L`importance des representations de l`infirmière - chu

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INSTITUT DE FORMATION DES PROFESSIONNELS DE SANTE
FILIERE INFIRMIERE, PROMOTION 2010-2013
44 chemin du Sanatorium
25030 Besançon cedex
TRAVAIL D'INITIATION A LA RECHERCHE DE FIN D'ETUDES EN SOINS INFIRMIERS
DIPLOME D'ETAT INFIRMIER SESSION JUILLET 2013
Thème n°16 : Prise en soins infirmiers des patients atteints de maladie mentale
(Psychose, T.O.C., dépression)
L’IMPORTANCE DES REPRESENTATIONS DE L’INFIRMIER(E)
DANS LE RETABLISSEMENT ET LA REHABILITATION DES
PERSONNES ATTEINTES DE PSYCHOSES CHRONIQUES
Semestre 6
UE 3.4 S6 : initiation à la démarche de recherche
UE 5.6 S6 : analyse de la qualité et traitement des données scientifiques et
professionnelles
UE 6.2 S6 : anglais
Présenté par Marie COSOTTI, Aurélie LYAUTEY, Vivien LYAUTEY et Ambre UMEC
Sous la direction d’Agnès SORDET
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INSTITUT DE FORMATION DES PROFESSIONNELS DE SANTE
FILIERE INFIRMIERE, PROMOTION 2010-2013
44 chemin du Sanatorium
25030 Besançon cedex
TRAVAIL D'INITIATION A LA RECHERCHE DE FIN D'ETUDES EN SOINS INFIRMIERS
DIPLOME D'ETAT INFIRMIER SESSION JUILLET 2013
Thème n°16 : Prise en soins infirmiers des patients atteints de maladie mentale
(Psychose, T.O.C., dépression)
L’IMPORTANCE DES REPRESENTATIONS DE L’INFIRMIER(E)
DANS LE RETABLISSEMENT ET LA REHABILITATION DES
PERSONNES ATTEINTES DE PSYCHOSES CHRONIQUES
Semestre 6
UE 3.4 S6 : initiation à la démarche de recherche
UE 5.6 S6 : analyse de la qualité et traitement des données scientifiques et
professionnelles
UE 6.2 S6 : anglais
Présenté par Marie COSOTTI, Aurélie LYAUTEY, Vivien LYAUTEY et Ambre UMEC
Sous la direction d’Agnès SORDET
3
A nos familles respectives pour l’amour, le soutien et les encouragements
qu’ils nous témoignent au quotidien.
4
REMERCIEMENTS
Tous nos remerciements à nos formateurs responsables des différentes unités
d'enseignements en relation avec le mémoire, pour leurs présentations des différentes unités
et l'élaboration du guide méthodologique sur lequel nous avons pu nous appuyer tout au long
de notre travail :
Madame SORDET Agnès, cadre formatrice à l'Institut de Formations des
Professionnels de Santé de Besançon
Madame LAUER Karine, cadre formatrice à l'Institut de Formations des
Professionnels de Santé de Besançon
M. DURANT Eric, cadre formateur à l'Institut de Formations des Professionnels de
Santé de Besançon, qui nous a permis de mener à bien se mémoire
Nous remercions tout particulièrement Madame SORDET Agnès pour son
implication, sa perspicacité, son accompagnement, son soutien durant les différentes étapes
des temps de guidance ainsi que sa précieuse aide lors de nos recherches bibliographiques.
Ainsi que de nous faire l'honneur d'être l'un des membres du jury lors de notre soutenance.
Nous tenons également à remercier Madame TETU Élisabeth, documentaliste à
l'Institut de Formations des Professionnels de Santé de Besançon, pour son aide lors de nos
recherches bibliographiques et la constitution de notre bibliographie.
Un grand merci aux documentalistes de la Bibliothèque Universitaire des Sciences
Médicales et Pharmacologiques de Franche-Comté.
Nous remercions les infirmiers des différents services du Centre Hospitalisé
Spécialisé pour leurs disponibilités, leurs réponses.
Un grand merci également aux professionnels ressources pour leur disponibilité,
leurs conseils et leurs encouragements.
Un grand merci tout particulièrement à nos familles, nos amis et camarades de l'IFSI
pour leur soutien et leurs encouragements.
5
SOMMAIRE
INTRODUCTION……………………………………………………………………page 8
SITUATION INTERPELLANTE……………………………………………………page 10
I. QU’ENTEND-T-ON PAR TROUBLES PSYCHOTIQUES ?
1. Du normal au pathologique……………………………………………………page 13
2. Le délire…………………………………………………………………………...page 14
3. Définition de la psychose………………………………………………………page 15
4. Classification des différentes psychoses…………………………………...page 15
II. CONNAISSANCES ET REPRESENTATIONS DE L’INFIRMIER.
1. Les formations…………………………………………………………………page 18
2. Le cadre législatif……………………………………………………………...page 19
3. Rôle infirmier et connaissances…………………………………………….page 19
4. La relation d’aide et ses outils………………………………………………page 22
5. Les représentations…………………………………………………………...page 22
III. CONTINUITE DES SOINS
1. Le Rétablissement…………………………………………………………….page 26
2. La Réhabilitation………………………………………………………………page 27
3. Prévention de la rechute……………………………………………….........page 28
CONCLUSION……………………………………………………………………….page 32
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES…………………………………………...page 34
ANNEXES
Annexe N°1………………………………………………………………………….page 37
Annexe N°2………………………………………………………………………….page 38
Annexe N°3………………………………………………………………………….page 41
6
INTRODUCTION
7
Dans l'histoire de la médecine ainsi que dans celle de la philosophie, « la folie est
reliée à un désordre ou une incohérence de la pensée comme de l'action humaine »
VOLTAIRE, 1764. La nature de ce désordre, ses motifs ont été décrits de différentes façons
suivant l'état des connaissances, des croyances et du temps. En 1946, l’Organisation
Mondiale de la Santé définit cette dernière comme « un état de complet bien être physique,
mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. ».
Actuellement cette organisation, considère que cinq des dix pathologies les plus
préoccupantes au vingt et unième siècle, dont la schizophrénie, concernent la psychiatrie.
Par la confrontation de nos recherches théoriques avec l’analyse des entretiens menés
auprès d’un infirmier diplômé d’état et d’un infirmier de secteur psychiatrique, nous tenterons
de répondre à notre question de départ:
En quoi les connaissances et représentations de l'infirmier(e)
peuvent-elles influencer le rétablissement et la réhabilitation
d'une personne atteinte de troubles psychotiques dans une structure spécialisée ?
8
SITUATION INTERPELLANTE
9
Suite à la mise en commun de nos différentes situations d’appel, nous avons décidé
de nous centrer sur une expérience vécue en stage qui fut le point de départ de notre travail
et que nous allons décrire ci-dessous.
Madame V., âgée de 37 ans, souffre d'une schizophrénie paranoïde avec
hallucinations auditives qui se traduit par le devinement de la pensée, une attitude d'écoute,
l'anosognosie, un délire mystique, des rites de lavages des mains par phobie des microbes
et surtout par peur de l'empoisonnement. Cette personne émet également des cris, soliloque
beaucoup, présente un syndrome dissociatif, un isolement social, des idées de toute
puissance à type de mégalomanie, une bizarrerie de contact, une angoisse, un néologisme
et un discours avec barrage. Elle est à ce jour hospitalisée en psychiatrie dans un service
accueillant des psychotiques chroniques non stabilisés. Nous en sommes à sa vingt-etunième
hospitalisation. Elle possède un appartement à Besançon où elle s'y rend en
permission de temps en temps car elle a des difficultés ‘‘à rester enfermée''.
A propos de son délire, depuis deux ans, nous en connaissons quelques éléments.
« Elle est la fille de Dieu, sa sœur est la Sainte Vierge. Elle a un persécuteur se prénommant
Richard GERE qui la harcèle à longueur de journée et aimerait avoir une relation avec elle
qu'elle refuse. Elle est actrice. Il devine ses gestes, ce qu'elle va faire. Elle en a assez d'être
harcelée et désire appeler la police car « nous n'avons pas le droit d'être harcelés de cette
manière ». Richard GERE commanderait les infirmiers du pavillon pour que ceux-ci
l'empoisonnent et provoquent sa mort. Depuis quelques jours, la patiente crie beaucoup :
« Sort de ma tête ! », « Dégage ! », « Je ne veux pas de toi ! ». En cas de cris et sur
prescription médicale, les infirmiers du service peuvent lui donner, un neuroleptique antiproductif. Cependant cela leur est très difficile étant donné que madame V. pense que ceuxci veulent l'empoisonner. Elle prenait sur un plateau tous ses repas dans une pièce isolée
par peur d'être contaminée. J’ai aussi remarqué, que pour s’apaiser, la patiente dessinait
