Le journal des soins infirmiers du chum Vol.13 - N o 1 - Hiver 2013 La participation des patients à l’amélioration de l’hygiène des mains : une idée qui fait son chemin. Problématique L’Organisation mondiale de la santé (OMS, 2010) reconnaît que l’hygiène des mains constitue la mesure principale de prévention des infections associées aux soins et à la transmission de bactéries multirésistantes. Pour en assurer l’observance par les soignants, elle recommande, entre autres stratégies, l’adoption d’une culture de sécurité impliquant la pleine participation de tous, dont celle des patients. Cette culture va dans le sens de l’expérience patient partenaire du CHUM (CHUM, 2011). Or, l’enquête de Longtin, Sax, Allegranzi, Hugonnet et Pittet (2009) révèle que les patients doivent se sentir invités à demander aux travailleurs de la santé de procéder à l’hygiène des mains. Cette invitation peut se faire par les soignants portant un badge illustrant l’hygiène des mains (Longtin et al., 2009, Longtin, Sax, Leape, Sheridan, Donaldson et Pittet, 2010, McGuckin, Storr, Longtin, Allegranzi et Pittet, 2010). Toutefois, une étude subséquente démontre que cette mesure ne fait pas l’unanimité auprès des soignants des hôpitaux universitaires de Genève (Longtin, Farquet, Gayet-Ageron, Sax, Pittet, 2012). Par conséquent, notre équipe a jugé intéressant de procéder à une enquête auprès des soignants du CHUM afin d’évaluer leur perception à l’égard de la participation des patients à l’hygiène des mains. Nous avons notamment évalué si les travailleurs de la santé étaient d’accord à porter un badge invitant les patients à leur demander de procéder à l’hygiène des mains. Natacha Des Rosiers, inf., B. Sc., conseillère en prévention des infections au CHUM et étudiante à la maîtrise en sciences cliniques, Université de Sherbrooke Pauline Laplante, inf., M. Sc., infirmière clinicienne spécialisée en prévention et contrôle des infections et chef de service de l’unité de prévention des infections du CHUM Yves Longtin, M.D., FRCP, microbiologiste infectiologue, Institut universitaire de cardiologie et pneumologie de Québec Cécile Michaud, inf., Ph. D, professeure titulaire, École des sciences infirmières, Université de Sherbrooke Méthode Cette enquête a été réalisée à l’hiver 2012, dans le cadre d’une activité d’amélioration continue de la qualité, auprès des soignants de deux unités de soins du CHUM, une unité de médecine et une unité d’isolement. Les données ont été recueillies par un questionnaire autoadministré, créé par Longtin et al. (2009), et adapté à la situation du CHUM. Ce questionnaire comprenait 37 questions, dont deux questions ouvertes permettant de recevoir des suggestions d’activités prioritaires pour améliorer la prévention des infections. Le questionnaire a été remis à l’ensemble des soignants travaillant dans ces deux unités. Les données ont été saisies dans le fichier Excel et analysées par le logiciel SPSS. Résultats Le taux de participation à l’enquête a été de 76 % (91/119). Bien que les répondants appartiennent à plusieurs catégories de soignants (voir tableau 1), la majorité occupe des postes d’infirmières ou d’infirmières auxiliaires (70 %), ce qui reflète la réalité des unités de soins. Participation des patients La majorité des répondants (89 %) considère que la collaboration des patients devrait être encouragée dans le but d’améliorer la qualité des soins. La participation des patients est particulièrement souhaitée si un patient détecte une erreur qui pourrait lui nuire (96 %). Toutefois, nos résultats confirment que peu de répondants (4/119, dont 3 préposés aux bénéficiaires) se sont fait demander par un patient de se laver les mains. Pourtant, la majorité (76 %) pense que les patients doivent le demander, Cet article constitue un abrégé de la version soumise à la revue Perspective infirmière. >> suite à la pa ge su iva nt e ÉDITORIAL Un sourire et un accueil chaleureux pour faire la différence! Nos patients en ont grandement besoin pour se reprendre en main. À cet effet, j’ai eu le privilège, à la fin de l’année 2012, de rencontrer plusieurs