32 Mal de dos et incapacité de travail Dr Michael F. Sullivan MA, MB, FRCS Consultant Orthopaedic Surgeon Est-ce que le « mal au dos » est un diagnostic spécifique pour lequel il existe un traitement caractéristique ? La réponse est « non ». L’article qui suit est une traduction d’un exposé donné par le Dr Sullivan à l’ICLAM, à Berlin. Il y traite le problème des « douleurs dorsales » sous trois angles : les moyens de traitement relevant de la politique de la santé, de la société et de la médecine. Lorsque l’on souffre d’un mal de dos, il s’agit d’une multiplicité de problèmes similaires qui, tous, ne présentent pas de symptômes spécifiques. Jamais un diagnostic précis ne sera posé et les douleurs seront traitées sur une base ad hoc. Nombre de médecins praticiens ayant des points de vue très différents sur la forme du traitement soignent de tels problèmes de santé. Il existe d’autres exemples de nature similaire, ainsi le colon irritable, les douleurs de la face antérieure du genou, le traumatisme par projection ou coup du lapin et les ASA SVV Infoméd 2007/2 ICLAM douleurs à la poitrine, qui tous ne sont pas spécifiques non plus. Toutes les formes de thérapie ont leurs partisans et les traitements seront cités à 80 % comme un succès, tout au moins aussi longtemps qu’un observateur indépendant n’a pas examiné les résultats à la loupe. Alors le taux de succès s’avère généralement moindre que celui de 60 %, taux qui est exigé tout à fait normalement comme résultat à atteindre pour toute méthode de traitement. J’ai abordé de trois façons différentes le problème du mode de traitement de douleurs dorsales : 1 Comment ce problème peut-il être influencé par des mesures de politique de la santé ? 2 Que peut faire la société ? 3 Que peuvent offrir les médecins et le personnel soignant ? Malheureusement, la dimension du problème est énorme. En GrandeBretagne, les maux de dos ont constamment augmenté au cours des 40 dernières années. Le nombre de jours de travail perdus qui sont imputables à des douleurs dorsales a augmenté arithmétiquement dans la popu- 33 lation au travail alors que pour sa part, le nombre d’habitants n’a crû que légèrement. En 1960, 8 millions de jours de travail étaient perdus en raison de maux de dos 1970 112 millions de jours, 1980 126 millions de jours, 1990 148 millions de jours, 2000 125 millions de jours. En d’autres termes, ce nombre double à chaque décennie. La plupart des maux de dos ne sont au départ pas spécifiques. 10 millions des jours de travail perdus sont cependant directement imputables à des douleurs dorsales en relation avec le travail. En 2005 – 2006, environ 10 millions de journées de travail ont été perdues et chaque personne concernée a manqué en moyenne 17,5 journées de travail. Ceci est un chiffre considérable, si l’on pense que l’effectif des travailleurs « blue collar » est relativement limité en Grande-Bretagne. Est-ce que des mesures de politique de la santé peuvent apporter une contribution à la solution de ce problème ? Certains pays comme la Suède, Singapour, l’Australie, le Canada et les Pays-Bas ont été en mesure d’enregistrer des succès. Par contre, la GrandeBretagne a totalement échoué. Tous les Etats n’ont pas attaqué le problème de la même façon. Alors que la Suède envisageait en 1991 d’adhérer à l’Union européenne, elle décida que quelque chose devait être fait pour atteindre un équilibre financier, spécialement dans le domaine des prestations versées pour les incapacités de travail. Jusqu’en 1991, le plein salaire était versé en cas de maladie. Mais dès 1991, ce taux a été réduit à 80 %. Durant la période de 1989 à 1994, soit en l’espace de 5 ans, le taux d’absences a baissé uniquement du fait de la réduction de 20 % d’indemnisation, passant de 9,6 % à 3,8 %. Ceci est un recul de près de 200 %. Singapour a choisi une autre approche. Chaque adulte de moins de 55 ans verse 20 % de son salaire dans un fonds central d’aide sociale. Les employeurs paient de leur côté un montant équivalent. Ceci est la même chose qu’en Grande-Bretagne. Mais alors que dans ASA SVV Infoméd 2007/2 ICLAM 34 ce dernier pays, les fonds sont versés au ministère des finances, à Singapour chaque individu a le contrôle sur sa part au fonds central d’aide sociale. Celuici est utilisé pour les prestations en cas de maladie, la prévoyance vieillesse et les prestations en cas d’incapacité de gain. Ainsi y a-t-il une grande incitation à renoncer à des prestations pour maladie et incapacité de gain et ce en faveur de prestations de vieillesse. Lorsque Tony Blair arriva au pouvoir en 1997, il a placé Frank