Tabagisme
et dépendance
au tabac:
au cœur de la
maladie cardiovasculaire
DOCUMENT D’AUTO-APPRENTISSAGE
TABAGISME ET DÉPENDANCE AU TABAC
Par Diane Lafontaine, B. Pharm., M. Sc. — Panacée Conseil Inc.
Table des matières
Objectifs d’apprentissage 3
1. Perspective clinique 3
1.1 Les effets dévastateurs du tabagisme 3
1.2 Les professionnels de la santé: un rôle important à jouer 3
1.3 Définition de l’accoutumance 4
1.4 La dépendance au tabac: une maladie chronique 5
1.5 Lien entre tabagisme et maladie cardiovasculaire 5
1.6 Autres effets nuisibles du tabagisme 6
1.7 Abandon du tabac et santé cardiovasculaire 6
1.8 Dépistage du tabagisme 6
2. Traitement de la dépendance au tabac 11
2.1 Symptômes physiques et psychologiques du sevrage du tabac 11
2.2 Changement de comportement 12
2.3 Aides pharmacologiques pour l’abandon du tabac 13
2.4 Aides pharmacologiques de premier recours 13
2.5 Aides pharmacologiques de deuxième recours 21
2.6 Les médecines douces 22
2.7 Choix thérapeutique en fonction du tableau clinique 23
3. Ajustement du traitement 26
4. Suivi 26
4.1 Efficacité thérapeutique 26
4.2 Tabagisme et interactions médicamenteuses 27
4.3 Observance thérapeutique 30
Conclusion 33
Annexe A 34
Références 35
Questionnaire de formation continue 40
2
Tabagisme et dépendance au tabac: au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage
Objectifs d’apprentissage
Le présent document vise à donner au pharmacien*un aperçu des solutions de soutien au renoncement au
tabac dans une perspective globale de prévention de la maladie cardiovasculaire. Le modèle de prise en charge
présenté ici s’appuie sur une méthode systématique comprenant le dépistage, l’amorce du programme de
renoncement au tabac, l’ajustement du traitement et le suivi du patient. Tout au cours du présent document,
le pharmacien trouvera des exemples d’intervention rapide visant à protéger la santé du cœur.
À la fin de la présente activité, le pharmacien devrait être en mesure:
=d’expliquer ce qu’est la dépendance aux produits du tabac;
=d’observer le cheminement du fumeur et d’aider celui-ci à franchir les diverses étapes;
=de conseiller des traitements pharmacologiques appropriés;
=de mettre en œuvre des stratégies appropriées pour soutenir des efforts de renoncement au tabac;
=de faire un suivi efficace auprès du fumeur faisant des efforts pour cesser de fumer
pour l’empêcher de recommencer à fumer.
1. Perspective clinique
1.1 Les effets dévastateurs du tabagisme
Les affections causées par le tabac sont toujours à l’état endémique dans le monde. L’Organisation mondiale
de la santé prédit que d’ici 2020, le nombre annuel de décès causés par le tabagisme atteindra 8,4 millions, soit
4 millions de décès annuels de plus qu’en 2001.1Concrètement cela signifie que si on empilait les corps de
toutes les personnes qui mourront d’une affection causée par le tabac d’ici 2020, on obtiendrait une tour d’une
hauteur de 180 km.1
Au Canada, le tabagisme constitue un grave problème de santé; il s’agit de la première cause de décès évitable.2
Malgré une multitude de programmes de prévention de l’usage du tabac, plus de 4,5 millions de Canadiens de
15 ans et plus sont des fumeurs actuels3et le tabagisme est toujours la cause du décès prématuré de quelque
45 000 personnes.4En vérité, 50 p. 100 de tous les fumeurs réguliers mourront des conséquences du tabagisme.5
Les effets nocifs du tabagisme et de la fumée secondaire du tabac sont bien documentés. La fumée du tabac
contient plus de 4 000 substances chimiques, dont 50 au moins sont cancérogènes.6
1.2 Les professionnels de la santé: un rôle important à jouer
Il existe des mesures efficaces de lutte contre le tabagisme. Les résultats de travaux de recherche révèlent que
les professionnels de la santé, dont les pharmaciens, peuvent contribuer à hausser la fréquence du renonce-
ment au tabac en fournissant de l’information et du soutien.7, 8
*Nota: Afin de faciliter la lecture du présent document, nous avons utilisé le masculin
comme genre neutre pour désigner aussi bien les femmes que les hommes.
