un titre.
En premier lieu, cet enseignement est d’une richesse qui trouve son inspiration dans
la tradition millénaire des grands maîtres qui ont marqué l’histoire du peuple juif. Ceci
ne diminue en rien l’exceptionnelle modernité de cette philosophie profondément
ancrée dans la foi d’Israël et à l’écoute de l’évolution de son histoire, de celle des
autres nations.
De plus l’enseignement du Rav Kook a suscité une formidable
impulsion religieuse au sein des pionniers œuvrant pour la renaissance
de l’Etat d’Israël, œuvre dont nous savourons aujourd’hui encore les
fruits.
Enfin, mais cette liste pourrait s’étendre à l’infini, nous ne pou-
vions pas ne pas souligner l’esprit d’ouverture et de tolérence envers
toutes les composantes de l’assemblée d’Israël et des peuples qui carac-
térisait essentiellement le Rav Kook.
Le Rav Kook écrivait : “Les justes purs, ils ne se lamentent pas sur
l’impiété, mais ils ajoutent de la justice; ils ne se lamentent pas sur
l’athéisme, mais ils ajoutent de la foi; ils ne se lamentent pas sur l’igno-
rance, mais ils ajoutent de la connaissance”. C’est dans cet esprit de
dévouement et d’amour de la Torah qu’il œuvra toute sa vie, sans cher-
cher à créer une nouvelle idéologie ou une secte particulière au sein du
peuple juif, mais dans le seul souci de faire converger toutes les bonnes
volontés vers la rédemption finale d’Israël et du monde : “Toute action
qui a pour but l’édification ou l’amélioration de ce qui existe en Erets
Israël est chère à mon cœur... Je me tiens prêt à aider à résoudre les
conflits... afin de calmer les cœurs dans la paix et la fraternité” (Iggarot
Hareya II, p. 29).
Dans l’espoir de participer autant que faire se peut à cette “répa-
ration du monde” par la divulgation de l’enseignement complexe et éclairé du Rav
Kook, OROT s’adresse à tous les publics, sans vouloir imposer aucun dogme ni aucu-
ne idéologie, mais surtout dans le désir de sensibiliser ceux qui voudront bien l’être à
la profondeur et à la beauté des liens qui unissent Dieu, la Torah, Israël et le monde.
C’est au travers de ses propres écrits et de ceux de ses nombreux disciples, ainsi
qu’au travers des enseignements d’autres grands maîtres, qu’OROT proposera
dans chaque bulletin d’aborder la philosophie du Rav Kook.
Nous attendons les remarques et les suggestions de tous ceux que ces lectures auront interpellés.
Dan KLAJMIC
C,
hers lecteurs, chères lectrices
Ce numéro est dédié à la mémoire de :
Rav Léon ASHKENAZI (Manitou) ZTS”L
SOMMAIRE
LA CHRONIQUE DU RABBIN A. BLUM 3
RAV A.I HACOHEN KOOK 4
LEDOSSIER 6
RAV KOOK ET E. LEVINAS 6
OROT HA-TEHIYAH 11
L
ETTRES DE FEU 12
OUVERTURES 16
LEFRUIT ET LARBRE 17
DOSSIER À VENIR 18
REVUE DE PRESSE 19
BIOGRAPHIE 20
OROT
ETUDIONS LABIBLE
Réaffirmer l’importance de la Bible
dans la vie juive peut paraître inutile.
Et pourtant dans les centaines de
synagogues de la région parisienne,
dans les dizaines de centres communau-
taires et cercles d’études en dehors de la
Paracha de la semaine, combien y-a-t-il
aujourd’hui de cours réguliers portant
sur des textes bibliques ?
Depuis la dispari-
tion du Professeur
André Neher (1914-
1988) qui depuis
1946 avait publié
une vingtaine de
livres et plus de 500
articles, le plus sou-
vent en rapport
avec la Bible, très
rares sont les
auteurs juifs diffu-
sant aujourd’hui en
France des leçons sur la Bible.
Comment en est-on venu à une situa-
tion aussi regrettable ? Peut-on y remé-
dier ? Quels sont néanmoins les
ouvrages récents concernant la Bible
écrits par des auteurs juifs en français ?