beaucoup mais refusait toute autre activité et ne s’inscrivait plus dans un projet de vie.
Ce jour là, étant étudiante infirmière dans le service, je me suis sentie obligée d’entrer
dans son délire afin de négocier avec elle, la bonne observance de son traitement
neuroleptique. La négociation a été très difficile.
Questionnement :
Lors de la mise en commun de nos différentes situations d’appel au tout début de notre
travail, cette situation nous a tous interpelés car elle soulevait plusieurs questions par rapport
à notre future pratique soignante, dont les principales étaient les suivantes :
10
Est-ce que les connaissances et les représentations des infirmiers peuvent influencer
la prise en soins de cette patiente ?
Quel est l’objectif de cette prise en charge en institution spécialisée et quel sens lui
donner ?
Comment gérer les situations de crises et d’urgence avec ce type de patient ?
Faut-il parfois adhérer temporairement au délire pour favoriser le consentement aux
soins du patient dans le cadre d’une négociation ?
Un patient atteint de troubles psychotiques chroniques peut-il se rétablir et être
réhabilité ? Comment l’infirmier peut-il y contribuer ?
11
I)
QU’ENTEND-T-ON PAR TROUBLES PSYCHOTYQUES ?
« Même atteints de troubles psychotiques, nous ne sommes pas des maladies mais
des personnes. »
Usagers de soins canadiens.
12
I. Que peut-on entendre par troubles psychotiques?
De par nos recherches et en nous appuyant sur les cours dispensés à l'Institut de
Formation des Professions de Santé de Besançon, lors de notre deuxième année de
formation, nous avons pu identifier que le terme de troubles psychotiques se référençait à la
grande famille de pathologies englobées sous le terme de psychose. Ce terme a été
introduit, comme alternative au terme de « folie », par le baron et médecin viennois Ernst
Von FEUCHTERSLEBEN en 1845, au sens très global de « maladie de l'esprit ». Le DSM III
(Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders de l'American Psychiatric Association)
a tenté de réduire celui de « psychose » à l’adjectif « psychotique ».
1. Du normal au pathologique
Pour comprendre la psychose dans sa globalité, nous devons être au clair avec les
différents courants théoriques sur lesquels se basent les soins dispensés aux personnes en
souffrance psychique et développés dans Le métier d'infirmière en santé mentale de Jacky
MERKLING.
Le courant systémique permet de considérer l'individu dans l'ensemble des systèmes
qui gravitent autour de lui : c'est à dire familial et environnemental principalement. Il ne
s'inscrit pas dans le passé vécu par l'individu, mais se base sur la connaissance du contexte
provoquant ou majorant certains symptômes.
Le courant cognitivo-comportementaliste tente de réduire ou faire disparaître les
symptômes en modifiant les comportements et attitudes du malade. L’action principale des
changements s’appuie sur les mécanismes cognitifs de la pensée. Il tente de transformer les
comportements négatifs pour construire des comportements positifs plus adaptés.
Le modèle organique ou médical consiste à la mise en place de traitements,
permettant la diminution voire la disparition des symptômes, selon le diagnostic posé.
Enfin, le courant psychanalytique repose essentiellement sur les trois premières
instances: le « Ça », le « Moi » et le « Surmoi » constituant « l’appareil psychique », théorisé
par Sigmund FREUD.
Le « Ça » est le pôle pulsionnel de la personnalité, le domaine de l’instinctif, du biologique
qui ne connaît ni règles de temps ou d’espace, ni interdits. Totalement inconscient, il est régit
et dirigé par le seul principe de plaisir.
Le « Moi » est la partie de la personnalité la plus consciente. Elle se forme à partir
13
d'identifications et de gratifications successives. De par son contact avec la réalité
extérieure, lorsque le désir et les pulsions du « Ça » ne peuvent pas être acceptés, le
« Moi » met en place des opérations inconscientes appelées mécanismes de défense. C’est
lors de la constitution du « Moi », avant, pendant et juste après la naissance, que peut se
former la personnalité psychotique. Ce sera lors de sa puberté, qu’au lieu d'expériences
réparatrices, le sujet vivra une éclosion de la psychose.
Enfin, le « Surmoi » est l'instance refoulante (héritier du complexe d‘Oedipe) et son activité
est partiellement inconsciente. Il est le support de tous les interdits et des contraintes
sociales et culturelles. Cependant selon Dominique GIFFARD, infirmier de Secteur
Psychiatrique, gérant du site Psychiatrie Infirmière; le psychotique est un « individu qui s'est
construit un système de relations à l'Autre de type psychotique [… qui] ne connaît pas
l’Oedipe. ».
C’est pourquoi, dans les psychoses, le « Moi » prend le parti du « Ça » pour détruire la
réalité du « Surmoi » et la remplacer par une néo-réalité: le délire. Ce dernier est bâtit sur les
exigences du « Ça ».
2. Le délire
D’après l’ouvrage collectif Processus psycho-pathologiques, UE 2.6 et les cours du
Professeur VANDEL que nous avons eu lors de notre deuxième année de formation, nous
savons que le délire peut se définir comme un processus se manifestant de manière
aiguë (en quelques heures ou en quelques jours). Il s’impose au patient qui y adhère
complètement et est alors incapable de distinguer la réalité et la subjectivité de « son
monde ».
Il se veut polymorphe à la fois au niveau des thèmes et des mécanismes. Les thèmes ont un
caractère variable et riche (grandeur, richesse, puissance, possession, persécution, jalousie,
dévalorisation, modification corporelle, influence, mysticisme). Les mécanismes eux sont
multiples, ils peuvent s’associer et sont observables : hallucinations auditives et/ou visuelles,
interprétations
délirantes,
fausses
intuitions,
imagination,
dépersonnalisation…).
L'organisation du délire peut être systématisée, c’est-à-dire organisée, possédant une
certaine logique et communicable ; ou non systématisée : délire flou, sans logique interne et
difficilement communicable. Durant cette phase, l’entourage ne reconnaît plus le patient.
Par ailleurs pour Dominique GIFFARD, infirmier de Secteur Psychiatrique, gérant du site
Psychiatrie Infirmière: « Le délire est une tentative de reconstruction de la réalité perdue. Il y
a toujours un aspect négatif que sont le déni et la dissociation, et un aspect positif qui est le
délire. Les hallucinations, symptôme psychotique, traduisent la présence d'une faille dans le
système symbolique du malade. Les voix qu'il entend, les visions qui s'imposent à lui
signifient quelque chose de son histoire: un vécu qui n'a pas été symbolisé, que le sujet ne
14
peut garder en lui et qu'il fait alors revenir du dehors, sous la forme d'une hallucination. »
3. Définition de la psychose
Le terme de psychose désigne en psychiatrie « un type de pathologie mentale,
caractérisée par un trouble grave de la relation avec la réalité, des troubles de l'identité ou de
la conscience de soi, des troubles des relations intersubjectives (donc de la communication),
et des perturbations spécifiques de l'activité mentale en particulier le délire et les
hallucinations. Les psychoses sont opposées aux « névroses » comme l'hystérie ou la
phobie, où la relation avec la réalité est maintenue et où le sujet, contrairement au
psychotique reconnaît l'existence de son trouble. » Cette définition est tirée du livre de
Nicolas GEORGIEFF, Qu’est-ce que la schizophrénie? (pp.1-2). Il faut savoir que dans la
psychose, l'angoisse est majeure et envahissante. Elle est de l'ordre du morcellement, de
l'intrusion et de la dévoration.
4. Classification des différentes psychoses
Derrière le terme de psychose, plusieurs pathologies peuvent s’exprimer, soit de
manière aigue, soit de manière chronique et ayant des caractéristiques propres, elles
peuvent être classées selon le modèle suivant :
La bouffée délirante aigüe se traduit par un épisode bref de psychose délirante aigüe
ou de psychose hallucinatoire aigue. Elle survient brutalement chez des sujets jeunes (entre
18 et 35 ans), sans antécédents psychiatriques et chez la personne psychotique (schizoïde),