3
Tabagisme et dépendance au tabac: au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage
Malgré les bienfaits éprouvés du soutien, de 2 à 15 p. 100 seulement des fumeurs qui sont suivis par un
médecin reçoivent une forme quelconque d’aide, que ce soit des conseils sur la manière de cesser de fumer,
de l’information sur des programmes de soutien ou une ordonnance d’un médicament aidant à cesser de fumer.9
On estime aussi qu’ordinairement, un traitement n’est offert qu’aux patients souffrant déjà d’une maladie
causée par le tabac.8Le dépistage systématique des fumeurs et la participation à des activités de renoncement
au tabac sont deux aspects sur lesquels tous les professionnels de la santé devraient se pencher davantage,
d’autant plus que le tabagisme est associé aux trois principales causes de morbidité et de mortalité au Canada:
la maladie pulmonaire, le cancer et la maladie cardiovasculaire.10, 11, 12
Il est difficile d’identifier une autre affection qui, malgré des interventions efficaces et facilement accessibles,
demeure associée à une négligence, à une fréquence et à un taux de mortalité similaires à ceux du tabagisme.
On consacre beaucoup d’énergie à sensibiliser les cliniciens et à inculquer le principe selon lequel ne pas traiter
le tabagisme serait perçu comme le défaut de donner des soins de santé appropriés.
1.3 Définition de l’accoutumance
La nicotine compte parmi les substances toxicomanogènes les plus puissantes, entraînant une tolérance
physique, un syndrome de sevrage et un état de besoin (parfois appelé dépendance psychologique).13 En effet,
cette substance cause autant d’accoutumance que l’alcool, la cocaïne ou les opiacés tels l’héroïne.14,15
Lorsque la fumée de cigarette est inhalée, la nicotine met sept (7) secondes à atteindre le cerveau. En stimulant
les récepteurs nicotiniques présynaptiques du système nerveux central, la nicotine cause la libération de
norépinéphrine, d’acétylcholine, de dopamine, de sérotonine et de bêta-endorphines. La libération de ces
neurotransmetteurs est associée au plaisir, à la détente, à l’augmentation de la capacité mémorielle et des per-
formances7. Par ailleurs, une hausse de la concentration de nicotine dans le sang déclenche la libération d’adré-
naline et provoque une légère augmentation de la glycémie, ce qui contribue à procurer une sensation de
«décharge» ou un regain d’énergie.11 Inversement, une diminution de la concentration de nicotine est asso-
ciée à une sensation de désagrément, à l’anxiété, au stress et à une sensation de baisse de la performance.7Les
sensations agréables autant que désagréables renforcent le comportement du fumeur.7Avec le temps, un
phénomène de tolérance physique apparaît; le fumeur a besoin de plus en plus de nicotine pour obtenir les
mêmes effets parce que son cerveau s’adapte progressivement à l’excitation produite par la nicotine.7
Le syndrome de sevrage à la nicotine est l’un des principaux signes de la dépendance à la nicotine. Il apparaît
ordinairement au cours des 24 heures suivant la suppression brusque de la nicotine ou après une réduction de
la consommation.9Voici comment se manifeste le syndrome de sevrage:9
=dysphorie ou humeur déprimée;
=insomnie;
=irritabilité, contrariété ou colère;
=angoisse;
=difficulté à se concentrer;
=agitation;
=augmentation de l’appétit.
Les symptômes les plus graves apparaissent au cours de la première semaine, bien que l’envie irrésistible de
fumer puisse persister pendant des mois et peut-être même des années.16 D’habitude, plus la consommation
de nicotine est élevée, plus les symptômes de sevrage sont graves et plus l’arrêt est difficile, mais cela varie
beaucoup.9Les variations génétiques du métabolisme nicotinique constituent un autre facteur de dépendance
à la nicotine.13 Certaines études révèlent que les personnes dont le métabolisme nicotinique est lent parvien-
nent plus facilement à cesser de fumer que celles dont le métabolisme est rapide.17 La personnalité (p. ex.