Quelle traduction de la Bible, quelle
introduction faut-il utiliser ?
Voilà quelques questions dont nous
laissons les réponses en suspens pour
une prochaine chronique. A.B.
Légendes
(1) Voir par exemple l’ouvrage de Rav Avraham
Remez sur le Livre de Josué (Jérusalem 5755).
(2) La Guemara Meguilla, traduite par le Grand-
Rabbin Israël Salzer, Keren Ha-sefer, Colbo, Paris
1978, p. 74 voir note 30.
(3) Chabbat 31a.
(4) Rabbénou Nissim.
(5) Voir Choul’hane Aroukh, Yoré Déa, Chap. 246.
(6) L’entretien infini, Gallimard, Paris 1969,
pp. 574-5, cité par Lionel Cohn Oui... je lis la
Bible, Jérusalem 1976, p. 33.
avenir lointain, quasi-mythique. Il s’agit
de toutes les générations de l’époque
post-biblique.
Le Rabbin babylonien Rava énumérant
les questions qui seront posées à l’hom-
me au moment de comparaître au
Jugement (relatif à tout son comporte-
ment durant sa carrière terrestre) men-
tionne Tsipita Li-Yechoua, as-tu vécu
dans l’espoir de la délivrance ? (3).
Rachi explique : il s’agit des paroles
des prophètes.
Et le Ran (4) précise : as-tu espéré
que se réalisent en ton temps les paroles
des prophètes?
Il est donc évident qu’il faut étudier
les textes prophétiques pour en com-
prendre les significations. Du moins au
début de son apprentissage, chacun
doit-il consacrer un tiers de son temps à
l’étude des vingt quatre livres de la
Bible (5).
Ne serait-ce qu’en tant que clef de
l’Histoire, le texte biblique s’impose
donc à nous pour que nous nous effor-
cions d’en saisir les profondeurs.
Un auteur non-juif contemporain
Maurice Blanchot (6) a excellemment
exprimé ce qui fait la spécificité du
message biblique :
“S’il y a un monde où, cherchant la
vérité et des règles de vie, ce que l’on
rencontre, ce n’est pas le monde, c’est
un livre, le mystère et le commande-
ment d’un livre, c’est bien le judaïsme,
là où s’affirme, au commencement de
tout, la puissance de la Parole et de
l’Exégèse, où tout part d’un texte et
tout y revient, livre unique dans lequel
s’enroule une suite prodigieuse de livres,
Bibliothèque non seulement universelle,
mais qui tient de l’univers, et plus vaste,
plus profonde, plus énigmatique que
lui”.
Je me réjouis de ce projet qui tient à
mettre l’accent sur l’oeuvre du
Grand-Rabbin Abraham Isaac Hacohen
Kook. Parmi les multiples positions ori-
ginales défendues par cet éminent
maître du judaïsme universel, j’aimerais
rappeler que le Rav Kook avait envisagé
de créer une yechiva différente des éta-
blissements classiques. Il songeait à fixer
entre autres critères pour être admis à la
yechiva, de tenir compte non seulement
comme ailleurs des connaissances tal-
mudiques du candidat, mais aussi de la
culture biblique.
En vérité, il semble bien que la
Yechiva Mercaz Harav n’a jamais appli-
qué l’essentiel du programme proposé
d’abord par son fondateur.
Cependant, plus qu’ailleurs, l’étude de
la Bible a été mise en valeur par les
élèves du Rav A.I. Kook et de son fils le
Rav Tsvi Yehouda Kook (1).
Un texte célèbre du traité Meguila
(14a) donne la règle suivante : “De
nombreux prophètes ont apparu en
Israël en nombre double du nombre des
Hébreux sortis d’Egypte, mais seule la
parole prophétique qui a été nécessaire
pour les générations à venir a été mise
par écrit” (2).
Les générations à venir ne sont pas
seulement celles qui s’inscrivent dans un
3
LACHRONIQUE DU RABBIN ALEXIS BLUM
ete 1997
P
ublier un périodique en langue française consacré à la
pensée juive est une heureuse entreprise qui mérite tous
nos encouragements.