hystérique, déséquilibrée, immature. Elle se traduit par
variables et en lien avec
des troubles du comportement
l’état délirant du patient. Elle peut conduire à la violence,
l’agressivité, envers lui-même mais également envers autrui, l’agitation anxieuse, le raptus
suicidaire, la stupeur, la prostration ou le mutisme. De plus, l’humeur du patient varie
constamment : il présente soit des
états exaltés se traduisant par de l’euphorie, de
l’agitation, soit par des états dépressifs se manifestant par de la tristesse, de l’abattement,
des idées de mort. Sa conscience est également altérée : le patient apparaît confus, éprouve
de la difficulté à se concentrer, à mémoriser, à juger, il est obnubilé. D’un point de vue
somatique l’insomnie est le signe physique dominant, elle est constante.
La psychose puerpérale se définit par un état confusionnel accompagné d’un délire
aigu et de troubles thymiques importants. Elle apparaît principalement chez la primipare
âgée de plus de trente ans dans la période du post-partum, soit entre trois et cinq jours
après l’accouchement et est parfois précédée de troubles du sommeil (période de
15
cauchemars importants), d’agitation ou d’un « post-partum blues ».
La psychose hallucinatoire chronique est une psychose délirante caractérisée par
l’automatisme mental, la richesse de l’activité hallucinatoire et une évolution chronique. Elle
survient entre trente-cinq et quarante ans et atteint le plus souvent les femmes. Les premiers
troubles sont brutaux, le patient présente alors un épisode délirant richement hallucinatoire
avec d’emblée un automatisme mental. Le psychiatre, ethnologue et photographe français
Gaëtan Gatian De CLERAMBAULT la définissait comme une « psychose délirante chronique
basée sur le syndrome d’automatisme mental qui en constitue le noyau, et dont la
superstructure délirante constitue une idéation surajoutée » Cet automatisme est selon lui
triple :
- idéo-verbal : les voix perçues sont malveillantes ou bienveillantes. Elles indiquent ou
commentent les actes, volent ou devinent la pensée du sujet.
- sensoriel et sensitif: les hallucinations sont visuelles, gustatives, olfactives, tactiles,
cénesthésiques (sensations internes désagréables ou voluptueuses).
- psychomoteur : les mouvements corporels ou verbaux sont imposés. Le syndrome
d’influence s’organise à partir de cet automatisme.
Il arrive cependant que le début soit insidieux. Le processus s’installe progressivement dans
un climat d’inquiétude croissant avec pour thèmes principaux : la persécution, l’influence et
la possession, que le patient ressent et accepte progressivement.
La schizophrénie est la plus fréquente des psychoses chroniques touchant ainsi 1%
de la population française adulte avec des troubles débutant les trois quarts du temps entre
quinze et trente ans. Pour Eugène Minkowski, le processus schizophrénique est une perte
du contact vital avec la réalité. Ce que le schizophrène perd, ce n’est pas la possibilité d’un
simple contact sensoriel, mais bien la dynamique de ces contacts. C’est-à-dire tout ce qui fait
le caractère vivant de la relation du sujet à autrui. Les états schizophréniques se
caractérisent par la dissociation, l’isolement social et le délire. Le mode d’entrée peut être
aigu, insidieux, pseudo-névrotique, addictif (alcoolisme, toxicomanie) ou par des troubles des
conduites: impulsions suicidaires, agitation. D’un point de vue clinique la schizophrénie peut
être principalement : paranoïde, hébéphrénique, catatonique.
16
II)
LES CONNAISSANCES ET REPRESENTATIONS DE
L’INFIRMIER
« Les malades aiment leur délire comme ils s’aiment eux-mêmes. »
Sigmund FREUD.
17
II. Connaissances et représentations
1. Les formations
Selon, Le métier d'infirmière en santé mentale de Jacky MERKLING (pp 146-153),
on peut observer une différence entre les formations avant et après 1992. Avant 1992, la
formation proposait dans son cursus une spécialisation en psychiatrie et donnait lieu au
diplôme d’infirmiers de secteur psychiatrique (ISP). Le décret de compétences étant peu
défini et la formation loin de la réalité institutionnelle, le rôle de l’infirmier spécialisé se
construisait dans l'expérience et l'approche intuitive durant ses stages. Après 1992, la
formation n’a plus proposée de possibilité de spécialisation et a formé des infirmiers
diplômés d’état (IDE). Le rôle infirmier s’est construit grâce aux connaissances théoriques
des soins, complétées par l’émergence de nombreux outils opératoires concernant l’entrée
en relation dans le domaine de la santé mentale : entretiens d'aide, entretiens familiaux,
animations de groupe…. A l’inverse de l’ISP, l’IDE à partir du décret de compétences s’est
inscrit légalement dans une dynamique de responsabilité individuelle.
Nous avons souhaité confronter lors de nos deux entretiens, ces deux formations
différentes. La population cible était volontairement deux infirmiers exerçant dans le milieu
psychiatrique. Les critères étaient : l’un issu de la formation IDE et l’autre, de la formation
ISP afin de confronter leurs connaissances et leurs représentations. De plus, l’un de ces
deux professionnels de santé, a travaillé en milieu extra hospitalier, ce qui a contribué à
l’enrichissement de l’entretien et de l’analyse.
Nous avons menés auprès d’eux, des entretiens semi-directifs de type qualitatifs. Cet outil
permettant ainsi aux professionnels d’avoir un fil conducteur, sans entraver leur spontanéité,
afin que nous puissions avoir des pistes de réponse à notre question de départ.
Lors de nos entretiens, nous avons observé que pour connaître le patient, l’IDE entre
directement en relation avec ce dernier. Dans son travail, il se donne le « droit à
l’expérience », écoute son feeling car pour lui : « c’est la meilleure formation ». Alors que
l’ISP est plutôt dans l’observation que dans le contact direct. Pour lui, spontanéité et naturel
sont les maîtres mots. Par conséquent nous pouvons nous demander si leur différence de
points de vue était influencée par : leurs âges ? Leurs expériences ? Leurs lieux
d’exercice (l’un en admission, l’autre dans un service d’hospitalisation chronique) ? Leurs
formations ? Leurs personnalités ?
18
Ajoutons que depuis l’Universitalisation de la formation infirmière en 2009, dont le
diplôme correspond à une équivalence de licence, la psychiatrie ne concerne qu’une infime
partie du programme. Jane-Laure DANAN, vice présidente du Comité d’Entente des
Formations Infirmières et Cadres explique que le but de cette nouvelle réforme est de créer
« des infirmiers qui réfléchissent sur leur pratique, capables de se former non seulement
par le biais de connaissances, mais aussi des compétences. Des infirmiers qui puissent
admettre qu’ils ne connaissent pas tout sur tout et qui pourront résoudre les problématiques
par leurs propres moyens. ». Nous pouvons émettre l’hypothèse que cette réforme
s’inscrivant dans la continuité Licence-Master-Doctorat, des masters voire des doctorats
peuvent-ils se créer pour les infirmiers exerçant en santé mentale ?
2. Le cadre législatif : rôle infirmier
Sur le site internet www.legifrance.gouv.fr et d’après le Code de la Santé Publique
définissant le rôle infirmier, il nous est apparu primordial de citer les trois articles suivants :
Art. R.4311-3 L’infirmier « identifie les besoins de la personne, pose un diagnostic infirmier,
formule des objectifs de soins, met en œuvre les actions appropriées et les évalue. »
Art. R.4311-2: conception de la personne comme un être unique et avec des dimensions
physiologiques, psychologiques, économiques, sociales et culturelles.
Art. R. 4312-2: le respect de la dignité et de l’intimité de la personne.
Suite à l’analyse de nos deux entretiens et de notre partie théorique, nous nous
demandons si le cadre législatif actuel délimite, de façon suffisamment explicite, le rôle de
l’infirmier en santé mentale ?
3. Rôle infirmier et connaissances
D'après l'ouvrage Psychiatrie et soins infirmiers de Michel HANUS et Vincent
MARCHAL (p 152, p 162, p169). Sur le plan psychique et social, l’infirmier doit:

