JAURÈS
ET LE MAROC
UN LONG COMBAT
POUR LA PAIX ET
LE DROIT DES PEUPLES
MI FABRE
JAURÈS ET LE MAROC
JAURÈS
ET LE MAROC
UN LONG COMBAT
POUR LA PAIX ET
LE DROIT DES PEUPLES
RÉMI FABRE
AVERTISSEMENT
La mission de la Fondation Jean-Jaurès est de faire vivre le débat public et de concourir ainsi
à la rénovation de la pene socialiste. Elle publie donc les analyses et les propositions dont
l’int du thème, l’originalité de la probmatique ou la qualité de l’argumentation contribuent
à atteindre cet objectif, sans pour autant nécessairement reprendre à son compte chacune
d’entre elles.
Jaurès et le Maroc
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SOMMAIRE
Introduction ......................................................................... 5
La politique de pénétration pacifique .............................. 17
Face aux grandes manœuvres diplomatiques .................. 23
De Tanger à Algésiras ......................................................... 29
Contre les aventures et exactions militaires ................... 35
L’accord franco-allemand de février 1909 ...................... 43
De l’étouffement du sultan à la marche sur Fès ............ 47
De la marche sur Fès à la crise d’Agadir ......................... 53
Les règlements définitifs :
l’accord Caillaux et le protectorat .................................... 59
Conclusion ........................................................................... 75
Jaurès et le Maroc
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INTRODUCTION
Dans un article intitulé « À Londres », paru dans
La Petite République le 17 mai 1896, Jaurès s’efforçait
quelques semaines avant le congrès socialiste international
de Londres de jeter les bases d’une attitude pratique des
socialistes dans ces questions « si redoutables pour la paix du
monde et pour le socialisme international » de la politique
coloniale. Il proposait trois règles pratiques qui pouvaient être
adoptées et pratiquées par les socialistes de tous les pays :
« 1° Vigilance incessante en faveur de la paix et contre les
prétentions excessives des uns ou des autres. Sollicitude
constante pour les races opprimées, appelées peu à peu à une
plus large autonomie et protégées au moins contre les pires
excès de la violence ou de l’exploitation. Extension des
garanties internationales assurant à tous les peuples, en
proportion de leur libre activité, l’usage des grandes routes
historiques et économiques du globe…1»
1. Repris in Jean Jaurès, Œuvres 2, Pour la Paix I : Les alliances européennes (1887-
1903), Textes rassemblés, présentés et annotés par Max Bonnafous, Paris, Éd. Rieder,
1931, p. 103.
Jaurès et le Maroc
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Jaurès et le Maroc
colonisation. Disciple convaincu de Jules Ferry dans les
années 1880, « colonial sans ambages4» jusqu’au début des
années 1890, il aurait simplement montré au lendemain de
son adhésion au socialisme plus de vigilance pour opposer la
bonne et la mauvaise colonisation, pour dénoncer les
exactions commises au nom d’une mission civilisatrice qu’il
importait de prendre davantage au sérieux.
La question marocaine, qui va faire l’objet de cette
étude, et à laquelle Jaurès a consacré de 1903 à 1912 une
bonne partie de ses forces, de ses interventions de
parlementaire, de journaliste, de tribun, en me temps qu’il y
a appliq sa réflexion intellectuelle va, nous semble-t-il,
contribuer à transformer de fond en comble cette attitude pour
l’orienter nettement, comme l’avait déjà suggéré Madeleine
Rebérioux5, et comme le soulignent Gilles Candar et Vincent
Duclert dans leur récente biographie, « vers l’anticolonialisme6».
Si Jaurès semblait ainsi fort bien saisir, et de
façon presque prémonitoire par rapport à la future question
marocaine, le danger que représentaient les rivalités
coloniales pour la paix européenne et mondiale, on pourrait
trouver que du point de vue des colonisés, il ne formulait que
des objectifs bien modestes, d’autant plus qu’il disait par
ailleurs que la condamnation de principe par le socialisme
international de la politique coloniale comme fruit du
capitalisme ne suffisait pas, que la « civilisation socialiste »
ne s’interdirait pas dans l’avenir de « rayonner sur les parties
encore obscures de la planète », que « la loi d’expansion et
de conquête » à laquelle cédaient actuellement tous les
peuples semblait « irrésistible comme une loi naturelle2», et
que si « une des nations européennes plus pénétrée de
scrupules ou d’esprit démocratique que les autres s’interdisait
systématiquement toute expansion coloniale, elle ne
diminuerait pas d’un atome la somme des iniquités et
des rapines commises en Afrique et en Asie », mais qu’elle
« pourrait bien être dupe3».
Comme cela a souvent été remarqué, et comme cet
article de 1896 pourrait l’attester, la « conversion » de Jaurès
au socialisme au début des années 1890 n’a dans un premier
temps pas fondamentalement modifié sa vision positive de la
2. Ibid. p. 100.
3. Ibid. p. 100-101.
4. Gilles Candar, Jaurès et l’Extrême-Orient. La patrie, les colonies, l’Internationale, Paris,
Fondation Jean Jaurès, 2011.
5. Jean Jaurès, Contre la guerre et la politique coloniale, édité par Madeleine Rebérioux,
Paris, Les Éditions sociales, 1959. Dans la présentation de cette anthologie publiée
aux éditions du Parti communiste en pleine guerre d’Algérie pour le centenaire de la
naissance de Jaurès, Madeleine Rebérioux insiste sur l’opposition déterminée de Jaurès
à la politique coloniale, sans pour autant le présenter comme un anticolonialiste
radical.
6. « Vers l’anticolonialisme » est le titre du chapitre XVI de la bibliographie de Candar
et Duclert parue l’année du centenaire de la mort de Jean Jaurès : Gilles Candar,
Vincent Duclert, Jean Jaurès, Paris, Fayard, 2014, p. 386-406.
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