Fiel au poste de ministre des assurances sociales. Fiel a été envoyé à Singapour pour y étudier le système de ce pays dans l’optique de l’introduire aussi en Grande-Bretagne. Blair a cependant pris par la suite une certaine distance avec ces plans et a retiré le portefeuille des assurances sociales à Field. Résultat : le nombre des jours de travail perdus entre 1990 et 2000, comme il en a déjà été fait mention plus haut, a passé de 48 millions à 120 millions. Depuis 1997, on aurait pu faire quelque chose. Il va de soi que l’on ne saurait comparer tels quels la Grande-Bretagne et Singapour, qui a une population presque exclusivement chinoise. À Singapour, il y a des liens fa- ASA SVV Infoméd 2007/2 ICLAM miliaux très étroits, raison pour laquelle la famille se liguerait contre un nourricier qui resterait inutilement à la maison pour des raisons de maladie, car les paiements proviendraient du fonds de l’aide familiale. Il en va autrement en Grande-Bretagne, où les liens familiaux sont distendus et où nombre de parents isolés et divorcés ne subissent guère de pression pour retourner au travail afin de soutenir la famille en leur qualité de parents nourriciers. Aux Pays-Bas, le problème était tout autre. Face aux prestations revendiquées, on a adopté une position de laisser-faire. En 1993, sur 100 travailleurs, 80 touchaient des prestations. Évidemment, toutes ces prestations n’étaient pas toutes imputables à des douleurs dorsales. En réalité, la part de ces dernières n’était que de 22 %. Autrement dit, un travailleur sur cinq soutenait un patient souffrant de tels maux. Comment en est-on arrivé là ? Il n’y avait aucune incitation à aller travailler. L’accès aux prestations de la sécurité sociale était aisé et on avait la garantie d’un plein salaire. Le résultat de ce système était l’escroquerie et l’abus largement répandu. Depuis 35 2000, la situation s’est cependant modifiée complètement puisque des critères stricts ont été appliqués pour poursuivre les abus. chiffre ne soit disponible, les cliniciens constatent une nette régression du traitement de douleurs dorsales par suite d’accidents de la circulation. Les Australiens et les Canadiens ont opté pour une autre voie. Ils ont décriminalisé les accidents de la circulation. Ainsi, si quelqu’un souffrait de douleurs dorsales ou d’un coup du lapin, la cause ne jouait aucun rôle. Peu importe qu’ils s’agisse d’un accident de la circulation, d’un choc à la tête en se rendant à la cave ou de travail dans son propre jardin, les douleurs dorsales étaient traitées de la même façon et jusqu’à ce que la situation s’améliore. La cause du mal et la question de la faute ne jouaient aucun rôle. Ailleurs, le problème est notable. En Grande-Bretagne, les coûts pour les accidents de la circulation se sont élevés en 2004 à 18 milliards de livres anglaises, soit 26 milliards d’Euro. Dont 13 milliards pour les coûts d’atteintes personnelles et 5 milliards pour des dommages matériels et dégâts aux véhicules. Dans l’État du Saskatchewan au Canada, les chiffres prouvent qu’en 1995, 417 personnes sur 100 000 ont quitté le travail pour des maux de dos. En 1996, après la mise en vigueur des nouvelles règles, ce taux est tombé à 296. Ceci équivaut à un recul de 30 % sur les prestations et les coûts. En Australie, le même système est appliqué depuis 2003. Bien qu’ici aucun Comment ces sommes ont été calculées ? À l’occasion de la saisie de ces montants de dommages, tous les éléments possibles sont inclus, comme par exemple la perte de gain individuelle. Il y a des coûts immatériels – la douleur, le chagrin et la souffrance. Quant à eux, les employeurs ont à s’acquitter des paiements compensatoires, des coûts des assurances et de la charge administrative. Ils doivent également faire face aux frais de recrutement, paiements pour blessures, pour dommages matériels, dommages en cas d’accidents non assurés et assumer aussi la charge liée ASA SVV Infoméd 2007/2 ICLAM 36 à l’industrie des assurances et aux frais administratifs. Pour la société dans son ensemble, la perte de productivité mise à part, ce sont des dépenses médicales et, bien sûr, des frais administratifs. Sur les 13 milliards de livres qui sont affectés aux créances issues des blessures, 9 milliards étaient imputables aux blessures à la colonne vertébrale, y compris le coup du lapin. En cas de litige, 30 % des coûts vont aux avocats, 30 % aux médecins et 30 % aux patients. Ni les avocats ni les médecins n’ont une quelconque raison de stopper le système. L’un dans l’autre, les médecins traitants ont tous un motif de s’en tenir à la procédure