d’entre vous et je tiens à vous remercier chaleureusement. Être infirmière et infirmier demande d’avoir cette « fibre clinique », d’aimer les gens et de vouloir les aider, une responsabilité quasi incontournable pour l’évolution de notre réseau de santé. Soutenus par des soins humains et de qualité, nos patients cheminent vers un meilleur équilibre. Cependant, on ne peut ignorer que cela demande à tout un chacun un réel engagement et une grande compétence. Ce premier numéro de 2013 aborde l’importance de mettre à profit le savoir du patient durant l’épisode de soins. Connaître SES préoccupations et SES connaissances permet d’orienter rapidement le soutien dont il a besoin, en tenant compte de SES priorités. Il se sentira ainsi écouté et sera plus réceptif à vos interventions de soins. Il est aussi question, dans ce numéro, de la visite d’Agrément Canada et d’une enquête sur l’implication du patient dans l’hygiène des mains. On y présente également le volet de la plateforme Hospitalis, un outil de soutien interactif à la pratique clinique. Quant à la médication, on y discute, cette fois-ci, d’insulinothérapie, un sujet toujours d’actualité! Enfin, un quiz sur la glycémie vous permettra de tester vos connaissances. au besoin. Peu de répondants (22 %) croient que le fait d’encourager les patients à rappeler aux soignants de se laver les mains prendrait trop de temps. Un grand nombre de répondants (68 %) croient que cette stratégie serait une mesure efficace pour améliorer l’hygiène des mains au CHUM. Néanmoins, seulement 57 % des répondants accepteraient de porter un badge pour encourager les patients à leur rappeler de se désinfecter les mains. Le questionnaire comportait une mise en situation dans laquelle le répondant se fait rappeler par un patient de désinfecter ses mains avant de le toucher. Le sentiment le plus fort évoqué par ce scénario est la reconnaissance : trois soignants sur quatre ont été reconnaissants envers le patient, lequel contribue ainsi à améliorer sa sécurité. Les autres sentiments sont moins agréables : la culpabilité, la honte, le risque de la colère du patient, l’impression que celui-ci ne lui fait pas confiance, l’humiliation et la peur de paraître incompétent. Finalement, les répondants ont prioritairement considéré l’hygiène des mains comme l’activité de prévention et de contrôle des infections ayant le plus d’impact sur la sécurité des patients. Nos résultats vont dans le sens d’une culture de la sécurité et du patient partenaire. Conclusion Les soignants des deux unités où a eu lieu l’enquête démontrent une franche ouverture à la participation des patients à la culture de la sécurité et à la conception du patient partenaire, ainsi qu’à l’amélioration de l’hygiène des mains des soignants. Le port d’un badge ne rallie qu’un peu plus de la moitié des répondants qui, pourtant, sont prêts à inviter les patients à leur demander. D’autres études ou d’autres consultations sont nécessaires pour évaluer la manière dont les soignants aimeraient inviter les patients à participer à l’hygiène de leurs mains. Remerciements Nous tenons à remercier chaleureusement les infirmières-chefs et l’équipe de soignants de l’unité de médecine et de l’unité d’isolement du CHUM pour leur participation et leur collaboration à ce projet d’amélioration de la qualité des soins. Sylvie Dubois Références CHUM. (2011). Dossier patient partenaire. CHUMAGAZINE, 2(1), 16-21. Consulté le 12 septembre 2012 à http://www.chumtl.qc.ca/ userfiles/File/PUBLICATIONS/chumagazine/ chumagazine_Vol2_no_1_fevrier-mars-2011.pdf tableau 1 Soignants ayant participé à l’enquête Nombre de répondants Infirmier(ère) 56 Infirmier(ère) auxiliaire 8 Préposé(e) aux bénéficiaires 15 Médecin 5 Autres : Pharmacien 2 Physiothérapeute 1 Ergothérapeute 1 Nutritionniste 1 Stagiaire 2 Total pag e 2 91 l’ ava n t- g a r d e % 61 % 9% 17 % 6% 2% 1% 1% 1% 2% 100 % V o l . 