Le secteur des prothèses dentaires -‐ Etat des lieux

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Le secteur des prothèses dentaires -­‐ Etat des lieux Septembre 2015 P r é a m b u l e Dans le cadre de l’animation du Cluster des Technologies Innovantes de la Santé (CTIS), l’ADN-­‐FC vient de publier un état des lieux du secteur de la prothèse dentaire. Le secteur des prothèses dentaires connait aujourd’hui de multiples évolutions : concurrence internationale, règlementations, modes de fabrication, matériaux, prise en charge des remboursements, etc. Il nous a semblé intéressant d’établir un état des lieux du secteur à l’échelle nationale et régionale avec un focus spécifique en direction du Nord Franche-­‐Comté qui concentre la majeure partie des acteurs de ce secteur d’activité méconnu. Le périmètre étudié est constitué de l’ensemble des laboratoires de prothèses dentaires se consacrant à la fabrication localisée en France métropolitaine, sans pour autant occulter le fait qu’une part non négligeable des prothèses posées en France est fabriquée à l’extérieur de nos frontières. 1. Qu’est-­‐ce qu’une prothèse dentaire ? Une prothèse dentaire est « un appareillage destiné à la restauration et au rétablissement fonctionnel et esthétique du système de manducation (action de manger) ». C’est un « dispositif médical sur mesure », au sens de l’article R. 5211-­‐6 du code de la santé publique (CSP). La fabrication de la prothèse, dont la réalisation fait intervenir un prothésiste dentaire, nécessite donc une prescription écrite préalable d’un chirurgien-­‐dentiste qui élabore les caractéristiques du dispositif sur mesure. Le prothésiste dentaire travaille « à partir des indications techniques et empreintes fournies exclusivement par le praticien ». On distingue deux types de prothèses dentaires : - les prothèses fixes, dites conjointes, qui comprennent principalement les couronnes (métalliques, céramo-­‐métalliques, céramo-­‐céramiques), les bridges et les inlay-­‐core (pièce métallique constituée de deux parties continues : un tenon qui s'insère dans la racine de la dent à couronner et une coiffe qui recouvre la partie coronaire restante de la dent qui recevra une prothèse fixée) ; - les prothèses mobiles, dites adjointes, qui sont des prothèses amovibles partielles ou complètes (appareils dentaires). Une troisième catégorie de fabrication concerne les appareillages dénommés orthèses, destinés à l’orthodontie ou aux troubles du dysfonctionnement de l’appareil manducateur ou respiratoire. L'acte prothétique permet de reconstituer les dents trop délabrées grâce à des couronnes, en métal ou en céramique. Il permet également de remplacer des dents manquantes, soit par un moyen fixe (bridge) scellé en bouche, soit par des appareils amovibles réalisés en alliage ou métal précieux ou semi précieux dits châssis métalliques, soit par des prothèses partielles ou complètes réalisées en résine synthétique de méthacrylate de méthyle. ADN-­‐FC s La Jonxion – Parc d’innovation de Belfort-­‐Montbéliard s 1 avenue de la Gare TGV s 90400 MEROUX Tél. 03 39 03 49 00 s [email protected] s www.adnfc.fr Les prothèses dentaires sont : - prescrites par un chirurgien-­‐dentiste ; - fabriquées sur mesure pour un patient ; - fabriquées par un prothésiste dentaire sur la base de la prescription du chirurgien-­‐dentiste ; - des dispositifs sur-­‐mesure devant répondre aux exigences de la directive européenne 93/42/CEE, c’est-­‐à-­‐dire répondre aux exigences essentielles de santé et de sécurité, et satisfaire à une procédure de conformité ; - soumises aux règles de matériovigilance en cas d’incidents ou de risques d’incidents graves. 2. Le marché français Le chiffre d’affaires de la profession de prothésistes dentaires est évalué en 2010 par l’Union Nationale Patronale des Prothésistes Dentaires (UNPDD) à 1,165 milliards d’euros hors importations. Longtemps épargné par la crise, le marché de la santé bucco-­‐dentaire est en baisse de 1,5 % au troisième trimestre 2014. Ce sont les laboratoires de prothèses français qui sont le plus durement touchés, avec une baisse de leur activité de 3 % au troisième trimestre 2014. Le décrochage du marché de la prothèse par rapport au reste des soins est dû majoritairement aux restrictions que s’imposent les patients en cette période de difficultés économiques et sociales : les prothèses, mal remboursées, passent pour des soins de luxe. 3. Les laboratoires de prothèses dentaires en France et dans le Nord Franche-­‐Comté 3.1.
