182 Djoudad, Murray, Chan et Daw
Dans un monde idéal, les autorités monétaires pourraient déterminer quelles
variations du taux de change sont dues à un changement des facteurs
économiques fondamentaux et lesquelles résultent uniquement de
mouvements spéculatifs. Si la variation était jugée injustifiée ou excessive, il
serait possible d’intervenir pour corriger la situation. Malheureusement, le
monde réel est bien différent de cet état idéal. Dans le cas des petits pays
industriels, les autorités monétaires sont confrontées à un épineux problème
d’identification. Nombre de ces pays sont en effet des exportateurs de
produits de base, ce qui les rend sensibles aux changements subits de
conjoncture. Les fluctuations des cours des produits de base, par exemple,
peuvent nécessiter une appréciation ou une dépréciation brutale de la
monnaie locale. En tentant de contrecarrer un tel mouvement, les autorités
ne feraient qu’aggraver les problèmes et entraver le processus de
rééquilibrage.
Nous examinons ici la situation vécue par l’Australie, le Canada et la
Nouvelle-Zélande depuis la disparition du système de Bretton Woods, en
vue de déterminer si les taux de change ont évolué de manière compatible
avec la situation économique fondamentale. Dans la première partie de
l’étude, nous estimons et testons de simples modèles à correction d’erreurs.
Les travaux d’Amano et van Norden (1993) ainsi que de Murray, van
Norden et Vigfusson (1996) ont montré que la plupart des variations
importantes du dollar canadien peuvent être attribuées à quatre variables
fondamentales : le différentiel de taux d’intérêt entre le Canada et les
États-Unis, l’écart d’inflation entre les deux pays, le prix réel des produits
énergétiques exprimé en dollars américains et le prix réel des autres produits
de base dans la même monnaie. L’un de nos objectifs ici est d’estimer des
modèles similaires pour l’Australie et la Nouvelle-Zélande, afin de voir si
les mêmes variables fondamentales jouent un rôle important dans le
comportement de leur monnaie.
Dans la deuxième partie de l’étude, nous abordons le problème sous un
angle un peu différent. Nous faisons appel à des modèles à changement de
régime pour saisir l’interaction de deux catégories différentes de cambistes :
les chartistes et les fondamentalistes. Les chartistes sont censés obéir à des
règles mécaniques basées sur l’évolution passée du taux de change, tandis
que les fondamentalistes, comme leur appellation l’indique, accordent plus
d’importance aux facteurs économiques fondamentaux. Nous testons un
certain nombre de formulations différentes afin d’évaluer l’importance
relative de chaque catégorie d’opérateurs à des époques différentes.
Vigfusson (1996) ainsi que Murray, Zelmer et Antia (2000), qui ont estimé
des modèles à changement de régime dans le cas du Canada, ont abouti à
certains résultats importants, mais qui ont de quoi surprendre. D’après leurs
estimations, les fondamentalistes tiennent généralement le haut du pavé sur