l`ontologie de kagame : une philosophie du langage sur

Annales FLSH N° 19 (2015)
1
L’ONTOLOGIE DE KAGAME :
UNE PHILOSOPHIE DU LANGAGE SUR FOND DE
METAPHYSIQUE
Par
Pr BOSISE BONGOLI René
1
et
BEKEKA LIKANE
2
ABSTRACT
For our opinion, Alexis Kagamé offers us the opportunity to
rest the question of the origin or the absolute, the question of report
between the existence and him preexisting, that means the man's
opening to the being's transcendence from the African linguistic
categories.
The research of a metaphysical knowledge is as well
indispensable to the scientist that to all reasonable man, because it is
a lot of questions that escape the science and that, therefore, call
metaphysical solutions. For example, from where do come - us?
Does this question send back at the origin of the man. That is - us?
This question sends back to its nature. Or let's go - us? This last
sends back to the one of his/her/its destiny.
Indeed, Alexis Kagamé is one of the philosophers Africans of
the colonial time to propose a to be the language in order to discover
an ontology there. However well often, one evokes his/her/its name
as much as the one of Tempels, especially in our generation without
a knowledge either deepened sufficient of their œuvres.
To this title, our author deserves philosopher's name.
1
Professeur Associé à l’Université de Kisangani
2
Assistant à l’Université d’Ikela
Annales FLSH N° 19 (2015)
2
0. INTRODUCTION
Depuis les temps anciens, les hommes ont toujours cherché à
obtenir une compréhension des événements, souvent énigmatiques
qui se produisent dans le monde qui les entoure. Les différents
mythes, qu’on trouve chez tous les peuples, ont été souvent conçus,
imaginés dans le but de rendre compte de l’existence même du
monde et de l’homme lui-même, de la vie et de la mort, de
mouvement de la terre, de la succession gulière des jours et des
nuits, etc.… si nous quittons ce monde de mythe pour suivre la
marche de la pensée proprement métaphysique ou réflexive, nous
assistons à ce même effort d’expliquer rationnellement le monde par
des causes dernières.
Ce besoin de comprendre le pourquoi de ceci ou de cela, cette
recherche d’une explication totale est une quête proprement
métaphysique. N’étant pas satisfait des vérités qui proviennent de la
connaissance vulgaire (qui se contente de l’opinion) et de la
connaissance scientifique (qui se limite au paraitre), l’esprit humain
en est arrivé à chercher un autre type de connaissance qui le ferait
pénétrer plus à fond dans l’explication des choses, c’est-à-dire une
connaissance des choses telles qu’elles sont en elles-mêmes et non
telles qu’elles paraissent, au fond il s’agit de la connaissance de
l’être et non de l’étant comme tel, bref une connaissance de l’absolu
et non du relatif.
Ainsi, comme le remarque Aristote, le plaisir de savoir qui
commence par le plaisir de percevoir et de sentir, atteste que savoir
est pour l’homme une activité conforme à la nature, bien plus ancré
dans sa nature, dont il est, pour ainsi dire une tendance. Ce plaisir est
d’abord, pour le vivant, le plaisir même de vivre. Mais « l’être
humain dispose de beaucoup plus que la faculté de sentir : il est
capable de développer un savoir » (ARISTOTE, 1992, 1003a33§, p
12). Car, l’expérience nous apprend simplement que la chose est, elle
ne nous dit pas le pourquoi des choses. Il y a en tout cas plus que ce
que nous voyons et palpons, Plus que ce que dit la science. La
véritable réalité serait ailleurs, au-de ou en deçà, et au besoin à
l’intérieur, et requiert un radical changement d’optique.
Pour une meilleure appréhension de cet essai, nous nous
proposons d’évaluer dans un premier point l’ontologie de
KAGAME et d’exhumer son statut, ensuite montrer en quoi sa
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philosophie est une systématisation et prise de conscience de la
pensée intuitive, et enfin donner une appréciation critique.
1. LA PHILOSOPHIE DU LANGAGE D’ALEXIS KAGAME
1.1. Considérations d’ordre historique : orientation de la philosophie
de Kagame
A titre de rappel, le père Placide Tempels fait figure de
pionnier à partir de son chef d’œuvre sur la philosophie Bantu. A.
Kagame et d’autres l’ont suivi. Mais cette problématique sur
l’existence de la philosophie africaine, était au centre de plusieurs
polémiques. C’est pour quoi, selon Bwanga Wa Mbenga, cette
tendance débutait une grande bataille théorique entre deux camps :
« ceux qui affirment l’existence de la philosophie africaine
(Tempelsiens) et les négateurs de l’existence de cette même
philosophie » (BWANGA WA MBENGA, 1981, p.21).
Tempels avait eu le mérite d’émettre pour la première fois son
hypothèse de l’existence d’une philosophie bantu. C’est à ce titre
qu’il passe pour le pionnier de la philosophie africaine. Pour
Bwanga, « A. Kagame confirme d’ailleurs l’existence d’une
philosophie bantu intuitive, c'est-à-dire l’agir humain sous la
conduite des principes rationnels, à travers toute son œuvre
philosophique » (BWANGA WA MBENGA, 1981, p.21). Ceci revient
à dire que le souci de Kagame, c’est de distinguer la philosophie
bantu de la philosophie en tant que métaphysique. Cela étant, dans
l’ethno philosophie des bantu, Kagame commence par les
considérations d’ordre historique : il parle des bantu et de leurs
langues. Le mot bantu, écrit-il, « évoque un groupe humain qui
peuple à peu près les tiers du continent africain » (A. KAGAME,
1975, pp. 93-111). C’est pourquoi nous estimons que malgré que les
bantu n’appartiennent pas une même race, ils partagent cependant les
éléments généraux d’une même civilisation. Car le critère de leur
unité culturelle est le système de langues à classes.
