Le téléconseil personnalisé Le téléconseil personnalisé existait déjsur le Minitel et son développement s’accélère depuis quelques années dans un contexte favorable. Il répond en effet des besoins nouveaux de la population. Distinct de la télémédecine, il n’est pas soumis un régime spécifique mais n’en est pas moins exempté de respecter certaines règles régissant la pratique médicale et l’utilisation d’internet. Spécialité(s) : ● Médecin ● Médecin généraliste et urgentiste spécialiste Sommaire ● ● ● ● ● Qu’est-ce que le téléconseil personnalisé ? Pourquoi les internautes ont-ils recours au téléconseil ? Les règles respecter pour la pratique du téléconseil Le téléconseil en Europe Du téléconseil la télémédecine Auteur : Valérie Cordonnier - Juriste / MAJ : 27/09/2016 Qu’est-ce que le téléconseil personnalisé ? Le téléconseil ne figure pas en tant que tel parmi les actes de télémédecine définis par le décret du 19 octobre 2010 (1) mais la frontière entre le téléconseil personnalisée et la téléconsultation est ténue. Le téléconseil personnalisé consiste en la mise en relation entre des internautes qui se connectent un site et des professionnels de santé (pas nécessairement médecins) qui leur fournissent des « informations spécialisées ». Il n’y a ni diagnostic, ni prescription. La téléconsultation quant elle est un acte de télémédecine, cette dernière étant définie comme « une forme de pratique médicale distance utilisant les technologies des l’information et de la communication» (2). Les actes de télémédecine sont limitativement prévus par la loi et définis par le décret de 2010. Téléconsultation, télé-expertise, télésurveillance médicale, téléassistance médicale et réponse médicale apportée dans le cadre de la régulation médicale La télémédecine en dix questions Tel qu’il est pratiqué en France, le téléconseil se positionne en complément plutôt qu’en substitution d’une consultation classique auprès du médecin traitant. Il s’agit soit de plateformes mises disposition des internautes auxquels les prestations sont facturées directement (la question ou la minute), soit de services mis dispositions par des assureurs de complémentaires santé dans l’objectif de se différencier de la concurrence ou de réduire les coûts de remboursement par le biais de la prévention. Les services de téléconseil marquent bien (au moins dans le descriptif de leur activité) leur différence avec la télémédecine. Pourquoi les internautes ont-ils recours au téléconseil ? Le téléconseil personnalisé répond des besoins spécifiques des internautes. Ces derniers y font appel notamment pour : • préparer un rendez-vous médical ou être orientés vers le bon professionnel de santé (spécialisation croissante de la médecine). • comprendre un diagnostic, un traitement: d’avantage en demande d’une explication, les patients peuvent ainsi poser toutes les questions qui n’ont pu être abordées lors de la consultation, et aussi être rassurés. • accéder un savoir médical plus pointu et/ou plus jour que celui de leur médecin généraliste: mieux informés, les patients sont plus exigeants. • préparer un voyage : connaître les vaccins obligatoires ou conseillés, les précautions d’hygiène, les équivalences de médicaments … de manière adaptée et individualisée au regard de chaque situation particulière (grossesse, traitement en cours pour une maladie chronique, jeunes enfants notamment). • aborder un sujet délicat dont ils n’osent pas parler en vis--vis, et sous couvert de l’anonymat. Le téléconseil présente pour ces internautes un certain nombre d’avantages : • accessibilité et immédiateté : les moyens de communication utilisés (téléphone et internet) permettent d’accéder des spécialités peu représentées dans certaines zones géographiques, et améliorent l’accès global aux soins des personnes isolées, handicapées, fragilisées. De plus, les plateformes proposent très souvent un engagement de réponse dans un délai imparti. • fiabilité supérieure aux forums de discussion (et moins anxiogène ...). • gain de temps en évitant un déplacement et confort de rester chez soi. • économie : face l’augmentation des dépenses santé, le téléconseil apparaît comme une alternative moins onéreuse qu’une consultation classique. Le Cnom appelle d’ailleurs une vigilance particulière des autorités sur l’ubérisation de la médecine (3) Les règles respecter pour la pratique du téléconseil Bien qu’ce jour il n’entre pas clairement dans le cadre juridique de la télémédecine, le téléconseil est tout de même soumis au respect de certaines règles: des obligations s’imposent tant l’égard des médecins que des sites proposant ces services. Les médecins doivent en effet : • respecter les règles déontologiques de leur profession, notamment les droits des patients ainsi que les règles de la confraternité. • soumettre pour avis au Conseil départemental de l‘Ordre les contrats existants avec les sites qui les emploient (4). • veiller ce que leur rémunération soit conforme leurs obligations; en effet, conformément au code de déontologie médicale (article 53 alinéa 3) «le simple avis ou conseil dispensé un patient par téléphone ou par correspondance ne peut donner lieu aucun honoraire ». le Cnom précise qu’il ne peut donc s’agir que d’une vacation horaire, quand bien même les médecins ne recevraient aucun appel et qu’« défaut, nous nous trouverions face un exercice irrégulier de la télémédecine » (5). • déclarer l’activité de téléconseil leur assureur de Responsabilité civile professionnelle car ils engagent leur responsabilité sur les « avis » donnés. • suivre les recommandations générales relatives aux activités de publication et de modération sur le websanté (6). Les sites doivent quant eux : • obtenir l’agrément pour l’hébergement des données personnelles de santé.L’hébergeur du site doit avoir obtenu l’agrément du Ministre de la Santé après avis motivé d'un comité d'agrément