Maladies chroniques - International Diabetes Federation

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Impact global
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La pvalence des maladies chroniques ne cesse daugmenter
à léchelle mondiale et menace gravement la capaci des pays
en développement à améliorer la santé de leurs populations.
En fait, les maladies chroniques sont devenues le principal
problème de santé dans de nombreux pays en développement.
On estime quen 2005, les maladies chroniques étaient res-
ponsables de 50 % des dés et des maladies dans 23 pays
en veloppement lectionnés. Les enquêtes mees dans
différents pays aux quatre coins du monde lent les lourdes
conséquences sanitaires et économiques des maladies chro-
niques, dont limpact est probablement le plus significatif dans
les pays pauvres qui sont les moins à me de réagir. En moins
de vingt ans, de nombreux habitants de pays en développe-
ment ont adopté les modes de vie des populations des régions
économiquement et technologiquement plus avancées, avec
comme conséquence quils partagent désormais les mes
problèmes de santé. Rachel Nugent décrit la charge croissante
des maladies non transmissibles chroniques dans les pays à
faibles et moyens revenus et appelle à une action multisecto-
rielle pour promouvoir un style de vie sain pour tous.
Maladies chroniques :
un problème croissant
dans les pays en
développement
Rachel Nugent
L’obésité de l’enfant, les taux élevés de
diabète de type 2, le sédentarisme et le ta-
bagisme sont de plus en plus présents dans
les pays à faibles et moyens revenus, à des
niveaux différents selon les cas. Les conclu-
sions de diverses enquêtes montrent une
augmentation, sur une période relativement
courte, du nombre de personnes atteintes
de surpoids ou d’obésité, un facteur de ris-
que majeur des maladies chroniques. Ces
augmentations concernent de nombreux
pays en développement et illustrent deux
réalités importantes concernant le dévelop-
pement des maladies chroniques à l’échelle
mondiale. Premièrement, en raison de la
variabilité des expériences entre pays, une
meilleure compréhension des conditions
sous-jacentes s’impose. Deuxièmement,
nous pouvons nous attendre à ce que la
charge des maladies chroniques continue
d’augmenter puisque les facteurs respon-
sables poursuivent leur progression.
Les moteurs des maladies
chroniques
L’augmentation des maladies chroniques
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services de santé publique ; c’est pourquoi
elle est généralement ignorée. Dans les
soins privés, la capacité à offrir des soins
appropriés et de qualité augmentera avec la
demande, mais uniquement pour les classes
favorisées. Les populations pauvres et les
classes moyennes seront laissées de côté.
Dans les pays à faibles et
moyens revenus, la plupart
des services de santé sont
payés par le patient.
Néanmoins, même dans les régions très
pauvres, une personne qui se sent mal et
à certains moments clés, comme lors d’une
grossesse, consulte un prestataire de soins à
la recherche de conseils et d’un traitement.
Le type de prestataire de soins consulté varie
fortement selon les besoins, l’accessibilité,
la disponibilité et d’autres facteurs. Dans
les pays en développement, les soins sont
pris en charge par les cliniques de soins
primaires locales, les agents sanitaires des
collectivités et les ONG assurant des services
sanitaires de base, les hôpitaux régionaux et
urbains offrant des services spécialisés, et les
guérisseurs traditionnels. Contrairement aux
systèmes publics subsidiés caractéristiques
des soins de santé des pays développés,
c’est le patient qui paie lui-même la plupart
des services de santé dans les pays à faibles
et moyens revenus.
Souvent, ces deux particularités (offre de
soins fragmentée et paiement direct des
services) limitent les traitements aux condi-
tions graves uniquement, souvent sans suivi.
Des réformes fondamentales et systémiques
des soins de santé s’imposent dans de
nombreux pays en développement. Ces
réformes devraient être conçues de façon
à élargir la portée et améliorer la coordi-
nation et la continuité des soins.
1
Nous
reprenons ci-dessous quelques suggestions
liées au style de vie dans les pays pauvres
résulte d’une combinaison complexe de
facteurs sociaux, économiques et compor-
tementaux. Il est impossible d’attribuer le
développement des maladies chroniques à
l’influence de l’un d’entre eux, tout comme
il est improbable qu’un seul de ces facteurs
ait un effet significatif. Mais pris ensem-
ble, ils ont modifié le risque auquel sont
confrontées les populations des pays en
développement. Ces principaux facteurs
sont notamment :
Sociaux
le souhait d’adopter un style de vie mo-
derne, ‘occidentalisé’
l’influence de moins en moins forte des
cultures traditionnelles
l’urbanisation
Economiques
le développement du commerce interna-
tional d’aliments traités
la puissance et l’efficacité de la publicité
et du marketing de produits néfastes pour
la santé à l’échelle mondiale
la généralisation des métiers sédentaires
et de l’intégration des femmes dans la
vie active
Comportementaux
l’adoption relativement précoce de com-
portements néfastes pour la santé, comme
le tabagisme
les changements d’habitudes alimentaires
en termes de restauration et de consom-
mation de viande et de produits laitiers.
