L`utilité sociale des organisations de l`économie sociale et solidaire.

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L’utilité sociale des organisations
de l'économie sociale et solidaire.
Une mise en perspective
sur la base de travaux récents
Jean Gadrey
(CLERSE-IFRESI, Université de Lille 1)
Rapport de synthèse pour la DIES et la MIRE
Programme de recherche « L’économie sociale et solidaire en région »
Février 2004
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Ce rapport est dédié à Jean-Noël Chopart, dont la disparition, en juillet 2003,
nous a privés d’un animateur scientifique remarquable et d’un ami. Ses
encouragements constants et ses critiques attentives et constructives nous ont aidés,
dans la première phase de la rédaction de ce rapport, à mieux cerner le sujet et ses
enjeux. Une bonne partie des apports durables du programme de recherches sur
l’économie sociale et solidaire en région tient à son investissement personnel et à la
qualité du copilotage intellectuel et organisationnel qu’il a exercé avec Daniel Rault,
sous la présidence de Guy Neyret.
Il aurait sans doute éprouvé une grande satisfaction en constatant que son
investissement des dernières années, qui faisait suite à beaucoup d’autres, débouchait
sur une mobilisation collective instituant l’économie sociale et solidaire comme objet
de réflexion de plus en plus reconnu et valorisé, sur le triple plan de la recherche, de
l’action politique, et du débat public.
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Sommaire
Présentation p. 4
Les 38 rapports de recherche consultés p. 6
Une petite statistique p. 10
Chapitre 1
De l’acceptation à la critique de la problématique de l’utilité sociale p. 11
Chapitre 2
L'utilité sociale : une convention socio-politique en devenir p. 27
Chapitre 3
Le contexte historique et international de la convention d’utilité sociale p. 55
Chapitre 4
À la recherche des dimensions et des critères de l'utilité sociale p. 63
Chapitre 5
Réflexions complémentaires sur quelques rapports de recherche p. 83
Chapitre 6
Sur la méthode d’évaluation de l’utilité sociale p. 109
Conclusion générale p. 119
Annexes p. 122
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L’utilité sociale des organisations
de l'économie sociale et solidaire.
Une mise en perspective sur la base de travaux récents
Jean Gadrey
Présentation
L'auteur de ce rapport mesurait la difficulté de l'exercice auquel il était convié
lorsqu'il a accepté de rédiger une synthèse de 38 rapports de recherche sur "l'économie
sociale et solidaire en région", sous l'angle de "l'évaluation de l'utilité sociale et des
bénéfices collectifs" des organisations de ce secteur. Il n'a pas été déçu. Ni par le caractère
insaisissable et multiforme de cet objet fuyant mais partout présent, qu'il s'agissait de
rattraper et de stabiliser pour un temps. Ni par les travaux qu'il a pu consulter et "exploiter",
en s'efforçant de rendre justice à leurs auteurs. Manifestement, ce programme a été
productif. Son utilité sociale sera jugée plus tard, mais la production de connaissances
originales et potentiellement utiles (car il reste à en organiser la "traduction" vers les
acteurs et les décideurs) est incontestable. Elle résulte de plusieurs facteurs, mais
l'implication constante, forte et intelligente des animateurs (Guy Neyret, Jean-Noël Chopart
et Daniel Rault), associée, au sens le plus fort de "l’association", à la motivation des
équipes et à leur goût du partage des savoirs, ont produit de forts bénéfices collectifs de
coopération. Les séminaires nationaux thématiques et les séminaires interrégionaux ont fait
le reste. La lecture des rapports est éclairante sur la façon dont la plupart des équipes ont pu
s’approprier, en les adaptant, des idées mises dans le pot commun, sans que leurs auteurs en
soient dépossédés. C'est un assez bel exemple de logique associative ou coopérative mise
en oeuvre dans la sphère publique : une personne, une voix ; non lucrativité ; retour des
bénéfices au collectif et à la collectivité ; démocratie interne ; partenariats multiples avec
les acteurs concernés ; innovation et découverte de nouveaux besoins de connaissance...