caractériser le délire (les mécanismes, les thèmes délirants, l'organisation du délire,
les sens sollicités (hallucinations auditives, olfactives, gustatives, kinesthésiques),
discerner ce qui est délirant ou pas.
Dans notre premier entretien, l’IDE nous fait part qu’il est important de connaître le
patient dans sa globalité pour pouvoir caractériser le délire : son motif
d’hospitalisation, son anamnèse, les soins reçus, le contexte. Ces informations
peuvent être recueillies par son entourage c'est-à-dire : sa famille, son voisinage,
ses ami(e)s, son médecin traitant, des travailleurs sociaux ou d’autres intervenants.
19

recentrer le patient de façon à ce qu'il soit le plus proche de la réalité,
proposer des activités à visée socio-thérapiques, adaptées aux capacités et
aux besoins du patient.

essayer d'inclure le patient dans la vie du service, le stimuler à créer des
liens sociaux avec les autres patients, en les accompagnant autour d'un jeu
par exemple.

veiller à l'observance, évaluer l'efficacité des traitements psychotropes sur les
troubles
psychotiques
par
l'intermédiaire
d'une
activité
à
médiation
thérapeutique (jeu de société pour contrôler la concentration ou l'accentuation
de certains symptômes ...) et déceler les effets secondaires surtout au début
d'un changement de traitement pour détecter un syndrome malin des
neuroleptiques, extra pyramidal, constipation, somnolence.
(Pour l’ISP, le traitement est primordial pour entrer en relation avec le patient.
La connaissance du patient permet également de mesurer l’efficacité du
traitement administré. Mais pour des patients chroniques, lorsque que le délire
est bien installé, les thérapeutiques peuvent se révéler inefficaces)
.

collaborer avec le tuteur et le curateur suivant le mode de protection dont
bénéficie le patient, ainsi qu'avec les structures tels que le Centre MédicoPsychologique (CMP) lors de la sortie du patient pour assurer la continuité
des soins.

inscrire le patient dans un projet de vie en réunion inter et pluridisciplinaire.

instaurer un cadre ayant une fonction contenante, qui donne des repères
temporels et cela dès l'admission du patient '' Accepter la prise d'initiatives
en prenant soin de bien préciser les limites. Le but est de canaliser la
méfiance et non pas d'alimenter le délire ''. L’IDE nous a expliqué, qu’une
absence de cadre induirait une montée d'agressivité, le cadre permet ainsi
de désamorcer la crise. La posture non verbale est également importante
puisqu’elle
influe
sur
la
manière
de
canaliser
psychiquement
et
physiquement le patient.
Pour l’ISP, le professionnel doit « ramener la personne délirante à la
réalité ». Le cadrage est essentiel, tout en laissant la liberté au patient
d’exprimer son délire. S’il y a danger pour le patient et/ou le soignant, les
professionnels peuvent adhérer temporairement et sans le nourrir, au délire
pour minimiser les risques. Il faudra alors attendre que le traitement stabilise
le patient pour canaliser le délire par le discours, la parole tout en essayant
de reconnaitre un délire authentique, d’un délire simulé.
20

observer et surveiller le comportement du patient afin de déceler certains
changements ou l'apparition de nouveaux troubles (attitudes d’écoute pour les
hallucinations auditives par exemple).
Le professionnel ISP ajoutera que cette observation est la base commune à toutes
les prises en charge.