Il faut mettre en place des
politiques encourageant des
choix sains pour limiter les
conséquences néfastes.
Quel type de réaction peut-on envisager
face à ces conditions dans les pays en
développement ? Il est clair que les sociétés
ne peuvent pas faire marche arrière concer-
nant les principaux facteurs énumérés ci-
dessus. Par conséquent, des politiques
encourageant des choix individuels sains
doivent être mises en place pour réduire
les risques et les conséquences néfastes
associés. Un domaine d’intervention clé
concerne les systèmes de soins des pays en
développement, actuellement mal équipés
pour aider leurs populations à adopter des
styles de vie sains. La Banque mondiale
décrit comme suit quelques-uns des pro-
blèmes systémiques qui affectent de façon
disproportionnée les personnes atteintes de
maladies chroniques :
‘Le paiement régulier d’honoraires élevés
aux prestataires de soins constitue une
menace pour les personnes atteintes de
maladies chroniques qui nécessitent un
traitement permanent malgré les efforts
consentis pour leur fournir un libre accès
aux soins. De plus, les relations entre les
soins primaires et secondaires sont presque
inexistantes et il n’existe aucun mécanisme
efficace pour le suivi des patients. De nom-
breux systèmes de collecte de données sont
en place, chaque centre assurant l’archi-
vage de ses propres dossiers et il n’existe
aucun mécanisme permettant aux prestatai-
res de soins d’échanger des informations
entre eux sauf lorsque des patients informés
gèrent eux-mêmes cet aspect.’1
Les responsabilités du système
de soins
Les systèmes de soins des pays pauvres
parviennent à peine à couvrir les besoins
sanitaires de base de leurs citoyens. La
charge supplémentaire que représentent
le dépistage, le diagnostic et le traitement
du nombre croissant de personnes atteintes
de maladies chroniques ou à haut risque
d’en développer menace de paralyser les
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du nombre de jours de travail perdus pour
cause de maladie et en termes de gain de
productivité. En dehors du cadre profession-
nel formel, les programmes publics doivent
être conçus de façon à toucher un nombre
maximal de travailleurs du secteur informel ;
l’information est un élément clé.
Adopter une approche intégrée
Dans les pays en développement, les servi-
ces de soins spécifiques, comme les soins
prénataux, l’immunisation, la supplémen-
tation de micronutriments, la planification
familiale et la prévention ou le traitement du
VIH/SIDA, sont assurés par un multitude de
programmes publics financés par des do-
nateurs. Il n’est pas difficile d’imaginer des
moyens simples d’étendre chacun de ces
de principes sur lesquels devraient se baser
les réformes des systèmes de soins.
Pratiquer la prévention
Les traitements qui seraient rentables dans les
pays à faibles et moyens revenus – comme
les antihypertenseurs et les hypocholestérolé-
miants sont hors de portée de la plupart des
personnes des régions en développement.
Dans le cas du diabète, plus de 80 % des
soins médicaux sont disponibles dans les
pays riches ne vivent que 20 % des per-
sonnes atteintes de la condition.2 Les mesures
préventives revêtent donc une importance
énorme dans les pays en développement.
Les initiatives de prévention doivent être
mises en œuvre au moment où et là où les
populations sont les plus réceptives un élé-
ment critique qui varie selon les populations.
Puisque de nombreuses personnes des pays
en développement ne bénéficient pas d’un
accès libre et permanent à un système de
soins formel, les approches préventives et
les incitants au sein de la collectivité peu-
vent s’avérer très efficaces. Les enfants sont
probablement plus réceptifs lorsqu’ils sont à
l’école, des comportements alimentaires
sains et la pratique d’une activité physique
peuvent devenir la norme au sein de leurs
groupes. Les lieux de travail peuvent être
conçus en tenant compte de la promotion
de la santé et les employés peuvent être
encouragés à atteindre certains objectifs en
matière de comportement sain. De telles me-
sures sont rentables en termes de réduction
Les systèmes de soins des pays pauvres parviennent à peine à couvrir les besoins sanitaires fondamentaux.
© EU / F.Lefèbvre
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programmes pour inclure la prise en charge
des maladies chroniques notamment le
dépistage, la prévention et le traitement.