La difficulté de la rédaction de ce rapport a été redoublée par le fait que le
rapporteur était un outsider des recherches dans ce champ, qui a son langage et ses sigles,
ses réseaux, ses règles et statuts, ses principes fondateurs, son identité et ses tensions, et ses
chercheurs confirmés. Fort heureusement, les insiders se sont révélés disponibles et prêts à
former l’outsider "sur le tas", en particulier à l'occasion des trois journées de séminaire
national, ainsi qu’en réagissant à l’envoi de papiers provisoires. Cela permettra peut-être
que la capacité parfois reconnue aux outsiders à jeter "un regard neuf" ne se résume pas à la
naïveté du néophyte.
Ce rapport est organisé de la façon suivante.
Le premier chapitre est consacré à un premier bilan de l’examen des trente-huit
rapports de recherche sous l’angle, d’une part, de l’importance qu’y tient la problématique
de l’utilité sociale, et, d’autre part, du degré d’acceptation ou de critique de cette
problématique par les chercheurs.
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Le chapitre 2 s’efforce de répondre à la question : "pourquoi l'utilité sociale est-elle
de plus en plus invoquée pour qualifier les organisation de l’économie sociale et solidaire
(OES), avec quels enjeux ?". Nous retracerons l’histoire de l’émergence de cette notion
d’abord sous l’angle des conventions fiscales, puis en présentant les analyses de l’acteur
associatif qui a été le plus influent – bien qu’il n’ait pas été le seul à s’exprimer – au cours
de cette période : le CNVA. Nous verrons ensuite comment le rapport Lipietz (1999-2000)
a défendu un certain point de vue associatif et avec quelle conception de l’utilité sociale.
Nous ferons ensuite état de la présence récente de la référence à l’utilité sociale dans le
droit et dans la loi, pour réguler d’autres questions que celles de la fiscalité associative.
Nous pourrons alors en venir à notre interprétation de l’invention de l'utilité sociale des
OES comme convention et comme outil de régulation. Ce chapitre se termine par une
réflexion sur la place du chercheur (et du rapporteur) dans ce type de débat portant sur la
construction de conventions socio-politiques.
Le chapitre 3, plus court, contient un détour par une contextualisation historique et
par une comparaison internationale. Ce détour est une invitation supplémentaire à
relativiser la problématique française de l’utilité sociale, et à en reconnaître le caractère
conventionnel.
Le chapitre 4 consiste à mettre à plat les critères d'utilité sociale que nous avons
rencontrés dans l'ensemble de nos lectures françaises, et principalement dans les rapports de
recherche du programme "de l'économie sociale et solidaire en région". Ce chapitre
s'appuie beaucoup sur les travaux des équipes. Il s'efforce de mettre un peu d'ordre dans le
foisonnement des idées, en rassemblant dans une grille unique, "additive", composée de
cinq tableaux, les critères mentionnés dans l’ensemble des travaux consultés, et en y
ajoutant quelques éléments plus personnels. Selon les chercheurs et selon les acteurs, la
représentation de l'utilité sociale fait appel à une grande partie de cette grille, ou à une
partie plus réduite.
Le chapitre 5 revient sur les analyses de plusieurs rapports, essentiellement ceux qui
consacrent le plus de développements à la thématique de l’utilité sociale. Il nous a semblé
en effet que la grille synthétique du chapitre 4 ne suffisait pas à rendre compte de la
richesse du patrimoine ainsi accumulé.
Le chapitre 6 est consacré aux méthodes d’évaluation, question très peu présente
dans les rapports examinés, mais sur laquelle il était indispensable de fournir quelques
éclairages, s’inspirant d’autres sources.
Un ultime chapitre devrait être ajouté, d’ici la fin 2003, à ce rapport. Il portera sur
les tentatives de mesure monétaire de l’utilité sociale ou de la "valeur ajoutée sociale" (ou
de certaines de leurs dimensions), qu’il s’agisse des rares travaux du programme de
recherches sur "l’ESS en région" qui ont envisagé ces méthodes économiques
(essentiellement ceux du CRIDA et du CRESGE), ou de travaux antérieurs, notamment
ceux de Michel Garrabé. Il s’agit de tentatives à hauts risques, dont il convient d’apprécier
(non monétairement…) l’apport et les limites. Il ne nous a pas été possible de réaliser cette
évaluation, elle aussi délicate, à ce stade.
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