et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) (7) (8). • informer les internautes sur l’hébergement de leurs données personnelles. La loi précise que l'hébergement de données de santé caractère personnel «[…]est réalisé après que la personne prise en charge en a été dûment informée et sauf opposition pour un motif légitime. » (9). • veiller au respect de l’exercice des droits des internautes sur les informations transmises l’occasion de leurs visites et questions sur les sites. Chaque responsable de traitement est tenu de s’assurer de l’effectivité des droits des personnes concernées par les données de santé dans le respect de la loi 78-17 du 6 janvier 1978, modifiée relative l’informatique, aux fichiers et aux libertés et des dispositions du code de la santé publique : droit d’accès aux données, droit de rectification et droit d’opposition notamment. Le téléconseil en Europe Le téléconseil fait couler beaucoup d’encre et suscite de vives réactions en France, tandis que nos partenaires européens l’ont largement adopté. En Suisse, où le financement public des dépenses de santé est faible, les assureurs de complémentaire santé financent le téléconseil pour limiter le recours aux consultations classiques. Les deux principaux acteurs reçoivent plus de 8.000 appels par jour (pour une population de 8 millions d’habitants), triés par des assistants médicaux. Dans la moitié des cas, le médecin donne un avis au téléphone, permettant d’éviter une visite en cabinet ; il peut également transmettre une prescription d’un médicament sur ordonnance, mais cela reste rare (3% des cas). En Grande-Bretagne, la plateforme NHS Direct créé en 1997, couplant téléphone et site internet, a été fermée en mars 2014. Elle a été remplacée par un numéro de téléphone gratuit (le 111) dédié aux questions nécessitant des réponses rapides et distinct du numéro dédié aux urgences (999). Disponible 24 heures sur 24 et tous les jours de l’année, le service utilise un système d'aide la décision clinique qui structure la réponse un appel, qui peut aller de conseils par téléphone l'envoi d'une ambulance d'urgence. Les appels sont d'abord évalués par un gestionnaire d'appels et peuvent être transmis un médecin. Ces recours généralisés des plateformes téléphoniques sont possibles notamment grâce la systématisation du dossier médical digital. Nos voisins semblent bien aller plus loin que le téléconseil personnalisé et avoir adopté la téléconsultation en tous lieux et en toutes circonstances, alors que télémédecine en France n’a pour le moment pas vocation se répandre plus largement. Toutefois, une brèche a été ouverte par de nouveaux acteurs. Du téléconseil la télémédecine Le site « deuxiemeavis.fr » et Axa Assistance ont mis mal la fragile frontière entre téléconseil et télémédecine. Le premier permet un patient ou son médecin de solliciter distance un avis spécialisé partir d’un questionnaire et du dossier médical téléchargé en ligne. Ce service s’adresse plus spécifiquement aux patients atteints de pathologies graves, rares ou invalidantes. Son coût de 295 euros est susceptible d’être pris en charge par les complémentaires santé ou branches professionnelles dans le cadre de partenariats. De son côté, Axa France (via sa filiale Axa Assistance) a ouvertement lancé un service de consultation par téléphone, destination de l’ensemble de son portefeuille d’assurance santé collective, pouvant aller jusqu’au bout du besoin du patient, y compris la prescription (l’ordonnance est envoyée directement la pharmacie choisie par le salarié). Ces deux expériences peuvent être qualifiées de téléexpertise et de téléconsultation, et relèvent ce titre du régime de la télémédecine. La plateforme MédecinDirect a elle aussi sauté le pas et propose ses adhérents depuis le 1er septembre 2016 des téléconsultations en ligne et par téléphone (10). Spécialisée dans le téléconseil médical, elle a obtenu les autorisations de la CNIL et l‘ARS Ile de France, et le cahier des charges a été réalisé avec la consultation du Conseil national de l‘Ordre des médecins. Les 23 médecins généralistes et spécialistes travaillant chez MédecinDirect ont signé une convention de télémédecine prévoyant la réalisation de télédiagnostics et de téléprescriptions limitées (antalgiques, imagerie médicale, examens biologiques et renouvellements de traitements). Face aux besoins croissants des patients d‘une part, et aux pressions des entreprises et assureurs de santé privés d’autre part, on peut donc se demander si le modèle actuel du téléconseil pourra se maintenir ou s’il n’est qu’une étape vers une télémédecine généralisée. Références (1) Décret 2010-1229 du 21 octobre 2010 définissant la télémédecine (2) Article L. 6316-1 du Code de la santé publique (3) Rapport de mission du Cnom « télémédecine et autres prestations médicales électroniques » (4) Le Cnom a publié un contrat type entre un médecin et une société exploitant un site internet dans le domaine de la santé (5) Cnom « Vade-mecum Télémedecine », septembre 2014 (6) Cnom, Livre blanc du 9 décembre 2011 « Déontologie médicale sur le web » (7) Décret 2006-6 du 4 janvier 2006 en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés et des Conseils de l'ordre des professions de santé. (8) Au 6 juillet 2016, 92 décisions d’agrément ont été rendues. (9) La loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 a remplacé le consentement exprès de la personne concernée l’hébergement externalisé de ses données de santé, par l’information et la possibilité pour cette dernière de s’y opposer pour des motifs légitimes. (10) Le Quotidien du Médecin, 19 juillet 2016. A lire aussi Télémédecine et responsabilité A découvrir sur notre site : Infographie : check-list du patient au bloc opératoire Certificat médical : les réponses vos questions Fiscalité : quoi de neuf en 2017 ? Chiffres clés du rapport annuel 2015 (pdf - 72.25 Ko) Auteur : Valérie Cordonnier - Juriste / MAJ : 27/09/2016