Par exemple, l’éducation et le conseil en
matière de nutrition pour éviter l’obésité
pourraient être intégrés aux programmes
existants contre la malnutrition afin de pro-
mouvoir une meilleure compréhension des
risques liés à une mauvaise alimentation à
chaque étape de la vie. Les familles au sein
desquelles des personnes sous-alimentées
cohabitent avec des personnes suralimen-
tées, même si elles sont actuellement rares,
constituent un problème croissant dans cer-
tains pays en développement.3 Tous les mem-
bres de ces familles ont besoin de conseils
sur les habitudes alimentaires saines. En
outre, le passage de la sous-alimentation à
la surconsommation se produit rapidement
et risque de se généraliser dans presque
tous les pays en développement.
4
Le passage de la sous-alimentation
à la surconsommation devrait
se généraliser dans la plupart
des pays en développement.
Un autre exemple de soins intégrés concerne
les nombreux programmes contre le VIH/
SIDA actuellement en place dans de nom-
breux pays pauvres. Lorsqu’un traitement
antirétroviral régulier est disponible, le VIH/
SIDA devient une maladie chronique, qui
nécessite des soins et un suivi permanents.
Une expérience menée au Cambodge a
révélé que le soutien à la gestion de la
maladie offert aux personnes atteintes du
VIH/SIDA était complémentaire aux servi-
ces nécessaires aux personnes atteintes de
diabète et d’hypertension.
5
Récompenser les comportements sains
Les trois principaux facteurs de risque des
maladies chroniques sont le tabagisme, la
mauvaise alimentation et le manque d’acti-
vité physique. Tous trois reflètent de mauvais
choix liés à des comportements néfastes
pour la santé. Si l’on pouvait trouver des
moyens simples d’encourager des choix
différents, les comportements changeraient
et le risque de développer une maladie chro-
nique chuterait. Arriver à un changement de
comportement à long terme est compliqué
et constitue un véritable défi, mais il s’agit
d’un élément essentiel de la gestion des
maladies chroniques. Les systèmes de soins
doivent renforcer leur efficacité en termes
d’encouragement et de soutien aux chan-
gements de style de vie durables.
Les incitants ont plus de chance de s’avérer
efficaces que les menaces pour induire un
changement de comportement dans les pays
en développement, où de nombreuses per-
sonnes ne sont pas conscientes du risque de
développer une maladie chronique. En fait,
des incitants peuvent être proposés à tous les
niveaux pour encourager les populations à
poser des choix sains : au niveau macro, les
gouvernements peuvent soutenir un système
agricole qui garantisse des aliments sains
abordables et disponibles ; au niveau de
la collectivité, les organismes publics et les
sociétés privées peuvent faciliter la pratique
d’activités physiques, par exemple en pré-
voyant des zones sûres pour la pratique du
vélo ou de la marche ; et au niveau micro,
les jeunes pourraient être récompensés s’ils
renoncent à la cigarette. Toutes ces mesures
coûtent cher mais permettrait de réaliser des
économies en coûts de santé directs et indi-
rects pour la société – congés de maladie,
invalidités, décès précoces – à long terme.
Conclusion
Les pays en développement se trouvent
confrontés à une épidémie de maladies
chroniques non transmissibles, perceptible
au sein des populations pauvres. La sensibi-
Rachel Nugent
Rachel Nugent est associée principale
du programme santé du Center for
Global Development, Washington DC,
Etats-Unis. Elle a été responsable de
département et professeur d’économie
auprès de la Pacific Lutheran University
et économiste senior au sein de
l’Organisation des Nations unies
pour l’alimentation et l’agriculture.
Références
1 World Bank. Public policy and chronic
non-communicable diseases. Oxford
University Press. Washington DC, 2007.
2 International Diabetes Federation. Diabetes
Atlas 3
rd
edition. IDF. Brussels, 2006.
3 Doak CM, Adair LS, Monteiro C, Popkin B.
Overweight and underweight coexist
within households in Brazil, China and
Russia. J Nutr 2007; 130: 2965-71.
4 Popkin B. Nutritional patterns and transitions.
Popul Dev Rev 1993; 19: 138-57.
5 Janssens B, Van Damme W, Raleight B, et
al. Offering integrated care for HIV/AIDS,
diabetes and hypertension within chronic
disease clinics in Cambodia. Bull World
Health Organ 2007; 85: 880-5.
lisation à la magnitude et aux conséquences
de ce problème reste faible et la capacité à
réagir de façon appropriée par le biais de
mesures rentables est encore plus limitée.
Pourtant, la charge des maladies chroni-
ques submergera vite les systèmes de soins
fragiles des pays en développement dès
qu’une petite partie de ces populations à
risque cherchera à bénéficier de soins. Pour
réagir de façon créative à cette menace et
encourager des choix de vie sains, il est
indispensable d’impliquer les organismes
donateurs, les gouvernements nationaux et
les prestataires de soins.
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