Caractéristiques Il existe environ 3 800 laboratoires en France, chiffre en constante diminution (-­‐ 28% en 10 ans). Par ailleurs, on assiste à une concentration du secteur avec de nombreuses disparitions d’entreprises n’employant aucun salarié. Près de 6 laboratoires sur 10 emploient entre 1 et 3 salariés. Etat des lieux du secteur des prothèses dentaires – Septembre 2015 2 /10 Source : étude de branche UNPDD -­‐ 2013 Même si leur nombre reste prédominant, les laboratoires spécialisés dans les prothèses fixes sont de moins en moins nombreux, alors que le nombre d’entreprises en CAO se développe. Source : étude de branche UNPDD -­‐ 2013 Les laboratoires pluridisciplinaires sont ceux dont la réalisation de prothèses fixes et la réalisation de prothèses mobiles représentent pour chacune plus de 45% du chiffre d’affaires total. Source : étude de branche UNPDD -­‐ 2013 Une part importante des entreprises spécialisées en prothèses mobiles et fixées n’emploie aucun salarié. Etat des lieux du secteur des prothèses dentaires – Septembre 2015 3 /10 3.2.
Répartition géographique 3 régions françaises concentrent près de 40% des laboratoires. En 2012, 49 laboratoires seulement sont présents en Franche-­‐Comté. Hormis la Corse, La région Franche-­‐
Comté est celle où les laboratoires sont le moins représentés sur le territoire. Source : étude de branche UNPDD -­‐ 2013 Source : étude de branche UNPDD -­‐ 2013 Etat des lieux du secteur des prothèses dentaires – Septembre 2015 4 /10 Les laboratoires sont aussi sous-­‐représentés en Franche-­‐Comté par rapport à la répartition de la population : 1,5% des laboratoires au niveau national pour 2% de la population totale. En revanche, en région PACA, les laboratoires sont sur-­‐représentés comme c’est le cas pour la répartition des soins médicaux en général : 12% des laboratoires pour seulement 8% de la population. 3.3.
Les acteurs dans le Nord Franche-­‐Comté Une trentaine de laboratoires de prothèses dentaires sont implantés dans l’agglomération du Pays de Montbéliard et le département du Territoire de Belfort, représentant environ une centaine d’emplois. Le nombre d’entreprises de la profession dans le Nord Franche-­‐Comté représente près de 60% du nombre total sur l’ensemble de la Franche-­‐Comté. En dehors de la Mutualité Dentaire de l’Est, ces laboratoires sont de toutes petites structures, de 0 à 4 salariés. La Mutualité Dentaire de l’Est est une exception car elle travaille uniquement pour les mutualités partenaires qui fournissent les centres de santé. Elle comprend 4 sites de production de prothèses dentaires (en Alsace, dans le Territoire de Belfort et dans le Doubs) et emploie 88 salariés dont 36 sur le site d’Argiésans (90). 4. Le métier de prothésiste dentaire Autrefois, les « mécaniciens-­‐dentistes », puisque que tels étaient leur nom, travaillaient en tant que salarié dans le cabinet dentaire. Ils se sont de plus en plus installés à leur compte pour fabriquer des prothèses dans leur laboratoire. Après la seconde guerre mondiale, les développements technologiques ont permis un essor considérable du marché de la prothèse dentaire. Les métiers de prothésiste dentaire et de chirurgien-­‐dentiste deviennent par la suite deux professions distinctes, l’une dépendant du Ministère de l’Artisanat et l’autre du Ministère de la Santé. L’activité de prothésiste dentaire consiste « dans le fait d’analyser les cas prothétiques, de concevoir, élaborer, réparer, fabriquer et enfin mettre sur le marché des dispositifs médicaux sur mesure » (Convention collective nationale des prothésistes dentaires du 18 décembre 1978). Les chirurgiens-­‐dentistes ont l’exclusivité de la vente. Les prothésistes ne peuvent pas choisir les patients du chirurgien-­‐dentiste et les patients consommateurs ne peuvent pas choisir leurs fournisseurs prothésistes. Les seuls clients possibles pour les prothésistes sont donc les chirurgiens-­‐dentistes et les médecins stomatologues. Etat des lieux du secteur des prothèses dentaires – Septembre 2015 5 /10 Le nombre d’actifs total en France (salariés et non salariés) au sein des laboratoires de prothèses dentaires est de 18 850. Ils sont répartis de la manière suivante : Source : étude de branche UNPDD -­‐ 2013 Source : étude de branche UNPDD -­‐ 2013 On constate une forte progression du nombre des actifs entre 2010 et 2012. Source : étude de branche UNPDD -­‐ 2013 Plus de 4 actifs sur 10 sont employés par les laboratoires de la plus grande strate. Etat des lieux du secteur des prothèses dentaires – Septembre 2015 6 /10 4.1.