1 3 N o 1 - HI V ER 2 0 1 3 Longtin, Y., Farquet, N., Gayet-Ageron, A., Sax, H., Pittet, D. (2012). Caregivers’ perception of patients as reminders to improve hand hygiene. Archives of Internal Medicine, 172(19), 15161517. Longtin, Y., Sax, H., Allegranzi, B., Hugonnet, S. et Pittet, D. (2009). Patients’ beliefs and perceptions of their participation to increase healthcare worker compliance with hand hygiene. Infection Control and Hospital Epidemiology, 30(9), 830-839. Longtin, Y., Sax, H., Leape, L., Sheridan, S., Donaldson, L. et Pittet, D. (2010). Patient participation: Current knowledge and applicability to patient safety. Mayo Clinic Proceeding, 85(1), 53-62. McGuckin, M., Storr, J., Longtin, Y., Allegranzi, B. et Pittet, D. (2009). Patient empowerment and multimodal hand hygiene promotion: A win-win strategy. American Journal of Medical Quality, 26(1), 10-17. Organisation mondiale de la santé [OMS] (2010). Résumé des recommandations de l’OMS pour l’hygiène des mains au cours des soins. Premier défi mondial pour la sécurité des patients. Un soin propre est un soin plus sûr. Consulté le 12 septembre 2012 à http:// whqlibdoc.who.int/hq/2010/ WHO_IER_PSP_2009.07_fre.pdf Lyne Gauthier, B. Pharm., M. Sc. Louise-Marie Lessard, inf., Ph. D. Lyne Gauthier est pharmacienne au CHUM. Louise-Marie Lessard était conseillère en soins spécialisés, évaluation de la qualité au CHUM. L’insulinothérapie Le programme QMentum d’Agrément Canada : plus qu’un bilan, une démarche itérative L’insuline est l’agent de choix pour le traitement de l’hyperglycémie en milieu hospitalier. L’insulinothérapie sous-cutanée doit être adaptée au contexte clinique et comporte généralement trois modalités : Le cycle de la démarche QMentum d’Agrément Canada s’étale sur trois ans pour permettre aux organisations de travailler à améliorer en continu la qualité et la sécurité des soins et des services. Au CHUM, la dernière visite remonte à avril 2010. L’insuline basale couvre les besoins en insuline en période de jeûne (entre les repas et la nuit) La prochaine visite aura lieu du 21 au 26 avril 2013. Chaque équipe de soins et de services a procédé à son autoévaluation pour témoigner de sa conformité aux normes d’Agrément Canada ainsi qu’aux 34 pratiques organisationnelles requises (POR) liées aux meilleures pratiques et à la sécurité des patients. À titre d’exemples, les moyens utilisés pour assurer la transmission adéquate du rapport interservices; la formation et le perfectionnement sur l’hygiène des mains. se donne sous forme d’insuline à action intermédiaire (Humulin N ou Novolin ge NPH) ou prolongée (Lantus ou Levemir) L’insuline prandiale couvre les besoins en insuline aux repas se donne sous forme d’insuline à action très rapide (Apidra, Humalog ou NovoRapid) ou rapide (Humulin R ou Novolin ge Toronto) Chaque équipe est actuellement en voie de finaliser son plan d’action qui précise les activités mises en œuvre en vue de répondre aux exigences particulières, dans une perspective d’amélioration continue. En avril, les visiteurs auront l’occasion de recueillir des preuves sur la qualité et la sécurité des soins et des services offerts par le CHUM. Au terme de la semaine, ils nous présenterons les résultats préliminaires de la visite. Leur évaluation finale nous sera transmise ultérieurement. L’insuline de correction couvre les hyperglycémies ponctuelles se donne en supplément à l’insuline prandiale, en utilisant la même insuline Des renseignements supplémentaires se trouvent au tableau Les insulines affiché dans les unités de soins et disponible sur l’intranet (icône Médicaments - http://portail.chum.rtss.qc.ca/ Portail/Document.php?ID=803). Référence Agrément Canada. Pratiques organisationnelles requises 2012. Consulté le 6 décembre 2012 à http://www.accreditation.ca/ uploadedFiles/ROP%20 Handbook%20FR.pdf Par ailleurs, l’insuline constitue un médicament à risque élevé et est fréquemment impliquée dans les incidents d’origine médicamenteuse. Il faut rappeler l’importance de la double vérification indépendante en vue de la préparation d’une dose. Quiz sur la glycémie 1 La glycémie postprandiale doit se prendre 2 heures après avoir fini de manger. Vrai ou Faux 2Une personne diabétique devrait vérifier sa glycémie avant de prendre le volant. 