Note de synthèse des sites naturels prioritaires pour de nouvelles

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Contribution à la révision de la liste indicative française
Thierry Lefebvre1
Note de présentation de la démarche et des résultats intermédiaires
Préparée pour le groupe de travail patrimoine mondial
Décembre 2015
Version provisoire
Ne pas citer sans autorisation
1
Les points de vue exprimés sont ceux de l’auteur et n’engagent pas le secrétariat international de l’UICN. Les
membres du groupe de travail patrimoine mondial du Comité français de l’UICN sont invités à apporter leurs
commentaires sur le document.
1
Avant propos
La présente note rend compte des travaux engagés par le Comité français de l’UICN depuis
l’année 2013 pour contribuer à la révision de la liste indicative et identifier les potentialités du
territoire national pour de nouvelles candidatures de biens naturels et mixtes sur la liste du
patrimoine mondial. Elle décrit les objectifs et la méthodologie de cette étude, qui a mobilisé
les experts du groupe de travail patrimoine mondial et plusieurs réseaux français d’aires
protégées. Les fiches descriptives des sites pré-identifiés à l’issue de cette analyse sont
présentées en annexe.
Ce travail s’inscrit en application du paragraphe 55 des Orientations, qui précise que « la
Stratégie globale pour une Liste du patrimoine mondial représentative, équilibrée et crédible a
été conçue pour recenser et combler les lacunes majeures de la Liste du patrimoine mondial.
Pour ce faire, elle encourage un plus grand nombre de pays à devenir États parties à la
Convention et à établir des listes indicatives répondant à la définition du paragraphe 62 et des
propositions d’inscription de biens pour inscription sur la Liste du patrimoine mondial. »
Il a été réalisé avec l’appui du Ministère de l’écologie, du développement durable et de
l’énergie, à qui nous exprimons toute notre gratitude.
Mots-clefs : liste indicative, étude thématique, processus amont, valeur universelle
exceptionnelle potentielle
2
Contexte et objectifs
Depuis son adoption en 1972, la Convention du patrimoine mondial constitue un instrument
juridique de premier plan pour promouvoir l’identification et la préservation de sites naturels
et culturels reconnus pour leur valeur universelle exceptionnelle, c’est-à-dire dont
l’importance « transcende les frontières nationales et présente le même caractère inestimable
pour les générations actuelles et futures de l’ensemble de l’humanité. » Au-delà d’établir une
« géographie du superlatif » à travers une liste de sites remarquables, l’objectif est d’assurer la
protection d’un patrimoine matériel perçu comme étant universel, indépendamment des
territoires dans lequel il s’inscrit.
Les déséquilibres de la liste du patrimoine mondial
Dans la pratique, l’analyse de la liste du patrimoine mondial, qui compte aujourd’hui 1031
biens, fait apparaître de nombreux déséquilibres thématiques et géographiques.
En novembre 2015, on compte ainsi 802 sites culturels, 197 biens naturels et 32 biens mixtes,
et près de la moitié d’entre eux sont situés en Europe et en Amérique du nord. Ces deux
régions apparaissent surreprésentées en comparaison des pays arabes et de l’Afrique, qui ne
rassemblent que 17% des sites inscrits.
Ce déséquilibre peut être constaté avec davantage d’ampleur encore à l’échelle
nationale puisque la France compte 41 biens inscrits dont seulement 4 sites naturels et mixtes,
soit 10% du total. De manière générale, les territoires d’outre-mer sont sous-représentés alors
qu’ils couvrent 97% de la zone économique exclusive française et regroupent l’essentiel des
enjeux de protection de la biodiversité, permettant à la France d’être classée parmi les pays
mégadivers2. Avec 37 propositions de candidatures en majorité culturelles et métropolitaines,
la liste indicative française laisse supposer que ces déséquilibres de fond pourraient perdurer à
long terme, même si la proportion de candidatures mixtes apparaît de plus en plus importante.
Il faut enfin noter que la plupart des candidatures sont issues d’initiatives locales, qui relèvent
pour la plupart de logiques d’opportunités que d’une vision stratégique des potentialités du
territoire au regard des lacunes de la Liste du patrimoine mondial.
Les déséquilibres s’expriment également dans la typologie des milieux représentés. Les sites
naturels correspondent majoritairement à des écosystèmes forestiers, des zones humides et des
montagnes, tandis que les milieux marins, qui recouvrent plus des deux tiers de la surface
terrestre, ne sont présents que dans 6% des sites inscrits. Il est intéressant de remarquer au
passage que les sites naturels français sont tous situés dans des contextes insulaires (Corse, La
Réunion, Nouvelle-Calédonie).
Potentiels du territoire français
Avec 41 biens inscrits, la France se situe au quatrième rang des pays les plus représentés sur
la liste du patrimoine mondial. Cependant, si l’on considère uniquement les biens naturels,
notre pays passe en 9ème position, à part égale avec la Tanzanie, l’Italie, le Pérou, le Japon,
l’Indonésie et l’Argentine. Sachant qu’il existe une corrélation entre le nombre de biens
2
Russel A. Mittermeier, Tom Brooks, Gustavo Fonseca, Daniel Brito (2007), Focus : Les
pays de mégadiversité, Annuels
3
inscrits et la superficie nationale, la France, dont le territoire est classé 41ème pour sa
superficie, dispose a priori d’un potentiel limité pour de nouvelles inscriptions en
comparaison de pays plus étendus. Cependant, ce constat n’est valable que pour le domaine
terrestre. Car dans le domaine marin, la France dispose de la seconde zone économique
exclusive la plus étendue au monde après celle des Etats-Unis, avec 11,3 millions de km2,
dont 97% est situé en outre-mer. Ces ordres de grandeurs donnent une indication sur les
potentialités pour de nouvelles inscriptions.
Listes indicatives
Les listes indicatives sont des inventaires réalisés par les Etats Parties des biens susceptibles
d’être proposés pour inscription sur la liste du patrimoine mondial. Elles doivent être établies
sur une base factuelle qui témoigne d’une valeur universelle exceptionnelle potentielle,
fondée sur une analyse des lacunes du patrimoine mondial.
Ce faisant, elles fournissent des indications intéressantes sur les futures propositions
d’inscriptions, et leur examen permet d’anticiper une croissance continue des candidatures au
cours des prochaines années : si l’ensemble des propositions identifiées par les Etats Parties
de la Convention devaient aboutir, la liste du patrimoine mondial compterait au total 2662
sites. L’état actuel des listes indicatives traduit la montée des puissances émergentes, en
particulier la Chine et l’Inde, qui sont vouées à modifier dans les prochaines décennies la
« hiérarchie mondiale » des pays les plus pourvus en sites inscrits. La liste indicative
française reste très dense en comparaison d’autres pays : les 37 biens actuellement inscrits
place la France en 6ème position mondiale mais ce classement pourrait évoluer suite aux
propositions de retrait envisagées par le comité des biens français du patrimoine mondial.
Rang
1
2
3
4
5
6
7
8
9
Total
Italie (51)
Chine (48)
Espagne (44)
France (41)
Sites inscrits
Naturels et mixtes
Australie (16)
Chine (14)
Etats-Unis (11)
Russie (10)
Canada (9)
Inde, Brésil (7)
Mexique (6)
RDC, R-U,
Espagne (5)
Tanzanie, Italie,
Pérou, Japon,
Indonésie,
Argentine, France
(4)
Listes indicatives
Total de sites
Turquie (60)
Chine (54)
Iran (49)
Inde (46)
Italie (40)
France (37)
Les biens naturels et mixtes inscrits sur la liste indicative française
La liste indicative française compte à ce jour 13 sites naturels et mixtes : 84% des sites ont été
proposés il y a plus de 5 ans (les plus anciens ont été inscrits en 1996) et seuls 38% font
l’objet d’une candidature en cours d’élaboration et/ou d’évaluation. Ces propositions
présentent en effet des degrés très divers de conditions de portage, de complétude des fiches
de déclaration de valeur universelle exceptionnelle et certaines n’identifient aucun critère.
4
Soumis
#Révisé
20/09/1996
20/09/1996
#22/06/2010
08/06/2000
08/06/2000
08/06/2000
01/02/2002
01/02/2002
01/02/2002
01/02/2002
01/02/2002
01/02/2002
#15/04/2013
17/11/2011
09/04/2014
Nom
Catégorie
Critères naturels
Montagne Sainte-Victoire et sites cézaniens3
Les Iles Marquises
Mixte
Mixte
(vii)(ix)(x)
Parc national de la Vanoise2
Ensemble de grottes à concrétions du Sud de
la France2
Massif du Mont Blanc2
La Camargue2
Parc national des Écrins2
Parc national de Port-Cros2
Le rivage méditerranéen des Pyrénées2
Bouches de Bonifacio
Les Alpes de la Mer
Mixte
Naturel
(vii)(viii)(ix)
Chaîne des Puys et faille de Limagne
Aires volcaniques et forestières de la
Martinique
Naturel
Naturel
Mixte/PC
Naturel
Mixte
Naturel
Mixte
Naturel
Naturel
(vii)(x)
(vii)(x)
(vii)(viii)(ix)(x)
(viii)(ix)(x)
(vii)(viii)
(vii)(viii)(ix)(x)
Certains biens culturels contiennent des valeurs naturelles importantes, susceptibles d’être
considérées par exemple dans les éléments de contexte d’une déclaration de valeur universelle
exceptionnelle et/ou un plan de gestion. Ils n’ont donc pas été inclus dans cette liste ni
considérés dans l’analyse mais mériteraient cependant des échanges approfondis avec Icomos
en vue de réfléchir aux moyens d’une valorisation de ce patrimoine. C’est le cas en particulier
du massif forestier de Fontainebleau, envisagé comme une extension du palais et du parc
éponyme, inscrit en 1981 au titre des critères (ii) et (vi).
Vers une liste représentative et crédible
Consciente des problèmes de représentativité de la liste du patrimoine mondial, l’Unesco,
avec l’appui des organisations consultatives, a engagé une réflexion afin d'assurer un meilleur
équilibre de la diversité culturelle et naturelle des biens de valeur universelle exceptionnelle.
Le Comité du patrimoine mondial a défini en 1994 une « stratégie globale pour une Liste
du patrimoine mondial équilibrée, représentative et crédible » dans le but de recenser et
de combler les lacunes majeures de la liste. Cette stratégie s’est traduite par la ratification de
la Convention par 39 nouveaux pays (principalement des Etats arabes, insulaires du Pacifique,
d’Europe de l’Est et d’Afrique), la réalisation de conférences et d’études thématiques et la
limitation du nombre de propositions d’inscriptions à 45 par an.
En première approximation, les Orientations (§61, 2015) fournissent des indications sur les
critères permettant des rééquilibrages thématiques et géographiques. Si le nombre de
propositions d’inscriptions dépasse la limite annuelle de 45 biens fixée par le Comité du
patrimoine mondial, la priorité est donnée, par ordre décroissant d’importance, aux biens
naturels, mixtes, transfrontaliers/transnationaux, et aux biens d’États parties d’Afrique, du
3
Proposition de retrait de la liste indicative émise par le comité national des biens français du
patrimoine mondial au cours de sa session du 12 novembre 2015
5
Pacifique et des Caraïbes (ces deux dernières régions concernent directement la France au
titre de son espace ultramarin).
L’enjeu d’une démarche en amont à l’échelle nationale
Pour élaborer leurs listes indicatives, les Etats Parties de la Convention sont encouragés à
consulter les analyses de la liste du patrimoine mondial et les études thématiques réalisées les
organisations consultatives, et à demander aussitôt que possible leurs avis sur les propositions
de candidatures. Il est apparu pertinent d’engager cette démarche en France, en amont du
processus de candidature, dans le but de se doter d’une vision stratégique des potentialités du
territoire français au regard des lacunes actuelles de la liste du patrimoine mondial.
Cette réflexion avait déjà été engagée en 2006 sur la base de dires d’experts, aboutissant à un
rééquilibrage entre les propositions de sites situés en métropole (Baie de Somme, Mer
d'Iroise, Bonifacio et les bouches de Bonifacio, Montagne Corse, sites de l'Arc Alpin : parc
des Ecrins, du Mercantour et de la Vanoise, Massifs des Maures et de l'Estérel) et en outremer (Soufrière et Parc national de la Guadeloupe, Forêts et fleuves de Guyane, Bora-Bora,
Îles Marquises, Forêts de Nouvelle-Calédonie, Archipel des Kerguelen et de Crozet). Ces
résultats n’ont cependant pas conduit à mettre à jour la liste indicative.
Une nouvelle révision a été engagée en 2013 pour les sites naturels, à la demande du
Ministère en charge de l’écologie, permettant de prendre en compte les évolutions de la liste
du patrimoine mondial et la publication de nouvelles études thématiques. L’objectif premier
est de contribuer à la révision de la liste indicative française et plus durablement de renforcer
la crédibilité du processus de candidature. Il a été décliné en trois objectifs spécifiques :
 évaluer la valeur universelle exceptionnelle potentielle des sites naturels et mixtes
actuellement inscrits sur la liste indicative
 identifier de nouveaux sites potentiels sur la base des orientations fournies par les études
thématiques et les ateliers régionaux
 formuler des recommandations pour renforcer les dossiers de candidature existants et
mettre en cohérence la liste indicative française avec les lacunes de la liste du patrimoine
mondial.
6
Principes et méthode
La méthode de travail utilisée fait référence à une recommandation des Orientations qui
encourage les Etats Parties à établir des listes indicatives répondant à la définition du
paragraphe 62, c’est-à-dire fondées sur l‘analyse de la liste du patrimoine mondial, des listes
indicatives et des études thématiques produites par les organisations consultatives.
Les fiches de déclaration de plusieurs sites naturels inscrits sur la liste indicative française ne
mentionnent pas systématiquement les valeurs et les critères proposés, limitant de facto
l’évaluation de leur valeur universelle exceptionnelle potentielle. Le choix a donc été fait de
ne pas examiner la liste indicative actuelle mais de considérer les caractéristiques du territoire
français en métropole et en outre-mer au regard des lacunes de la liste du patrimoine mondial.
Cette approche a abouti à identifier une liste de sites, qui par interpolation permet à la fois de
réviser la liste indicative et d’identifier de nouvelles propositions de candidatures.
Deux approches analytiques ont été mobilisées :
Approche liée aux données (études thématiques, ateliers régionaux) pour l’identification
des sites
Etudes thématiques
Pour évaluer la valeur universelle exceptionnelle d’une proposition d’inscription, l’UICN
prend en compte une pluralité de sources documentaires et d’expertise, à commencer par les
justifications apportées par le dossier de candidature, les études thématiques globales,
l’analyse des priorités mondiales de conservation de la nature, les avis d’experts scientifiques,
les conclusions des missions d’évaluation et, in fine, l’avis du panel du patrimoine mondial.
Les études thématiques reposent sur un principe commun : réaliser un état des lieux de la liste
du patrimoine mondial pour des types de bien déterminés, et identifier sur cette base les
caractéristiques prioritaires pour de nouvelles inscriptions. Elles couvrent l’ensemble des
critères naturels et une part importante des types de biens correspondants. Les principaux
biomes font ainsi l’objet d’évaluations depuis 25 ans, avec un intérêt marqué pour le domaine
marin plus récemment (2012, 2013), tandis que les études relatives aux biens géologiques ont
été complétées dans la première décennie des années 2000. Des mises à jour sont nécessaires
pour la plupart d’entre elles afin d’intégrer les dernières évolutions de la liste du patrimoine
mondial. En conséquence, certains sites recommandés ou des sites comparables ont pu être
inscrits depuis leur publication ; par ailleurs, ces études n’évaluent pas l’état de conservation
ni les systèmes de protection et de gestion, qui contribuent également à la valeur universelle
exceptionnelle des propositions de candidatures.
Graphique. Vue d’ensemble des études thématiques
7
Graphique. Dates de publication des études thématiques
Ateliers régionaux
Les Orientations indiquent dans le paragraphe 56 que « les États parties et les Organisations
consultatives sont encouragés à prendre part à la mise en œuvre de la Stratégie globale en
collaboration avec le Secrétariat et d’autres partenaires. Des réunions régionales et
thématiques relatives à la Stratégie globale et des études comparatives et thématiques sont
organisées à cet effet. » Ces ateliers, dont plusieurs concernent le territoire français, déclinent
les préconisations techniques des études thématiques dans des contextes biogéographiques
déterminés, et permettent d’identifier de nouvelles propositions d’inscriptions avec davantage
de précision. Leur principal intérêt est de contribuer à l’harmonisation des listes indicatives à
l’échelle régionale.
Approche pilotée par des spécialistes (dires d’experts) pour la caractérisation et la
priorisation des sites