La formation des prothésistes dentaires Les formations existantes sont les suivantes : - Bac Pro prothèse dentaire : diplôme de base - BTM (Brevet Technique des Métiers) prothésiste dentaire (formation continue) : encadrement d'équipe - BTMS (Brevet Technique des Métiers Supérieur) prothésiste dentaire (formation continue) : permet de diriger un laboratoire. En complément, un BTS prothésiste dentaire a été créé en 2013. A noter : la fabrication des prothèses, de plus en plus assistée par ordinateur, et l’évolution des matériaux utilisés obligent le prothésiste à une réactualisation régulière de ses connaissances. Source : étude de branche UNPDD -­‐ 2013 Les lycéens se détournent ou méconnaissent ces métiers pourtant passionnants dans lesquels ils seraient épargnés par le chômage. Par ailleurs, beaucoup de centres proposent une formation insuffisamment professionnelle. En Franche-­‐Comté, deux formations sont proposées : le Bac Pro et le BTM au CFA Hilaire de Besançon. 5. La fabrication des prothèses dentaires Le prothésiste-­‐dentaire est en charge de la fabrication de A à Z. Dans le cas où il lui manquerait des équipements ou des effectifs, la sous-­‐traitance est très bien organisée au sein du milieu de la prothèse dentaire. La co-­‐traitance est un usage courant dans le but de gagner des contrats entre plusieurs prothésistes. Les équipements nécessaires à l’activité de fabrication de prothèses dentaires sont les suivants : - Fonderie - Tours horizontaux - Micro-­‐tours pour usinage - Fours céramiques - Four pour coulée - Polymérisateur à résine synthétique. Les matériaux pour la fabrication des prothèses sont les suivants : - Pour les armatures : cobalt chrome et titane, métaux précieux ou semi-­‐précieux - Pour les cosmétiques : céramique et résines. Etat des lieux du secteur des prothèses dentaires – Septembre 2015 7 /10 5.1
La mise sur le marché : généralités sur la règlementation Les prothèses dentaires (amovibles ou fixes, par exemple les couronnes, bridges,…), fabriquées spécifiquement pour un patient déterminé, sont considérées comme des dispositifs médicaux sur mesure. A la différence des dispositifs médicaux fabriqués en série, le fabricant ne porte pas l’entière responsabilité de la conception du produit. En effet, le fabricant doit se conformer aux caractéristiques définies par le professionnel de santé. Cependant, si une modification s’avère techniquement nécessaire au cours de sa fabrication, sur la conception de la prothèse, par rapport à la prescription initiale, elle devra être réalisée après avoir obtenu l’accord du prescripteur. armature cosmétique DM implantables (ostéo à intégrer) (marquage CE, standards industriels) DM sur mesure (DMSM) (supra non implantables) Fabriquée par les grands Fabriquée par les prothésistes groupes (brevets) tels que dentaires. Straumann, Zimmer. DM sur mesure, armature Fabriquée par les prothésistes usinée par un sous-­‐traitant dentaires. industriel, avec certificat de conformité. Le chirurgien-­‐dentiste doit s’assurer que celui-­‐ci est un fabricant identifié comme tel par les autorités sanitaires. A cet effet, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) met à disposition des praticiens la liste des responsables de la mise sur le marché de dispositifs médicaux sur mesure qui se sont déclarés. La prothèse dentaire doit être livrée au chirurgien-­‐dentiste avec une déclaration de conformité aux exigences essentielles. En effet, le prothésiste doit garantir que les caractéristiques spécifiques de la prothèse sont en conformité avec toutes les exigences de la directive 93/42/CEE du 14 juin 1993 relative aux dispositifs médicaux. Une prothèse dentaire française garantit donc aux patients d'avoir en bouche un produit conforme à la réglementation française, composé de matériaux ayant un marquage CE. Tout comme la plupart des activités industrielles, la fabrication de prothèses dentaires est soumise à la mondialisation et à la délocalisation des services. La fabrication d'une prothèse dentaire peut ainsi être sous-­‐traitée à des opérateurs situés en dehors du territoire français. Cependant, le fabricant qui sous-­‐traite toute ou partie de la production de la prothèse dentaire réalisée sur mesure est responsable du produit final. A l’issue de l’acte prothétique, le chirurgien-­‐dentiste remet au patient la déclaration de conformité du dispositif médical (article L. 1111-­‐3 du Code de la santé publique). Cette déclaration doit également être versée au dossier médical et tenue à la disposition du patient (article R. 5211-­‐51 du Code de la santé publique). Etat des lieux du secteur des prothèses dentaires – Septembre 2015 8 /10 5.2
Fixation des prix et décision de prise en charge L’assurance maladie rembourse une partie des soins à la préparation, de la pose de la prothèse et de la prothèse dentaire, selon les codes spécifiques en vigueur. Les prix de vente de la prothèse dentaire sont libres dans un cabinet dentaire. Leurs tarifs sont intégrés dans un prix de prestation globale. Ils varient ainsi largement et sont déconnectés des remboursements de la Sécurité Sociale. 6. Etude de l’attractivité de l’industrie 6.1.