prévenir le passage à l’acte de celui-ci, et en cas de crises, préserver les
autres patients et lui même de son agressivité dégagée.
Dans la gestion de l’agressivité l’IDE nous a fait part de la place prépondérante que
prenait la négociation. Pour cela, le professionnel peut utiliser des outils tels que : la
reformulation, des questions fermées, des phrases courtes et la médiation thérapeutique.
Cette dernière peut se faire par le biais d’actes techniques (prise de tension, de
température, de thérapeutiques…), qui en se répétant, deviennent des occasions d’
entretiens informels. Le professionnel de santé doit en être conscient et se montrer
disponible.
Nous pouvons ajouter, de par nos connaissances et nos entretiens, que la cohésion
de l’équipe et le partage d’informations, avec le médecin psychiatre, sont primordiales. En
effet, le recueil d’informations réalisées par les infirmiers, permettra au psychiatre d’analyser
la situation, de poser un diagnostic et de donner l’orientation de la prise en charge.
Pour l’IDE, la prise de risque est essentielle pour faire avancer cette dernière, sans mettre en
péril ni soi-même ni l’équipe. Il précise que pour travailler en pluridisciplinarité et en
interdisciplinarité, le temps des relèves permet d’assurer une certaine continuité des soins.
Par ailleurs, le fait d’être inscrit au sein d’une équipe peut permettre de se faire relayer, si un
infirmier se trouve en difficulté.
Par ailleurs, pour l’IDE, la prise en charge idéale, serait également d’accompagner
les familles. L’IDE souligne qu’il est important de prendre le temps d’expliquer le trouble à
l’entourage et de travailler avec lui autour du projet de vie. Pour lui, dans les faits, cette
composante n’est pas assez prise en compte. Il faut également garder à l’esprit que le
système familial peut être pathologique. Cette vision est différente de celle de l’ISP, qui
évoque la famille comme une ressource pour construire l’anamnèse du patient et permettre
aux soignants de faire le lien avec son environnement, sa vie affective, et professionnelle.
Ainsi que pour qualifier ses relations. Pour décharger cette dernière, des hospitalisations
peuvent être programmées, pour permettre à la famille de décompresser.
21
Pour finir, nous pouvons émettre l’hypothèse que le rôle infirmier peut être nuancé
suivant les différents courants théoriques appliqués au sein du service. De plus, nous avons
remarqué que l’ISP développe davantage son rôle de soignant, par rapport aux délires. Estce parce qu'il a fréquenté plus de services hospitalisant des patients chroniques délirants?
Est-ce son expérience, son ancienneté, sa connaissance sur le sujet qui l’ont poussé à
développer plus cette partie ? Ou bien la façon dont nous avons posé la question dans
notre entretien?
4. La relation d'aide et ses outils
Carl ROGERS, dans Le développement de la personne (p.27), définissait la relation
d’aide comme une relation dans laquelle « l’un au moins des deux protagonistes cherche à
favoriser chez l’autre la croissance, le développement, la maturité, un meilleur
fonctionnement et une plus grande capacité d’affronté la vie. ».
C'est une relation établie entre le patient et le soignant dans le but de maintenir ou
d'améliorer la santé du patient. Elle pourra se faire au cours d'entretiens formels ou
informels. La relation d’aide est basée sur la confiance favorisée par: l’écoute active, la
communication (verbale et/ou non verbale qui servira de point d'ancrage), l’absence de
jugement, l'empathie, l'authenticité ainsi que la disponibilité de la part du soignant. L’infirmier
utilisera certains outils comme la négociation, la reformulation, des questions ouvertes et
fermées. Elle fait partie intégrante du rôle propre infirmier.
Les deux entretiens mettent l’accent sur l’importance de l’écoute active, l’empathie et la
connaissance de soi. L’IDE, rappelle que cette relation d’aide s’inscrit également grâce à
l’acceptation mutuelle de l’autre.
Nous pouvons observer que par rapport à l’ISP, l’IDE arrive davantage à décrire sa pratique
professionnelle, ainsi qu’à nous exposer le cheminement de cette dernière.
Il parvient à exposer les outils qu’il utilise, par exemple, dans la relation d’aide.
L’ancienneté joue t-elle un rôle dans l’analyse de leurs pratiques professionnelles ? Une
analyse de la pratique peu poussé, peut-elle mener à une chronicisation du soignant ? Estce l’atteinte d’un seuil d’intériorisation du métier ? Est-ce de par leur différence de
formations ?
5. Représentations
Lors de son cours de psycho-socio-anthropologie en Novembre 2010, Madame
DROUART BELIGA définissait une représentation comme : une modalité d’organisation de
la connaissance de la réalité qui a une visée pratique. Elle est constituée de valeurs, de
croyances et de savoirs spécifiques.
22
Dans son ouvrage Les représentations sociales de la schizophrénie, le psychiatre
Frantz-Samy KOHL explique que l’infirmier est avant tout un individu qui vit dans une société
ayant une culture particulière, à une époque particulière. Sa représentation de la santé, de la
maladie mentale, du rétablissement, de la réhabilitation des personnes atteintes de troubles
psychotiques, va dépendre de l’influence d’autres facteurs et d’autres représentations. Ces
derniers vont s’imbriquer et interagir les uns avec les autres au niveau individuel mais aussi
collectif. En effet, cette représentation que l’infirmier aura, sera influencée par la vision, les
valeurs et les croyances, que son entourage lui aura transmises. Elle dépendra également
de ses connaissances, de sa curiosité, de sa formation, de la représentation qu’il a de son
métier, de son expérience personnelle et de son ouverture d’esprit vis-à-vis de la prise en
charge des patients. Elle sera également influencée par les valeurs, les croyances, le
contexte politique et économique, ainsi que par l’influence des médias de la société dans
laquelle il vit.
Lors du premier entretien, l’IDE évoque un conditionnement sociétal (idée d’une société
hyper violente) vis-à-vis de l’agressivité et de la violence. Celles-ci sont l’expression de
symptômes de la pathologie, que certains soignants peuvent accepter de manière plus ou
moins agressive en fonction de leurs seuils d’acceptation et de leurs idées préconçues. De
plus, l’appauvrissement des formations basées sur la gestion de la violence et le self
défense participent au positionnement de l’infirmier en tant que « gestionnaire de la
violence type milieu carcéral ». Il ne faut pas « mélanger les rôles, on est infirmier, on n’est
pas gardien de prison, on n’est pas policier, on n’est pas juge, on n’est pas auxiliaire de
justice ». Pour lui, il faut être au clair avec ses valeurs face à l’isolement, la contention et
l’hospitalisation sans consentement. Il faut considérer le patient psychotique chronique
comme notre « égal, c’est un alter ego et le considérer dans ce qu’il est dans son mode de
vie, ce qu’il peut penser. On n’est pas là pour juger, on n’est pas là pour être accepté mais
c’est se dire que c’est quelqu’un qui a des droits. ». Ce sujet n’est pas abordé par l’ISP.
Nous pouvons nous questionner sur l’incidence qu’aurait une image positive véhiculée par
les médias de patients atteints de troubles psychotiques sur nos représentations de leur
pathologie, de l’agressivité au niveau individuel et collectif ?
Nous avons pu observer que les représentations des professionnels sur leur métier
différaient sur différents points. L’IDE exprime que pour lui en étant soignant « on a toujours
envie d’être un petit peu l’égal de Dieu: on a envie de guérir, de combattre la maladie voire la
mort […] en s’occupant des autres, on cherche à se soigner nous-mêmes. » On ne travaille
pas par hasard en psychiatrie. C’est pourquoi, il est important pour lui de toujours remettre
en question notre prise en charge: « Est-ce qu’on est dans le soin? » et d’être conscient de
ses limites pour « ne pas surinvestir la relation au risque de ne pas être professionnel […] on
23
ne peut pas s’occuper de tout le monde ». Le soignant est un être humain qui a un vécu,
une histoire dont il se doit d’être conscient. Pour lui, dans cette profession, il faut savoir
passer le relais, travailler dans différents services, s’enrichir continuellement et lutter contre
le risque de « chronicisation » du soignant. Car à long terme, le risque est de s’habituer, de
minimiser la souffrance de l’autre, de ne plus écouter activement, de manquer d’empathie,
d’être amené à infantiliser les patients voire être trop familier avec eux, s’aventurant, de ce
fait, sur le chemin dangereux de la maltraitance. Il faut garder à l’esprit que le patient
psychotique, le restera, que nous ne pouvons pas guérir les gens mais que nous pouvons
conserver leurs acquis en mettant en place des projets afin de garder une dynamique. En
revanche, pour l’ISP, exercer avec des patients chroniques n’est pas délétère. L’expérience
permet d’évacuer. Certes « nous pouvons y laisser des plumes », mais cela permet de
relativiser sur sa vie personnelle.
24
III)
CONTINUITE DES SOINS
« Regarder la folie comme une maladie en général incurable, c'est avancer une
assertion vague et sans cesse contredite par les faits les plus authentiques »
Philippe PINEL, précurseur de la psychiatrie.
25
III. Continuité des soins
1. Le Rétablissement
C’est un concept anglo-saxon, porté par des patients canadiens. Ces derniers le
définissent comme étant « le cheminement personnel consistant à se remettre de la maladie
et se réinsérer dans la société ». Ils le définissent également comme « l’expérience de
réappropriation et de reconstruction d’une vie personnelle satisfaisante et accomplie ».
Pour les soignants, ce modèle suppose « un accompagnement sur le long terme et axé dès
le début vers une reprise en main de sa vie par la personne ». Pour Bernard PACHOUD
(santé mentale dossier rétablissement et psychose : se rétablir de la maladie mentale pp2431) : contrairement aux idées reçues de nombreux patients psychotiques se rétablissent et
réussissent à se réengager dans une vie relativement autonome et satisfaisante qui leur
donne une place sociale autre que le statut de « malade mental ».
Le rétablissement résulte d’un processus lent, chaotique qui s’étale sur de
nombreuses années. Il peut survenir sans que la maladie ait totalement disparue et s’avère
même en partie indépendant des formes résiduelles et de l’évolution que peut prendre la
maladie. En effet le handicap psychique n’est pas forcément corrélé à l’évolution de la
maladie et au degré de rémission des symptômes. Ainsi une atténuation satisfaisante des
symptômes n’induit pas forcément une amélioration de la vie sociale de la personne. Celle-ci
peut rester désœuvrée et socialement exclue alors qu’à l’inverse, certains patients dont les
symptômes sont résistants aux traitements retrouvent une activité régulière et une insertion
sociale dans un environnement qui leurs sont adaptés.
En outre, le rétablissement dépend en vérité de nombreux autres facteurs qui sont les
suivants :

L’environnement social, familial et professionnel du patient, leurs représentations de
la maladie psychotique chronique.

La perception interne du patient et sa volonté de faire face à sa maladie et surmonter
son handicap psychique.

Le respect de son auto-détermination (volonté du patient de sortir de la maladie
mentale et de se réengager dans une vie active satisfaisante, dotée de sens en
opérant lui-même les choix de vie et les moyens de parvenir à leurs
accomplissements) et de son empowerment (le pouvoir de choisir, de décider et
d’agir par et pour soi-même).
26

La perception de son rapport au travail, de sa place au sein de ce travail, de son
utilité, intérêt et efficacité.