Les sources bibliographiques doivent être complétées par des dires d’experts pour caractériser
plus finement la valeur universelle exceptionnelle potentielle des sites identifiés et les
8
prioriser. Trois ateliers ont été organisés au cours de l’année 2013 afin d’identifier les
potentialités du territoire français au regard de critères internationaux (résultats des études
thématiques, analyse des sites inscrits sur la liste indicative, inventaires à dires d’experts),
d’évaluer la valeur universelle exceptionnelle virtuelle des propositions en considérant leur
intégrité et les systèmes de protection afin d’identifier les priorités.
Atelier 1 : synthèse des priorités internationales et identification des sites français potentiels,
description de la CPM. L’analyse a été réalisée par zone biogéographique et par critère, à
l’exception du critère (vii) considéré comme associatif
L’examen des études thématiques réalisées par l’UICN à l’échelle internationale et les
conclusions de certains ateliers régionaux ont permis d’identifier une première liste de sites
situés sur le territoire français considérés comme prioritaires i.e. correspondant à des lacunes
de la liste : forêts humides et sèches de Nouvelle-Calédonie, écorégion marine de Tahiti,
forêts de montagne de Polynésie, Mont Pelé et Parc naturel régional de Martinique, Parc
national de Guadeloupe, Canal du Mozambique - Îles éparses, Mayotte (en série avec les
Comores), Terres australes et antarctiques françaises, Paysages culturels de Polynésie
française (Vallée Opunohu, Mo’orea, Taputapuātea, Rapa, Atoll marae, Tuamotu),
Guadeloupe, Guyane (Saul). Les sites alpins du Massif du Mont-Blanc et Mercantour-Alpi
Marittime sont « suggérés pour considération », dans la mesure où leur valeur universelle
exceptionnelle potentielle reste à démontrer.
Atelier 2 : caractérisation de la valeur universelle exceptionnelle potentielle des sites
correspondant en France
Chaque site a fait l’objet d’une description synthétique, structurée selon le modèle des fiches
de déclaration de valeur universelle exceptionnelle (valeurs naturelles, critères proposés,
intégrité, systèmes de protection et de gestion, éléments d’analyse comparative). L’ensemble
des données a été validé par les gestionnaires des sites concernés, lorsqu’il était possible de
les identifier.
Atelier 3 : priorisation des sites
Ces propositions ont ensuite été réparties dans quatre catégories, en fonction de leur niveau
d’adéquation avec les critères de la Convention du patrimoine mondial constitutifs de la
valeur universelle exceptionnelle : haut potentiel (candidature recommandée), haut potentiel
avec réserves (correspondant à un renvoi), potentiel moyen (équivalent à un diffèrement) ou
faible (non recommandé pour inscription). Au final, seules les sites classés dans les deux
premières catégories ont été retenus comme prioritaires.
9
Orientations fournies par les études thématiques internationales
Les études thématiques donnent des indications sur les priorités internationales en fonction
des lacunes identifiées sur la liste du patrimoine mondial. Ces données ont été déclinées dans
le cadre d’ateliers régionaux, dont trois concernent directement la France : Océan Indien
(2012), Alpes (2010) et Océan Pacifique (2009). Cette partie décrit les principaux critères de
priorisation proposés et les sites français qui sont parfois mentionnés.
Etudes thématiques globales
World’s greatest natural areas (1982)
Auteur(s) : Jeffrey A. McNeely (coord.)
Description : en 1980, la commission des parcs nationaux et des aires protégées (ex CMAP)
de l’UICN a pris l’initiative de proposer au Comité du patrimoine mondial un inventaire
indicatif des sites naturels exprimant une valeur universelle exceptionnelle. Ce travail, réalisé
sur la base de consultation d’experts internationaux, visait plusieurs objectifs, en particulier
aider les pays à préparer leurs listes indicatives, faciliter les analyses comparatives et
contribuer à rééquilibrer la liste. Il faut rappeler qu’en 1982, année de publication du
document, la liste du patrimoine mondial comptait au total 96 biens culturels, 31 biens
naturels (dont 7 sur le seul territoire des Etats-Unis) et 7 biens mixtes (dont 3 en Australie).
Ce document fournit une information sur la vision initiale du patrimoine mondial, qui devait
rassembler un nombre très limité de biens : « le statut de patrimoine mondial est censé être
exclusif et ne concerner que les meilleurs sites ; la convention n’a pas vocation à protéger tous
les sites de grande valeur ou importants. »
Critères de priorisation : l’inventaire est présenté par royaume biogéographique et par pays.
Il rassemble des sites proposés à dire d’experts mais ne précise aucun critère de priorisation.
Sites identifiés : le document identifie une liste de 216 sites naturels prioritaires, dont une
grande partie a depuis été inscrite sur la liste du patrimoine mondial, y compris au cours des
dernières années. Sept sites français sont mentionnés :
a) Grottes ornées de la Vallée de la Vézère (inscrit en 1978)
b) Mont Saint Michel et sa baie (inscrit en 1979)
c) Parcs nationaux du Grand Paradis/Vanoise (Italie/France) (inscrit sur la liste indicative)
d) Camargue (inscrit sur la liste indicative)
e) Pyrénées (France/Espagne) (inscrit en 1998)
f) Ile de Tahiti
g) Montagne Pelée (inscrit sur la liste indicative)
Lien : https://goo.gl/dWPu94
Critère (vii)
Le critère (vii) relatif à l’esthétique de paysages ou de phénomènes naturels a fait l’objet
d’une seule étude spécifique en 2013, destinée à objectiver son application. Il faut souligner
que l’usage de ce critère décline dans les propositions d’inscriptions et qu’il tend à devenir de
plus en plus associatif.
Etude sur l’application du critère (vii) (2013)
Auteur(s) : Nora Mitchell, Leticia Leitão, Piotr Migon, Susan Denyer
Description : cette étude thématique propose des principes et un cadre d’application plus
rigoureux du critère (vii), qui inclut deux idées distinctes : (a) les phénomènes naturels
remarquables et la beauté naturelle, qui sont le plus souvent mesurables et évaluables
10
objectivement et (b) l’importance esthétique exceptionnelle, dont l’évaluation est plus
complexe et subjective. La définition de ces principes s’appuie sur une analyse des principales
évolutions de l’application du critère (vii).
Critères de priorisation : aucun indicateur n’est proposé pour prioriser des sites. En
revanche, l’étude insiste sur l’importance d’identifier et de décrire les attributs clefs qui
transmettent la valeur universelle exceptionnelle.
Sites identifiés : étant à vocation strictement méthodologique, l’étude ne mentionne aucun
site prioritaire à l’échelle internationale. Ce critère associatif n’a pas été pris en compte dans
la révision de la liste indicative.
Lien : http://goo.gl/YGpxcb
Critère (viii)
Le critère (viii) est couvert par de nombreuses études thématiques qui décrivent une grande
diversité de types de biens : volcans (2009), grottes et karsts (2008), sites géologiques (2005),
montagnes (2002), histoire géologique et sites fossilifères (1996). Ce faisant, elles permettent
d’apprécier avec une bonne précision les lacunes de la liste du patrimoine mondial même si
une mise à jour des données reste nécessaire. Ces travaux ont conduit à identifier les périodes
géologiques les plus faiblement représentées (Silurien, Paléocène, Oligocène, Pliocène) ainsi
que des périodes lacunaires dans l’histoire du vivant (sites fossilifères présentant les débuts de
l’évolution de la vie avant le Cambrien).
Volcans (2009)
Auteur(s) : Chris Wood
Description : l’étude analyse 97 biens volcaniques inscrits sur la liste du patrimoine mondial
et sur les listes indicatives, représentant une large variété de formes et de caractéristiques, afin
d’identifier les principales lacunes. Pour ce faire, elle s’appuie sur la classification des types
volcaniques établie par Thouret (2004)
Critères de priorisation : l’analyse de cette liste a permis de conclure à une bonne
représentation des types de volcans sur la liste du patrimoine mondial mais souligne des
lacunes dans (a) certaines caractéristiques liées aux volcans effusifs (fissures volcaniques,
volcans sous-glaciaires, trapps) et explosifs (calderas, ignimbrites), (b) de certains paysages
associés à des activités volcaniques (plaines basaltiques, rifts continentaux), et propose de
considérer l’inscription (c) des volcans les plus iconiques du monde.
Sites identifiés : l’étude recommande de considérer l’inscription de la montagne Pelée au titre
de volcan iconique, sur la base de sa notoriété, de son importance scientifique, et de ses
valeurs culturelles et éducatives (les Monts Saint Helens, Fuji, Etna, Thera sont également
identifiés dans cette catégorie et certains ont été inscrits depuis). L’étude évoque les trapps
des îles Kerguélen sans toutefois les retenir dans la liste (non exhaustive) des biens
recommandés pour inscription.
Lien : https://goo.gl/T6oDBj
Grottes et karsts (2008)
Auteur(s) : Paul Williams
Description : les systèmes karstiques sont relativement bien représentés sur la liste du
patrimoine mondial, limitant de fait la possibilité de nouvelles inscriptions.
Critères de priorisation : bien que les karts soient représentés dans les zones humides et
particulièrement dans l’hémisphère nord, la liste du patrimoine mondial présente plusieurs
lacunes de représentation des valeurs karstiques que l’étude propose de couvrir, notamment
de (a) renforcer la présence des karts des Alpes dinariques par des propositions des biens en
11
série transnationaux, (b) de remplir les lacunes de représentation dans les environnements
arides et semi-arides (Moyen Orient, Asie Centrale, hémisphère sud), le pergélisol continu et
discontinu, et (c) d’identifier des sites dans des roches détritiques évaporites et des pseudokarsts ayant des caractéristiques paysagères exceptionnelles.
Sites identifiés : l’étude identifie l’ensemble de grottes à concrétions du sud de la France,
dans une liste de 30 sites ayant des « caractéristiques karstiques significatives », susceptibles
de contribuer à étayer une valeur universelle exceptionnelle. Il faut cependant souligner que
ce site ne répond pas aux priorités géographiques définies par l’étude et que d’autres grottes
aux caractéristiques similaires ont été inscrites en Chine. Il pourrait être proposé pour une
inscription au titre d’autres critères ou pour le label Géoparc. Les Cévennes et les Grands
Causses figurent également dans cette liste en raison des paysages de plateaux calcaires et ont
été inscrits en 2011 en tant que paysage culturel, sans que les caractéristiques géologiques
n’aient été proposées au titre du critère (viii).
Lien : https://goo.gl/RA5BFM
Sites géologiques (2005)
Auteur(s) : Paul Dingwall, Tony Weighell, Tim Badman
Description : le rapport vise en premier lieu à caractériser le patrimoine géologique et
géomorphologique visé par le critère (viii) de la convention du patrimoine. Ce critère
complexe inclut en effet quatre composantes : l’histoire de la Terre (enregistrement d’impacts
de météorites, de glaciations, de phénomènes tectoniques), l’évolution de la vie, les processus
géologiques en cours (ex. glaciation, volcanisme) et les caractéristiques géomorphologiques
significatives (ex. glaciers, montagnes, récifs coralliens).
Critères de priorisation : ces composantes ont été subdivisées en 13 thèmes afin d’identifier
plus précisément des catégories de sites susceptibles d’être proposés pour inscription :
caractéristiques structurelles et tectoniques, systèmes volcaniques, systèmes de montagnes,
sites stratigraphiques, sites fossilifères, systèmes lacustres fluviaux et deltaïques, systèmes
karstiques et grottes, systèmes côtiers, îles océaniques atolls et récifs coralliens, glaciers et
calottes glaciaires, glaciation, systèmes désertiques arides et semi-arides, impacts
météoritiques.
Sites identifiés : aucun site prioritaire n’est recensé. Cette démarche relève d’études
thématiques, qui couvrent en partie seulement la classification proposée (volcans, montagnes,
systèmes karstiques, sites fossilifères, déserts).
Lien : http://goo.gl/qZLuzj
Montagnes (2002)
Auteur(s) : Jim Thorsell, Larry Hamilton
Description : les montagnes figurent parmi les trois biomes les plus représentés sur la liste du
patrimoine mondial. Publiée à l’occasion de l’année internationale des montagnes, l’étude
analyse 55 sites naturels et mixtes inscrits et identifie 28 autres aires de montagnes pouvant
abriter une valeur universelle exceptionnelle.
Critères de priorisation : afin de circonscrire la définition d’une aire de montagne, l’étude
propose trois critères de sélection : une variable altitudinale minimale de 1500 mètres, une
superficie minimale de 10 000 hectares et un système d’aires protégées de catégories I à IV de
l’UICN. Il faut noter que certains sites inscrits sur la liste du patrimoine mondial
antérieurement à la réalisation de cette étude ne répondent pas à l’ensemble de ces
caractéristiques (cas des Mornes de la Dominique).
12
Sites identifiés : sous réserve d’une évaluation de l’intégrité, et rappelant que la zone alpine
est fortement anthropisée, l’étude identifie le Mont Blanc4 parmi les 28 sites « ayant un fort
potentiel pour considérer une candidature ». Il est également précisé en préambule de cette
liste additionnelle que, dans le cas des Alpes, une candidature au titre de paysage culturel ou
de réserve de biosphère serait plus adaptée.
Lien : https://goo.gl/MN5vx9
Histoire géologique et sites fossilifères (1996)
Auteur(s) : Roderick T. Wells
Description : l’étude fournit un cadre analytique afin d’identifier les évènements clefs de
l’histoire de la Terre, les dépôts fossilifères qui expriment le mieux ces évènements et analyse
en conséquence la représentativité de la liste du patrimoine mondial pour cette composante du
critère (viii). A l’issue de cette analyse qui n’a pas été mise à jour depuis la date de parution
de l’étude, il apparaît que les périodes qui ne sont pas actuellement bien représentées sont le
Silurien, le Paléocène, l’Oligocène et le Pliocène. L’auteur recommande de privilégier des
sites fossilifères bien préservés contenant des accumulations d’une grande diversité d’espèces
qui informent sur l’histoire des changements environnementaux à travers le temps.
Critères de priorisation : tout site proposé pour inscription doit être évalué en termes de
diversité de ses formes, la qualité de sa préservation, sa position dans l’échelle des temps
géologiques et la valeur de la séquence pour une ou plusieurs lignées.
Sites identifiés : l’étude n’identifie aucun site prioritaire à l’échelle internationale.
Lien : https://goo.gl/BjqMN2
Critères (ix) et (x)
Les critères (ix) et (x) relatifs à la biodiversité font l’objet de plusieurs études thématiques
portant sur des écosystèmes spécifiques ou plus globalement sur des zones biogéographiques:
biodiversité terrestre (2013), patrimoine mondial marin (2012), biogéographie, habitats et
biodiversité (2004), aires protégées importantes pour la biodiversité (2000), forêts (1997),
zones humides et marines (1997). Une grande attention a été portée jusqu’à ces dernières
années à la biodiversité terrestre mais on peut observer depuis 2012 un rééquilibrage en
faveur du patrimoine marin, qui constitue un enjeu important pour de nouvelles inscriptions.
Cette évolution a des implications directes pour la France du fait de sa présence dans trois
océans (Atlantique, Pacifique et Indien).
Pour justifier une valeur universelle exceptionnelle potentielle, un site doit à la fois appartenir
à une écorégion non représentée sur la liste du patrimoine mondial et constituer une priorité
pour la conservation de la biodiversité à l’échelle globale. L’évaluation des critères (ix) et (x),
qui sont souvent associés dans les propositions de candidatures, repose donc sur deux
approches complémentaires :
a) la classification des provinces biogéographiques du monde proposée par Miklos Udvardy
(1975). Les provinces biogéographiques correspondent à des zones de taille continentale
ou subcontinentale avec des caractéristiques géographiques, faunistiques ou floristiques
homogènes. Ce système de classification identifie 14 biomes, subdivisés en 193
provinces, dont certaines peuvent être lacunaires en sites naturels du patrimoine mondial.
Il faut cependant rappeler que la Convention du patrimoine mondial a pour objectif
d’identifier des sites ayant une valeur universelle exceptionnelle et que de nombreuses
4
Cette proposition émane d’une réunion d’experts sur les sites naturels alpins potentiels (Autriche, 2000).
13
provinces biogéographiques ne contiennent pas de tels sites. De ce point de vue, les
réserves de biosphère constituent un instrument plus adapté pour établir une liste
représentative des provinces biogéographiques dans le monde.
Figure. Carte des provinces biogéographiques
b) les priorités internationales en matière de conservation de la biodiversité, définies par
plusieurs systèmes de classification des habitats naturels et des écosystèmes :
