TYPES DE TURBULENCES ENVIRONNEMENTALES ET ADAPTATIONS STRATEGIQUES. Gaël GUEGUEN ATER Montpellier III ERFI Montpellier I Les turbulences environnementales sont, depuis un certain temps, un sujet d'intérêt préoccupant chercheurs en sciences de gestions et praticiens. Caractéristiques d'un milieu difficile pour l'entreprise, ces turbulences ont fait leur apparition, d'un point de vue conceptuel, dans les années 60 avec Emery et Trist (1965) et Terreberry (1968). Par la suite, elles furent popularisées par des auteurs tels que Drucker (1969) ou Toffler (1981) qui les qualifieront de "défis majeurs". Leur présence a conduit à une reconsidération des outils stratégiques et a servi à développer le management stratégique en remplacement de la planification d'entreprise (Ansoff et al., 1993) qui pourtant était prônée auparavant comme solution aux menaces environnementales (Ansoff et al., 1979). Que l'on s'interroge sur leur réelle présence pour l'entreprise (Mintzberg, 1990 ou Woodward, 1982) ou sur leur caractère favorable (Marchesnay, 1986 ou d'Aveni, 1995), les turbulences environnementales sont une expression des difficultés rencontrées par les managers, c'est une émanation perceptuelle du manque de contrôle de la part des dirigeants. Face à un désavantage, on se positionnera soit en essayant de profiter de la nouvelle situation, soit en essayant de préserver l'organisation des perturbations. Ces deux comportements visent à maintenir un équilibre à travers une augmentation de la variété de réponses possibles, ou à travers une isolation de son système des menaces extérieures. Nous verrons par la suite que d'autres comportements sont à envisager en période de turbulences. Ces diverses réflexions concernant les caractéristiques environnementales ont entraîné l'émergence d'un courant fondateur des sciences de gestion avec des auteurs tels que Lawrence et Lorsch (1967) ou encore Burns et Stalker (1961) : la théorie de la contingence environnementale. Tous ces auteurs ont opté pour des caractéristiques environnementales différentes rejoignant incertitude, complexité, dynamisme ou turbulences afin de se prononcer sur une cohérence entre l'environnement et la structure de l'entreprise. Nombre d'études ont montré l'intérêt de ce "fit" sur la performance de l'entreprise (Naman et Slevin, 1993 ; Venkatraman et Prescott, 1990) Ce "fit" est un coalignement entre la stratégie ou la structure d'une organisation et son contexte externe (environnement). La turbulence est envisagée comme une caractéristique de l'environnement proche de l'organisation qui tend à le rendre fréquemment changeant. La perception de ces changements variera d'une organisation à l'autre mais aura un impact assez fort pour permettre une remise en cause du système de gestion actuel. Cameron, Kim et Whetten (1987) poseront, comme définition de la turbulence, que les changements auxquels est confrontée l'organisation sont significatifs, rapides et discontinus. Igor Ansoff a beaucoup contribué à l'étude des turbulences, il est vrai surtout à l'aide de méthodologies normatives. Ansoff et al. (1979) estimeront que les turbulences stratégiques font arriver des événements singuliers et inattendus qui résistent aux réponses de succès traditionnelles et qui, au résultat final, ont un impact majeur sur les profits de l'entreprise. Plus tard (Ansoff et Mac Donell, 1990), il envisagera que la turbulence 1 corresponde à la variabilité dans un environnement caractérisé par un degré de nouveauté de défis et par la vitesse auxquels ils se développent. Ces trois définitions nous permettent d'identifier quatre principes qui vont caractériser la turbulence : la significativité du changement, la rapidité du changement, l'imprévisibilité du changement et le renouvellement du type de changement. La turbulence entraînera des modifications, dans l'environnement, qui auront un impact important sur l'organisation. La significativité du changement correspond à l'effet direct des nouvelles caractéristiques de l'environnement. Ce nouvel état va intéresser directement l'organisation. Elle sera en mesure de se rendre compte du changement, car sa situation d'équilibre se trouvera menacée. Même si elle ne s’aperçoit pas que l'environnement connaît des variations, elle se rendra compte que son état se trouve modifié. La notion de significativité renvoie ainsi à celle de perception. La rapidité du changement correspond à la vitesse dans la succession des variations. Les oscillations seront prononcées. Les secousses de l'environnement se succéderont à une vitesse suffisamment élevée pour empêcher un état prolongé de stabilité. Ainsi, les organisations en présence de turbulences risquent de connaître un effet en cascade. L'inconvénient sera que la rapidité rencontrée ne permettra pas de finir la gestion du changement précédent sans connaître de nouvelles variations. D'autre part (Gueguen, 1997) le fait de réagir encore plus rapidement à ces changements peut entraîner une augmentation du niveau de turbulences. Le changement sera imprévu, discontinu. Ansoff et Mac Donell (1990) ajouteront que les changements discontinus seront des changements qui ne peuvent être maîtrisés par les capacités de la firme. En effet, la discontinuité sera envisagée comme un événement qui ne suit pas une extrapolation d'une série d'événements précédents. On pourra penser que l'imprévisibilité du changement gênera la firme qui souhaite un environnement stable. Cependant les changements rencontrés pourront être autant bénéfiques que mauvais pour l'organisation. La turbulence entraînera des variations difficilement prévisibles, mais celles-ci pourront intrinsèquement accroître la satisfaction des firmes en présence en fonction, par exemple, de leur positionnement stratégique. Le critère de nouveauté permet d'introduire un caractère surprenant pour ces variations. L'environnement va imposer de nouvelles situations à l'organisation où les modèles de réponses ne pourront pas servir. C'est dans cette caractéristique que résidera réellement l'opportunité d'apprentissage offert par les turbulences. C'est aussi au travers de cette notion que le concept de crise peut faire partie intégrante du processus de turbulence. Cependant la turbulence ne sera pas systématiquement composée de variations nouvelles, certaines auront déjà été rencontrées par l'organisation. En revanche, nous pourrons supposer que l'importance de la turbulence sera conditionnée par le nombre de situations nouvelles et caractérisée par le renouvellement du type de changement. Ainsi, nous pourrons retenir (Gueguen, 1998) que la turbulence est un enchaînement d'événements plus ou moins espacés dans le temps, plus ou moins favorables mais imprévisibles quant à leur ampleur et suffisamment nouveaux pour entraîner un impact, perçu par les membres de l'organisation, qui conduit à une reconsidération des capacités de la firme du fait de la gêne occasionnée. 