Des aménagements mis en place par l’employeur et de la reconnaissance de celui-ci
envers le patient.
La désinstitutionalisation et le développement de la psychiatrie de secteur ont permis
de favoriser dans les pays anglo-saxon le rétablissement de nombreux patients. Mais la
France tient une position un peu ambivalente. Elle voudrait s’y ouvrir mais reste frileuse par
rapport aux principes d’auto-détermination et d’empowerment qu’elle préfère inscrire dans
une psychothérapie institutionnelle. La transposition de ce modèle dans notre culture de
soins impliquerait donc de revisiter nos pratiques.
2. La Réhabilitation
Selon la définition du dictionnaire Larousse édition 2013 : « réhabiliter, c’est
reconnaître la valeur, l’utilité de quelqu’un, de quelque chose après une période d’oubli, de
discrédit ».
Pour la personne psychotique chronique, la réhabilitation serait le fait de retrouver un statut
social et de pouvoir exercer ses droits et devoirs de citoyen de manière autonome. Elle
constitue le « volet » social du rétablissement. Pour cela, le patient peut bénéficier d’un
étayage compensatoire de son handicap psychique : suivi médicosocial, intra et
extrahospitalier.
Pour le psychiatre Denis LEGUAY, d’après la loi du 11 février 2005 (annexe 1), le
patient psychotique chronique doit être considéré le plus souvent comme atteint de
« handicap psychique ». Dans la réhabilitation de ce type de patient, il est nécessaire
d’évaluer, de définir des mesures de compensation et de mettre en oeuvre des dispositifs de
soutien.
La réhabilitation est une pratique, centrée sur des objectifs de réalisation personnelle,
respectueuse du sujet et s’effaçant derrière ses choix de vie. Ces objectifs doivent être
atteignables et déterminés après une analyse objective de la situation du patient. Il faut
concevoir la prise en charge des personnes souffrant de troubles psychiques en terme de
qualité de vie (insertion, conditions concrètes d’existence, ressources, logement, réalisation
personnelle, relation familiales, amicales, sociales, rôle professionnel…) et non pas
exclusivement en terme de préoccupation thérapeutique.
27
Notons, que la réhabilitation commence en intra hospitalier où s’organise le devenir
du patient en fonction de son projet de vie. Les soignants doivent s’inscrire dans la
philosophie du réseau qui a pour vocation de favoriser la mise en relation des différents
intervenants sanitaires et sociaux.
Un réseau est avant tout fondé sur le partenariat et la collaboration de professionnels dans
des disciplines différentes et complémentaires. Il permet de développer des savoirs faire
d’équipe et des relations de solidarité. Il favorise la connaissance et la confiance mutuelle,
induit des prises de conscience collectives, les diagnostics partagés, la formation réciproque.
Pour acquérir une autonomie progressive, le patient pourra s’orienter et être orienté vers
différentes structures (réseau) adaptées à son évolution : Appartement thérapeutique, Atelier
thérapeutique, Accueil Familial Thérapeutique (AFT), Centre d'Activités Thérapeutiques à
Temps Partiel (CATTP), Centre d'Hébergement et de Réinsertion Sociale (CHRS), Centre
médico-social (CMS), Centre Médico-Psychologique (CMP), Foyer de postcure, Hôpital de
jour, Maison relais. (voir rôle des structures dans l’annexe 2).
Dans Schizophrénie au quotidien, approche systémique en psychiatrie publique de
Jean Claude Benoit (pp18-19), nous apprenons que: « Sous l’influence de Madame Simone
Veil et des syndicats des psychiatres hospitaliers, est apparue une ère novatrice
d’organisation des soins en psychiatrie. Le ministère de la santé imposait sur l’ensemble du
territoire national une « sectorisation » de la population adulte sur la base d’environ 70 000
individus par service. Chaque zone géographique correspondant à un service de soins en
psychiatrie (un service comprend des structures intra et extra-hospitalières). Ce fut le point
de départ d’une véritable aide proche des patients souvent en crise mais également de leurs
familles, des instances administratives et sociales locales. »
Mais la réhabilitation passe aussi par la déstigmatisation du handicap psychique pour
limiter l’exclusion. Pour cela, sont mises en place des politiques de sensibilisation, par
exemple la semaine d’information en santé mentale, dont l’ambition est de faire reculer
l’ignorance, la crainte, les représentations négatives et les idées reçues.
3. Prévention de la rechute
D’après le dossier ‘’ Prévenir la rechute ’’ issu de la revue Santé Mentale, en ce qui
concerne les patients atteints de troubles psychotiques chroniques, il s’agit plutôt d’une
amélioration importante des principaux symptômes dont les manifestations persistantes
n’interfèrent plus de façon significative avec le comportement.
28
On parle de rechute lorsque la recrudescence symptomatique survient dans les six mois qui
suivent l’épisode de décompensation psychotique. La maladie était en voie de guérison,
mais reprend son évolution. Tandis qu’on parle de récidive lorsque les symptômes
apparaissent après une période de rémission, c’est la réapparition d’une maladie ou d’un mal
dont un sujet déjà atteint s’était remis.
Les deux concepts ont des mécanismes différents. On ne prévient pas une rechute de la
même façon qu’une récidive car dans la récidive la démarche médicale a déjà été couronnée
de succès et peut-être traitée de la même façon que l’état initial, ce qui n’est pas le cas dans
la rechute qui oblige un changement de stratégie et très souvent caractérisée par une
nouvelle admission en hôpital psychiatrique et par une augmentation des symptômes
positifs. Le psychiatre suisse Eugen BLEULER évoquait la rechute pour la schizophrénie
comme une possibilité de son évolution temporelle, au même titre que la progression
continue de la maladie, la stabilisation et la survenue de poussées.
Jacques DELAMARE a définit en 1974, le terme de rémission comme étant « un
affaiblissement temporaire des symptômes d’une maladie aigüe ou chronique ».
La rémission est « partielle » en cas de symptômes résiduels cliniquement significatifs et
« complète » si le patient est asymptomatique. Elle implique la capacité à fonctionner dans la
communauté socialement et professionnellement, mais aussi à être relativement à l’abri des
co-morbidités de la pathologie.
Il existe différents critères de rémission qui peuvent être évalués suivant différentes échelles
et leur persistance dans le temps. Ces critères prennent en compte le niveau de symptômes
positifs et négatifs, de symptômes cognitifs, dépressifs et de désorganisation. Si
l’amélioration perdure trois mois, on parle de rémission symptomatique, si elle persiste au
bout d’un an, on parle de rémission syndromique. Au bout de quinze à dix-sept-mois on parle
de rémission fonctionnelle. Mais la durée retenue nécessaire pour parler de rémission est
d’au moins six mois.
Pour prévenir la rechute, les professionnels doivent être vigilants vis-à-vis
du consentement aux soins du patient et veiller à l’observance des traitements ainsi qu’à
l’expression des effets secondaires qui favorisent parfois, l’arrêt des thérapeutiques. Un
patient conscient de sa pathologie (« Insight ») reconnaitra le bénéfice du traitement sur ses
troubles.
Ils doivent inscrire et coordonner la prise en charge du patient depuis l’intra vers
l’extrahospitalier (avec le réseau) ; identifier les facteurs susceptibles d’induire une rechute,
29
les causes et le sens des précédentes rechutes. Les infirmiers peuvent également lui
proposer de rédiger des directives anticipées en cas de réhospitalisation, celles-ci élaborées
en partenariat avec lui et ses proches.
Ils peuvent également proposer une psycho-éducation aux patients et à leurs entourages
(les informer sur la pathologie, les traitements, les différentes stratégies de prise en charge,
les avancées et les progrès scientifiques) en vue d’éviter une détresse ou un épuisement.
De plus, le patient réinséré dans son environnement, saura, après une éducation
reçue par les soignants, identifier les signes annonciateurs
de la rechute (dépression,
anxiété, repli social, troubles du sommeil…). Ces signes pourront également être détectés
par l’entourage.
Si le patient, à ce moment là, n’est pas réhospitalisé. Les risques encourus sont : le passage
à l’acte, l’auto et l’hétéro agression, le refus d’adhésion aux soins, une augmentation de la
résistance aux traitements, et une aggravation de ses troubles cognitivo-comportementaux.
En ce qui concerne nos deux entretiens menés, les professionnels étaient
complémentaires quant à la définition de la réhabilitation, du rétablissement et le rôle du
CMP dans la prévention de la rechute. La réhabilitation a pour objectif de réinsérer le patient
dans un milieu psychosocial. Ce dernier recouvra une certaine autonomie (obtention d'un
travail adapté, un appartement) et aura comme appui des professionnels qui graviteront
autour de lui afin d'assurer la continuité des soins.
Le professionnel ISP précise, que le CMP prend toute son importance, lorsque le patient
n'est plus hospitalisé, il est le pivot du réseau de soins. Il organisera des visites à domicile,
aidera celui-ci dans sa recherche d'appartements, réalisera le semainier et contrôlera ainsi
l'observance. Il évaluera son état psychique. Pour éviter toute réticence de la part du patient,
ce dernier sera accompagné par deux psychiatres : l'un ayant le rôle du prescripteur et
l'autre celui de psychothérapeute.
Du fait de notre trame d’entretien, les professionnels ont expliqué que la stabilisation du
patient se fait grâce à l'observance du traitement neuroleptique, le suivi de sa prise en
charge et de sa volonté. L'IDE précisera que stabilisation ne signifie pas patient sédaté
exempt de symptômes. Pour lui, la réhabilitation pourra se faire lorsque le patient sera
stabilisé. Ce qui rejoint le point de vue de l'ISP. Ce dernier rajoute que, auparavant, le rôle
du CMP était assuré en partie par l'infirmier de secteur.
30
CONCLUSION
31
