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Contexte et objectifs
Depuis son adoption en 1972, la Convention du patrimoine mondial constitue un instrument
juridique de premier plan pour promouvoir l’identification et la préservation de sites naturels
et culturels reconnus pour leur valeur universelle exceptionnelle, c’est-à-dire dont
l’importance « transcende les frontières nationales et présente le même caractère inestimable
pour les générations actuelles et futures de l’ensemble de l’humanité. » Au-delà d’établir une
« géographie du superlatif » à travers une liste de sites remarquables, l’objectif est d’assurer la
protection d’un patrimoine matériel perçu comme étant universel, indépendamment des
territoires dans lequel il s’inscrit.
Les déséquilibres de la liste du patrimoine mondial
Dans la pratique, l’analyse de la liste du patrimoine mondial, qui compte aujourd’hui 1031
biens, fait apparaître de nombreux déséquilibres thématiques et géographiques.
En novembre 2015, on compte ainsi 802 sites culturels, 197 biens naturels et 32 biens mixtes,
et près de la moitié d’entre eux sont situés en Europe et en Amérique du nord. Ces deux
régions apparaissent surreprésentées en comparaison des pays arabes et de l’Afrique, qui ne
rassemblent que 17% des sites inscrits.
Ce déséquilibre peut être constaté avec davantage d’ampleur encore à l’échelle
nationale puisque la France compte 41 biens inscrits dont seulement 4 sites naturels et mixtes,
soit 10% du total. De manière générale, les territoires d’outre-mer sont sous-représentés alors
qu’ils couvrent 97% de la zone économique exclusive française et regroupent l’essentiel des
enjeux de protection de la biodiversité, permettant à la France d’être classée parmi les pays
mégadivers
. Avec 37 propositions de candidatures en majorité culturelles et métropolitaines,
la liste indicative française laisse supposer que ces déséquilibres de fond pourraient perdurer à
long terme, même si la proportion de candidatures mixtes apparaît de plus en plus importante.
Il faut enfin noter que la plupart des candidatures sont issues d’initiatives locales, qui relèvent
pour la plupart de logiques d’opportunités que d’une vision stratégique des potentialités du
territoire au regard des lacunes de la Liste du patrimoine mondial.
Les déséquilibres s’expriment également dans la typologie des milieux représentés. Les sites
naturels correspondent majoritairement à des écosystèmes forestiers, des zones humides et des
montagnes, tandis que les milieux marins, qui recouvrent plus des deux tiers de la surface
terrestre, ne sont présents que dans 6% des sites inscrits. Il est intéressant de remarquer au
passage que les sites naturels français sont tous situés dans des contextes insulaires (Corse, La
Réunion, Nouvelle-Calédonie).
Potentiels du territoire français
Avec 41 biens inscrits, la France se situe au quatrième rang des pays les plus représentés sur
la liste du patrimoine mondial. Cependant, si l’on considère uniquement les biens naturels,
notre pays passe en 9ème position, à part égale avec la Tanzanie, l’Italie, le Pérou, le Japon,
l’Indonésie et l’Argentine. Sachant qu’il existe une corrélation entre le nombre de biens
Russel A. Mittermeier, Tom Brooks, Gustavo Fonseca, Daniel Brito (2007), Focus : Les
pays de mégadiversité, Annuels