Analyse mondiale des habitats CSE/UICN. Ce système divise les habitats terrestres et
marins du monde en une série hiérarchique de 13 catégories d’habitats de premier niveau,
82 catégories de deuxième niveau et 154 catégories de troisième niveau. Trois des habitats
de premier niveau couvrent une superficie beaucoup plus grande que les autres et
constituent 72% de la superficie totale du réseau naturel du patrimoine mondial. Plusieurs
types d’habitats (savane, mer et désert) sont aussi relativement mal couverts. L’analyse
aboutit à identifier 10 habitats prioritaires, dont les forêts de montagne de Polynésie et de
Nouvelle-Calédonie.
Global 200 (WWF). Les écorégions correspondent à une association de domaines
biogéographiques et de provinces floristiques/zoogéographiques. Le WWF a identifié 867
écorégions sur la planète et sélectionné parmi elles 238 régions dites «Global 200» qui
sont considérées comme exceptionnelles au niveau biologique et prioritaires en matière de
conservation : 142 sont des régions terrestres, 53 des régions d’eau douce et 43 des
régions marines. La plupart des types d’écorégions prioritaires englobent des biens du
patrimoine mondial et cette proportion est légèrement plus élevée dans les écorégions
terrestres. Deux zones concernent la France : la forêt sèche de Nouvelle-Calédonie
(relique couvrant 3% de la forêt originelle) et l’écorégion marine de Tahiti (l’île de Rapa
est identifiée pour ses hauts niveaux d’endémisme des espèces côtières).
Hotspots de biodiversité (Conservation International). Un point chaud de biodiversité
(traduction de l'anglais biodiversity hotspot) est une zone biogéographique terrestre ou
marine possédant une grande richesse de biodiversité particulièrement menacée par
14
l'activité humaine. Elle doit contenir au moins 1500 espèces de plantes vasculaires
endémiques et avoir perdu au moins 70 % de sa végétation primaire. La France est
présente dans 5 des 34 points chauds de biodiversité recensés à l’échelle mondiale : bassin
méditerranéen, îles caribéennes, Nouvelle-Calédonie, Polynésie-Micronésie, Madagascar
et îles de l’Océan Indien. Trois centres de biodiversité terrestre ne contiennent pas de
biens du patrimoine mondial parmi lesquels la Nouvelle-Calédonie (forêt humide et sèche
en zone tampon du bien actuellement inscrit). Il faut souligner que les points chauds de
biodiversité correspondent à des zones où les espèces de plantes vasculaires sont
fortement menacées : elles permettent donc d’identifier les zones prioritaires pour la
conservation mais en même temps, une attention particulière doit être portée aux
questions d’intégrité.
Les hotspots reposent sur l’état de conservation des espèces de sur les fore vasculaire
mais ne coïncident pas nécessairement avec les zones de forte biodiversité pour les
espèces animales.
En complément de cette approche, BirdLife International a développé les aires
endémiques pour les oiseaux (EBA), correspondant à des zones de présence d’au moins
deux oiseaux endémiques dont l’habitat est inférieur à 50000 km2. Au total, 218 EBA
abritant 2500 espèces d’oiseaux ont été recensées à l’échelle mondiale.
Les centres de diversité des plantes (UICN/WWF) correspondent à des zones de grande
richesse spécifique en plantes, avec une part importante d’espèces endémiques. Ces
espèces sont caractérisées par leur haut niveau d’irremplaçabilité et de vulnérabilité. Au
total, 234 centres de diversité des plantes ont été identifiés à l’échelle mondiale.
Figure. Principales lacunes dans la couverture des priorités mondiale de conservation. Quatre
systèmes de priorisation ont été croisés pour la réalisation de cette carte : hotspots de
biodiversité, global 200, aires endémiques pour les oiseaux, centres de diversité des plantes.
15
The World Heritage List: Future priorities for a credible and complete list of natural
and mixed sites (2004)
Auteur(s) : programme aires protégées de l’UICN
Description : l’UICN a réalisé en 2004 une évaluation de la couverture mondiale des biens
naturels et mixtes inscrits sur la Liste du patrimoine mondial, dans le but de renforcer sa
représentativité. Pour les biens naturels, cette notion doit être interprétée comme une
« représentation des régions biogéographiques ou des évènements de l'histoire de la vie ».
Toutefois, il faut garder à l’esprit que la liste du patrimoine mondial ne doit pas constituer un
échantillonnage de l’ensemble des écosystèmes et des habitats terrestres et marins, mais vise à
identifier des sites reconnus pour leur valeur universelle exceptionnelle.
Critères de priorisation : la liste a été évaluée au regard de plusieurs systèmes de référence
écologiques, notamment les provinces biogéographiques, la classification d’Udvardy,
l’analyse mondiale des habitats CSE/UICN, les écorégions Global 200 du WWF et les
hotspot. Cette analyse a conclu que la plupart des régions biogéographiques sont bien
représentées : on peut trouver, dans les biens naturels et mixtes actuels, des exemples de
presque tous les principaux habitats naturels ou de toutes les principales caractéristiques
naturelles du monde, avec une prévalence des biomes subtropicaux, des forêts humides et des
systèmes montagneux mixtes. Cependant, la couverture des biens du patrimoine mondial est
limitée dans certains biomes prioritaires pour la conservation (milieux marins, systèmes
lacustres, savanes, forêts boréales, prairies tempérées, déserts à hiver froid et toundra). Sur
cette base, l’étude identifie 20 sites prioritaires pour de nouvelles inscriptions.
Sites identifiés : les évaluations biogéographiques confortent l’intérêt des écosystèmes
terrestres et marins de la zone Pacifique (Polynésie et Nouvelle-Calédonie).
La biodiversité terrestre et la Liste du patrimoine mondial (2013)
Auteur(s) : Bastian Bertzky, Yichuan Shi, A. Hughes, Barbara Engels, Mariam Ali, Tim
Badman
Description : s’appuyant sur de précédentes études thématiques et sur une analyse
cartographique, cette étude évalue la couverture des régions biogéographiques et des priorités
en matière de conservation de la biodiversité dans les biens du patrimoine mondial de la
biodiversité et identifie les principales lacunes.
16
Critères de priorisation : l’étude s’appuie sur la méthode mise au point par Le Saout (2010)
pour identifier les aires protégées les plus irremplaçables pour la conservation mondiale des
espèces, considéré comme le concept le plus important pour évaluer la valeur universelle
exceptionnelle d’un site candidat possible. L’irremplaçabilité est une mesure agrégée du degré
de dépendance globale d’espèces à l’égard d’une aire protégée, calculée à partir du
pourcentage de distribution mondiale de chaque espèce se superposant avec les limites de
chaque aire protégée. L’analyse d’irremplaçabilité s’appuie sur 21 419 espèces vertébrées
évaluées au plan mondial pour la Liste rouge de l’UICN (amphibiens, oiseaux et mammifères)
et 173 461 aires protégées existantes relevant de l’ensemble des catégories de gestion de
l’UICN, et incluant les biens du patrimoine mondial naturels et mixtes et d’autres aires
protégées reconnues au plan international comme les Réserves de biosphère et les Sites
Ramsar.
Sites identifiés : deux sites français sont classés parmi les 100 aires protégées les plus
irremplaçables du monde, pour lesquels « une inscription sur la liste du patrimoine mondial
pourrait être envisagée » : le Parc naturel régional de La Martinique et l’aire d’adhésion du
parc national de La Guadeloupe. Aucun site métropolitain n’est répertorié dans cette liste.
Lien : http://goo.gl/v5vL0d
Le patrimoine naturel marin et la Liste du patrimoine mondial (2012)
Auteur(s) : Ameer Awad Abdulla, David Obura, Bastian Bertzky, Yichuan Shi
Description : cette étude vise à identifier et à proposer des sites marins pouvant avoir une
valeur universelle exceptionnelle, en particulier dans les régions biogéographiques qui ne sont
pas encore représentées ou qui sont sous-représentées sur la Liste du patrimoine mondial (ces
biens ne représentaient que 5% de la liste en 2012). Elle propose un cadre de 16 thèmes
généraux sur les caractéristiques marines et océaniques auxquelles les critères naturels du
patrimoine mondial pourraient être appliqués lors de l’élaboration d’un dossier de proposition
de bien du patrimoine mondial marin. L’étude constate que 67% des provinces
biogéographiques côtières ne sont que peu ou pas couvertes par un bien inscrit et qu’une
grande proposition de la haute mer n’en contient aucun.
Critères de priorisation : la méthode repose sur une analyse cartographique des lacunes dans
la couverture actuelle des biens du patrimoine mondial marin par province côtière et
pélagique. Pour prioriser les sites, l’irremplaçabilité (ou le caractère unique, rare, naturel) a
été identifiée comme le facteur le plus important pour la valeur universelle exceptionnelle5.
Sites identifiés : l’étude liste plusieurs provinces biogéographiques côtières lacunaires (qui ne
contiennent pas de biens marins inscrits sur la liste du patrimoine mondial) : Marquises
(lacune côtière), plateau brésilien : nord Brésil – Plateau des Guyanes (côtier), Polynésie Sud
Est, Amsterdam Saint Paul ; et une province biogéographique au large lacunaire : Canal du
Mozambique. Ces premiers résultats issus d’une analyse biogéographique doivent cependant
être complétés par une évaluation de l’irremplaçabilité des sites afin d’étayer leur valeur
universelle exceptionnelle (pour des espèces ou des écosystèmes importants pour la
conservation mondiale).
Lien : https://goo.gl/DsYDPx
Review of the World Heritage Network: Biogeography, Habitats and Biodiversity (2004)
Auteur(s) : Chris Magin, Stuart Chape
Description : l’étude propose un état des lieux complet des sites naturels inscrits sur la liste
du patrimoine mondial au titre des critères de biodiversité, sur la base d’analyses
cartographiques et de recherches bibliographiques. Elle vise à fournir une évaluation de la
5
Les deux autres facteurs sont la vulnérabilité et la représentativité
17
couverture des principaux types d’habitats sur la liste du patrimoine mondial, permettant
d’identifier les lacunes les plus significatives, où de nouvelles candidatures peuvent être
encouragées, à condition de répondre à la condition d’intégrité
Critères de priorisation : trois catégories de données sont croisées avec la carte des sites
inscrits sur la liste du patrimoine mondial pour identifier les priorités de nouvelles
candidatures : les systèmes biogéographiques (Udvardy, Global 200), les habitats d’espèces
menacées (UICN/SSC) et les aires prioritaires pour la conservation de la biodiversité
(hotspots, aires endémiques d’oiseaux, centres de diversité des plantes).
Sites identifiés : de nombreux sites français sont identifiés par cette évaluation, en particulier
en outre-mer : forêts sèches et humides, et rivières de Nouvelle-Calédonie (G200, SSC,
hotspot) ; forêt humide tropicale de Polynésie (SSC) ; maquis méditerranéen (SSC) ;
écorégion marine de Tahiti (G200) ; Iles Comores – Mayotte (EBA) ; Rimatara (EBA) ; Iles
Marquises (EBA) ; archipel des Tumaotu (EBA) ; région de Saul (CDP)
Lien : http://goo.gl/fvq29R
A global overview of protected areas on the world heritage list of particular importance
for biodiversity (2000)
Auteur(s) : Gemma Smith, Janina Jakubowska
Description : l’étude complète une série d’analyses de lacunes de la liste du patrimoine
mondiale engagées en 1996, afin d’asseoir une stratégie globale pour les sites naturels. Elle
vise à identifier des aires protégées existantes ayant des valeurs de biodiversité significatives,
qui pourraient justifier une candidature.
Critères de priorisation : l’analyse croise la liste du patrimoine mondial avec les systèmes
de priorisation de la conservation de la biodiversité : global 200, centres de diversité des
plantes, hotspots, centres de diversité génétique des plantes Vavilov, aires endémiques pour
les oiseaux, taxons en danger critique, zones humides d’importance internationale (Ramsar),
aire marines d’importance
Sites identifiés : plusieurs sites ou aires potentielles sont identifiés pour de nouvelles
inscriptions :
 hotspot : Nouvelle-Calédonie
 centres de diversité des plantes non représentés : Alpes (Autriche / France / Allemagne /
Italie / Liechenstein / Slovénie / Suisse – plusieurs sites ont été inscrits de puis), îles de
l’Océan Indien (Comores, Mascareigne incluant Maurice, Rodrigues and La Réunion),
Pacifique (Polynésie française – Marquises – et Nouvelle Calédonie – Grande terre) et la
Guyane française (région de Saul)
 aires endémiques d’oiseaux non couvertes : avec une priorité critique (Iles Comores, Iles
Marquises, Rimatara, archipel des Tumamotu) ; avec une priorité urgente (Nouvelle
Calédonie, Réunion – inscrit depuis, Iles de la Société)
 sites Ramsar qui pourraient mériter une inscription : Grand cul de sac marin de la
Guadeloupe
Lien : https://goo.gl/4RUi2u
A global overview of forest protected areas on the world heritage list (1997)
Auteur(s) : Jim Thorsell, Todd Sigaty
Description : cette étude établit des statistiques sur la répartition biogéographique des 61
aires protégées forestières inscrites sur la liste du patrimoine mondial (écozones ou royaumes
biogéographiques d’Udvardy). Elle s’appuie sur la définition donnée par la FAO (« une forêt
correspond à un couvert arboré de plus de 10% sur au moins un demi-hectare ») et restreint
son champ d’analyse aux sites couverts par au moins 20% de couvert forestier.
18
Critères de priorisation : l’analyse conduit à identifier plusieurs écozones faiblement
représentées, en particulier en Amazonie, dans le Pacifique Sud, dans certaines régions du
Sud-Est asiatique (Papouasie Nouvelle-Guinée) et les régions de forêts boréales. Elle établit
une liste des « aires protégées forestières qui pourraient être considérées pour une inscription
sur la liste du patrimoine mondial », qui nécessiterait une mise à jour substantielle car certains
sites ont depuis été inscrits, notamment dans la région amazonienne. Dans un contexte où les
forêts constituent l’un des biomes les plus menacés de la planète, la condition d’intégrité
constitue un élément particulièrement fondamental de la valeur universelle exceptionnelle
(superficie importante et absence de perturbation).
Sites identifiés : bien que la France soit concernée par plusieurs écozones prioritaires
(Paléarctique, Néotropical, Océanien), aucun site de notre territoire n’est répertorié dans
l’étude.
Lien : http://goo.gl/jTpwNf
A global overview of wetland and marine protected areas on the world heritage list
(1997)
Auteur(s) : Jim Thorsell, Renée Ferster Levy, Todd Sigaty
Description : cette étude thématique analyse 77 sites marins et zones humides inscrits sur la
liste du patrimoine mondial et aboutit à identifier des lacunes de représentation en Asie
Centrale, au Moyen Orient, dans les régions polaires et le Pacifique Sud.
Critères de priorisation : pour caractériser les zones humides majeures à l’échelle mondiale,
elle s’appuie sur la définition donnée par la convention Ramsar, tout en soulignant la
différence d’approche avec la convention du patrimoine mondial, qui considère un plus large
éventail de valeurs naturelles.
Sites identifiés : l’étude identifie une liste non exhaustive de sites ayant des zones humides
et/ou marines d’importance internationale et qui mériteraient d’être considérés pour une
inscription. Aucun site français n’est répertorié dans cette liste.
Lien : https://goo.gl/IS4iMX
Oceanic Islands (1991)
Auteur(s) : Hugh Synge
Description : la France, qui possède de nombreuses îles, est particulièrement concernée par
les résultats de cette étude, dont l’objectif est d’identifier les îles prioritaires pour de nouvelles
inscriptions. Ce document nécessite toutefois une mise à jour au regard de l’acquisition de
nouvelles connaissances sur les niveaux d’endémicité des îles océaniques et de l’évolution de
la liste du patrimoine mondial. Il précise que le nombre d’écosystèmes ne constitue pas un
argument clef pour aborder les critères de biodiversité de la convention du patrimoine
mondial, a contrario de la rareté ou de l’unicité d’un type de végétation d’importance
mondiale dont l’état de conservation doit être exceptionnel.
Critères de priorisation : l’étude fournit des critères d’éligibilité adaptés au contexte
insulaire, particulièrement important pour la France, à savoir : (a) compter plus de trois
oiseaux endémiques, (b) plus de 50 espèces de plantes endémiques, (c) îles importantes pour
les populations d’oiseaux marins, par exemples South Georgia, (d) îles pour le Centres de
plantes pour la biodiversité
Sites identifiés : de nombreux sites français sont identifiés, et ce à plusieurs titres :
 les Iles Marquises (7 espèces), la Nouvelle-Calédonie (5 espèces) et les Iles de la Société
(5 espèces) répondent au critère de priorisation pour les oiseaux endémiques. En revanche,
l’analyse ne retient pas la Martinique (2 espèces) ni La Guadeloupe, les Îles Crozet,
Amsterdam ou Kerguelen qui comptent chacune une seule espèce d’oiseau endémique ;
19