Le Rabbin Alexis Blum est rabbin de la
Communauté de Neuilly-Sur-Seine
(Hauts-de-Seine) où il dispense divers cours
de ‘Houmach, Michna et Guemara. Il est
diplômé du Séminaire de l’Ecole Rabbinique
de France et titulaire d’une Licence
d’Hébreu. Il est chargé également de l’au-
mônerie de l’Ecole Polytechnique et des pri-
sons, ainsi que du Journal des Enseignants
juifs Hamoré. Il a étudié une année en Israël
à la Yechiva Mercaz Harav Kook sous la
direction spirituelle du Rav Tsvi Yehouda
Kook, le fils du Rav Kook, et du Nazir.
RABBIN ALEXIS BLUM
RABBI
ABRAHAM ITSHAK
HACOHEN KOOK ZTSL
du Rabbin Réouven HaLévi de Dvinsk, l’un
des talmudistes les plus réputés de son
époque et auteur notamment de la collec-
tion de responsa Roch Leréouvéni ; ce
dernier ne cache pas son affection pour le
jeune prodige en le présentant aux autres
Maîtres. Le Rabbin Réouven HaLévi a une
influence majeure sur la méthode talmu-
dique du Rav Kook. Sous sa direction
Avraham Yitz’hak apprend à concentrer
son travail sur la manière de déduire une
décision légale (hil’hatique) tout en évi-
tant la dialectique autant que l’abstrait,
ces raisonnements d’ordre analytiques qui
jouissaient alors d’une grande popularité
auprès des jeunes talmudistes.
Lorsque le Rav Kook se marie à l’âge de
vingt ans, il est instruit et compétent dans
tous les domaines de l’étude juive.
Influencé par le Rabbin Naftali Tzvi
Yehouda Berlin (le Netziv), Roch Yéchiva
de l’école talmudique de Volozhin, qui
s’impliquait alors dans divers enjeux natio-
naux, le Rav Kook commence à rechercher
des moyens pour pénétrer de sainteté tous
les aspects de la vie de la nation. Son
activité littéraire commence à Volozhin
par quelques articles sur le Netziv qui sont
publiés dans les mensuels Kol Ma’hziké
HaDat et Knesset Israël. En 1888, le Rav
Kook lance son propre magazine, le men-
suel Itouré Sofrim. Le but audacieux de ce
journal rempli de nouvelles expressions et
de phrases sur l’unité nationale, le renou-
veau et la littérature, est d’unifier la Torah
et le nationalisme dans cette époque pré-
sioniste. Il est également “de construire un
hâvre de paix pour la littérature rabbi-
nique” et “d’unifier tous les mouvements
à l’intérieur du peuple juif en l’honneur de
la nation et de son renouveau”. L’essai
obtient un large succès, mais par manque
d’organisation il n’est suivi d’un second
numéro en 1889. Le rêve du Rav Kook de
publier un journal populaire, Chalom
Laam, afin de faire connaitre ses idées ne
verra jamais le jour non plus.
Durant la période qui sépare la publica-
tion des deux numéros d’Itouré Sofrim, le
Rav Kook est nommé Rabbin de la petite
ville de Zoïmel en Lithuanie. Il y assumera
4
BIOGRAPHIE 1865-1935
Inspiré d’une biographie du Rabbin Moché Tzvi Neriyah z”l dans
“Celebration of the soul” (Ed.Genesis Jerusalem Press).
Avraham Yitz’hak HaCohen Kook est né
dans le petit village de Grivia près de
Dvinsk, en Lithuanie, le 16 Eloul 5625
(1865), mois qui sera toujours l’occasion
d’évènements importants dans sa vie
comme on le verra par la suite. Son père
est le Rabbin Chelomo Zalman HaCohen
Kook, pieux talmudiste de la Yechiva de
Volozhin, centre alors incontesté du mou-
vement mitnagued (1). Sa mère se nomme
Pérel Zelata, fille de Rabbi Raphaël, l’un
des premiers ‘Hassidim de Rabbi
Mena’hem Mendel de Loubavitch, l’auteur
du Tzema’h Tzedek. Le Rabbin Chelomo
Zalman sert notamment d’émissaire à
Jérusalem pour la Yechiva de Volozhin et
celle d’Etz ‘Haïm. Il remplit autant sa mai-
son d’amour de la Torah et d’observance
scrupuleuse des mitzvot que d’une pas-
sion inconditionnelle pour Eretz Israël. Il
lui arrive fréquemment de parler hébreu le
Chabbat et ainsi le jeune Avraham
Yitz’hak acquiert-il un penchant pour la
Terre Sainte et la langue hébraïque.
