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on peut toujours lancer l'un contre l'autre deux individus de la même classe »
. Le vrai
critère, pour Marx, est la propriété privée des moyens de production. Si bien d'ailleurs que
la suppression de cette propriété définit tout le programme communiste
. Alors pourquoi ce
critère et pas celui des revenus ? Parce que selon Marx, une société est toujours un rapport
entre dominants et dominés. Décrire une société, ce n'est donc pas d'abord décrire des
individus, mais des relations entre eux, comprendre comment le uns dominent les autres.
Tant qu'on en reste à la question du revenu, rien n'est dit du rapport entre les individus. La
source de la domination, c'est pour Marx, la propriété privée des moyens de production.
Pourquoi ? Il faut comprendre la propriété comme une puissance sociale réelle et non
pas seulement comme un titre juridique. Le propriétaire des moyens de production a une
force dont ne dispose aucun de ceux qui vendent leur force de travail.
a) Il contrôle l'accès des producteurs aux moyens de production. Ce qui lui
donne un pouvoir immense sur leur vie, puisqu'il décide qui travaille et qui ne travaille pas.
Bien sûr le droit du travail va considérablement limiter ce pouvoir-là. Mais ce droit n'est pas
secrété par le capitalisme lui-même. Il lui est imposé par ses adversaires.
b) Il détermine la finalité de la production. Pouvoir qui a des conséquences sur
le destin de populations entières. Rosa Luxemburg prend l'exemple de l'invention et de la
production de machines à tisser
. Elle insiste sur les effets imprévisibles de la production.
Déterminer la finalité de la production est un pouvoir tellement immense qu'il échappe
largement au capitaliste lui-même.
« En 1768, Cartwright construit à Nottingham, en Angleterre, les premières filatures mécaniques de
coton; en 1785, il invente le métier à tisser mécanique. La première conséquence en est, en Angleterre,
la disparition du tissage à la main et l'extension rapide de la fabrication mécanique. Au début du XIX°
siècle, il y avait en Angleterre, d'après une estimation d'époque, environ un demi-million d'artisans
tisserands; ils sont maintenant en voie d'extinction, et vers 1860 il n'y avait plus dans tout le Royaume-
Uni que quelques milliers d'artisans tisserands; en revanche, un demi-million d'ouvriers d'usine se
trouvaient embauchés dans l'industrie du coton. En 1863, le président du conseil, Gladstone, parle à la
Chambre d'un “ enivrant accroissement de richesse et de puissance ” qui s'est déversé sur la bourgeoisie
anglaise, sans que la classe ouvrière y ait la moindre part.
L'industrie cotonnière anglaise fait venir ses matières premières d'Amérique du Nord. Le
développement des usines dans le Lancashire a fait naître de gigantesques plantations de coton dans
le sud des États-Unis. On a fait venir des Noirs d’Afrique, main-d'œuvre bon marché pour un travail
meurtrier dans les plantations de coton, de canne à sucre, de riz et de tabac. En Afrique, le commerce
Marx cité par Georges Gurvitch, É
tudes sur les classes sociales
, Gonthier, page 32.
Résumé dans la lettre de Engels à Marx du 23 octobre 1846.
Rosa Luxemburg,
Introduction à l'économie politique
, I-4. Disponible sur le site www.marxists.org