trois îles françaises comptent plus de 50 espèces de plantes endémiques : la NouvelleCalédonie (168 espèces), La Réunion (89 espèces) et les Marquises (61 espèces). Dans la
région Caraïbes, La Martinique (12 espèces) et la Guadeloupe (14 espèces) présentent des
niveaux d’endémisme trop faibles, tandis que la Dominique compte 62 espèces de plantes
endémiques (le parc national de Morne Trois Pitons a d’ailleurs été inscrit en 1997
notamment au titre du critère (x), justifié par l’endémisme des espèces de flore
vasculaire) ;
 l’étude considère également dans son champ d’analyse les îles importantes pour certaines
populations d’oiseaux marins. Ce critère pourrait être appliqué à l’archipel de Crozet et de
Kerguelen, bien qu’aucun de ces sites ne soit cité. Plusieurs îles font parties de centres de
plantes pour la biodiversité, notamment dans l’Océan Indien (île de La Réunion, au titre
des Mascareignes) et dans la zone Pacifique (îles Marquises, Nouvelle-Calédonie, Rapa).
Pour les Caraïbes, la sélection est plus complexe mais pourrait inclure des îles des petites
Antilles
Lien : http://goo.gl/oS6Cnx
Assessing marine world heritage in the Western Indian Ocean (2012)
Auteur(s) : Fanny Douvere, Agne Bartkute (coord.)
Description : cette publication présente les résultats d’un atelier régional organisé par
l’Unesco en 2012 dans l’océan indien pour identifier les priorités de nouvelles candidatures .
Même si certains experts de l’UICN ont été consultés, elle n’est donc pas considérée comme
une étude thématique de l’UICN et en conséquence, ses conclusions n’engagent pas
l’organisation consultative.
Sites identifiés : hormis La Réunion, inscrite en 2010, les principales îles françaises de
l’Océan indien sont identifiées comme des « aires potentielles pour de nouvelles
inscriptions » et sont généralement inscrites dans un contexte transnational : croissant des
Comores et des Glorieuses, îles Eparses, Terres australes françaises (Crozet, Kerguelen, Saint
Paul and Amsterdam)
Lien : http://goo.gl/Yg88El
20
Priorisation des sites
Les sites identifiés sur la base des préconisations techniques fournies par les études
thématiques ont été décrits et priorisés par les experts du groupe de travail patrimoine
mondial, en considérant les trois dimensions de la valeur universelle exceptionnelle :
- le site doit répondre à une lacune clairement identifiée de la liste du patrimoine mondial
et/ou être suggéré pour considération par au moins une étude thématique
- le site doit être dans un état de conservation optimal. L’analyse de l’intégrité a conduit à
reconsidérer plusieurs sites pourtant identifiés dans des études thématiques. Cette question
est particulièrement sensible dans le contexte français, où les sites naturels et mixtes ont
tous fait l’objet d’au moins un rapport sur leur état de conservation
- le site doit être couvert par un système de protection efficace (de catégorie I à IV
préférentiellement ou fondé sur une gestion traditionnelle des ressources naturelles).
Le tableau suivant compile les données issues des études thématiques et des évaluations à dire
d’experts. Ces propositions techniques ne préjugent pas de l’intérêt des territoires concernés
et ne tiennent pas compte de la réalité du portage, qui n’a pas été examinée par les experts. Il
s’agit cependant d’un élément déterminant qui doit être pris en considération par l’Etat Partie.
21
Région
Océan
Pacifique
Ecorégion
T
M



