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Leçon de Géostratégie Africaine n° 59
L’OCCIDENT SOUS ADMINISTRATION COLONIALE CHINOISE
Partie 2/3
De Jean-Paul Pougala (*)
Le XXIème siècle a vu l’arrivée au pouvoir en Occident d’une nouvelle génération de responsables
politiques, fruits de leur époque de vache maigre, avec une vision low-cost des principes du droit
international, une conception au rabais de l’intérêt général de la société. Ce sont des dirigeants
qui n’ont rien à voir avec le charisme ou l’humanisme de leurs prédécesseurs. C’est cette situation
qui va faciliter le déploiement de l’arsenal stratégique chinois pour coloniser tout l’Occident. En
cela, la démocratie du suffrage universel a été un handicap et non une force. Avant daffronter
notre leçon du jour, je vais prendre des exemples de l’actualité de ces derniers jours pour vous
faire comprendre si la nouvelle génération des personnages politiques occidentaux au pouvoir en
Occident comprend ou non les vrais enjeux du monde et s’ils ont quelque chose à voir avec leurs
prédécesseurs.
Est-ce qu’un George Bush est à mettre sur le me plan qu’un Roosevelt ou un Kennedy ? Un
Sarkozy est-il de la même épaisseur qu’un De Gaulle ou un Sadi Carnot (1837-1894) ? Sils ne
sont pas forcément pires, le rôle qu’ils jouent semble complètement déphasé par rapport aux
enjeux. Avant, il fallait réussir dans la vie avant d’entrer en politique. Aujourd’hui, la politique est
un travail. On ne peut donc pas parler de volonté populaire, puisque des personnes, toujours les
mêmes, ont déjà fait le choix de la profession de leur vie, qu’elles seraient des élus du peuple. La
politique devient ainsi, juste une sorte de cirque, un théâtre de jeux de rôles. Sadi Carnot par
exemple, valeureux président français assassiné au poignard par lanarchiste italien Sante
Geronimo Caserio le 24 juin 1894, pour avoir refusé de gracier un des leurs, fait ses études
supérieures à l'École Polytechnique de Paris il sort ingénieur en 1857, avant de s'inscrire pour
une spécialisation à l'École des Ponts et Chaussées de Paris d'où il sortira major de sa promotion
en 1863. Et avant d’entrer en politique pour devenir ministre des travaux publics, et ensuite
devenir le 5ème Président de la République Française le 3 décembre 1887, il a réalisé des
ouvrages énormes pour sortir son pays du sous-développement, comme le système de régulation
du niveau du lac d'Annecy dont il fait augmenter la hauteur de 20 cm, au pont qui porte son nom
sur le fleuve Rhône etc. Aujourd’hui, l’Occident vit sous la dictature des médiocres de la
littérature, c’est-à-dire des personnes qui n’avaient pas eu de notes suffisantes en mathématiques
au lycée pour poursuivre des études en série scientifique et qui se retrouvent tous à faire des
études de droit, de littérature, de journalisme etc. Et ce sont eux qui dans la professionnalisation
de la médiocrité de la sélection éducative de base, multiplient les incohérences et les non-sens
géopolitiques et qui, traduits en géostratégie deviennent de vrais catastrophes pour les nations
qu’ils dirigent. Pour bien le faire comprendre, je vais prendre lexemple de l’escalade de la
question syrienne.
Le 22 Août 2013, un communiqué de la présidence de la République Française récite : « Le chef
de l'Etat a fait part de l'émotion suscitée en France par les massacres intervenus en Syrie dans la
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nuit du 20 au 21 août ». S’il est si certain des évènements au point de faire un tel communiqué,
c’est qu’il doit en avoir été informé par les services secrets français ou bien, il doit avoir eu la
confirmation d’une autorité au-dessus de tout soupçon qui ne court aucun risque d’être démenti
après. Et que constate-t-on ? Qui l’a informé ? Pour le savoir, il faut écouter le même jour, son
ministre des affaires étrangères Laurent Fabius sur la chaine de télévision BFM et la radio RMC
qui dit ceci :
"Hier soir, j'ai eu le président de la Coalition Nationale Syrienne, Assi Ahmed El-Djerba, il confirme
ces éléments et l'utilisation d'armes chimiques massives, dans la banlieue de Damas, il est formel"
Oui, vous l’avez bien compris, sa source d’information est une des parties prenantes au conflit. Et
vous croyez qu’il va s’arrêter en si bon chemin ? Et bien non. Lorsqu’on l’interroge sur le veto
russe au conseil de Sécurité des Nations Unies, il répond : « les décisions devraient alors être
prises d'une autre façon ».