UNÉLÈVE HORS DU COMMUN
Jusqu’à l’âge de treize ans Avraham
Yitz’hak étudie la Torah dans sa ville nata-
le. Après sa Bar-Mitzvah en 1878, il étudie
dans diverses Yéchivot durant une période
de huit ans. Il passe d’abord deux ans à
Lutzen sous la direction spirituelle des
Rabbins Eliezer Dan Yechivah et Yaakov
Rabinowitz, fils du Rabbin Mordé’haï
Gimpel Jaffe. Il retourne ensuite étudier
trois années à Grivia puis, en 1883, il va
apprendre à Samargon dans la banlieue de
Vilna. Il s’y fait connaître comme “le pro-
dige de Grivia” et sa réputation atteint le
Rabbin Eliahou David Rabinowitz-Téomim
de Poniowitz, qui choisit ce talmudiste en
herbe pour sa fille. Entre les fiançailles et
le mariage, Avraham Yitz’hak étudie enco-
re un an et demi à la fameuse Yéchiva de
Volozhin. On l’appelle là-bas “le prodige
de Poniowitz” d’après le nom de la ville
d’origine de son futur beau-père : il prend
l’habitude d’étudier dix-huit heures par
jour.
Tout au long de son enfance Avraham
Yitz’hak fréquente également la maison
ses fonctions de 1888 à 1895. En 1891 il
publie anonymement un petit ouvrage
intitulé ‘Havach Péer qui traite de la mise
des téfilin et de leur emplacement sur la
tête. Il voyage également à cette époque
d’une communauté à l’autre et, tel un
prédicateur, enjoint avec ferveur les gens
qu’il rencontre de prendre conscience de
l’importance de la mitzva des téfilin.
En 1890, le Rabbin Mordé’haï Elasberg,
un des premiers sionistes religieux, aban-
donne son poste de Boïsk. Le Rav Kook
accepte de l’y remplacer en 1895. C’est là-
bas également que s’enracinent ses incli-
naisons nationales alors qu’à la même
époque le sionisme politique et tous ses
avatars s’établissent fermement. Dans
Teoudat Israël Ouleoumiouto article parut
en 1901 dans le journal HaPeles, il expose
avec profondeur et originalité la concep-
tion de la Torah concernant l’essence et
les objectifs du nationalisme juif qu’il tient
pour des éléments intrinsèques à la Torah.
Il souligne l’absurdité de vouloir exclure la
religion du processus de reconstruction
d’Eretz Israël. C’est encore à Boïsk qu’il
aborde des sujets plus théologiques et
qu’il commence notamment son com-
mentaire sur les parties aggadiques du
Talmud qui ne sera publié après sa mort
sous le nom d’Eyn Ayah.
L’ARRIVÉE EN ERETZ ISRAËL
C’est en 1902 que le Rabbin de Jaffa,
Naftali Hertz HaLevi, décède et qu’on pro-
pose au Rav Kook de le remplacer. Jaffa
est alors une petite ville et la communau-
té achkenaze y est plus petite encore mais
c’est avec joie qu’il accepte le poste. Il
arrive à Jaffa durant l’été 1904. En tant
que Rabbin de Jaffa et des implantations
voisines, il cherche immédiatement à éli-
miner les divisions qui existent déjà entre
les religieux et les laïcs. Alors que certains
Rabbins ignorent purement et simplement
les pionniers non-religieux, le Rav Kook
tente de les rapprocher de la Torah et
encourage leurs efforts de reconstruction.