2 Cependant il est nécessaire de bien comprendre le phénomène des turbulences qui, ayant fait l'objet d'une utilisation plus comme champ que comme objet de recherche, ont connu des acceptations et des définitions différentes malgré le fait qu'elles ont toutes en commun une certaine image d'incontrôlabilité de la firme en regard de l'extérieur, de son milieu, de son environnement. Pour ce faire, nous essayerons de déterminer les causes des turbulences, de voir dans quel contexte leur émergence est la plus probables. Une fois cette définition ou plutôt cette conception "fédératrice" trouvée, permettant de véhiculer un sens commun pour la recherche, une tentative d'opérationnalisation peut être envisagée. Le but est d'identifier les comportements types des entreprises en fonction de la donne environnementale de turbulences. Différents facteurs ont tour à tour été étudiés, lorsqu'on se penche quelque peu sur la littérature sur le sujet. Là encore, et cela est lié à l'observation de la turbulence plus comme un champ que comme un objet, les études montrent des comportements particuliers parfois contradictoires les uns envers les autres. Nous essayerons de retrouver les "dogmes" dominants en nous penchant sur les études réalisées précédemment. Il apparaîtra à l'issue de cette revue de la littérature, que les turbulences environnementales, que l'on se place d'un point de vu déterministe ou volontariste, entraînent obligatoirement des comportements spécifiques. Notre étude se veut d'identifier ces comportements en nous penchant sur une industrie qui présente ces différents éléments concourants à construire un environnement turbulent. L'intérêt sera d'y déceler des degrés divers, tant d'une façon qualitative que quantitative, permettant une avancée dans l'étude de ces concepts. Notre problématique ainsi dégagée sera confrontée à un corps d'hypothèses et à un test empirique. I. Causalité des turbulences. Les turbulences sont un concept issu des sciences physiques. Leur étude a suscité différentes approches, notamment celles concernant les théories du chaos. Dans la théorie des fluides, s'opposant à un écoulement laminaire ou régulier, la turbulence est un écoulement complexe où une superposition de fréquences entraîne des perturbations. Dans la théorie du chaos, elle est la manifestation d'une croissance de variations et d'amplifications faisant sortir un système d'un équilibre pour aller vers un autre. Utilisée en gestion, par l'intermédiaire de métaphores, cette même turbulence a caractérisé des environnements où de nombreuses perturbations intervenaient. Emery et Trist ( 1965) vont distinguer quatre types d'environnements allant de très calmes à très perturbés. Pour eux, le plus complexe est l'environnement turbulent où seule une politique d'institutionnalisation peut permettre l'émergence d'une solution. D'autre part, ils analysent l'environnement en essayant de comprendre la texture causale, à savoir la nature des interrelations au sein de l'environnement. Reprenant cette idée, qu'une décision peut apparaître rationnelle au niveau individuel mais irrationnelle au niveau collectif, Metcalfe et Mac Quillan (1977), dans le prolongement d'Emery et Trist, proposent un management macroorganisationnel qui se veut créateur d'un cadre d'institutions qui traitent avec les implications systémiques des conflits interorganisationnels. En fait, un paradoxe peut survenir : en effet, comme on le verra par la suite, la turbulence est issue de la complexité. Hors en augmentant les interrelations entre les organisations, afin de réduire les turbulences, on augmente la complexité (définit en terme du nombre d'interrelation), d'où augmentation de la turbulence. 3 Toujours influencés par les travaux sur les interrelations dans l'environnement, Mc Cann et Selsky (1981) développent un cinquième type d'environnement : l'hyperturbulent. Outre l'adjonction du superlatif, cette recherche rentre dans la perspective du courant de l'écologie des populations où l'environnement se trouve scindé en deux parties : l'une chaotique, l'autre beaucoup plus calme, car séparée du reste des organisations les moins performantes. Cependant des critiques furent émises concernant l'approche d'Emery et Trist. On notera Metcalfe (1974) qui leur reconnaît un travail de description mais une absence concrète de réponses aux turbulences. Il leur reprochera d'avoir, par cette absence, contribué à considérer les turbulences comme une simple métaphore de conditions environnementales où l'entreprise a du mal à survivre du fait de la complexité ou pour Polley (1997) du fait d'une dynamique extrêmement complexe avec une quantité infinie de variations. Terreberry (1968), en s'interrogeant sur l'évolution de l'environnement des organisations, retient que jusque dans les années 60 les organisations étaient considérées comme des systèmes fermés, l'intensification des relations a changé les choses. Ainsi, l'évolution est inéluctable et l'auteur pense que l'environnement organisationnel devient de plus en plus turbulent et que le souci d'adaptation des organisations renforce la perte de leur autonomie. L'environnement se chargera de la pression sélective sur les différentes entreprises présentes. Les transformations internes engendreront à leur tour une augmentation des turbulences. Il apparaît donc un entremêlement fort des différentes caractéristiques environnementales. Dess et Beard (1984), dans une tentative de conceptualisation, retiendront trois dimensions permettant d'expliquer l'environnement. Il s'agira de l'abondance (capacité), de la complexité (homogénéité-hétérogénéité, concentration-dispersion) et du dynamisme (stabilité-instabilité, turbulence). Pour ces auteurs, ce découpage peut permettre une meilleure opérationnalisation des facteurs externes aux organisations et ainsi engendrer une compréhension plus cohérente de théories telles que l'écologie des populations ou la dépendance des ressources. Cette unification du champ de recherche à un intérêt notable. La conceptualisation d'un concept aussi ambiguë que l'environnement (quelles sont ses frontières ? Quels acteurs le composent ? Existe-t-il des environnements similaires ?). Dans notre cas, elle peut entraîner une réflexion sur les causes des turbulences en fonction de trois facteurs généralement relevés dans la littérature : la complexité, l'incertitude et le dynamisme. La complexité correspond à l'hétérogénéité et l'étendue des activités d'une organisation (Dess et Beard, 1984). Elle peut représenter la mesure du nombre de configurations compétitive qu'une firme peut idéalement considérer comme bonne pour sa propre stratégie (Chakravarthy, 1997). Pour Marchesnay (1993) un système deviendra complexe quand le nombre d'acteurs est important et quand les relations entre ces acteurs sont fortes et interactives. Cette notion renvoie donc à une diversité et une hétérogénéité des éléments composant un système. D'un point de vue qualitatif, l'augmentation des relations entre ces éléments renforce le caractère complexe du système. L'incertitude est le manque d'informations sur des facteurs environnementaux rendant impossible la prévision de l'impact d'une décision spécifique sur l'organisation et où on ne pourra donner de probabilités quant à l'impact des facteurs environnementaux sur l'organisation (Morris et al., 1995). De la même façon, Demsetz (1998) estime que l'incertitude sera présente 4 lorsque l'information est suffisamment défaillante pour qu'il soit impossible de faire des estimations de probabilités des différents événements possibles. Le dynamisme entraîne l'absence de modèles en renforçant le caractère imprédictible de l'environnement (Dess et Beard, 1984). Il se distingue par le degré de changement ou de variations des facteurs constituants l'environnement (Bourgeois, 1985). Proche du concept de volatilité, le dynamisme peut se trouver représenté par la croissance du marché, la modification de la structure concurrentielle ou l'amélioration des technologies. Ces trois dimensions, corrélées à la turbulence, forment une toile de fond permettant de mieux appréhender l'environnement. Ainsi, de nombreux auteurs vont estimer que (1) la turbulence est fonction de la complexité et du dynamisme (Morris et al. 1995, Chakravarthy 1997, Terreberry 1968, Ansoff et al. 1993). Pour Ganesan (1994), Daft et al. (1988) ou Duncan (1972) l'association complexité et dynamisme (2) va produire de l'incertitude, mais pour Duncan, le dynamisme est un facteur explicatif de l'incertitude perçue plus fort que la complexité. Callot (1997) pense que la complexité entraîne de l'incertitude. Jina et al. (1996), ainsi que Ansoff et al. (1979), estiment que la turbulence est liée à l'incertitude et au dynamisme (3). Comme le fait remarquer Brisson (1992), les termes turbulences et incertitudes ont été souvent amalgamés. En effet, si on se penche sur le travail de Lawrence et Lorsch (1967), leur incertitude, se caractérisant par la complexité et le dynamisme, ressemble fort à la turbulence. Mais selon Cameron et al. (1987) la turbulence crée de l'incertitude (4) en arguant le fait que la turbulence est le meilleur facteur de prédiction de la perception des incertitudes environnementales. Ainsi, nous pouvons comprendre que la turbulence (T) est fonction de la complexité (C) et du dynamisme (D), ainsi que de l'incertitude (I). Nous avons donc les équations suivantes : En fonction de (1) : T = f (C ; D). Ici, la turbulence est liée à la présence de l'association complexité et dynamisme. En fonction de (2) : I = f (C ; D). L'incertitude a les mêmes causes que la turbulence. Toutes deux sont issues d'une complexité et d'un dynamisme de l'environnement. En fonction de (3) : T = f (I ; D). L'incertitude associée au dynamisme permet de faire émerger des turbulences au sein d'un environnement. En fonction de (4) : I = f (T). Confirmé par (2), la turbulence, du fait du renouvellement rapide des éléments de l'environnement entraîne de l'incertitude. A ce niveau, nous serions tentés de dire que pour certains auteurs T = I. A partir de ces relations trouvées, nous pouvons estimer que : T = f (C ; D ; I) en ayant I = f (C ; D ; T) (5). Les turbulences sont issues de l'association des caractéristiques de complexité, de dynamisme et d'incertitude de l'environnement. On peut raisonnablement imaginer qu'il existe différentes sortes de turbulences qui se distingueront par la présence plus ou moins forte de l'une de ces combinaisons. Nous pouvons représenter, via la figure 1, l'ensemble des causalités des facteurs de l'environnement considérés : 5 Complexité et Dynamisme (2) (5) (1) Incertitude et Dynamisme (3) (4) Turbulence Fig. 1 : Causalité des relations environnementales Notre propos est de penser qu'il existe différentes turbulences tant d'un point de vue quantitatif (importance du changement pour l'entreprise) que qualitatif (par exemple : est-ce une turbulence plutôt liée à la complexité ou au dynamisme ?). Leurs implications, comme nous le verrons par la suite, peuvent engendrer des comportements stratégiques différents, car les facteurs prioritaires et la visibilité stratégique différeront. En effet, si on retient le critère de lisibilité, considérée comme la compréhension de l'environnement (Silvestre et Goujet, 1996), les turbulences perturberont de façon spécifique la lecture de l'environnement que l'entreprise fera afin d'établir ses choix stratégiques. Incertitude et turbulence, nous l'avons vu, apparaissent comme des notions assez proches. Toutes deux font partie d'une considération perceptuelle de l'environnement. Dans cette considération, si le milieu entourant l'entreprise peut être source d'opportunité, il renferme surtout d'innombrables pièges. Le thème de l'environnement perçu est un thème extrêmement vaste. Tosi et al. (1973) critiquèrent les travaux de Lawrence et Lorsch (1967) sur ce problème, de même que Downey et al. (1975). Starbuck et Mezias (1996) sont extrêmement méfiant vis-à-vis d'une prétendue objectivité des données et relèvent que la plupart des enquêtes se font par le biais perceptuel. Bourgeois (1980) estime que l'environnement perçu est le plus important puisque c'est lui qui concourt au processus d'élaboration de la stratégie. Plus tard (1985), il estime que la perception et la vision de l'environnement sont la clef du processus stratégique et un même environnement peut apparaître de façon différente à des firmes. Remarquons cependant que Sutcliffe et Huber (1998) ont montré qu'il existe une homogénéité signifiante de perception au sein d'un même environnement. En ce qui concerne la littérature sur les turbulences, on s'aperçoit que les comportements des entreprises différent de ce que voudrait la doctrine. Ainsi, Brisson (1992) remarque qu'il existe une augmentation de la centralisation et une baisse de la participation, entre autre, alors qu'il faudrait que l'entreprise décentralise la prise de décision et fasse participer ses différents acteurs. Miller (1992) pense que les comportements à prendre face à des données environnementales perturbantes vont nuire à la cohérence interne de l'entreprise. Ceci se remarque également en fonction des travaux sur l'inertie de Hannan et Freeman (1977) pour qui l'inertie va diminuer la flexibilité de l'entreprise et limite son adaptation aux changements environnementaux. Le phénomène perceptif est donc influencé par la situation de la firme. Callot (1997) s'apercevra