Oui. C’est bien sorti de sa bouche, je vous jure. Voilà un dirigeant politique dont le pays invoque la
légalité internationale, la communauté internationale. Lorsqu’on lui dit que si cette communauté
internationale symbolisée par le Conseil de Sécurité des Nations Unies prenait une décision
contraire, que feriez-vous ? Plutôt que de dire qu’il se plierait à la décision de la Communauté
Internationale, il dit clairement qu’il faudrait des décisions d’une autre façon, c’est-à-dire, passer
outre. Il ajoute : « Il est possible de répliquer avec les Américains, les Britanniques (...). Si
l'utilisation de ces gaz est avérée, il faut une réaction de force ».
Dommage qu’il ait été mal informé, parce que pour une fois les USA ont décidé de jouer franc jeu
et voici ce que la porte-parole de la diplomatie américaine Jennifer Psaki déclare jeudi
22/08/2013 :
« Les Etats-Unis ne sont pas en mesure "pour l'instant" de dire avec certitude s'il y a eu recours à
des armes chimiques en Syrie mercredi (21/8/2013) […] A ce moment précis, nous sommes
incapables de déterminer de manière définitive que des armes chimiques ont été utilisées. […] le
président [Barack Obama] a ordonné aux services de renseignement de rassembler au plus vite
des informations supplémentaires sur ces allégations ».
Et lorsque 3 jours plus tard, on aura la confirmation de l’utilisation des armes chimiques qui ont
intoxiqué non seulement les enfants, mais aussi les militaires syriens, plutôt que de se demander
se situe la vérité, le président français insiste que la ligne rouge est franchie et qu’il faut aller
bombarder. Peu importe si en Syrie se trouve la plus grande base militaire russe en Méditerranée
et qu’une cible attribuée à Assad risque demain se révéler une base militaire russe qui répliquerait
de manière foudroyante, notre politicien fonce tête baissée. Ceci sans que personne ne se
demande comment des gens qui ont raté toutes les épreuves précédentes peuvent être les
premiers à courir pour répéter les mêmes erreurs. De l’Irak à lAfghanistan, en passant par la
Libye, nulle part ces mêmes faucons sont intervenus, le pays est resté debout. Cela a été
toujours la destruction totale de l’entité même étatique. Alors pourquoi diable ce sont toujours les
mêmes cancres à se bousculer pour aller larguer les bombes ? Et pourquoi la Chine qui aurait pu
se permettre de financer 10 fois plus de combats n’est pas aussi guerrière ?
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Dans l’entretien que le président Obama donne à une chaîne américaine pour répondre au
président français qui cherche à tout pris sa part de guerre comme l’avait fait avant lui Sarkozy, dit
que le vrai problème d’aller en Syrie est d’ordre économique, parce que l’Amérique n’a pas
d’argent.
Le président américain est bien conscient qu’il a besoin d’aller supplier la Chine pour financer une
telle guerre et puisque c’est cette dernière qui est prête à mettre le double veto aux Nations Unies,
alors, il est plus intelligent de jouer sagement la reculade.
Et lorsqu’on voit l’insistance de deux pays en quasi-faillite comme la France et le Royaume Uni
pour chercher leur guerre en Syrie, pour ensuite faire la queue à Pékin pour quémander un peu
d’argent pour financer cette guerre et leurs dettes publiques colossales, on est en droit de se
demander comment la démocratie a pu produire de tels monstres politiques, incapables
d’interpréter convenablement les évènements pour comprendre que le monde a changé et que
c’est tout leur logiciel qu’il faut changer pour s’adapter à la nouvelle donne, et non juste tenter
d’esquiver les questions qui fâchent pour ne pas déplaire à l’électorat qui dans le respect du
système démocratique du suffrage universel, a besoin d’être soudoyé, arnaqué et distrait avec
des guerres inutiles.
Mais tout ça ne répond pas à la question : pourquoi l’instance de François Hollande pour aller
bombarder la Syrie ? Pour le savoir, il faut juste regarder la courbe des sondages à propos de la
popularité du président français, François Hollande, pendant 1 an, depuis son élection le 8 Mai
2012, et on constate qu’il est le plus impopulaire des 60 dernières années. Mais à un moment
donné, en Janvier 2013, il gagne des points, pour son engagement dans la guerre au Mali. C’est
la preuve d’un peuple formaté à aimer le sang, à primer la violence. C’est un peuple très
désorienté et qui vit toujours dans la nostalgie d’un passé très lointain lorsquils étaient ceux qui
avaient toutes les initiatives mondiales, décidant par exemple de faire ou de ne pas faire la guerre.