Il leur montre son intérêt par des lettres
ouvertes dans les journaux, des conversa-
tions individuelles et des visites person-
nelles. Ce faisant, il espère que ses actes
hâteront la rédemption tant attendue.
Les premiers chapitres d’Orot HaTe-
chouvah, dans lesquels il expose ses ensei-
gnements sur le repentir, sont publiés à
ete 1997
Allemagne. La Convention est annulée et
le Rav Kook trouve refuge en Suisse.
Pendant deux ans, il réside à Saint-Gallen,
puis en 1916, il devient rabbin de la com-
munauté londonienne de Ma’hziké Hadat.
Les années à Jaffa ainsi que son séjour
forcé en Suisse ont rendu le Rav Kook très
prolixe. Sa production littéraire de cette
période est peut-être la plus créatrice. La
masse de ces écrits qui se composent
d’autant de révélations intuitives que
d’analyses personnelles profondes, est
recueillie dans des carnets de notes. Ces
textes ont un large champ d’application :
l’individu et la collectivité, le peuple juif et
les nations, le bien et le mal ou encore
l’Univers et Dieu. Des portions de ces
écrits seront publiées plus tard par le fils
du Rav Kook, le Rabbin Tzvi Yehouda
Kook, sous le titre d’Orot; la majorité des
textes sera récoltée et éditée par “le
Nazir”, le Rabbin David HaCohen dans
Orot HaKodech.
LAPREMIÈRE GUERRE MONDIALE
Peu de temps après l’arrivée du Rav
Kook à Londres débute l’activisme poli-
tique qui culminera avec la Déclaration
Balfour. Le Rav envisage la déclaration
britannique sur le “Foyer National Juif”
comme “le début de la rédemption” qui
transformera la vie de la nation. Il fonde à
cette époque “La Bannière de Jérusalem”,
organisation visant à unir toutes les fac-
tions des religieux avec les laïcs. Son
objectif est de parfaire les idéaux poli-
tiques et spirituels de la Nation. Il voyage
dans de nombreuses villes anglaises et
correspond avec les juifs européens ou
américains en s’efforçant de les convaincre
de rejoindre son camp.
Le décès de sa fille Esther Yael à l’âge
de quatorze ans, juste après Soukkot 5680
(1919) coïncide avec un tournant majeur
de la vie publique du Rav Kook. Vers la
fin de l’été 1919, le Rav quitte Londres
pour occuper le poste de Rabbin de
OROT
Jérusalem. Ses activités dans la Ville Sainte
sont motivées par les mêmes objectifs que
ceux qu’il a fixés pour “la Bannière de
Jérusalem”. L’un d’eux est d’établir un
Rabbinat et un Grand-Rabbinat pour tout
Eretz Israël. Il espère que les Maîtres les
plus réputés soutiendront son initiative et
que le Rabbinat d’Eretz Israël sera organi-
sé de telle manière qu’il deviendra l’auto-
rité rabbinique centrale pour tout le
peuple juif. Il dépense sans compter son
temps et son énergie pour la réalisation de
ce projet, ignorant l’opposition virulente
de ceux qui refusent de reconnaître
quelque Rabbinat que ce soit impliqué
dans le sionisme. 1920 voit la publication
d’Orot, qui lui vaut d’être mis au ban par
les deux autorités de l’ancien Yichouv : le
Rabbin Yit’hak Yerouham Leib Diskin et le
Rabbin Yosseph ‘Hayim Sonnenfeld, ou
plus exactement par les plus zélés de leur
entourage. Le Rabbin de Gour, Rabbi
Avraham Mordé’haï Alter, sera même
appelé d’Europe pour rétablir la paix entre
les communautés.
Une telle effervescence n’empêche pas
la majorité des Rabbins d’Eretz Israël de se
réunir durant l’été 1921 à Jérusalem et de
fonder le Grand-Rabbinat à la tête duquel
ils placent le Rav Kook ainsi que le Rabbin
Yaakov Meir, premier Grand Rabbin
Sépharade.
LEMERKAZ HARAV
Le second objectif du Rav Kook est la
création d’une Yéchiva Universelle qui ser-
virait d’institut d’études juives supérieures.