Caraïbes
Cat
Archipel des Marquises

M
vii
Critères
viii ix

x
V

3
2
Forêts humides tropicales
de Polynésie
N

VUE
I PG
3
2
Sér
Tra
Oceanic Islands (1991) ;
Biogeography (2004) : EBA ;
Biodiversity (2000) : CDP, EBA
critique ; Marine (2013)
S
Biogeography (2004) : SSC
Archipel des Tuamotu
N
 2
2
2
S


Iles Australes (Rimatara)
N
 2
2
2
S

Tahiti – Îles de la Société
(domaine marin)
N/M

3
2
2
S
Forêts humide et sèche de
Nouvelle Calédonie
N

3
1
2
U


Crozet, Kerguélen,
Amsterdam, Saint Paul
N

3
2
3
S
TN


Mayotte - Archipel des
Comores
N

3
1
2
S
TN


Iles Eparses – Canal du
Mozambique
N

3
3
3
S
TN
Montagne Pelée et forêt
de Martinique
(PNR/RBI)





Grand cul de sac marin
(aire marine adjacente
du parc national et aire
d’adhésion)
Forêt de Guyane (Saul)
et zone côtière (plateau
continental)
Massif du Mont-Blanc

Priorisation
S


Métropole
LI


Océan
Indien
Site
Biogeography (2004) : EBA ;
Biodiversity (2000) : EBA critique
; Marine (2013)
Biogeography (2004) : EBA ;
Biodiversity (2000) : EBA critique
Greatest Natural Areas (1982) ;
Oceanic Islands (1991) ;
Biogeography (2004) : G200 ;
Biodiversity (2000) : EBA urgent ;
Marine (2013) : côtier
Oceanic Islands (1991) ;
Biogeography (2004) : G200,
SSC, hotspot ; Biodiversity
(2000) : hotspot, CDP, EBA
urgent
Marine (2013) : côtier
(Amsterdam, Saint Paul) ;
Western Indian Ocean (2012)
Biogeography (2004) : EBA ;
Biodiversity (2000) : CDP, EBA
critique , Western Indian Ocean
(2012)
Marine (2013) : pélagique ;
Western Indian Ocean (2012)
Recommandation
***
*
Lien avec le dossier Marquises
*
Lien avec les îles de la société
*
Lien avec les îles de la société
**(*)
Problème d’intégrité (forêt sèche relictuelle)
***
Proposition sérielle / extension des Iles Heard
**
Problème d’intégrité du lagon
Proposition sérielle avec les Comores
***
Proposition sérielle Canal du Mozambique
***
Centrer la proposition sur le nord de l’île
(Montagne Pelée). Evaluer l’intérêt d’une
série (extension de Sainte-Lucie pour le
critère viii, proposition commune avec la
Guadeloupe pour le critère x)
Evaluer l’intérêt d’une série (proposition
commune avec La Martinique pour le critère
x)

3
2
3
S
TN
N

3
2
3
S
TN
Terrestrial Biodiversity (2013) ;
Biodiversity (2000)
***
N

3
2
3
U
TF
Biogeography (2004) : CDP ;
Biodiversity (2000) : CDP ;
Marine (2013)
***
2
2
2
U
TF
Mountains (2002)
**

M

22
Problème d’intégrité en zone côtière
**
Greatest Natural Areas (1982) :
montagne Pelée ; Volcanoes
(2009) ; Terrestrial Biodiversity
(2013)
N
Limiter le nombre de critères proposés,
intégrer le domaine marin côtier, circonscrire
le périmètre terrestre aux forêts ombrophiles
et aux îlots inhabités
Bien transfrontalier (PN Tumucumaque) ;
Intégrer littoral (savane) et le domaine côtier
(mammifères marins)
Avis de retrait de la liste indicative
Potentiel pour bien mixte transfrontalier.
Considérer le critère (vii), harmoniser les
critères entre les trois pays concernés.

Alpes
Parcs nationaux de la
Vanoise/Grand Paradis
Grottes à concrétions du
sud de la France6



Biodiversity (2000) : CDP
*



Greatest Natural Areas (1982)
*



Caves and Karst (2008)
*

Camargue


 1
1
2
Greatest Natural Areas (1982)
*

Maquis Méditerranéen
 N/M


2
2
Biogeography (2004) : SSC
*


Catégorie de bien
LI : inscription sur liste indicative
C : catégorie de bien
N : naturel
M : mixte