médico-juridique. À l’échelle mondiale, la majorité des parlementaires sont des juristes. C’est la raison pour laquelle ils se soucient de ne perdre aucun avantage financier. Que cherchons-nous à obtenir en tant qu’acteurs du domaine de la santé ? Nous tentons d’alléger les douleurs sciatiques et d’inciter les patients souffrant de douleurs dorsales à reprendre leur travail. Tous les patients souhaitent pour eux-mêmes un diagnostic ASA SVV Infoméd 2007/2 ICLAM compréhensible. Mais ceci n’est souvent pas possible avec les maux de dos. Toutefois, s’il s’agit de sciatique, il est utile de recourir à une procédure de diagnostic par imagerie. Mais j’aimerais souligner que les examens MRI montrent souvent des anomalies chez des patients sans caractéristiques particulières. Jensen constate dans son étude, qui a été publiée en 1994 dans le New England Journal of Medicine, que chez 98 personnes sans caractéristiques particulières âgées entre 20 et 80 ans et sans problèmes de dos dans leur historique de maladie, il a été constaté pour 52 % d’entre elles une hernie discale (disc bulge), une protrusion discale (disc protrusion) pour 27 % et une extrusion discale pour 1%. Toute anomalie pathologique peut être découverte au moyen d’examens MRI. Dans « Spinal Disorders », qui a été publié en 1993, Salmmen et ses collaborateurs ont soumis des enfants à des examens MRI. L’école objet de l’étude comptait 1503 enfants de moins de 15 ans. Pour chaque tranche de 38 enfants – avec et sans problèmes de dos – des examens MRI ont été entrepris. Dans les deux groupes, on a compté à chaque fois 32 % de résultats anor- 37 maux. Sur la base d’une telle investigation, il n’y a aucune raison d’engager des traitements car un résultat MRI anormal ne signifie pas qu’un patient a besoin d’un traitement particulier. Le résultat en question devrait seulement servir d’information complémentaire à un diagnostic clinique. Le problème de l’hernie discale occupe évidemment le premier rang et présente une évolution naturelle, qui a été décrite pour la première fois en 1993 par Weber à Oslo, Norvège. Il a examiné, dans une étude randomisée, en double aveugle, des interventions chirurgicales ainsi qu’une gestion conservative pour des hernies discales ; il a découvert qu’après quatre ans, aucune différence n’était constatable. Cette étude a été réexaminée minutieusement par Boos, qui présumait que les statistiques utilisées par Weber n’étaient pas exactes. Il y a évidemment aussi des patients qui, après avoir renoncé à une intervention chirurgicale, ont quand même opté plus tard pour une telle intervention. Compte tenu de cet effet, Boos est d’avis qu’il ne fait aucun doute que chez des patients affectés d’une sciatique, l’intervention chi- rurgicale sur une période de 1 à 5 ans faisait meilleure figure que le traitement conservateur. Dans le Journal of the American Medical Association (JAMA), une étude de résultats concernant des patients souffrant de la colonne vertébrale (SPORT) a été publiée en novembre 2006, qui a analysé les cas de 1244 patients pendant 5 ans. Si, après six semaines, les patients ressentaient toujours des douleurs dans les jambes, ils s’en sortaient mieux avec des interventions chirurgicales qu’avec un traitement conservateur. Si chez un tel patient la décision de l’intervention chirurgicale est tout de même prise une fois, à quel genre d’opération faut-il recourir ? La « Cochrane Null Hypothese » est probablement le meilleur moyen de déterminer l’opération appropriée. La bibliothèque Cochrane évalue les différents résultats de divers types d’interventions chirurgicales. Lorsqu’on évalue les résultats, on doit considérer celui de l’intervention aussi bien du point de vue du patient que du chirurgien. Les critères sont le soulagement de la douleur, une amélioration de l’état, le re- ASA SVV Infoméd 2007/2 ICLAM 38 tour au poste de travail, le gain et la perte économiques, enfin la qualité de vie et le taux de nouvelles interventions. Il est absolument inacceptable de procéder à une intervention chirurgicale, même si les résultats sont bons, lorsque le risque de complications est élevé. C’est pourquoi ce risque doit être inclus également dans la comparaison. En cas d’intervention sur les disques des vertèbres, ceci concerne le cauda equina syndrom précoce, les atteintes aux nerfs et vaisseaux, les infections, l’instabilité et l’arachnitis, les troubles de fonctionnement des nerfs et myeloceles. Une douleur chronique constitue l’effet négatif à long terme le plus fréquent. Compte tenu des « null hypotheses » mentionnées ci-avant – il ne