que les entreprises en difficultés perçoivent plus de turbulences que 6 les autres. Duncan (1972) émet l'idée que les individus ayant une très haute tolérance à l'ambiguïté et à l'incertitude vont percevoir les situations moins incertaines que d'autres ayant une tolérance plus faible. Cependant, nous objecterons que le positionnement stratégique et la réflexion sur les ressources disponibles sont les déterminants principaux de l'adaptation. Ainsi, on pourra retrouver des comportements mécaniques, tout à fait optimaux, malgré le fait que l'environnement soit turbulent. Donc, on peut raisonnablement envisager une étude des turbulences en fonction de la perception de la part des acteurs concourant à sa trame causale, car ce sont eux, prioritairement, qui permettront la construction dudit environnement et c'est en fonction de cette perception qu'ils élaboreront leurs stratégies. L'intérêt serait de trouver un environnement a priori turbulent (d'un point de vue objectif) et d'en étudier la perception de la part des entreprises le composant. Les différences relevées permettraient une comparaison avec l'intensité de la complexité, du dynamisme ou de l'incertitude exprimés par les membres des entreprises. Cependant, nous souhaitons diviser l'environnement en deux zones spécifiques. C'est la traditionnelle distinction entre environnement proche et environnement général ("task environment" et "remote environment" dans la littérature américaine) que nous allons retenir. Dans l'environnement proche, l'entreprise est influencée par des facteurs externes mais peut aussi les influencer. Il s'agira des clients, des fournisseurs ou des concurrents. Dans l'environnement général, l'entreprise ne se trouvera qu'influencée par ces facteurs externes tels que l'environnement socio-politique, les tendances de consommation, le climat général. Plus sera proche l'environnement plus les signaux seront rapidement perçus et il s'agira d'avertisseurs plus précis (Marchesnay, 1986, retiendra les notions de micro-, de méso- et de macro-environnement). On pourra penser que la perception du danger sera plus importante dans l'environnement proche que dans l'environnement général. La distinction repose sur les travaux de Bourgeois (1980) qui envisage que l'environnement se décompose en secteurs et n'est plus considéré comme une seule entité. De la même façon, et comme le font remarquer Rojot et Bergmann (1995), que Lawrence et Lorsch (1967) avaient cessé de considérer l'environnement comme homogène mais composé de parties sur lesquelles l'entreprise allait avoir des relations différentes (environnement scientifique, technico-économique et de marché). La distinction entre environnement général et particulier reposera sur leur position par rapport à l'entreprise. Nous retiendrons les notions d'environnement latéral, aval et amont. Là encore, les différentes caractéristiques expliquant les turbulences auront des positions bien particulières. Les comportements stratégiques des entreprises seront liés au positionnement et à la nature des perturbations extérieures. L'environnement amont sera composé des fournisseurs et des technologies utilisées directement par l'entreprise. Il s'agira de l'origine des ressources nécessaires à son activité. L'environnement aval se composera des clients et des débouchés des inputs de l'entreprise. L'environnement latéral concernera la concurrence et les éventuels produits de substitution. Ainsi, une augmentation de la complexité au niveau des fournisseurs pourra être interprétée différemment qu'une augmentation de la complexité avec les clients. Notre propos va se trouver synthétisé dans le tableau suivant qui est une grille de recherche des turbulences environnementales : 7 Tab. 1 : Grille d'identification des turbulences environnementales. Découpage de l'environnement Amont Environnement Aval proche Latéral Amont Environnement Aval général Latéral Caractéristiques environnementales Complexité Dynamisme Incertitude ⇓ ⇓ ⇓ TURBULENCES Notre problématique repose sur l'idée qu'en fonction du type de turbulences, les entreprises auront des réponses spécifiques. Une turbulence qui se caractérise par un dynamisme latéral proche aura une influence différente qu'une turbulence ayant pour origine une complexité avale générale. L'idée est donc que face à une perturbation environnementale, les entreprises vont réagir différemment en fonction des caractéristiques perçues de cette turbulence. D'où notre thèse qui veut que le type de turbulences entraîne un comportement stratégique spécifique. II. Adaptation aux turbulences. L'adaptation est généralement considérée comme un terme général décrivant une période de changements graduels, incrémentaux et continus en réponse à des conditions environnementales (Tushman et Romanelli, 1985). Il s'agit donc de mobiliser les ressources de l'entreprise pour être en cohérence avec la nature de l'environnement, il s'agira de fournir des réponses pour assurer la survie à long terme ou assurer la croissance de l'entreprise. Chakravarthy (1982) distinguera un modèle d'adaptation où il existera une capacité, un processus et un état d'adaptation. Les capacités se retrouveront dans les capacités organisationnelles (agrégat des ressources humaines permettant le processus d'information) et les ressources matérielles (matières, finances, technologies dont dispose l'entreprise). Donc l'adaptation de l'entreprise se trouve contrainte par ses ressources disponibles. Hrebiniak et Joyce (1985) concilient les deux visions de l'adaptation organisationnelle, à savoir celles des choix stratégiques (l'entreprise décide de sa survie en s'adaptant) et celle du déterminisme environnemental (l'environnement va sélectionner les entreprises au sein d'une industrie). En fait, plutôt que de voir en ces deux théories des oppositions, les deux auteurs vont considérer que se sont des variables indépendantes et peuvent être positionnées sur deux continuums afin de dresser une typologie de l'adaptation organisationnelle. Ainsi, l'adaptation est issue à la fois de l'environnement (dans notre cas, la turbulence va créer des niches par exemple) et du management (dans notre cas, en fonction de leur perception, les entreprises vont modifier leurs objectifs ou leurs décisions). De ce fait, nous pouvons nous pencher sur les diverses possibilités offertes aux entreprises face aux turbulences que nous avons recensées dans le tableau suivant : 8 Tab.2 : Les réponses aux turbulences dans la littérature. Face à la turbulence Auteurs Management intra-organisationnel, Création de Metcalfe et Mc Quillan (77), Metcalfe réseaux Institutionnalisation, Régulation externe (74), Emery et Trist (65), Mc Cann et Selsky (85), Post et Mahon (80), Augmentation des interrelations entre les Terreberry (68) organisations Comportement éthique, valeurs fortes Morris et al. (96) Contrôle de l'environnement Bonis (72) Stratégie entrepreneuriale (innovation, introduction Naman et Slevin (93), Morris et al. (95), du changement, réaction rapide et flexible) Davis et al. (83), Miller et Friesen (83), Ansoff (68 et 90) Perturber le marché d'Aveni (95), Prokresch (93) Comportement de créateur Ansoff et al. (93) Structure organique Brisson (92), Mintzberg (90), Jennings et Seaman (94) Développement de la tolérance aux variations et Polley (94) structure indépendante flexible Augmenter l'informel Getz (94) Décentralisation Kalika (85) Augmentation de la vitesse de prise de décision Judge et Miller (91), Kalika (91) Transversalité dans l'organisation sur la base de Allouche et Huault (98), Tarondeau et processus complexes, apprentissage Wrigth (95), Martinet (84) Structure Généraliste Hannan et Freeman (77) Développement de ressources distinctes Chakravarthy (97) Focalisation et flexibilité du métier de base, Joffre et Koenig (84), Meyer (82) constitutions de réserves, concentration des ressources Recentrage sur les buts Woodward (82) Se positionner sur une niche Callot (97) Les propositions des auteurs peuvent apparaître comme contradictoire à certains égards. En fait, il n'en est rien comme nous allons le voir. Notre répartition permet de faire ressortir quatre grandes orientations stratégiques en réponse aux turbulences de l'environnement : une stratégie de pérennisation collective, une stratégie entrepreneuriale, une stratégie organisationnelle et une stratégie de positionnement. La stratégie de pérennisation collective : c'est celle mise en avant par Emery et Trist ou par Metcalfe. Il s'agit d'une institutionnalisation de l'environnement et une préférence pour des choix collectifs plutôt qu'individuels. Le but est une concertation des différents acteurs pour permettre une préservation des avantages. La création de normes, de conventions, de règles de la concurrence, d'une régulation externe permettant de limiter une explosion des font partie de la stratégie de pérennisation collective. Par exemple, la limitation volontaire de la diffusion d'une innovation, le rassemblement autour d'un ordre professionnel sont des mesures permettant aux organisations de se prémunir contre l'amplification des changements dépassant leur seuil de tolérance. 9 La stratégie entrepreneuriale : elle est l'inverse de la précédente puisque c'est une stratégie individuelle, menée au détriment des concurrents. Comme le disait le dirigeant de "Silicon Graphics" (Prokresch, 1993), "la clef pour obtenir l'avantage compétitif n'est pas de réagir au chaos ; c'est de produire le chaos". Au delà du discours "guerrier" que nous apprécierons à une valeur toute relative, on retiendra que le comportement entrepreneurial est fortement basé sur l'innovation (investissement en recherche et développement), sur une observation attentive de l'environnement (veille environnementale) où la recherche du changement est permanente. D'Aveni, qui soutient ce type de stratégie, estime que l'avantage est de courte durée, mais que de toute façon il faut rapidement en retrouver un autre. La stratégie organisationnelle : c'est une thématique d'importance dans la littérature sur le management stratégique. Tel Mintzberg, à l'instar de Burns et Stalker, on peut proposer que des variables structurelles prendront une forme organique plus que mécanique afin d'absorber le changement de l'environnement et de pouvoir le réguler au sein de l'entreprise. La flexibilité, la décentralisation, la participation seront essentielles pour permettre à l'entreprise un apprentissage basé sur l'informel. La stratégie de positionnement : c'est une stratégie de niche où l'on se recentre sur ses buts, sur ses compétences déjà acquises. Comme Meyer (1982) le met en avant, on pourra envisager ces turbulences comme des secousses et attendre le passage des perturbations, permettant par la suite de modifier sa structure ou ses objectifs stratégiques. Dans ce cas, il s'agit d'une position d'attente. La disponibilité de "slack" (Cyert et March, 1963) amortira l'impact. Mais cela peut être également vu comme la création de nouveaux espaces liés aux changements discontinus qui vont redéfinir des niches viables. L'intérêt sera de maintenir la certitude du contrôle sur l'entreprise. Ces quatre stratégies seront respectivement optimales en fonction du type de turbulence rencontrée. Nous avons distingué le fait que les turbulences peuvent se caractériser par une plus grande importance soit du couple complexité-dynamisme, soit du couple complexitéincertitude, soit du couple dynamisme-incertitude, soit de l'association complexité-incertitudedynamisme. En fonction de la valeur de chacun de ces couples, la stratégie retenue pourra s'avérer viable et permettra la survie, si la stratégie est menée à terme, de l'entreprise, voire son développement. Pour mieux visualiser nos propositions nous allons représenter par un cube (figure 2 : cohésion du choix stratégique et caractéristiques des turbulences) l'environnement où les quatre stratégies seront positionnées en fonction de leur localisation optimale. La stratégie de pérennisation collective est plus efficace lorsqu'il y a moins de dynamisme. En effet l'idée est de concilier les forces en présences nombreuses avec de fortes interrelations générant de l'incertitude. Cette stratégie vise à réduire incertitude et complexité afin d'avoir une meilleure lisibilité de l'environnement. Elle est peu efficace lorsqu'il y a trop de dynamisme car celui-ci crée de nouvelles entrées risquant de perturber l'équilibre stratégique au profit d'éléments non pris en compte dans les tentatives d'institutionnalisation. D'où : H1 : La stratégie de pérennisation collective intervient lors de turbulences caractérisées par la complexité et l'incertitude. La stratégie de souplesse organisationnelle est une stratégie tournée vers l'entreprise. Elle est la plus efficace lorsque les turbulences sont marquées d'incertitude et de dynamisme, entraînant une modification continuelle de l'équilibre stratégie-structure. L'apparition de complexité est moins discriminante dans le cas de cette stratégie. Chakravarthy (1982) parlera de 10 spécialisation adaptative pour désigner cette gestion du "fit" au sein d'un état d'adaptation donné. D'où : H2 : La stratégie de souplesse organisationnelle intervient lors de turbulences caractérisées par le dynamisme et l'incertitude. La stratégie de positionnement est une stratégie qui est moins efficace face à des turbulences qui se caractérisent par une forte incertitude. En effet, elle vise à assurer une niche, issue de la complexité et du dynamisme, qui est censée produire une rente à terme. Si on n'a pas de fortes raisons de