1
Evaluation de la Valeur universelle
exceptionnelle
V : Valeurs
1 : Potentiel
I : Intégrité
faible
PG : Protection et
2 : Potentiel
gestion
moyen
3 : Potentiel
élevé
Envisager des alternatives : paysage culturel,
réserve de biosphère
Envisager un paysage culturel ou une RB
Avis de retrait de la liste indicative
Envisager un paysage culturel ou une RB
Avis de retrait de la liste indicative
Ne répond pas à une lacune actuelle – géoparc
Avis de retrait de la liste indicative
Ne répond pas à une lacune actuelle (delta de
l’Okavango, Doñana, Delta du Danube ?)
Ne répond pas à une lacune actuelle (région
florale du Cap, Ibiza).
Eléments à prendre en considération et recommandations
Bien en série / unique
Caractère
transnational/transfrontalier
TN/TS
Recommandation
+++ potentiel élevé (lacune de
la liste du PM, critère
d’irremplaçabilité) : inscription
sur LI recommandée
++ potentiel élevé avec
réserves (analyse comparative à
renforcer / choix d’autres
critères / intégrité) : étayer la
VUE
+ Potentiel moyen (pour prise
en considération, contribution à
la VUE d’un bien sériel) : si le
site n’est pas sur LI, ne pas
inscrire
Ce site est mentionné pour prise en considération mais ne répond pas aux priorités géographiques identifiées dans l’étude thématique. Par
ailleurs, d’autres karsts similaires ont été inscrits en Chine
6
23
L’analyse conduit à distinguer trois situations :
1) Sites non inscrits pour lesquels une candidature pourrait être envisagée
L’une des caractéristiques de l’étude est d’ouvrir la possibilité de nouvelles candidatures de
biens naturels, dès lors que ceux-ci répondent à une lacune identifiée dans au moins une étude
thématique. Le fait qu’un bien soit mentionné ne signifie pas qu’il doive être inscrit mais
constitue un élément à prendre en considération pour la définition de la valeur universelle
exceptionnelle potentielle. Dans tous les cas, une analyse de la faisabilité technique doit être
réalisée pour étayer objectivement la VUE, qui s’appuie sur une identification précise des
valeurs, une analyse comparative, une description de l’état de conservation des principaux
attributs et une évaluation des systèmes de protection.
A ce stade, seuls les sites répondant aux exigences des trois piliers de la valeur universelle
exceptionnelle sont listés mais des analyses complémentaires peuvent conduire à considérer
de nouvelles propositions.
Site
Crozet, Kerguélen, Amsterdam, Saint Paul
Iles Eparses – Canal du Mozambique
Proposition
Bien en série avec Heard
Bien en série canal du Mozambique
Cette candidature doit être envisagée dans un
contexte transnational avec au moins La
Martinique
Cette candidature doit être envisagée dans un
contexte transnational ; Sous réserve que les
conditions d’intégrité soient respectées
(orpaillage)
Grand cul de sac marin (aire marine
adjacente du parc national)
Forêt de Guyane (Saul) et zone côtière
(plateau continental)
Tahiti – Îles de la Société (domaine marin)
2) Sites inscrits pour lesquels une candidature est à approfondir
Ces sites ont été identifiés dans une étude thématique mais leur valeur universelle
exceptionnelle doit être étayée par une étude de faisabilité, le plus souvent pour améliorer
l’analyse comparative, évaluer l’intégrité du bien et/ou renforcer la proposition par une
approche en série nationale ou transnationale. Il est recommandé de poursuivre la candidature
sous réserve que ces modifications soient apportées.
Site
Les Îles Marquises
Proposition
Réduire les critères (vii, x), envisager la
possibilité d’un paysage culturel marin,
intégrer
Cette candidature doit être envisagée dans un
contexte transnational avec au moins La
Guadeloupe. Potentiel pour un bien mixte
Aires volcaniques et forestières de la
Martinique
3) Sites inscrits pour lesquels une alternative doit être envisagée
Entrent dans cette catégorie les sites actuellement inscrits et qui ne répondent à aucune
priorité internationale. Il est recommandé de dé-lister les candidatures qui ne font l’objet
d’aucun portage et d’envisager des démarches de valorisation alternatives pour les autres
(critère culturel ou paysage culturel, autre désignation régionale / internationale).
24
Site
Montagne Sainte-Victoire et sites cézaniens
Parc national de la Vanoise
Ensemble de grottes à concrétions du Sud de
la France
La Camargue
Parc national des Écrins
Parc national de Port-Cros
Le rivage méditerranéen des Pyrénées
Bouches de Bonifacio
Les Alpes de la Mer
Chaîne des Puys et faille de Limagne
Massif du Mont-Blanc
Proposition
Géoparc
Le site est déjà classé comme réserve de
biosphère
Géoparc et/ou réserve de biosphère
Géoparc
Géoparc
25
Conclusion
L’analyse conduit à proposer un important rééquilibrage des propositions en faveur des
territoires d’outre-mer, qui abritent l’ensemble des sites pré-identifiés. Appliquée à la liste
indicative actuelle, elle aboutirait à la suppression de 11 des 13 sites naturels candidats.
Les potentialités pour de nouvelles inscriptions de sites naturels en métropole sont en effet
très limitées voire quasi-inexistantes. Seul un bien métropolitain (Mont-Blanc) est signalé
« pour considération » en raison de son caractère esthétique, qui ne peut être qu’associatif, et
pour son importance dans le développement de la pratique de l’alpinisme, sans que cette
pratique ne soit pour autant limitée à ce seul massif. Ce constat est corroboré par les
évolutions de la liste du patrimoine mondial : les inscriptions au cours des cinq dernières
années en Europe continentale ne concernent que le critère (viii), pour des caractéristiques
remarquables à l’échelle mondiale. Par exemple, le Mont Etna (Italie) a été inscrit en tant que
volcan le plus actif de la planète tandis que Stevns Klint (Danemark) constitue un témoignage
exceptionnel au plan mondial de l’impact d’une météorite sur l’histoire de la vie sur Terre.
Certains paysages culturels présentent des enjeux de biodiversité importants (Cévennes) mais
leurs valeurs naturelles n’ont pas été directement prises en compte dans les candidatures.
Enfin, aucun bien n’a été inscrit en Europe au titre du critère (x) depuis 2009 et du critère (ix)
depuis 2007 (forêts primaire de hêtres en Slovaquie et en Ukraine), si l’on fait exception de
l’extension en 2011 aux forêts des forêts de hêtres en Allemagne, dont l’UICN recommandait
de différer l’inscription afin de compléter la série proposée.
A l‘inverse, les régions d’outre-mer présentent des potentiels importants, qui doivent être
corroborés par des ateliers régionaux et des analyses comparatives complémentaires. Pour les
critères de biodiversité, ce constat est lié en grande partie au caractère insulaire des territoires
ultramarins, qui présentent de hauts niveaux d’endémisme et à leur situation géographique,
dans des points chauds de biodiversité mondiale. Les potentialités sont également liées au
écosystèmes marins, encore lacunaires à l’échelle mondiale, et pour lesquelles la France
dispose d’atouts considérables eu égard à l’importance de son domaine maritime.
Suites de la démarche
Plusieurs suites sont envisagées afin de valoriser cette démarche aux échelles nationale et
internationale.
1) cette première liste de sites prioritaires est présentée à titre indicatif et provisoire. Elle doit
être complétée par des analyses à l’échelle éco-régionale et une validation par des experts
internationaux. Les États parties sont d’ailleurs encouragés à demander aussitôt que possible
un avis en amont des Organisations Consultatives lors de l’élaboration de leurs Listes
indicatives le cas échéant. Ces résultats seront donc soumis à l’évaluation des experts du
groupe de travail patrimoine mondial et de la Commission mondiale des aires protégées de
l’UICN, qui pourrait conduire à réévaluer certaines propositions ;
2) un accompagnement technique peut être envisagé en priorité pour les sites inscrits sur la
liste indicative dont la structure de portage est clairement identifiée. Il peut prendre la forme
d’études de faisabilité, de missions d’évaluation et/ou de conseils aux porteurs de projets, en
fonction des attentes exprimées.
26
3) un travail similaire a été réalisé par Icomos France pour les biens culturels, et le croisement
des résultats issus des deux démarches facilitera l’identification des potentiels de mixité, voire
conduire à faire évoluer certaines propositions vers des paysages culturels
Le processus engagé en 2013 peut contribuer de manière effective à la révision de la liste
indicative française, conformément aux recommandations de la « stratégie globale pour une
Liste du patrimoine mondial équilibrée, représentative et crédible ». Ce faisant, une révision
périodique doit être envisagée afin de prendre en compte les évolutions susceptibles de
modifier l’appréciation de la valeur universelle exceptionnelle des biens identifiés :
- c’est le cas en premier lieu de la liste du patrimoine mondial, qui peut incorporer des sites
comparables et conduire à ré-évaluer la VUE de certaines propositions de candidature
- la mise à jour et la réalisation de nouvelles études thématiques, associées à l’organisation
d’ateliers régionaux, aboutiront à redéfinir certaines priorités internationales
- les études de faisabilité menées dans des sites identifiés en première analyse peuvent
également modifier les préconisations techniques issues de l’analyse stratégique, en
particulier sur les questions d’intégrité
- de nouvelles candidatures peuvent émerger dans le cadre de propositions en série
transnationales ou transfrontalières (cas des forêts de hêtres)
- la doctrine interprétative de la convention du patrimoine mondial évolue en fonction des
décisions du comité et des groupes de travail mis en place pour assurer une liste
représentative et équilibrée.
Le processus amont reste une démarche expérimentale que peu de pays ont mis en place ; les
méthodologies
27
Annexe 1. Analyses d’irremplaçabilité
Auteur : Ana Rodrigues (CEFE/CNRS)
Parc naturel régional de La Martinique
Martinique Regional Nature Park is one of the world’s most irreplaceable protected areas,
having been ranked 117 in overall irreplaceability and 96 in irreplaceability for threatened
species. Because it is in the top 100 for one of these criteria, it has been specifically
recommended as a site that should be considered for world heritage status under criterion (x)
in the report by Bertzky et al (2013). This protected area is particularly important for birds
(ranked 44) and for threatened birds (ranked 35). It is of global importance for 13 bird
species, including two threatened bird species (Icterus bonana, Ramphocinclus brachyurus)
that have about half of their total range inside the PA. For three bird species (Icterus bonana,
Cinclocerthia gutturalis, Cyanophaia bicolor) it seems to be the world’s most important PA.
It is of global importance for three amphibians, including one species that is not found
anywhere else (Allobates chalcopis); and it is of global importance for four mammals,
including one species that has nearly half of its range in the PA (Myotis martiniquensis).
Guadeloupe National Park Buffer Zone
Note that although the buffer zone includes a marine area, the information below is only for
land species. Guadeloupe National Park Buffer Zone is one of the world’s most irreplaceable
PAs, having been ranked 58 in overall irreplaceability and 33 in irreplaceability for threatened
species. Because it is in the top 100 for one of these criteria, it has been specifically
recommended as a site that should be considered for WH status under criterion (x). This
protected area is particularly important for mammals (ranked 33) and in particular for
threatened mammals (ranked 10). It is of global importance for 8 mammal species, including
four threatened species (Eptesicus guadeloupensis, Chiroderma improvisum, Sturnira
thomasi, Myotis dominicensis) that have > 40% of their total range inside the protected area.
For these eight mammal species, it seems to be the world’s most important protected areas.
It is of global importance for four amphibians, for which it is the world’s most important
protected areas, including two threatened species that have >50% of their range in the
protected areas (Eleutherodactylus pinchoni and Eleutherodactylus barlagnei).
It is of global importance for 11 bird species, for which it is the world’s most important
protected areas, including one threatened species (Turdus lherminieri).
Îles Kerguelen, Crozet, Amsterdam et Saint Paul
The Réserve Naturelle Nationale des Terres Australes Françaises Ramsar Site, Wetland of
International Importance was not highlighted by our study, maybe because the WDPA doesn’t
seem to have a map for it. They are important for marine birds and mammals, which are not
well covered by our analysis. I can find more information about this if useful.
Polynesie francaise - îles Marquises
There seems to be a single protected area in the WDPA for the Marquesas Islands
(http://protectedplanet.net/sites/Mohotani_Reserve_Integrale_Natural_Reserve) which was
not highlighted by our study. However, the Marquesas have a number of endemic bird species
(e.g., the Critically Endangered Pomarea whitneyi
http://www.birdlife.org/datazone/speciesfactsheet.php?id=6080) which can be included in
recommendations for designating these islands as a WHS. I can find more information about
this if useful.
28
Forêts sèches et humides de Nouvelle-Calédonie
If our analysis had included plants, the forests of New Caledonia would for sure have been
highlighted as having very high importance, given the large number of endemic species, many
of which highly threatened. Note that New Caledonia is one of the world’s biodiversity
hotspots (Myers, N., R. A. Mittermeier, C. G. Mittermeier, G. A. B. Fonseca, and J. Kent.
2000. Biodiversity hotspots for conservation priorities. Nature 403:853 – 858), with > 2500
endemic plants. I am not a plant specialist, but can try to find more information about this if
useful. The information below is for vertebrates only.
Provincial de Thy Territorial Park
Provincial de Thy Territorial Park is highlighted for its importance for mammals, being
ranked 201 for mammals and 102 for threatened mammals. This is because it holds nearly
(92%) all of the global range of a Critically Endangered species (Nyctophilus nebulosus).
Although it was not specifically recommended as a WHS in our study (only PAs in the top
100 where highlighted) it is ranked relatively high in global ranks and could be defended
under criterion x.
In addition, two of New Caledonias’s protected areas are highlighted for their importance for