fait aucun doute que l’intervention chirurgicale est préférable à pas de traitement du tout. La discectomie standard, la microdiscectomie et la chirurgie invasive minimale montrent à peu près les mêmes résultats. Aussi longtemps que l’élément déclencheur est retiré et que le nerf ou la theca ne sont pas endommagés, les résultats sont bons. ASA SVV Infoméd 2007/2 ICLAM Comment traite-t-on les maux de dos et que cherche-t-on à obtenir ? Le meilleur résultat réside manifestement en un taux élevé de retour au travail, en un taux réduit de complications et de faibles frais de traitement. Voilà le but que tout pays cherche à atteindre. Du point de vue des cliniciens, les douleurs dorsales avec mobilisation précoce devraient être traitées, pas plus de deux jours de repos au lit, avec des moyens soulageant la douleur (il ne fait aucun sens de dire au patient qu’il devrait s’accommoder de celle-ci). Puis suit, durant les quelques semaines ultérieures, un traitement physique intensif. Physiothérapie, ostéopathie et chiropratique peuvent toutes s’appliquer, et aussi longtemps que la personne exécutant le traitement le fait avec enthousiasme et s’entend bien avec le patient, les résultats sont à peu près les mêmes. L’objectif est un retour précoce au travail. Il ne faut pas donner d’incitations financières à rester à la maison. 39 Faut-il recourir à des blocages de vertèbres ? Voilà un sujet très nébuleux. La spondylolyse est – et ceci n’est pas contesté – le cas le plus fréquent que le blocage de vertèbres traite le mieux. Il y a cinq catégories de spondylolyse, en fonction de leur cause respective : 1 dysplasique 2 isthmique 3 dégénérative 4 traumatique 5 pathologique Les types les plus répandus de spondylolyses sont les isthmiques et les dégénératives. Le type isthmique apparaît chez 4 à 5 % des Européens et il n’y a donc, lorsqu’il est découvert au cours d’un examen radiologique ou MRI, pas de raison absolue de cesser le travail. Chez certains groupes d’athlètes comme les gymnastes et certains footballeurs, l’incidence de spondylolyses est de 50 %. Ceci ne veut certainement pas dire que tous ont besoin d’une opération. Savoir comment traiter des douleurs dorsales non spécifiques sans en connaître clairement la cause demeure cependant un problème entier : le pa- tient a été traité de manière conservative et la réintégration a échoué. Faut-il alors envisager des blocages de vertèbres ? Je cite Sontag, Spine 1995, « Une fois le diagnostic d’instabilité de vertèbres posé, le blocage est indiqué ». À mon avis, le blocage de vertèbres ne peut être mis en œuvre qu’à titre de dernière mesure et présente souvent de mauvais résultats. En Grande-Bretagne, nous avons procédé à une expérience prospective concernant le blocage de vertèbres, dans laquelle ce procédé a été comparé avec un programme de réhabilitation de trois semaines. La semaine avant que le patient n’entre à l’hôpital pour l’opération, un tirage au sort a lieu et suivant cela, un blocage des vertèbres est opéré ou un programme de réhabilitation de trois semaines est entrepris. Pendant ce temps, les patients restent du lundi au vendredi dans un bâtiment annexe de l’hôpital pour y suivre un programme très intensif d’éducation du dos et de physiothérapie. Ce programme pour patients « in house » peut également améliorer leur motivation et les aider à se sentir comme une équipe. Ils réali- ASA SVV Infoméd 2007/2 ICLAM 40 sent que d’autres personnes sont là pour s’entraider. Les résultats ont été testés au moyen de diverses méthodes, notamment l’indice d’incapacité Oswestery, le Shutttle walking test et le Visual pain score. Notre sentiment initial était qu’une pseudarthrose constatable sur une radiographie était un facteur très important. Ceci indiquerait à coup sûr un échec. Or, un grand nombre d’examens ont montré que tel n’est pas le cas. Il y a de cela déjà de nombreuses années, Rothman avait étudié 600 patients ayant subi des blocages de vertèbres. 39 d’entre eux souffraient de pseudarthrose. 