Les substantifs de ces langues, dont les racines restent
généralement inchangées, comportent un élément linguistique se
plaçant immédiatement avant la racine du mot. Cet élément que
Kagame nomme « classificatif », note Bwanga, a deux formes :
« l’une identifie le singulier et l’autre le pluriel » (BWANGA WA
MBENGA, a. c, p.26). Autrement dit, dans toute la zone bantu, le
substantif comporte un élément linguistique qui se place avant la
racine du mot. Cet élément s’appelle classificatif ou préfixe qui
comporte deux genres, dont l’un singulier et l’autre le pluriel, tandis
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que la racine reste invariable. C’est pourquoi. « Muntu » au singulier
homme et « ba-ntu » aux pluriels singuliers hommes. Nous
constaterons que « la racine ntu, mu et ba sont les deux formes du
classificatif » ((A. KAGAME, 1975, p. 93).
C’est vers 1852, pense Bwanga à la suite de Kagame, que la
forme bantu fut retenue par des linguistes qui travaillaient sur
l’Afrique australe. Les objectifs que se sont assignés ces linguistes
consistaient à designer par l’ensemble des langues qui dénotaient
l’homme par la racine Ntu. A leur tour, les ethnologues
s’accaparèrent du même terme pour désigner la culture et les races
qui en vivaient.
Malgré l’acception universelle de ce terme Ntu, qui se
remarque dans les langues bantu à l’occurrence le terme Muntu
« pluriel : bantu » sous les formes suivantes : muntu (pluriel : wantu
ou antu), mundu (pluriel : andu), Ntu, mur (pluriel bar), mot (pluriel
bot), mutchu (pluriel atchu), etc. et voir oma chez les mpongwe,
mukpa (pluriel de bakpa) chez hamba, l’idée d’unité qu’elle sous-
entend, prône Kagame, « n’est que fiction et solution de possibilité.
Seul, ajoute-t-il, le système des langues à classes, est le critère obvie
qui soit valable pour toute la zone considérée » (A. KAGAME, 1975,
p. 93).
1.2. Pourquoi une philosophie du langage ?
Il est question ici de l’importance qu’accorde Kagame au
langage abordant son étude ontologique. Car la philosophie du
langage est e en Afrique à partir de ses travaux, et principalement
à partir de sa philosophie bantu rwandaise de l’être. Mais son
analyse est plutôt linguistique ou théorico-linguistique.
En effet, si Kagame avait entrepris une étude systématique du
phénomène langage humain articulé, c’est parce qu’il avait compris
« qu’il existe un lien très étroit entre la pensée humaine et la
langue » (A. KAGAME, 1975, p. 943).
Il est, sans doute, un des premiers gres de cette époque à
s’être réalisé l’importance des informations que peut octroyer la
structuration de l’expérience langagière sur le sujet humain. C’est
pourquoi la majorité des nègres de son temps considéraient la langue
« comme une superstructure pouvant éclairer un certain nombre de
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manifestations sociales, et que le langage est la conscience réelle,
pratique, renchérit Bwanga » (BWANGA WA MBENGA, A. c. p. 36).
A la suite de Wittgenstein, Kagame avait compris que « le
langage est une peinture de la réalité » (L. WITTIGENSTEIN, 1976, p.
33.). La dynamique du langage est une expression d’un rapport entre
l’homme et l’univers, une réflexion sur le réel.
Notre auteur avait compris avec Staline, selon le commentaire
de Gadet, que la « langue est un moyen, un instrument de
communication entre les hommes et qu’elle est directement liée à la
pensée dont elle enregistre et fixe les résultats du travail » (F.
GADET, juin 1977, pp. 56-61.). Ceci signifie que la langue étant un
symbole, elle ne fait pas seulement appel à l’interprétation, mais
aussi à une véritable réflexion philosophique. Donc, la langue est
imprégnée de philosophie, c’est-à-dire elle véhicule des idées, elle
est la sagesse parlée, l’expression de la pensée et de sentiment. En ce
sens, Heidegger considère le langage comme maison de l’être, A.
Kagame s’était rendu compte que le langage est manifestation et
source nourricière de l’existence d’un être. Son intérêt philosophique
consiste dans une purification à l’égard des habitudes sociales qui
masquaient l’essentiel, et entreprendre une purification semblable du
phénomène langage pour qu’en fait soit mise à nu la pensée de tout
un peuple. Qu’on est-il de l’ontologie comme science des êtres chef
KAGAME.
1.2.1. Les Quatre Catégories de l’être dans la Pensée Bantu selon
Kagame
L’analyse de l’ontologie de Kagame consiste à expliciter les
instances linguistiques fondamentales et particulières de l’univers
notamment des existants sans intelligence, de l’existant
d’intelligence et du préexistant. Sans se préoccuper de l’étude du
préexistant, entant que première cause des existants ; il convient
d’analyser les quatre catégories de l’être, à savoir le Muntu ou être
intelligent, le Kintu ou être chose, le Hantu ou l’existant localisateur
(le lieu et le temps) et Kuntu ou être modal.
1.2.1.1. Le « Muntu » ou être-avec-intelligence
L’homme est un animal supérieur formé d’un double principe
vital dont il importe de déterminer la nature : le principe vital, à
savoir l’ombre propre l’animalité et le principe d’intelligence.
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