Ce que ce peuple ne sait pas encore est que le pire doit encore arriver dans la guerre, celle-
stratégique et plus meurtrière en terme de pouvoir d’achat et d’emplois, que la Chine a décidé de
leur livrer depuis bientôt 10 ans.
Nous allons voir dans les lignes qui suivent les techniques très sophistiquées d’encerclement de
l’Occident mis en place par la Chine et tout cela, sans aucune réaction de l’Occident, encore
perdu dans des opérations militaires inutiles de contrôle du monde, comme Africom. Ce qu’ils ne
savent pas, c’est qu’au XXIème siècle, le monde ne se commande plus militairement, mais avec
l’intelligence économique.
VOICI COMMENT LA CHINE A PRIS L’OCCIDENT D’ASSAUT
Les élections politiques dans toute l’Union Européenne durant les 10 dernières années se
cristallisent dans un duel entre ceux qui veulent le protectionnisme et ceux qui disent que ce serait
une bêtise. Les conservateurs qui veulent le protectionnisme contre la Chine, sont ceux qui à la
fin, gagnent les élections, parce que le peuple est toujours très sensible sur le danger des emplois
venu de Chine. Ainsi, ce sont les partis de droite qui sont majoritaires aujourd’hui en Europe. Mais
ce que ce peuple et ses dirigeants ne savent pas, encore moins leurs experts qui se succèdent
sur les plateaux de radios et télévisions, c’est qu’ils sont tous en retard par rapport au plan chinois
de les mettre tous à genoux.
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La Chine avait élaboré une stratégie en 3 étapes et alors qu’elle entre maintenant dans la
troisième étape, ils en sont encore à commenter et ne parler que de la première.
Voici les 3 phases de la stratégie chinoise de la conquête de l’occident :
1- PRODUITS A BAS PRIX
Les économistes écrivent encore aujourd’hui que la Chine est l’atelier du monde, que la Chine
est l’usine du monde. Ceci n’est vrai qu’en partie, parce que la tendance est d’une Chine qui
ne se contente plus de produire à moindre coût les produits à bas contenu technologique. Les
stratèges chinois avaient compris s le début qu’aucun pays ne peut mener la moindre
politique de conquête du monde sans les moyens financiers, sans le succès économique. Pour
y parvenir, ils ont tout simplement décidé de faire converger vers la Chine, le plus grand
nombre d’investissements destinés à la création de la richesse. Ils se sont emparés d’un
instrument qui au départ était une faiblesse du pays pour la transformer en force, et c’est le fait
d’utiliser le bassin de millions de pauvres, comme instrument de flexibilité pour la compétitivité
chinoise. L’obsession de la compétitivité à outrance a permis à la Chine de sortir de la misère
des millions de chinois qui sont venus grossir le bassin de consommation vertueuse du pays.
En même temps, cela a permis à la Chine d’inonder tous les marchés du monde entier avec
ses produits à des prix défiant toute concurrence. Et ça a marché, à la vue de la montagne des
réserves monétaires de l’Empire du Milieu.
2- ACQUISISITION DES ENTREPRISES POUR POSSEDER LEUR TECHNOLOGIE
LAVIATION
La plus grande société aéronautique du monde est chinoise, soit en terme du nombre d’employés
que de chiffre d’affaire et elle s’appelle : AVIC (Aviation Industry Cooperation of China) avec ses
400 000 salariés et 37 milliards d’€ de chiffre d’affaires en 2012 et plus de 200 usines en Chine.
Pour l’instant, ses principales productions se concentrent sur : le C919 (l’avion moyen-courrier)
l’ARJ-21 (l’avion régional), le Z10 hélicoptère d’attaque surnommé « Tonnerre de Feu »
(concurrent de l’américain Apache AH-64 produit par l’entreprise privée Boeing et du russe Mil Mi-
28 produit par l’entreprise publique Mil - Rostvertol PLC et Z19 (hélicoptère de reconnaissance et
de soutien au sol surnommé « Tornade Noire ») etc.