birds: Reserve Speciale de Faune de la Haute Yate Special Fauna Reserve and Parc Territorial
de la Riviere Bleue Territorial Park are both of global importance for one vulnerable species
of bird (Eunymphicus cornutus).
Guyane
Guyane (parc amazonien) National Park was treated as two separate units in our analysis
(following the classification in the World Database on Protected Areas): Guyane (parc
amazonien) National Park - Core Area (IUCN category II) and Guyane (parc amazonien)
National Park - Buffer zone (IUCN category V)
Guyane (parc amazonien) National Park - Core Area (see attachment)
Guyane (parc amazonien) National Park - Core Area is ranked 387 across all species (and
1083 for threatened species), being relatively well placed for birds (rank = 229) and
amphibians (rank = 360).
It is of global importance for 17 species of amphibians (one Vulnerable) being the most
important PA in the world for five species (see attachment), including one that has >30% of
its range in the PA (Allobates granti).
It is also of global importance for five bird species (one Vulnerable; being the most important
PA in the world for two species; see attachment), and two mammals.
Although it was not highlighted in our study (only PAs in the top 100 where highlighted) it is
ranked relatively high in global ranks and could be defended under criterion x.
Guyane (parc amazonien) National Park – Buffer Zone (see attachment)
Guyane (parc amazonien) National Park - Buffer zone is ranked 414 across all species (and
1454 for threatened species), being relatively well placed for birds (rank = 312) and
amphibians (rank = 312).
It is of global importance for 12 species of amphibians (none threatened) being the most
important PA in the world for two species (Rhinella lescurei and Allobates granti) that have
>30% of their range in the PA. It is also of global importance for one bird and one mammal.
Although it was not specifically recommended as a WHS in our study (only PAs in the top
100 where highlighted) it is ranked relatively high in global ranks and could be defended
under criterion x.
29
Annexe 2. Fiches descriptives
1.
2.
3.
4.
5.
Montagne Pelée / Parc naturel régional de La Martinique
Parc national de Guadeloupe
Europa – Archipel des Glorieuses
Crozet, Kerguélen, Amsterdam, Saint Paul
Forêt amazonienne (Sud Guyane)
1. Volcan et forêts de Martinique
Sources : fiche de déclaration de valeur universelle exceptionnelle, études thématiques
Note : l’étude thématique coordonnée par Jeffrey A. McNeely, World’s greatest natural areas
(1982), identifie la zone de la montagne Pelée (5000 ha sur la partie nord ouest de l’ile) au
titre des critères des critères (vii) et (ix). Ce site témoigne d’une éruption volcanique qui a
produit une nuée ardente, détruisant entièrement la ville de Saint Pierre. Il présente un transect
inaltéré de faune et de flore après des épisodes volcaniques récents, depuis les côtes rocheuses
et les environnements marins jusqu’aux forêts sèches, aux forêts humides et aux forêts de
nuages. Il fournit donc un exemple classique d’un processus écologique de succession
primaire. La montagne Pelée constitue l’habitat d’espèces endémiques menacées (Myadestes
genibarbis, Buteo platypterus, Cinclocerthia gutturalis, Ramphocinclus brachyurus, dromicus
cursor).
D’une superficie de 1080 km2, l’île de la Martinique se localise au cœur de l’arc des Petites
Antilles entre la Dominique au Nord et Sainte-Lucie au Sud. Longue de 65 km environ et
large d’une trentaine de km, cette île orientée NNW-SSE, est la plus excentrée de l’arc
antillais. Sur le plan écologique et environnemental, elle se caractérise d'abord par un relief
volcanique très accidenté, extrêmement montagneux au nord avec la Montagne Pelée (1395m)
et les Pitons du Carbet (1197m au Piton Lacroix). Soumise à un climat tropical maritime
humide, cet ensemble naturel bénéficie d'une pluviosité annuelle abondante renforcée ou au
contraire atténuée par les effets orographiques.
La grande diversité des conditions bioclimatiques, topographiques et altitudinales y favorise
la mise en place de nombreux écosystèmes terrestres, principalement forestiers, et d'une flore
très riche, surtout si on la rapporte à l'exiguïté du territoire. Ainsi se succèdent, des rivages
aux sommets volcaniques, la mangrove, des forêts dites xérophiles , des forêts mésophiles,
hygrophiles, montagnardes, des fourrés semi-arborés au-dessus de 800 m et, au-dessus de
1100 m, des savanes altitudinales à fougères et broméliacées.
La flore indigène de ce continuum comprend environ 1200 espèces de phanérogames dont
12% environ sont endémiques, et auxquelles il faut ajouter 200 espèces parfaitement
naturalisées et se comportant comme des espèces autochtones. En dehors des oiseaux, la
faune des vertébrés, comme dans toutes les petites îles est limitée. Dans le domaine des
Invertébrés, en revanche, notamment chez les Insectes, les Arachnides, les Mollusques, la
biodiversité s'avère de plus en plus étonnamment riche et intéressante au fur et à mesure du
développement des investigations.
Valeur universelle exceptionnelle virtuelle
30
Le bien a été inscrit sur la liste indicative française au titre des quatre critères naturels.
Toutefois une analyse comparative à l’échelle internationale devra être réalisée afin d’étayer
cette proposition.
Critère (vii) : Le monument naturel proposé s'inaugure par la majesté de la Montagne Pelée
qui, (par ses velours verdoyants dominant la belle rade de la ville de Saint-Pierre, sa charge
historique, son aura de volcan actif) concentre les lignes de force des paysages les plus
puissants. Cette splendeur de départ se prolonge par celles des Pitons du Carbet qui s'élancent
d'un singulier ensemble au-dessus des touffeurs forestières.
Critère (viii) : La Montagne Pelée, à cause de l’éruption du 8 mai 1902 jouit d’une notoriété
scientifique internationale et de l’existence d’une recherche scientifique actualisée, elle est un
lieu fondateur dans l’émergence de la volcanologie moderne et de la surveillance volcanique.
Le bien est mentionné dans l’étude thématique de l’UICN sur les volcans au titre de site
iconique.
Critère (ix) : La végétation comprend un nombre très important d'espèces endémiques dans
les formations végétales, essentiellement forestières, des zones submontagnardes,
montagnardes et altitudinales. Une espèce arborée sur deux est endémique des Petites Antilles
dans ces étages de végétation. Ce processus d'isolement des populations, renforcé par
l'histoire géologique particulière de la Martinique, a sans doute favorisé la spéciation et
l'apparition de nombreuses espèces endémiques dans cette île. Les genres d'arbres forestiers
(Sloanea, Eugenia, Miconia), riches en espèces endémiques sont de bons exemples de
radiation évolutive à partir d’espèces ancestrales originaires du nord de l'Amérique du sud ou
des Grandes Antilles.
Critère (x) : Le continuum volcanique et forestier proposé accueille tous les étages de
végétation et tous les types forestiers propres à la Martinique et aux Petites Antilles centrales
montagneuses. La biodiversité végétale, dans l'aire globale du continuum est très élevée: on
dénombre environ 1400 espèces de Phanérogames dont 1200 clairement autochtones, et 200
parfaitement naturalisés. Le parc naturel régional de Martinique a été identifié parmi les 100
aires protégées les plus irremplaçables au monde pour les espèces menacées, et fortement
recommandé pour une candidature au titre du critère (x) en raison de son importance
internationale pour 13 espèces d’oiseaux et 4 mammifères. Le bien proposé est également
couvert par des priorités internationales, puisqu’il fait partie du hotspot de biodiversité des
îles caribéennes, et inclus 10 aires importantes pour les oiseaux.
Eléments d’analyse comparative
La partie centrale du monument naturel proposé au Patrimoine mondial occupe une superficie
d'environ 9500 à 10000 hectares. À titre de comparaison l'aire classée Patrimoine mondial Du
Parc Des Trois Pitons de la Dominique est de 7000 hectares, celle (également classée au
Patrimoine Mondial) de la Zone de Gestion des Deux Pitons de Sainte-Lucie est de 2909
hectares. L'aire centrale du Parc National de la Guadeloupe est de 21850 hectares.
Par rapport aux autres cœurs de Réserves de la Région, le Bien martiniquais proposé au
classement est le seul englobant tous les étages de végétation des Petites Antilles, ces
derniers, de plus, disposant de superficies importantes (autour de 2000 ha) et à peu près
équivalentes. Le périmètre central du bien sélectionné est également le seul contenant deux
grandes aires forestières s'étendant sans discontinuité du littoral aux sommets volcaniques.
31
L'aire centrale du continuum martiniquais "Pelée-Pitons-Péninsule du Sud-ouest" possède le
nombre le plus élevé d'arbres forestiers autochtones recensés dans un Parc ou une Réserve des
Petites Antilles, soit 321 espèces autochtones. La Martinique est d'ailleurs l'île qui héberge le
plus grand nombre d'espèces arborées autochtones des Petites Antilles.
Intégrité
Les espaces du continuum proposé sont relativement bien préservés. Ces zones ont été
partiellement inventoriées pour leur biodiversité dans le cadre d'études spécifiques ou de
programmes nationaux comme celui des ZNIEFF. Les menaces qui pèsent actuellement sur
ces zones sont principalement d'origine anthropique avec l'urbanisation et la fragmentation
des habitats. Les zones les plus pentues et arrosées peuvent être fragilisées par une surfréquentation en particulier sur les lignes de crêtes qui sont les ouvertures les plus
fragilisantes pour ces massifs montagneux. De nombreuses actions de police sont mises en
place pour lutter contre ces dégradations.
Systèmes de protection et de gestion
Le bien proposé est couvert par plusieurs statuts de protection locaux et nationaux :
- Classement au titre des sites, comme patrimoine national : site classé des Mornes de la
Pointe du Diamant et du Rocher du Diamant, site classé des Versants Nord-Ouest de la
Montagne Pelée (VNOMP)
- Réserves Biologiques Intégrales : RBI de la Montagne Pelée, RBI de Prêcheur-GrandRivière, RBI des Pitons du Carbet. Ces 2 dernières sont en cours d'instruction.
- Une partie du site proposé est propriété du Conservatoire du Littoral (Montagne Pelée,
Rocher du diamant, Morne Larcher)
- parc naturel régional de Martinique (catégorie V de l’UICN).
2. Parc national de Guadeloupe
Auteur : Hervé Magnin (Parc national de Guadeloupe)
Description du site
Le bien proposé concerne l’ensemble du périmètre du parc national de Guadeloupe incluant la
zone cœur et l’aire marine d’adhésion, qui couvre la baie du Grand Cul-de-Sac marin.
La baie du Grand Cul-de-Sac Marin est un territoire marin de 15 000 hectares entouré par des
formations inondables côtières d'environ 7 000 hectares parmi les mieux conservées des
Petites Antilles.
Une barrière récifale d'une trentaine de kilomètres protège de la houle un vaste lagon incluant
des formations coralliennes et de vastes herbiers marins et des îlets souvent colonisés par le
palétuvier rouge. Les mangroves littorales constituent un cordon protecteur essentiel sur plus
de 60 % du linéaire de la cote de la baie - à l'arrière duquel s'étend une forêt marécageuse
parfaitement adaptée à une submersion saisonnière. La Grande rivière à Goyave se jette dans
la baie en formant un vaste estuaire colonisé par la mangrove, historiquement c'était un
biotope majeur pour le lamantin au cours du XVIIIème siècle, avant son extinction. Près de
5000 hectares de cette baie et de son littoral sont inscrits en cœur de parc national depuis
1989.
32
Les principales valeurs naturelles identifiées dans la partie marine du bien sont :
- gradient écologique de salinité entre la mangrove et la forêt marécageuse et les prairies
humides et marais;
- trilogie des écosystèmes marins : récif corallien, herbiers et mangroves;
- diversité faunistique marine remarquablement diverse sur un territoire de petite taille
- forte naturalité et une fréquentation limitée.
Valeur universelle exceptionnelle virtuelle
Le bien pourrait être proposé au titre du critère (x). L’étude d’irremplaçabilité (Le Saout
2013) ne couvre pas la partie marine mais la partie terrestre du parc national a été mise en
évidence dans les 100 sites prioritaires à l’échelle mondiale (la zone tampon a été classée
58ème en général et 33ème pour les espèces menacées. Par ailleurs, le site est également couvert
par plusieurs priorités internationales : il fait partie du hotspot de biodiversité des îles
caribéennes (seulement couvert par 0,3% des sites du patrimoine mondial), l’aire marine
inclut une aire importante pour les oiseaux (GP005) et le massif forestier de l’île de Basse
Terre et les aires environnantes sont identifiés par l’Alliance for zero extinction pour trois
espèces d’amphibiens.
Intégrité
Le parc national de Guadeloupe s’étend sur une superficie totale de 22000 hectares, dont
15000 hectares en aire marine. La structure foncière relève majoritairement du domaine
public (90% environ).
La partie terrestre du parc national présente un bon état de conservation. En revanche, l'état
général des formations récifales est, à l'image de l'ensemble des Antilles, dans un mauvais état
de santé à la suite d'une épidémie ayant provoqué dans les années 90 une mortalité massive
des coraux constructeurs (Acropora sp.). La situation est encore aggravée par les épisodes de
blanchissements dus à l'élévation anormale de la température de l'eau.
Dispositifs de protection et système de gestion
Le cœur du parc national correspond à un statut de protection réglementaire classé en
catégorie II de l’UICN tandis que l’aire d’adhésion relève de dispositions contractuelles. Ces
deux niveaux de protection sont a priori conformes aux exigences de la convention du
patrimoine mondial. La Charte du parc national pourrait valoir plan de gestion du bien
identifié dans la mesure où les limites se superposent.
Eléments d’analyse comparative
L’analyse comparative devra considérer les îles de Dominique et la Martinique. Il n’existe pas
de site similaire dans l’outre-mer français.
3. Europa (Archipel des Glorieuses)
Auteur/contributeurs : Cédric Marteau, Jean Pascal Quod, Pascal Chabanet, Sonia Ribes
Europa est la plus méridionale des îles Eparses. Il s'agit d'un atoll surélevé caractérisé par une
structure karstique importante. L'île, de forme pentagonale, est basse et sablonneuse. Elle
possède une ceinture de dunes dont le point culminant se situe entre 6 et 7 mètres de haut. Son
33
diamètre est compris entre 6 et 7 km, pour une superficie terrestre d’environ 30 km² et 47 km²