Menace de nouveaux entrants Les chirurgiens-­‐dentistes ont la possibilité de commander directement à des sous-­‐traitants étrangers et les laboratoires français peuvent sous-­‐traiter toute ou partie de la fabrication des prothèses qui leur sont commandées. Une prothèse réalisée en France pour un coût de 150 euros peut être produite au Maroc ou en Inde pour 25 ou 50 euros. Pas étonnant que les laboratoires soient tentés de sous-­‐traiter la fabrication. Mais le risque est de trouver des matériaux douteux dans l’alliage métallique du support. Sur les 11,4 millions de prothèses dentaires posées chaque année en France, plus de 10% sont fabriquées à l'étranger. Et selon la Confédération Nationale des Syndicats Dentaires (CNSD), « la majorité des importations se fait en provenance de Chine (28,8%), de Hong Kong (28,3%), de Turquie (16,8%), du Maroc (9,4%) et de Madagascar (3,7%) ». En somme, 9 prothèses dentaires importées sur 10 proviennent de pays hors Union européenne... Par ailleurs, on connait moins la partie concernée par le tourisme médical. En 2011, 19 350 français se sont rendus à l'étranger pour se faire soigner les dents. Les factures sont quasiment divisées par deux par rapport aux prix pratiqués en France, et la Sécurité Sociale intervient également. La concurrence étrangère et la pénurie de professionnels qualifiés menace l’existence même de la spécialité en France et pourrait poser des problèmes de santé publique. 6.2
L’évolution des tarifs et de sa transparence Quel que soit le pays de fabrication de la couronne, la minorisation du prix d’achat n’est pas répercutée dans le prix de vente. L'article 57 de la loi « Hôpital, patients, santé, territoires » impose aux professionnels de santé qui posent des prothèses dentaires d'informer leurs patients du prix d'achat de ces prothèses, ainsi que le montant de leurs honoraires qui doit être bien distinct du tarif de la prothèse. Le devis imposé par cet article doit préciser le nom et l'adresse du fabricant de la prothèse, le lieu de fabrication ainsi que les informations permettant d'identifier le dispositif concerné et son prix d'achat. Une pression s’exerce actuellement sur la transparence des prix pour le chirurgien-­‐dentiste, et pourrait déboucher sur une pression des prix au niveau du prothésiste, déjà contraint par un prix plancher minimum. Etat des lieux du secteur des prothèses dentaires – Septembre 2015 9 /10 Conclusion Même s’il a tendance à se restreindre en période de crise actuelle, le marché de la prothèse est promis à un bel avenir car le marché de l’esthétique se développe très vite en raison du vieillissement de la population, de l’allongement des carrières et la volonté des seniors de conserver une apparence impeccable. Il existe un savoir-­‐faire français, haut de gamme, et positionné sur le sur-­‐mesure, la sécurité et la qualité, qui ne demande qu’à être exploité, si de nouvelles générations de jeunes professionnels veulent bien venir rejoindre ces métiers. Toutefois, les prothésistes dentaires français, pour maintenir leur longueur d’avance face à la concurrence internationale, doivent innover et investir dans leur laboratoire pour suivre les avancées technologiques (CFAO). Cela leur permettra de lutter contre la concurrence des industriels qui veulent équiper les cabinets dentaires pour réaliser eux-­‐mêmes les prothèses et de lutter contre la concurrence déloyale des pays à bas coûts de main d'œuvre et leurs importations de prothèses, dont on ne connait pas l'impact sur la santé publique mais qui sont pourtant remboursées par la Sécurité sociale et les mutuelles au même titre que les prothèses fabriquées en France. Avec 60% des prothésistes dentaires franc-­‐comtois, le Nord Franche-­‐Comté est l'espace économique régional qui pèse le plus dans ce secteur. Dynamique et modeste à la fois, doté d’un savoir-­‐faire de qualité dans les domaines de l’usinage et du polissage médical conforme à sa tradition d’excellence industrielle, le Nord Franche-­‐Comté possède des entreprises innovantes mettant au point de nouveaux procédés de fabrication afin de garantir une offre de qualité, réactive et compétitive, permettant le maintien et le développement des productions françaises. Etat des lieux du secteur des prothèses dentaires – Septembre 2015 10 /10 
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