Plutôt que d’aller à la conquête de l’Occident avec cette entreprise aux chiffres redoutables et
capable de terrasser tous les concurrents sur son passage, la China décidé d’une autre stratégie,
celle dite d’encerclement. Elle consiste dans ce cas à mettre la main sur la technologie
occidentale d’un côté et de l’autre, à racheter tous les sous-traitants stratégiques de ses
principaux concurrents occidentaux que sont Airbus et Boeing. Une fois cette opération terminée,
il sera ainsi possible de produire dans l’une des 200 usines chinoises de l’AVIC tous les avions
occidentaux dont les marques ont été achetées au préalable par les Chinois.
C’est ainsi qu’en Mars 2011, Avic s’offrait l’avionneur américain Cirrus, leader dans la fabrication
des avions d’affaire et des jets privés. Avec son fameux « Bizjet », un avion fabriqué en 10 ans en
5000 exemplaires et vendu dans 60 pays, la Chine s’offre un ticket gagnant pour occuper une
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position dominante sur le plus grand marché au monde de laviation d’affaires. Au moment de la
signature du contrat, il y avait 500 avions en commande et en attente d’être produits et livrés,
c’est-à-dire 70% du marché mondial des avions d’affaires dont la valeur, selon une estimation faite
par Fabrice Gliszczynski dans le quotidien financier français la Tribune du 15/11/2012, sera de
560 milliards de $ pour les 20 prochaines années.
En Janvier 2013, c’est le groupe chinois CQHIC qui rachetait le fabricant américain
d’hélicoptères Enstrom avec son siège social dans le Michigan.
En février 2013 le groupe minier chinois Leshan Heima rachète l’avionneur français Lisa
Airplanes, en grande difficultés financières, propriétaire de l’Akoya, le seul avion au monde
capable de se poser à la fois sur terre, en mer et sur la neige, mais aussi propriétaire de l’avion
tout-terrain dénommé Skylander. L’Etat français décide de réagir pour protéger les brevets
français dans l'aéronautique des rachats chinois.
Le fond de capital-risque Aerofund III, est créé pour remplacer Aerofund et Aerofund II, jugés
inefficaces pour protéger les brevets français. Mais l'initiative s'avère ridicule est qu'on
prévoit qu'à plein gime, son capital sera de 300 millions d'€. Il suffit de le comparer au fond
chinois CIC avec son volume de cash de 420 milliards de $ pour comprendre que c'est comme
laisser une chèvre protéger la viande d'un lion.
A Pékin, on a décidé de sauver une autre société française, Latécoère, en difficulté financière elle
aussi. Son métier est de produire les blages pour les avions, la structure de lavion et les
différentes composantes électroniques des avions. Ses principaux clients sont, comme par
hasard, Bombardier, Dassault, Boeing, Airbus etc.
LA GUERRE DES NORMES
Comme si ça ne suffisait pas, depuis le mois de Juin 2013, Pékin a ouvert un nouveau front de
bataille avec les Occidentaux. Désormais, tout avion fabriqué sur le sol chinois devra avoir la
certification chinoise et non plus celle du pays d’origine de son constructeur et pour avoir ce
certificat de conformité, il faudra avant tout marquer tous les avions d’une belle étiquette
indélébile : MADE IN CHINA. Les Occidentaux sont pris à leur propre piège du mensonge
généralisé. Aujourd’hui, Airbus assemble les A320 dans son usine de Tianjin depuis 2009 et
réexporte dans le monde avec un bon MADE IN TOULOUSE (Made In France). Le fabriquant
d’hélicoptères italien AugustaWestland qui assemble ses hélicoptères dans son usine de Jiangxi
en Chine, est fier de coller une belle étiquette MADE IN ITALY sur ses hélicoptères chinois et les
exporte surtout aux USA. Désormais, ce n’est plus possible. La Chine a décidé de mettre fin au
mensonge. Jusqu’aujourd’hui, la combine se faisait comme ça : soit pour Airbus que
AugustaWestland par exemple, c’est l'agence européenne de curité aérienne (AESA) et la
direction de l'aviation civile américaine, la puissante FAA (Federal Aviation Agency) qui certifiait
les avions fabriqués en Chine. Une véritable fraude morale. Désormais, tout ça est terminé. C’est
la direction générale de l'aviation civile chinoise, Civil Aviation Administration of China (CAAC) qui
sera la seule habileté à émettre un certificat attestant le respect des tests exigés par la Chine pour
ses propres avions. Et pour le faire, bien sûr que la Chine va exiger les dessins des avions, pour
être certaine que les pièces utilisées sont conformes. Malgré les protestations des industries
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