
Le téléconseil en Europe
Le téléconseil fait couler beaucoup d’encre et suscite de vives réactions en France, tandis que nos partenaires européens l’ont largement adopté.
En Suisse, où le financement public des dépenses de santé est faible, les assureurs de complémentaire santé financent le téléconseil pour limiter le recours aux consultations
classiques. Les deux principaux acteurs reçoivent plus de 8.000 appels par jour (pour une population de 8 millions d’habitants), triés par des assistants médicaux. Dans la moitié des
cas, le médecin donne un avis au téléphone, permettant d’éviter une visite en cabinet ; il peut également transmettre une prescription d’un médicament sur ordonnance, mais cela reste
rare (3% des cas).
En Grande-Bretagne, la plateforme NHS Direct créé en 1997, couplant téléphone et site internet, a été fermée en mars 2014. Elle a été remplacée par un numéro de téléphone gratuit
(le 111) dédié aux questions nécessitant des réponses rapides et distinct du numéro dédié aux urgences (999). Disponible 24 heures sur 24 et tous les jours de l’année, le service
utilise un système d'aide la décision clinique qui structure la réponse un appel, qui peut aller de conseils par téléphone l'envoi d'une ambulance d'urgence. Les appels sont d'abord
évalués par un gestionnaire d'appels et peuvent être transmis un médecin.
Ces recours généralisés des plateformes téléphoniques sont possibles notamment grâce la systématisation du dossier médical digital.
Nos voisins semblent bien aller plus loin que le téléconseil personnalisé et avoir adopté la téléconsultation en tous lieux et en toutes circonstances, alors que télémédecine en France
n’a pour le moment pas vocation se répandre plus largement. Toutefois, une brèche a été ouverte par de nouveaux acteurs.
Du téléconseil la télémédecine
Le site « deuxiemeavis.fr » et Axa Assistance ont mis mal la fragile frontière entre téléconseil et télémédecine.
Le premier permet un patient ou son médecin de solliciter distance un avis spécialisé partir d’un questionnaire et du dossier médical téléchargé en ligne. Ce service s’adresse plus
spécifiquement aux patients atteints de pathologies graves, rares ou invalidantes. Son coût de 295 euros est susceptible d’être pris en charge par les complémentaires santé ou
branches professionnelles dans le cadre de partenariats.
De son côté, Axa France (via sa filiale Axa Assistance) a ouvertement lancé un service de consultation par téléphone, destination de l’ensemble de son portefeuille d’assurance santé
collective, pouvant aller jusqu’au bout du besoin du patient, y compris la prescription (l’ordonnance est envoyée directement la pharmacie choisie par le salarié).
Ces deux expériences peuvent être qualifiées de téléexpertise et de téléconsultation, et relèvent ce titre du régime de la télémédecine.
La plateforme MédecinDirect a elle aussi sauté le pas et propose ses adhérents depuis le 1er septembre 2016 des téléconsultations en ligne et par téléphone (10). Spécialisée dans le
téléconseil médical, elle a obtenu les autorisations de la CNIL et l‘ARS Ile de France, et le cahier des charges a été réalisé avec la consultation du Conseil national de l‘Ordre des
médecins. Les 23 médecins généralistes et spécialistes travaillant chez MédecinDirect ont signé une convention de télémédecine prévoyant la réalisation de télédiagnostics et de
téléprescriptions limitées (antalgiques, imagerie médicale, examens biologiques et renouvellements de traitements).
Face aux besoins croissants des patients d‘une part, et aux pressions des entreprises et assureurs de santé privés d’autre part, on peut donc se demander si le modèle actuel du
téléconseil pourra se maintenir ou s’il n’est qu’une étape vers une télémédecine généralisée.
Références
(1) Décret 2010-1229 du 21 octobre 2010 définissant la télémédecine
(2) Article L. 6316-1 du Code de la santé publique
(3) Rapport de mission du Cnom « télémédecine et autres prestations médicales électroniques »
(4) Le Cnom a publié un contrat type entre un médecin et une société exploitant un site internet dans le domaine de la santé
(5) Cnom « Vade-mecum Télémedecine », septembre 2014
(6) Cnom, Livre blanc du 9 décembre 2011 « Déontologie médicale sur le web »
(7) Décret 2006-6 du 4 janvier 2006 en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés et des Conseils de l'ordre des professions de santé.
(8) Au 6 juillet 2016, 92 décisions d’agrément ont été rendues.
(9) La loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 a remplacé le consentement exprès de la personne concernée l’hébergement externalisé de ses données de
santé, par l’information et la possibilité pour cette dernière de s’y opposer pour des motifs légitimes.
(10) Le Quotidien du Médecin, 19 juillet 2016.
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Auteur : Valérie Cordonnier - Juriste / MAJ : 27/09/2016