croire que ce domaine de l'environnement est viable, il serait trop dangereux d'y concentrer l'exclusivité de ses forces. La stratégie de positionnement inclut une volonté de choix calculés et prudents. Notons que cette stratégie peut permettre une structure mécanique. D'où : H3 : La stratégie de positionnement intervient lors de turbulences caractérisées par la complexité et le dynamisme. La stratégie entrepreneuriale est la stratégie à adopter lors de turbulences où la complexité, le dynamisme et l'incertitude ont une importance équivalente. La lisibilité de l'environnement est quasi nulle et seule l'entreprise est maître de son destin. Il lui faut être proactive et créer ses avantages concurrentiels au sein d'un environnement qui peut se révéler extrêmement riche en opportunités, pour peu qu'elle sache développer des produits captant le marché. C'est une stratégie de contrôle visant un équilibre ponctué considéré comme une accumulation de changement provoquant une brisure permettant un nouvel équilibre. D'où : H4 : La stratégie entrepreneuriale intervient lors de turbulences caractérisées par la complexité, l'incertitude et le dynamisme. INCERTITUDE Souplesse organisationnelle Pérennisation collective Stratégie entrepreneuriale COMPLEXITE Stratégie de positionnement DYNAMISME Fig. 2 : Cohésion du choix stratégique et caractéristiques des turbulences 11 Puisque l'environnement proche est considéré avec plus d'importance que l'environnement général (affectant directement et particulièrement l'entreprise), il serait judicieux de penser que les turbulences inhérentes à ce type d'environnement auront un impact plus fort. De même, on peut estimer que ces turbulences engendreront plus aisément le choix d'un comportement stratégique donné. D'où : H5 : Les turbulences caractérisant l'environnement proche incitent plus les entreprises à faire un choix stratégique que les turbulences de l'environnement général. En fonction des différents éléments énoncés, en période de turbulences il existe différents choix stratégiques possibles qui seront contingents au type de turbulences. De ce fait, il faut pouvoir caractériser les événements environnementaux afin de vérifier si les choix stratégiques opérés sont performants. De plus il sera intéressant de voir les différences d'impact des turbulences latérales, en amont et en aval sur l'entreprise pour lesquelles nous nous refusons à émettre des hypothèses pour l'instant. Notre enquête doit porter sur une population spécifique, permettant d'identifier les critères énoncés. III. Méthodologie. Afin de tester nos hypothèses et de voir si notre thèse peut trouver confirmation, nous adopterons la démarche de recherche suivante : Nous allons rechercher un environnement turbulent pouvant présenter des caractéristiques d'incertitude, de complexité et de dynamisme permettant de dégager les traits saillants souhaités. La comparaison entre environnements différents est pour l'instant plus que problématique car il risque d'y avoir de trop grosses spécificités pour chacune des industries concernées. Il faut pouvoir travailler sur des populations homogènes afin de dégager des résultats significatifs. De ce fait, nous nous intéresserons à un environnement turbulent où des secteurs vont se différencier. Les industries à haute technologie ont toujours été considérées comme turbulentes. Doublées d'une caractéristique d'émergence elles concourent à asseoir l'incertitude, la complexité et le dynamisme. Après réflexion, l'industrie internet, à savoir les entreprises ayant pour métier l'internet, apparaît comme fortement appropriée. Il semble s'en dégager différentes spécificités intéressantes. En effet, certains phénomènes de concentration commencent à prendre place dans certains de ses secteurs, laissant augurer une augmentation de la complexité liée aux différentes interactions nécessaires au rachat des entreprises. Des start up conditionnent son dynamisme. L'entrée, sur cette industrie, d'entreprises ayant déjà fait leurs preuves dans d'autres métiers entraîne une forte incertitude de même que les standards technologiques qui sont en perpétuelles évolutions. L'industrie internet peut se subdiviser en différents secteurs. Nous pouvons retenir : les fournisseurs d'accès à internet (FAI), les agences conseils en commerce et communication électronique, les entreprises d'animation et de maintenance de sites, les sociétés de conseils en référencement et promotion de sites web, les hébergeurs de sites, les entreprises de conception de sites, les éditeurs et distributeurs de logiciels, les boutiques marchandes et les sites de recherches. La population est assez hétérogène, avec de grandes entreprises et des PME. La coexistence d'entreprises différentes permettra d'assurer la validité d'éventuels résultats. 12 Comme le suggère le rapport Lorentz (1998), l'internet, via le développement du commerce électronique, est une industrie profondément dynamique. Nous noterons que les propositions du rapport laissent entrevoir des possibilités de stratégie d'institutionnalisation par le biais de l'application de labels de qualité (type norme AFNOR) ou l'introduction de l'Etat via la législation, pour réguler cet environnement. Du fait de sa nouveauté, il s'agit d'une industrie peu encore régulée permettant l'adoption libre de comportements stratégiques. Le développement de PME entrepreneuriales ou la mise en place, par de grandes sociétés, de comportements innovatifs (par exemple, la société américaine SUN Microsystem et son langage JAVA) démontrent que ce type de stratégie est particulièrement viable en ce milieu dépourvu, pour certains de ses secteurs, de fortes barrières à l'entrée. D'autant plus qu'il s'agit d'un environnement favorisant, pour l'heure, plus la rentabilité capitalistique que commerciale (exemple de l'inflation du titre Netscape sur le Nasdaq). Les stratégies de souplesse organisationnelle, du fait de l'évolution des normes et des technologies peuvent s'avérer performantes. En effet, lorsque l'incertitude et le dynamisme sont présents, les turbulences peuvent être contrées en intégrant le changement dans la structure de l'entreprise. De plus, le caractère incertain de l'environnement, au niveau des technologies à utiliser, nécessite une marge de manoeuvre pour l'entreprise afin de ne pas se retrouver isolé sur un marché peu porteur Les stratégies de positionnement sont également viables. En effet, on constate une forte spécialisation de certains acteurs de cette industrie. Ceux-ci tentent de capitaliser leur avantage concurrentiel en se positionnant sur de petits créneaux porteurs. L'émergence de cette industrie permet de détenir un petit monopole et de l'exploiter en détenant un avantage concurrentiel basé sur un actif immatériel spécifique (brevet, technologie). La méthode d'enquête sera "cohérente" avec l'environnement étudié puisqu'il s'agira d'une enquête administrée sur internet. Schaaper (1999) montre que les résultats obtenus sont identiques à ceux effectués par voie postale. La démarche sera la suivante : il s'agira d'envoyer par courrier électronique une présentation de l'étude et une invite à cliquer sur un lien contenu dans le message. Ce lien permettra d'accéder à une page internet construite pour le recueil des données. La localisation de ce questionnaire se trouvera sur le serveur de mon laboratoire, ce qui permettra une meilleure institutionnalisation de l'enquête perçue par les entreprises. Le questionnaire, une fois rempli et validé, sera reçu selon une codification appropriée, permettant un traitement statistique rapide, dans ma boîte aux lettres électroniques. Les questions posées concerneront donc les caractéristiques perçues de l'environnement, les orientations stratégiques effectuées et souhaitées et le niveau de performance des entreprises. Il s'agit donc d'une enquête quantitative. Celle-ci essayera de distinguer les différentes adéquations stratégiques en fonction de l'équation suivante : Performance = f (stratégie ; turbulences) comme nous l'avons avancé dans notre thèse. 13 Conclusion. Notre propos fut de présenter la recherche en fonction de différentes étapes. La première concerna l'identification des causes des turbulences. Nous avons vu que l'analyse des turbulences peut passer par une considération perceptuelle. Nous pûmes retenir que complexité, dynamisme et incertitude concouraient à créer de la turbulence. Ladite turbulence peut s'échelonner en fonction de la zone d'origine (touche-t-elle des ressources proches de l'entreprise ?). La multiplicité des turbulences apparut lorsque nous nous penchâmes sur les différents degrés pouvant la caractériser. Ainsi, il n'existe pas une turbulence mais des turbulences. La seconde étape fut d'identifier dans la littérature les stratégies et préconisations mis en avant pour permettre à l'entreprise de survivre et de croître dans ce type d'environnement. Nous essayâmes de dégager quatre grandes orientations qui sont des stratégies possibles. Les stratégies entrepreneuriales, de positionnement, de souplesse organisationnelle et de pérennisation collective furent envisagée pour concilier les différentes opinions sur la réaction à adopter et le type de turbulence. C'est ainsi que nous dégageâmes l'idée qu'en fonction du type de turbulence une stratégie spécifique peut être retenue. Notre dernière étape fut de présenter les perspectives exploratoires possibles. Il m'est apparu que cette étude pouvait se révéler propice lors d'une enquête portant sur une industrie fortement turbulente du fait de son émergence et pouvant se caractériser en secteurs suffisamment distincts pour laisser apparaître certains facteurs environnementaux créant de la turbulence. De ce fait, nous retînmes l'industrie internet. Bibliographie : ALLOUCHE, J. et ISABELLE, H. (1998). "Contrôle, coordination et régulation : les nouvelles formes organisationnelles", Finance Contrôle Stratégie, volume 1, n°2, juin 1998, pp. 5-31. ANSOFF, H. I. et MCDONELL, E.J. (1990). Implanting Strategic Management, second edition, Prentice Hall. ANSOFF, H. I. et SULLIVAN, P. A. (1993). «Empirical support for a paradigmatic theory of strategic success behavior of environment serving organization», International Review of Strategic Management, Vol. 4, pp. 173-203. ANSOFF, H. I., EPPINK, J. et GOMER, H. (1979). «Management of strategic surprise and discontinuity: problem of managerial decisiveness», Revue Sciences de Gestion, n°1, pp. 459488. ANSOFF, I. (1968) Corporate Strategy. Trad. Stratégie du développement de l'Entreprise, Les éditions de l'organisation, coll. Les classiques EO, 1989. AVENI (d'), R. (1995). Hypercompétition. Vuibert. 381 p. BONIS, J. (1972). "Oraganization and environnement", International Studies of Management and Organization, vol.2, pp.314-343. BOURGEOIS, L.J. (1980). "Strategy and environment: a conceptual integration", Academy of Management Review, vol. 5, n°1, pp.25-39. BOURGEOIS, L.J. (1985). "Strategic goals, perceived uncertainty, and economic performance in volatile environment", Academy of Management Journal, vol.28, n°3, (Septembre), pp. 548-573. BOYD, B. (1990). "Corporate linkages and organizational environments : a test of ressource dependence model", Strategic Management Journal, vol.11, pp. 419-430. 14 BRISSON, G. (1992). L'Influence de la Relation Structure-Turbulence sur la Performance des Organisations. Le Cas des Municipalités Québecoises, Thèse N.R., sciences de gestion, Aix Marseille 3. BURNS, T. et STALKER, G.M. (1961). The Management of Innovation. Tavistock, london. CALLOT, P. (1997); Déterminants Structurels et Stratégiques, Perception de l'Environnement et Influence sur le Champ Concurrentiel de la Restauration Commerciale en France. Thèse, IAE de Poitiers, 6 janvier 1997, 482 p. CAMERON, K. S., KIM, M. U. ET WHETTEN, D.A. (1987). "Organizational effects of decline and turbulence", Administrative Science Quarterly, n°32, pp. 222-240. CHAKRAVARTHY, B. (1997). "A new strategy framework for coping with turbulence", Sloan Management Review, Winter, pp. 67-82. CHAKRAVARTHY, B.S. (1982). "Adaptation : a promising metaphor for strategic management", Academy of Management Review, 1982, vol.7, n°1, pp. 65-44. CYERT, R.M. et MARCH, J.G. (1963). A Behavioral Theory of the Firm, Prentice Hall, USA, traduction : Processus de Décision dans l'Entreprise, traduit par J.P. PIOTET, 1970, Dunod, Paris. DAFT, R.L., SORMUNEN, J. et PARKS, D. (1988). "Chief executive scanning, environmental characteristics and company performance : an empirical study", Strategic Management Journal, vol.9, pp. 123-139. DAVIS, D., MORRIS, M.H. et ALLEN, J. (1991). "Perceived environemental turbulence and its effects on selected entrepreneurship, marketing and oraganizational characteristics in industrial firms", Journal of the Academy of Marketing Science, vol. 19, n°1, pp. 43-51. DEMSETZ, H. (1998). L'Economie de la Firme. Sept Commentaires Critiques. Traduction de The economics of the Business Firm - Seven Critical Commentaries. Traduction de J.C. Papillon, Editions Management et société (EMS), Paris, 1998, 250 p. DESS, G.G. et BEARD, D.W. (1984). "Dimensions of organizational task environments", Administrative Science Quarterly, 29, pp. 52-73. DOWNEY, H.K., HELLRIEGEL, D. et SLOCUM jr, J.W. (1975). "Environmental uncertainty : the construct and its application", Administrative Science Quarterly, December 1975, vol.20, pp. 613-629. DRUCKER, P. (1969). La Grande Mutation, trad. De "The age of discontinuity". Les éditions de l'organisation, 1970, 429 p. DUNCAN, R.B. (1972). "Characteristics