3 L’hémoglobine glyquée est un bon indicateur de l’efficacité du traitement. >> r éponses à la pa ge 4 l’ ava n t- g a r d e Vol. 13 No 1 - hiver 2013 pag e 3 Josée F. Breton est conseillère senior en organisation des soins et du travail et responsable de l’implantation de la plateforme Hospitalis au CHUM. Hospitalis : un outil de soutien interactif à la pratique clinique des infirmières et des infirmières auxiliaires La plateforme Ace-PTM, conçue par Hospitalis, est un portail qui permet de centraliser tous les documents utilisés dans la pratique des cliniciens. Terminé le temps de consulter les documents dans un cartable. Le système Hospitalis regroupe les documents de différentes disciplines : soins infirmiers, promotion de la santé, laboratoires et radiologie. Promotion de la santé Josée F. Breton, inf., M.B.A. Valérie Lahaie est conseillère en soins spécialisés, promotion de la santé au CHUM. Osez mettre à profit ce que vos patients savent! Vous voulez faire un pas de plus pour aider vos patients à se prendre en main? Lorsque vous avez de l’information à leur transmettre, demandez-leur d’abord ce qu’ils savent sur le sujet. Profitez aussi de ce moment pour évaluer leurs perceptions. Ainsi, des questions simples, dans un langage clair permettront de baser vos échanges sur les connaissances et les préoccupations des patients. À titre d’exemple, voici des questions que vous pouvez utiliser. Qu’est ce que vous ferez pour prendre soin de vous au retour à la maison? Pour vous, que veut dire prendre cette pilule-là? Depuis l’automne 2012, l’application est disponible sur le site intranet du CHUM. Comment pensez-vous devoir la prendre? Ce faisant, vous reconnaissez leurs compétences, ce qui les encouragera à participer davantage à leurs soins. De plus, cela vous permettra de découvrir un ou deux « savoirs clés » sur lesquels miser pour leur montrer ce qu’ils doivent faire. Ils seront ainsi plus enclins à retenir et à utiliser l’information la plus importante. Pour accéder à la plateforme, vous utilisez votre code p et le mot de passe associé. Les méthodes de soins, les règles de soins infirmiers, ainsi que les autres documents pertinents à la pratique du personnel infirmier seront regroupés dans le domaine Soins infirmiers. L’utilisation de l’application est fort simple : la recherche de documents se fait en utilisant des mots clés, de la même façon que dans le moteur de recherche Google. De plus, il sera possible d’y intégrer un lien vers un site Internet ou une vidéo. La plateforme s’enrichira progressivement de nouveaux documents. Valérie Lahaie, inf., M. A. (santé communautaire) Réponses du jeu-questionnaire de la page 3 1 l’Avant-Garde est publié par la Direction des soins infirmiers du CHUM TROIS fois par année. Révision, correction et conception graphique Direction des communications Afin de faciliter la lecture des textes, L’Avant-Garde, de façon générale, utilise le terme « infirmière ». Il est entendu que cette désignation n’est nullement restrictive et englobe les infirmiers. À l’exception des entrevues personnelles, les articles de L’Avant-Garde peuvent être reproduits sans autorisation, avec mention de la source. Dépôt légal : Bibliothèque nationale du Canada, 2013 ISSN : 1496-8983 © CHUM 2013 Bibliothèque nationale du Québec, 2013 L’Avant-Garde est publié grâce à l’appui financier de la Fondation du CHUM. pag e 4 l’ ava n t- g a r d e V o l . 1 3 N o 1 - HI V ER 2 0 1 3 Faux. On commence à calculer le temps lorsque le patient a pris sa première bouchée. La glycémie postprandiale s’effectue donc 2 heures après la première bouchée et non 2 heures après avoir terminé de manger. 2 Vrai. Pour prévenir les hypoglycémies, il est recommandé aux patients diabétiques de vérifier leur glycémie avant de prendre le volant et de faire un contrôle toutes les quatre heures durant les longs trajets. 3 Vrai. L’hémoglobine glyquée (A1c) reflète le contrôle de la glycémie des deux à trois derniers mois. Il est recommandé de la mesurer de deux à quatre fois par année, selon le niveau de contrôle du diabète. Chez les patients diabétiques, on vise généralement un taux d’A1c de 7 % ou moins.