Pour conclure nous pouvons dire que les représentations de l’infirmier concernant la
maladie mentale, le rétablissement et la réhabilitation des personnes atteintes de troubles
psychotiques chroniques, se construisent autour de nombreux facteurs et peuvent
effectivement avoir une influence positive ou négative sur leur rétablissement.
Les entretiens que nous avons menés auprès des deux infirmiers issus de formations
différentes, nous ont appris que celles-ci étaient complémentaires mais ne constituaient en
réalité qu’une base de connaissances et de savoirs sur laquelle chaque professionnel
s’appuie et qui doit être enrichie par la formation et l’expérience. En outre, en tant que
futur(e)s infirmier(e)s, nous savons à présent que nous devons faire preuve d’ouverture
d’esprit, mais garder également un esprit critique en ce qui concerne les représentations
véhiculées par la société. Nous ne devons pas oublier qu’un individu se construit, avant tout,
à travers le regard de l’autre et que, malgré leurs difficultés avec le lien social, les personnes
atteintes de troubles psychotiques, puiseront les ressources nécessaires à leur
rétablissement, à travers le regard d’autrui.
Ainsi nous pouvons supposer que si l’origine de la psychose prend naissance dans un
dysfonctionnement du processus d’attachement, la clé du rétablissement, naîtra alors peut
être dans l’élaboration de la relation à l’autre. Par conséquent, lorsque l’infirmier(e) reconnaît
le patient comme acteur de son parcours de soin, cela ne pourrait-il pas initier le processus
de rétablissement de ce dernier ? Et ce type de démarche ne pourrait-elle pas s’effectuer en
milieu extra-hospitalier ? C’est pourquoi nous aurions aimé approfondir le sujet par le biais
de la problématique suivante :
En quoi la collaboration entre un infirmier de secteur extrahospitalier et un
patient psychotique chronique peut-elle favoriser le rétablissement et la réhabilitation
de ce dernier ?
32
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
33
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES :
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psychiatrie publique, Erès, 2006, 176p.
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34
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Aujourd’hui la réhabilitation. Santé mentale, Acte Presse, Langres, mars 2006, n°106,
pp15-88.
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Ecouter … Santé Mentale, Acte Presse, Langres, Janvier 2008, n°124, 21-63.
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cognitives. Soins psychiatrie, Juillet/Aout 2008, N°257, pp 17-22.
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Rétablissement et Psychose. Santé mentale, Acte Presse, Langres, mars 2012,
n°166, pp24-84.
SITES INTERNET :
 http://legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do
35
ANNEXES
36
ANNEXE N°1
Loi du 11 février 2005 art L.114 du code de l’action sociale et des familles
« Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d’activité ou restrictions
de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en
raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions
physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un
trouble de santé invalidant. »
37
ANNEXES N°2
Les différentes structures extrahospitalières décrites sur le site internet :
http://www.psycom75.org/Soins-et-accompagnement/Organisation-des-soinspsychiatriques/Lieux-de-soins consulté le 26 mai 2013.
Centre médico-psychologique (CMP) : les CMP sont les pivots des secteurs de
psychiatrie. Ils assurent des consultations médico-psychologiques pour toutes personnes en
souffrance psychique et organise les orientations éventuelles vers des structures adaptées. Il
existe des CMP pour adultes et pour enfants.
Accueil familial thérapeutique (AFT) : l'accueil familial thérapeutique consiste à
organiser le séjour à plein temps d'un patient dans une famille d'accueil, pour une durée
variable, tout en lui proposant les soins nécessités par son état.
Appartement thérapeutique : les appartements thérapeutiques s'adressent aux
personnes seules ou en couple, avec ou sans enfant qui se trouvent en situation de fragilité
psychologique, sociale ou financières et nécessitent des soins et un suivi médical. Une prise
en charge médicale, psychologique et sociale de la personne est assurée et offre un
logement individuel de relais à titre temporaire.
Atelier thérapeutique : un atelier thérapeutique est une activité encadrée par un
personnel soignant dont l'objectif est de permettre une évaluation des capacités d'autonomie
globale du bénéficiaire. Il s'agit d'une activité transitionnelle non-rémunérée permettant
d'aller vers une réinsertion professionnelle progressive.
Centre d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour les
usagers de drogues (CAARUD) : les CAARUD sont issus de la loi du 9 août 2004 qui visait
notamment à regrouper les dispositifs de réduction des risques au sein de structures
uniques. L’accueil est anonyme et gratuit. Il s’adresse à des personnes qui ne sont pas
encore engagées dans une démarche de soins ou à celles dont les modes de consommation
ou les drogues consommées exposent à des risques majeurs (infections, notamment
hépatite C, accidents, etc.). Une attention particulière est portée aux usagers les plus
marginalisés.
Centre d'activités thérapeutiques à temps partiel (CATTP) : les CATTP sont un
des moyens du dispositif de santé mentale mis à la disposition de la population dans le
38
cadre de la sectorisation. Ils consistent à proposer aux patients des actions de soutien et de
thérapeutique de groupe visant à maintenir, ou favoriser, une existence autonome. Le
CATTP propose des activités en séquences d'une demi-journée qui s'appuient entre autres
sur la musique, la peinture, l'expression corporelle, le théâtre. Elles favorisent par le biais de
ces médiations, les approches relationnelles, la communication, l'affirmation de soi.
Centre de soins d'accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) :
les CSAPA s’adressent aux personnes en difficulté avec leur consommation de substances
psychoactives. Leur mission s’étend également aux personnes souffrant d’addictions sans
substance (en particulier le jeu pathologique). Ils remplacent les centres spécialisés de soins
aux toxicomanes (CSST) et les centres de cure ambulatoire en alcoologie (CCAA) en les
rassemblant sous un statut juridique commun.
Centre d'Hébergement et de Réinsertion Sociale (CHRS) : les CHRS ont pour
vocation d'accueillir des personnes rencontrant des difficultés économiques, de santé ou
d'insertion, en vue de les aider à accéder ou à recouvrer leur autonomie personnelle et
sociale. L'hébergement reste temporaire le temps de développer des alternatives à ces
situations avec l'aide des travailleurs sociaux.
Centre médico-social (CMS) : un CMS est un lieu dans lequel sont regroupés des
professionnels de plusieurs métiers : assistantes sociales, éducateurs, médecins,
puéricultrices, sages-femmes… Cette équipe propose un accueil gratuit et adapté à chaque
situation, des consultations médicales ou encore un soutien social pour faire face aux
difficultés rencontrées. Il s'agit d'un lieu ouvert à tous.
Centre médico-psychologique pédagogique (CMPP) : les CMPP assurent le
dépistage, le diagnostic et le traitement des troubles neuro-psychiques et du comportement
de l'enfant et de l'adolescent. Ils travaillent en lien avec les CMP, les PMI, les écoles, le
service social et les médecins de ville.
Consultation psychiatrique : une consultation psychiatrique est assurée par un
psychiatre qui travaillera à la définition d'un diagnostic de l'état de santé mentale du patient.
Consultation somatique : dans certaines structures de soins psychiatriques, des
consultations somatiques sont assurées. Elles visent à établir un diagnostic sur l'état de
santé physique du patient par un médecin généraliste.
39
Foyer de postcure : les foyers de postcure sont des offres d'hébergements
thérapeutiques, proposant une prise en charge médicale diversifiée un soutien éducatif et
psychologique. Cet hébergement est temporaire permettant un accompagnement progressif
vers l'autonomie.
Hôpital de jour : l'hospitalisation de jour concerne en principe des patients dont l'état
de santé nécessite des soins pendant la journée. Les séjours peuvent être continus ou
discontinus (une à plusieurs demi-journées par semaine). Le patient rentre chez lui le soir.
Cette alternative à l'hospitalisation complète permet de maintenir la personne dans son
milieu, de prévenir des périodes de crise en diminuant l'intensité des symptômes.
Maison relais : la maison relais est destinée à l’accueil de personnes à faible niveau
de ressources, isolées et dont la situation sociale, psychologique ou psychiatrique, rend
impossible à échéance prévisible leur accès à un logement ordinaire. Il est important de
rappeler que la maison relais ne s’inscrit pas dans une logique de logement temporaire mais
bien d’habitat durable, sans limitation de durée, et offrant un cadre semi collectif valorisant la
convivialité et l’intégration dans l’environnement social.
40
ANNEXES N°3
Le processus de rétablissement basé sur le dossier rétablissement et psychose
de Jérôme Favrod, Shyhrete Rexhaj, Charles Bonsack
Il est construit sur des témoignages de patients. La théorie du rétablissement se
divise en cinq étapes que le patient va traverser pour se remettre du bouleversement
psychologique de sa maladie chronique.
Les personnes qui se décrivent comme rétablies d’une psychose délirante chronique
affirment se percevoir comme différentes de ce qu’elles étaient avant de se sentir malades.
La plupart se sentent grandies par l’expérience, même si elles ont statut sociale inférieur à
celui qu’elles occupaient avant la survenue de la maladie. Le retour aux anciens rôles
sociaux selon elles n’est pas un critère du rétablissement, tout comme l’absence de
symptômes. En revanche, le bien-être subjectif est important.
Les quatre ingrédients essentiels au processus de rétablissement :