propension à prendre des risques) et certains troubles mentaux, en particulier la schizophrénie, le trouble bipo-
laire, la dépression et le trouble déficitaire de l’attention, sont associés avec un risque élevé d’abus.13
4
Tabagisme et dépendance au tabac: au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage
Certains auteurs décrivent la toxicomanie comme un état d’hypersensibilité du système de récompense du
cerveau aux effets directs d’une substance et à tous les autres stimuli extérieurs qui ne sont pas directement
reliés à celle-ci.13 L’auto-administration de nicotine a une importante composante psychologique, qui est ren-
forcée par les activités quotidiennes et certains facteurs sociaux.7Chaque fois qu’il s’allume une cigarette, le
fumeur prend en moyenne 10 à 12 inhalations de fumée, ce qui équivaut à prendre 10 à 12 doses d’une drogue
procurant un sentiment de bien-être.18 Il n’est donc pas étonnant que bon nombre de fumeurs décrivent leur
plaisir de fumer comme quelque chose faisant partie de leur image ou de leur vie sociale. Le fumeur qui es-
saie de réduire sa consommation de tabac se rappelle constamment de l’élément manquant associé à son
plaisir de fumer (p. ex. rituel matinal du café-cigarette, rencontres avec des amis pour prendre un verre).11 La
compulsion est une impulsion irrésistible et irrépressible à consommer la substance; elle amène la personne
à s’assurer qu’elle pourra toujours s’en procurer.19 Les stratégies visant l’identification des synchronisateurs
comportementaux constituent une composante essentielle du programme d’abandon du tabac.
Cesser de fumer est loin d’être une tâche facile. Cela sous-entend apporter d’importants changements à son
mode de vie, à ses valeurs, à son comportement en société et à son mode de penser. Mais surtout, cela
exige une grande capacité d’adaptation.
1.4 La dépendance au tabac: une maladie chronique
Le manque d’initiative de la part des cliniciens envers les programmes d’abandon du tabac est entre autres
attribuable au fait que les données sur l’abstinence à long terme trouvées dans la documentation médicale
sont décourageantes. Par conséquent, les cliniciens sont portés à penser que les interventions sont inutiles.
Mais ce jugement peut cacher la vraie nature de la dépendance au tabac, qui est en fait une maladie chronique
associée à des risques de rechute.8Si on adoptait une attitude plus constructive, on reconnaîtrait la chroni-
cité de la dépendance au tabac et s’attendrait à ce que le patient ait des périodes de rechute et de rémission.8
Rechute et chronicité vont de pair; ce n’est ni la défaillance du clinicien ni celle de son patient qui est en
cause. La vérité, c’est que la cessation tabagique ne nécessite pas des soins de courte durée, mais plutôt
des soins de longue durée.
À titre de professionnel de la santé, il faut se rappeler que la guérison n’est pas une destination, mais plutôt
un voyage!
1.5 Lien entre tabagisme et maladie cardiovasculaire
Il existe de très nombreuses preuves que le tabagisme accroît la morbidité et la mortalité, qu’il s’agisse de
maladies cardiovasculaires, de coronaropathies, de mort subite, de maladies vasculaires périphériques, d’acci-
dent vasculaire cérébral ou d’anévrisme de l’aorte. Les données de la Framingham Heart Study révèlent que
les femmes et les hommes n’ayant jamais fumé vivent respectivement en moyenne 4,9 ans et 6,2 ans de plus
sans souffrir de maladies cardiovasculaires comparativement aux fumeurs.20
Le tabagisme est un facteur indépendant de risque de coronaropathie. La présence simultanée d’autres facteurs
de risque, comme les antécédents familiaux de maladies cardiovasculaires, augmente de beaucoup ce risque.21
Le tabagisme a beaucoup d’effets néfastes sur l’appareil cardiovasculaire; il provoque une hausse de la tension
artérielle et une diminution de la résistance à l’exercice physique. Il favorise la formation de caillots sanguins et
réduit le taux de lipides de haute densité (HDL-C).21
5
Tabagisme et dépendance au tabac: au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage
1 / 45 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans l'interface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer l'interface utilisateur de StudyLib ? N'hésitez pas à envoyer vos suggestions. C'est très important pour nous!