of organizational environments and perceived environemental uncertainty", Administrative Science Quarterly, vol. 17, pp. 313-327. EMERY, F. E. et TRIST, E.L. (1965). «La trame causale de l’environnement des organisations», Sociologie du Travail, 1964, n°4, pp. 337-350. GANESAN, S. (1994). "Determinants of long-term orientation in buyer-seller relationships", Journal of Marketing, vol. 58, April, pp.1-19. GETZ, I. (1994). "Systèmes d’information: l’apport de la psychologie cognitve", Revue Française de Gestion, (Juin-Juillet-Août), n°99, pp. 92-108. GUEGUEN, G. (1997). " Face aux turbulences, l'entreprise doit-elle être réactive ?", actes de la VI ème conférence de l'AIMS, Montréal. GUEGUEN, G. (1998). " Turbulences environnementales, effets chaotiques et degré de sensibilité aux conditions initiales : contribution à la théorie de l'adaptation de l'entreprise", actes de la VIIème conférence de l'AIMS, Louvain-la-Neuve. HANNAN, M.T. et FREEMAN, J. (1977). "The population ecology of organizations", American Journal of Sociology, vol. 82, n°5, pp.929-964. HREBINIAK, L.G. et JOYCE, W.F. (1985). "Organizational adaptation : strategic choice and environmental determinism", Administrative Science Quarterly, September 1985, pp. 336-349. 15 JENNINGS, D.F. et SEAMAN, S.L. (1994). "High and low levels of organizational adaptation : an empirical analysis of strategy, structure and performance", strategic Management Journal, vol. 15, pp. 459-475. JINA, J., BHATTACHARYA, K. et WALTON, A. (1996). "A new perspective in manufacturing systems design : turbulence management and rapid re-invention", International journal Technology Management, vol.12, n°2, pp.144-162. JOFFRE, P. et KOENIG, G. (1984). "L'entreprise et la turbulence", in L'Entreprise dans la Littérature étrangère, Université de Paris Dauphine, Analyse de la SEDEIS, DMTP, 70 p. JUDGE, W.Q. et MILLER, A. (1991). "Antecedents and outcomes of decision speed in différent environnemental contexts", American Management Journal, vol. 34, n°2, June, pp.449-463. KALIKA, M. (1985). "L'efficacité des entreprises est-elle liée à leur structure ?", Revue Française de Gestion, Janvier Février 1985, pp. 93-104. KALIKA, M. (1991). «De l’organisation réactive à l’organisation anticipative», Revue Française de Gestion, n°86, (Novembre-Décembre). LAWRENCE, P. et LORSCH, J. (1967). Adapter les Structures de l’Entreprise. Les Editions d’Organisations, 1986, Paris. LORENTZ, F. (1998). "Commerce électronique : une nouvelle donne pour les consommateurs, les entreprises, les citoyens et les pouvoirs publics", rapport du groupe de travail présidé par M. F. Lorentz. MAC CANN, J. et SELSKY, J. (1984). «Hyperturbulence and the emergence of type 5 environments», Academy of Management Review, vol. 9, n°3, pp. 460-470. MARCHESNAY, M. (1986). La Stratégie. Du Diagnostic à la Décision Industrielle. Chotard et associés éditeurs. MARCHESNAY, M. (1993). Management Stratégique. Eyrolles. MARTINET, A.C. (1984). Management Stratégique : organisation et Politique. Mc Graw Hill, coll. Stratégie et Management, Paris, 1984, 118 p. METCALFE, J.L. (1974). "Systems models, economic models and the causal texture of organizational environments : an approach to macro-organization theory", Human Relations, vol.37, n°7, pp.639-663. METCALFE, L. et Mc QUILLAN, W. (1977). "Managing turbulence", TIMS studies in the Management Sciences, 5, 1977, pp. 7-23. MEYER, A.D. (1982). "Adapting to environmental jolts", Administrative Science Quarterly, 27, pp. 515-537. MILLER, D. (1992). "Environnemental fit versus internal fit", Organization Science, vol. 3, n°2, May, pp. 159-178. MILLER, D. et FRIESEN P. (1983). "Strategy making and environment : the third link, Strategic Management Journal, summer, pp. 221-235. MINTZBERG, H. (1990). Le Management. Voyage au Centre des Organisations. Editions d’Organisation. MORRIS, M.H., HANSEN, S.V., PITT, L.F. (1995). "Environnemental turbulence and oraganizational buying : the case of health benefits in south Africa", industrial Marketing management, n°24, pp. 305-315. MORRIS, M.H., MARKS, A.S., ALLEN, J.A. et PEERY, N.S. (1996). "Modeling ethical attitudes and behaviors under conditions of environnemental turbulence : the case of South Africa", Journal of Business ethics, 15, pp. 1119-1130. NAMAN, J.L. et SLEVIN, D.P. (1993). "Entrepreneurship and the concept of fit : a model and empirical tests", Strategic Management Journal, vol.14, pp.137-153. POLLEY, D. (1997). "Turbulence in organizations : new metaphors for organizational research", Organization Science, vol. 8, n°5, September October, pp. 445-457. 16 POST, J. et MAHON, J. (1980). "Articulated turbulence: the effect of regulatory agencies on corporate responses to social changes", Academy of Management Review, vol. 5, n°3, pp. 399407. PROKRESCH, S.E. (1993). "Mastering chaos at the high-tech Frontier : an interview with Silicon Graphics's ed mcCracken", Harvard business review, November December, vol. 71, n°6, pp.134-144. ROJOT, J. et BERGMANN, A. (1995). Comportement et Organisation, Vuibert, 352 p. SCHAAPER, J. (1999). "La qualité de l'information dans une enquête par sondage menée sur internet", WP, CEREGE, IAE de Poitiers, 171, janvier, 24 p. SILVESTRE, H. et GOUJET, R. (1996) "Lisibilité de l'environnement, management stratégique : éléments de recherche sur les PMI." RIPME, vol. 9, n°1, 1996. pp.61-78. STARBUCK, W.H. et MEZIAS, J.M. (1996). "Opening Pandora's box : studying the accuracy of managers' perceptions", Journal of Organizational Behavior, 17(2), pp. 99-117. SUTCLIFFE, K.M. et HUBER, G.P. (1998). "Firm and industry as determinats of executive perceptions of the environment", Strategic Management Journal, 19, pp. 793-807. TARONDEAU, J.C. et WRIGHT, R. (1995). "La transversalité dans les organisations ou le contrôle par les processus", Revue Française de Gestion, n°104. TERREBERRY, S. (1968). "The evolution of organizational environments", Administrative Science Quarterly, pp. 590-613. TOFFLER, A. (1981). The Third Wave. Bantam Books, New York. TOSI, H., ALDAG, R. and STOREY, R. (1973). "On the measurement of the environnement : an assessment of the Lawrence and Lorsch environmental uncertainty subscale", Administrative Science Quarterly, vol. 18, pp. 27-36. TUSHMAN, M. ET ROMANELLI, E. (1985). "Organization evolution : A metamorphosis model of convergence and reorientation". Dans Staw, B.M. et Cummings, L.L. (éditeurs), Research in Organizational Behavior, vol. 7, JAI Press, Greenwich, CT, pp. 171-232. VENKATRAMAN, N. et PRESCOTT, J.E. (1990). "Environnement-strategy coalignement : an empirical test of its performance implications", Strategic Management Journal, vol. 11, January 1990, pp. 1-23. WOODWARD, S.N. (1982). "The myth of turbulence", Futures, August 1982, pp.266-279. 17