Le but de la Yéchiva est double : former
des Maîtres dans les études juives tradi-
tionnelles mais aussi neutraliser les
approches non-traditionnelles du Talmud
et de la Bible grâce à d’intensives
recherches dans le domaine des contro-
verses soulevées. Il pense également que
la renaissance d’une littérature juive reli-
gieuse est nécessaire pour répandre la
sainteté dans toute la nation.
En 1935 le Rav Kook tombe gravement
malade, atteint du cancer. Il combat
durant plusieurs mois avant de succomber
le 3 Eloul 5695 (1935) seize années jour
pour jour après son arrivée à Jérusalem
pour y servir en qualité de Rabbin de la
Ville Sainte.
partir de 1905. En 1906, il renouvelle ses
efforts visant à la sortie d’un mensuel ;
celui-ci doit s’appeler HaNir. Mais ce pro-
jet avorte une fois de plus. C’est encore à
la même époque qu’il publie un court
essai intitulé Ivké Hatzon dans lequel il
exprime les préoccupations de sa généra-
tion et leurs enjeux spirituels.
Préoccupé par l’essor économique du
pays, le Rav Kook presse de nombreuses
organisations de Diaspora d’acquérir des
terres en Eretz Israël et les assiste dans
leurs démarches. En 1907 il rédige un
ouvrage hala’hique consacré à l’étrog, Etz
Adar, dans lequel il établit clairement la
supériorité de l’étrog non-greffé qui pous-
se en Israël, espérant ainsi soutenir le sec-
teur agricole encore embryonnaire. A par-
tir de 1908, il assume certaines responsa-
bilités au sein de l’Ecole Mizra’hi, ce qui
lui vaut déjà des cris d’alarme de quelques
Rabbins du vieux Yichouv de Jérusalem
attachés au ban existant sur l’étude des
langues étrangères et des sciences pro-
fanes dans les écoles juives. Ce ‘Hérem
existe depuis la moitié du XIXème Siècle et
est dû en partie aux craintes suscitées par
les ravages de la Réforme. Mais depuis son
édit il ne cesse d’être combattu par de
grandes autorités rabbiniques comme le
Rabbin Yéhochoua Leib Diskin de Brisk.
C’est notamment son fils, le Rabbin
Yitz’hak Yerouham Diskin, qui signera le
‘Herem prononcé contre le Rav Kook lors
de la publication d’Orot où le Rav Kook
enjoindra à “découvrir les étincelles de
sainteté contenues dans les langages et la
sagesse des peuples”.
L’année sabbatique tombe en 1910.
S’engage alors une controverse hala’hique
acharnée sur le point de savoir s’il est
légitime de vendre la terre afin de ne pas
perturber l’agriculture naissante. Cette
année-là le Rav Kook publie Chabbat
Haaretz : c’est un traité concernant les
lois de la Chemitah aux termes duquel il
conclut que certaines formes d’agriculture
peuvent être permises sous certaines
conditions et après notamment que la
terre ait été vendue à des non-juifs pour
une durée déterminée.
Au début de l’année 1914, le Rav Kook
est à nouveau sous le feu des zélotes de
Jérusalem en raison du poste de respon-
sable spirituel qu’il a accepté de prendre à
l’Ecole Ta’hkémoni de Jaffa, où les
langues étrangères et les études profanes
sont enseignées aux étudiants. C’est éga-
lement au cours de cette année que le
Rav Kook accepte l’invitation qui lui est
faite d’assister à la Convention
Internationale de l’Agoudat Israël à Berlin.
Mais la première Guerre Mondiale le sur-
prend peu de temps après son arrivée en
5
ete 1997
Légendes
(1) Au XVIIIème Siècle, sous l’impulsion du Baal
Chem Tov, naît le ‘Hassidisme qui est un mouve-
ment de renouveau religieux insistant sur le servi-
ce divin dans la joie et la proximité de tous avec
Dieu par le travail de l’esprit. Ce mouvement ren-
contre un écho populaire sans précédent mais il se
heurte à des opposants dans les écoles talmu-
diques, les “mitnaguedim” dont la conception cen-
trée sur l’étude est plutôt empreinte de rigueur.
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