39 patients avec blocages stables de vertèbres ont été comparés avec un groupe de même importance sans blocages et la fréquence des allègements de symptômes était pratiquement la même dans les deux groupes. Depuis lors, nombres d’études ont montré le même résultat. Nos résultats sont valables pour les 349 patients provenant de l’expérience réalisée au sujet des blocages de vertèbres et qui ont été observés pendant ASA SVV Infoméd 2007/2 ICLAM deux ans. Ce suivi a été exécuté par un observateur indépendant. À la fin de la période de deux ans, aucune différence n’était constatable entre le groupe avec blocage et celui qui recevait le programme de réhabilitation. Mais les coûts de l’intervention chirurgicale représentaient le double de ceux de la réhabilitation. En même temps que notre expérience était réalisée l’étude suédoise «Lumbar spine study ». Cette étude a révélé que des résultats légèrement meilleurs ont été obtenus avec des blocages de vertèbres que sans traitement, mais que tous les types de blocage donnaient le même résultat. En d’autres termes, un blocage très compliqué ne donnait pas de meilleur résultat qu’un autre de nature simple. Avec une fixation interne, un retour au travail légèrement plus rapide a été obtenu. Par contre, la fréquence de complications est très diverse. Le blocage postérolatéral est une opération très simple avec un taux de complication de 12 %. Un blocage postérolatéral instrumenté avait un taux de complication de 22 %. Avec un blocage de 360 degrés, qui résulte d’un blocage antérieur et postérieur, le taux 41 de complication était que 40 %. Ces résultats ont été publiés en 2003 dans l’European Spine Journal. La conception moderne ne consiste donc pas à prescrire le blocage de vertèbres, mais le remplacement de disques intervertébraux. Selon ma propre expérience et de mon point de vue, les résultats du remplacement de disques intervertébraux sont encore plus mauvais que ceux des blocages. Partout dans le monde, de nombreuses études ont été menées mais aucune ne donne réellement de bons résultats prospectifs aléatoires selon lesquels le remplacement de disques intervertébraux est sans nul doute mieux indiqué que le blocage de vertèbres. Et les résultats de blocages ne sont pas bons. Si un programme de réhabilitation était lancé, quand faudrait-il le commencer ? Le plus tôt sera le mieux. Il devrait débuter 6 semaines après que le type de maladie en question soit apparu et non pas après 6 à 12 mois seulement. Attendre ainsi donne de très mauvais résultats. Si un patient simule, est-ce important ? Ce n’est pas important car on peut normalement constater grâce à l’examen, l’historique du malade et des questions pièges si un patient simule ou non. Finalement, cette information ne peut être utilisée en Grande-Bretagne, ni en Europe, en raison de la législation sur les droits de l’homme. Quel est l’objectif ? Agir tôt et mener un traitement actif conjointement à des mesures de dissuasion financières. Le pire serait d’examiner de manière approfondie un patient et lui communiquer que quelque chose serait anormal, spécialement s’il a insisté pour passer au scanner. Les patients partent de l’idée que la high tech représente la solution intelligente, même si tel n’est souvent pas le cas. Le plus difficile est de traiter un patient avec une cicatrice dans le dos et de lui dire qu’il ne lui manque rien. Malheureusement, il y a dans toute communauté un grand nombre de patients qui ont subi un accident de travail et qui ne retourneront pas au travail, quelle que soit la méthode de traitement pour laquelle on opte. La seule manière de se comporter avec eux sont ASA SVV Infoméd 2007/2 ICLAM 42 les moyens de dissuasion financiers ; mais ceci n’est pas dans le pouvoir des médecins et la plupart des politiciens n’osent pas faire passer une telle dissuasion dans la réalité. Dans toute étude scientifique provenant d’Amérique du nord, il se révèle de surcroît que, dans les plans d’assurances pour travailleurs « blue collar », les résultats sont plus mauvais que chez les patients privés. Les patients les plus faciles à traiter sont les cadres qui ont des incitations au travail. La première chose que je demande à un patient, s’il me consulte, est de savoir son âge et sa profession et s’il a actuellement un emploi. Un patient qui a sa propre affaire travaillera à plein temps, même s’il souffre des pires problèmes de dos. Les douleurs dorsales posent un problème socio-économique et ne représentent un problème biologique que pour une infime part. Il faut des mesures de dissuasion financières pour faire retourner des patients sans douleurs dorsales spécifiques au travail et à la normalité. La carotte est meilleure que le bâton ! ASA SVV Infoméd 2007/2 ICLAM À propos de l’auteur M. Dr Sullivan est un chirurgien orthopédique et était chef du Royal National Orthopaedic Hospital de l’Université de Londres. Il est membre de la British Orthopaedic Association et fut président de la British Association of Spinal Surgeons, de l’European Spinal Surgeons, et de l’IITS Minimal Spine Surgery Society. Il a publié de nombreux articles au sujet de la chirurgie de la colonne vertébrale, ainsi que 22 livres.