L’espoir : c’est le point de départ du processus, il permet de se projeter dans l’avenir,
de croire en soi et en son potentiel ;

La redéfinition de l’identité : Elle permet de distinguer ce qui relève de la maladie et
ce qui relève de la personne. Le fait d’être défini comme un malade peut conduire à
ne plus se percevoir comme une personne à part entière. La perte de l’identité
(aliénation) et la non-prise en compte de la personne (discrimination) est l’un des
impacts négatif de la maladie mentale. Le patient peut alors refuser de s’identifier
avec la maladie et la nier ou il peut l’accepter comme étant une partie de lui-même et
le concevoir comme quelque chose d’extérieur à soi avec lequel il faut grandir.

La découverte du sens à la vie : Le patient a de nouveaux buts et de nouvelles
valeurs. Ses projets antérieurs sont bouleversés par la maladie qui peut interrompre
une formation, un emploi et remettre en question la relation de couple. La personne
doit donc bâtir de nouveaux projets et endosser de nouveaux rôles sociaux. Cette
recherche de sens à la vie peut amener la personne à découvrir ce qui la rend si
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précieuse et enrichissante et l’amener à se réaliser dans une activité créatrice, à
s’engager dans le soutien auprès de ses pairs, ou à développer une nouvelle vision
sur le monde sur le plan spirituel ou philosophique. Elle reconstruit son projet de vie.

La responsabilité du rétablissement : Elle concerne la gestion de sa propre santé et
de son traitement, l’autonomie dans ses choix de vie et la volonté de prendre des
risques mesurés pour avancer.
Les Cinq étapes du processus de rétablissement de la pathologie psychotique
chronique :

Le moratoire : est caractérisé par le déni, la confusion, le repli sur soi et la révolte.

La conscience : intervient lorsque la personne a une première lueur d’espoir en une
vie meilleure et en une possibilité de rétablissement. Elle survient grâce à un élément
déclencheur qui survient soit du patient, soit d’un clinicien, soit d’une autre personne
clé, soit d’un autre patient. La personne peut alors endosser un autre rôle que celui
de malade.

La préparation : Elle implique de faire l’inventaire de sa partie saine, de ses valeurs,
de ses forces et de ses faiblesses. Ceci nécessite d’apprendre à gérer sa maladie, à
faire appel aux services disponibles, à s’impliquer dans des groupes de pairs.

La reconstruction : C’est lors de cette étape que le dur travail du rétablissement se
met en place. La personne travaille à se forger une identité positive. Elle établit et
avance vers des buts personnels importants en mobilisant ses ressources. C’est une
prise de responsabilité dans la gestion de sa maladie et une prise de contrôle sur sa
vie qui se caractérise par une prise de risque, des échecs et des essais.

La croissance : La personne n’est pas forcément libre de ses symptômes mais elle
sait gérer sa maladie et rester stable. Elle a confiance en ses capacités et maintient
une vision positive tournée vers le futur. Elle se sent transformée positivement par
l’expérience de la maladie, comme si celle-ci lui avait appris quelque chose sur ellemême.
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RESUME
Titre : L'influence des connaissances et des représentations dans la prise en charge du
psychotique chronique
Introduction : Suite à une situation vécue en stage, nous avons constaté que les
représentations des infirmiers pouvaient avoir une influence sur le rétablissement et la
réhabilitation des personnes souffrant de troubles psychotiques chroniques. Nous avons
donc décidé de travailler sur ce sujet qui éveillait notre questionnement quant à notre future
pratique professionnelle.
Méthode : Notre réflexion repose sur une confrontation entre des apports théoriques
émanant de recherches bibliographiques et deux entretiens semi directifs de type qualitatif
menés auprès d'infirmiers du secteur psychiatrique intra-hospitalier issus de formation
différente
Résultats : Leur analyse nous a permis de mettre en évidence que les connaissances et les
représentations de l'infirmier concernant le rétablissement et la réhabilitation des personnes
atteintes de troubles psychotiques chroniques pouvait avoir un impact favorable sur celle-ci ;
en particulier lorsqu'elle était considéré comme étant actrice de leur parcours de soins à part
entière. D'après nos diverses lectures, cet aspect se concrétiserait davantage lors de la
continuité des soins en milieu extra-hospitalier.
Conclusion : C'est pourquoi nous aurions souhaité poursuivre nos recherches en posant la
problématique suivante :
En quoi la collaboration de l’infirmier, exerçant en milieu extra hospitalier, avec une personne
atteinte de troubles psychotiques chroniques, peut elle favoriser le rétablissement et la
réhabilitation de celles-ci ?
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