de superficie récifale. Cette caye est entourée d’un récif frangeant presque continu,
interrompu par des plages de sable. Un lagon couvre le cinquième de l’île dans la partie nordest (environ 900 ha dont quelques 700 ha de mangrove). La Z.E.E. délimitée autour d’Europa
représente une surface de 127 300 km².
Europa est soumise à une très faible pression anthropique et possède un patrimoine naturel
terrestre et marin exceptionnel par sa biodiversité et son état de conservation. L'île est classée
en site RAMSAR depuis le 27 octobre 2011.
Avec 988 espèces marines et 212 espèces terrestres recensées à ce jour sur le territoire, l’île
d’Europa est dotée d’une biodiversité très riche. Parmi ces espèces, nombreuses sont celles
qui sont menacées à l’échelle régionale voir internationale et qui présentent un fort intérêt
patrimonial.
La richesse spécifique de l’île n’est pas la seule à lui conférer un intérêt écologique. En effet,
Europa a été / est soumise à de très faibles pressions anthropiques ce qui a garanti la très
bonne préservation de ses habitats marins et terrestres dont dépendent les espèces. En outre,
certaines espèces comme les tortues marines et les oiseaux marins sont fortement liés aux
deux compartiments (marins et terrestres) pour satisfaire leurs cycles biologiques. Ainsi, la
présence abondante de ces espèces à fort intérêt patrimonial sur le territoire d’Europa révèle
l’état de conservation exceptionnel des écosystèmes de l’île.
Certaines végétations d’Europa (mangrove, sansouires, steppes salées) constituent les derniers
reliquats dans le sud-ouest de l’océan indien et l’île dispose d’un taux d’endémisme élevé (par
exemple, 16,5% de l’entomofaune d’Europa est endémique).
Europa est ainsi une zone refuge importante pour de nombreuses espèces menacées au niveau
régional et/ou international et est considérée comme un véritable sanctuaire de biodiversité
par la communauté scientifique.
Valeur universelle exceptionnelle virtuelle
Le site pourrait être proposé au titre des critères (ix) et (x).
Critère (ix) : L'ensemble des systèmes de végétation d'Europa et la richesse des continuités
écologiques et systématiques depuis la mangrove jusqu'aux forêts basses à Euphorbia
stenoclada développées sur le plateau récifal fossile sont bien préservés et représentatifs d'un
jeune atoll de l'ouest de l'océan Indien. Sa végétation présente un très grand intérêt à la fois
patrimonial et systématique, que renforce le caractère faiblement anthropisé de l'île. Comme
souligné par de nombreux scientifiques, Europa est un véritable laboratoire pour l'étude de
l'évolution naturelle d'un atoll. A Europa, malgré le jeu réduit d'espèces, la végétation traduit
de manière exemplaire et didactique les moindres variations de salinité, d'hydromorphie, de
texture des sols. Europa constitue ainsi un terrain exceptionnel d'apprentissage à l'écologie des
communautés végétales et des habitats sur la base d'un nombre réduits de facteurs
écologiques. Il est probable que de telles continuités écologiques soient devenues rares, voire
exceptionnelles dans l'océan Indien occidental en raison de l'exploitation des littoraux
(pâturage, salines, urbanisation, etc.).
Critère (x) : De nombreuses espèces menacées ou inscrites sur les annexes de conventions
internationales et appartenant à de nombreux groupes taxonomiques trouvent refuge dans les
34
écosystèmes d'Europa. En effet, 13 espèces sont considérées comme vulnérables, en danger
ou en danger critique d'extinction par l'UICN, 14 figurent sur les annexes I et II de la
convention de Bonn sur les espèces migratrices. En outre, la Convention de Berne relative à la
conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe liste 20 espèces dans ses
annexes II et III et 2 espèces ont été intégrées aux annexes III et IV de la Convention
régionale de Nairobi. Parmi toutes ces espèces, les tortues marines vertes et imbriquées sont
inscrites sur les annexes de toutes les conventions sus-mentionnées. Le système de mangroves
lagonaires coralliennes, développées sur matériaux coralliens, présente une certaine
originalité écologique et une nette diversité en fonction des conditions hydrodynamiques, de
substrat, de salinité et d'exondation. Elles présentent de fortes affinités écologiques,
structurales, floristiques et typologiques avec les mangroves d'autres atolls de l'océan Indien,
notamment, les mangroves des îles d'Aldabra et de Cosmoledo. (Boullet, 2008a)
Les sansouires d'Europa connaissent un développement spatial ordonné le long d'un gradient
de salinité et d'hydromophologie sans équivalent, compte tenu des rares situations
équivalentes et généralement dégradés de madagascar. Europa constitue ainsi un site majeur
de conservation de ces habitats de sansouires. (Boullet, 2008b)
978 espèces marines ont été inventoriées à Europa. La présence de la mangrove primaire et
d’herbiers de phanérogames marines en bordure de lagune confèrent à Europa un intérêt
patrimonial incontestable. Ces habitats sont indispensables pour le développement des tortues
marines vertes (EN) et imbriquées (CR) immatures. La mangrove joue également un rôle de
nurserie pour le requin pointe noire et le requin limon-faucille (VU).
Parmi les 380 espèces de poissons osseux recensées à Europa, il faut noter la présence du
napoléon (Cheilinus undulatus) (EN), du mérou séllé (Plectropomus laevis) (VU) et du thon
obèse (Thunnus obesus) (VU).
13 espèces de requins ont été répertoriées dans les eaux d’Europa, dont 4 sont classées «
vulnérable » et 2 « en danger d’extinction » par l’UICN.
7 espèces de mammifères marins ont été observées dans les eaux d’Europa : 3 espèces de
baleines et 4 de dauphins. En outre, la présence du rorqual commun (Balaenoptera physalus)
(EN) confère à Europa une valeur patrimoniale élevée.
Europa constitue un site majeur pour le maintien des populations de tortues vertes (EN) et
imbriquées (CR) dans l’océan Indien. Elle est le site de ponte le plus important de l’océan
Indien pour la tortue verte.
Europa héberge l'avifaune marine la plus diversifiée des îles Eparses avec huit espèces dont
une sous-espèce endémique rare, le paille-en-queue à brins blancs d’Europa et abrite, pour
certaines espèces, les colonies les plus importantes de l’océan Indien.
Sur sa partie émergée, il faut noter qu’Europa héberge 212 espèces (faune et flore) et
constitue un sanctuaire terrestre particulièrement bien préservé dans un contexte régional où
les pressions anthropiques sont fortes.
Le système primaire de mangroves lagonaires coralliennes, les sansouires et les steppes salées
d’Europa sont dans un état de conservation exceptionnel et constituent les derniers reliquats
dans le sud-ouest de l’océan Indien.
L’entomofaune d’Europa montre un taux d’endémisme élevé (17 espèces, soit 16,5%). De
même, sur les 4 espèces de reptiles terrestres recensées sur l’île, deux sous-espèces de
Scincidae sont endémiques.
Enfin, d’un point de vue ornithologique, Europa héberge une petite population de héron
crabier blanc (Ardeola idea) (EN), ainsi qu’une sous-espèce de passereau endémique
d’Europa, l’oiseau à lunette d’Europa (Zosterops maderaspatana ssp. voeltzkowi).
35
Intégrité
Les limites du bien identifié correspondent à l'ensemble des écosystèmes terrestres de l'île
d'Europa ainsi qu'aux écosystèmes marins jusqu'à la limite des 12 milles nautiques, sur une
superficie totale de 205800 hectares. Il s'agit ainsi de la partie terrestre et des eaux
territoriales, au sens de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (Montego Bay,
1982).
Les pressions anthropiques appliquées sur le territoire par le passé et de nos jours sont très
faibles. Les écosystèmes terrestres et marins sont ainsi particulièrement bien préservés et se
trouvent dans un état de conservation exceptionnel. Les principales menaces sont les espèces
exotiques envahissantes (Choca), les changements globaux et les macrodéchets apportés par
les courants marins. L'état de conservation exceptionnel des habitats terrestres et marins
d'Europa est d'autant plus important que ces derniers sont soumis à de fortes pressions à
l'échelle régionale (mangroves, steppes salées, sansouires, récifs coralliens, etc.). Europa
constitue ainsi un réel sanctuaire de biodiversité dans le sud-ouest de l'océan Indien.
Dispositifs de protection et système de gestion
L’île d’Europa est protégée par deux mesures réglementaires :
- Arrêté préfectoral n°13/DG/IOI du 18 novembre 1975 - classement en réserve naturelle
complété de la note N°1157/81 du 16 août 1981 - Le Classement en "Réserve Naturelle"
interdit "toute déprédation de la nature tant terrestre que marine, aussi bien en ce qui concerne
la faune et la flore". Les prélèvements d'échantillons botanique et zoologique, y compris de
coquillages, le dérangement de l'avifaune et l'abandon de déchets sont strictement interdits.
- Arrêté préfectoral n°13/DG/IOI du 18 novembre 1975 - classement en réserve naturelle
complété de la note N°1157/81 du 16 août 1981. Arrêté préfectoral n°13/DG/IOI du 18 nov
1975 - classement en réserve naturelle complété de la note N°1157/81 du 16 août 1981. Ce
texte prévoit l’interdiction de toute forme de pêche à l'intérieur des eaux terroriales. Des
autorisations peuvent être accordées pour des prélèvements d'animaux et végétaux marins à
des fins de recherche scientifique.
Par ailleurs, Europa est reconnue depuis 2011 comme une Zone Humide d'Importance
Internationale au titre de la convention de Ramsar.
Un projet de classement en réserve naturelle nationale est également envisagé (Livre Bleu de
la Mer, CiMer 2009, Grenelle de la Mer)
Les principales structures impliquées dans la gestion sont la Collectivité des Terres australes
et antarctiques françaises, les Forces Armées de la Zone Sud Océan Indien (FAZSOI),
DMSOI – AEM et le Conservatoire Botanique National de Mascarin (CBNM). Un plan
d'action pour l'éradication du Choca a été défini sous la coordination des Taaf, avec l’appui
technique du CBNM (sa mise en œuvre est assurée par les FASZOI). Les Taaf en partenariat
avec les FAZSOI ont développé une politique exemplaire de tri des déchets et de dépollution
des sites depuis 2001. La surveillance des eaux sous juridiction française autour d'Europa est
assurée en partenariat avec l'AEM et la DMSOI.
Eléments d’analyse comparative
L’analyse comparative devra porter sur deux sites situés dans les Seychelles qui présentent
des caractéristiques similaires, Aldabara et Cosmoledo, afin d’étayer la valeur universelle
36
exceptionnelle du bien identifié. Toutefois, compte tenu de la latitude et du climat subaride
de cette partie du canal du Mozambique, l'île d'Europa paraît être une île corallienne sans
équivalent dans les régions occidentales de l'océan Indien.
4. Crozet, Kerguélen, Amsterdam, Saint Paul
Auteur/contributeurs : Cédric Marteau, Jean Pascal Quod, Pascal Chabanet, Sonia Ribes
Les Terres australes françaises sont situées au sud de l'océan Indien.
Crozet et Kerguelen prennent place à proximité du front polaire dans le domaine
subantarctique.
Les 5 îles volcaniques de l'archipel Crozet s'étendent sur 500 km² et constituent l'émergence
d'un plateau continental de 14 955 km² inclus dans la ZEE Française.
L'archipel de Kerguelen est formé d'une île principale, la Grande Terre, et plus de 300 îles et
îlots pour une surface de 6 500 km². Ces îles volcaniques sont l'émergence du plateau de
Kerguelen s'étendant sur 100 495 km² dont la majeure partie est située dans la ZEE Française.
Saint-Paul et Amsterdam, sont en domaine subtropical à proximité de la convergence du
même nom. D’origine volcanique, ces deux îles sont parmi les plus isolées de la planète.
La faune et la flore de ces îles présentent des adaptations originales, résultat de plusieurs
millions d’années d’évolution dans un isolement extrême. L’endémisme prononcé, la très
forte relation trophique entre les domaines marin et terrestre, l’isolement extrême et
l’éloignement de toutes sources de contamination font de ces îles subantarctiques des milieux
originaux sans équivalent et très largement préservées.
Les archipels de Crozet et de Kerguelen abritent les communautés d’oiseaux marins les plus
riches et diversifiées au monde (plusieurs dizaines de millions d’individus).
Les eaux côtières et les plateaux continentaux présentent une diversité spécifique
exceptionnelle et les principaux milieux marins constituent un patrimoine biologique de
premier ordre.
Valeur universelle exceptionnelle virtuelle
La candidature pourrait être envisagée au titre des critères (vii), (ix) et (x).
Critère (vii) : Les Terres australes françaises comptent de nombreux sites d’une beauté
naturelle et d’une importance esthétique exceptionnelle :
- les milieux côtiers concentrent des millions d’oiseaux et mammifère marins venant muer et
se reproduire à terre. Ces sites sont le théâtre d’une nature sauvage brute et préservé des
impacts anthropique. Les colonies d’oiseaux marins de plusieurs centaines de millier de
couples s’étendent à perte de vue.
- les nombreuses falaises côtières de plusieurs centaines de mètre de haut, battues par les
vents violents et la mer déchainées. Nombre de ces falaises abritent de vastes colonies
d’oiseaux forçant leur caractère exceptionnel.
- les Fjord de Kerguelen.
- la calotte glaciaire Cook qui couvre 400 km² de la Grande Terre de Kerguelen.
- le plateau des Tourbières à Amsterdam, vaste étendue couvertes de tourbières saturées en
eau ou les sphaignes et les hépatiques sont abondantes a une importance exceptionnelles que
ce soit pour sont esthétique ou son aspect patrimonial.
- le cratère effondré de Saint Paul accueille une mer intérieure et plusieurs dizaines de millier
d’otarie à fourrure subtropicale.
- les vastes étendues minérales ponctuées de nombreux lacs d’altitude.
37
- le golfe du Morbihan à Kerguelen, concentre plusieurs dizaines d’îles et d’îlots, agrémentés
de nombreux bras de mer intérieure et de fjords.
Critère (ix) : Occupant des points singuliers sur la planète, à des latitudes où les espaces
émergés sont rares, ces îles permettent d’établir et d’entretenir des observatoires de la planète.
Ces observatoires jouent un rôle essentiel dans le maillage établi à l’échelle du globe et
particulièrement lâche dans cette région du monde.
Le taux d’endémisme strict ou régional des faunes et des flores de ces îles est élevé,
fournissant des modèles rares et remarquables permettant l’étude de l’évolution des espèces
en milieux insulaires. Ces territoires, permettent l’étude de leurs adaptations à de sévères
contraintes environnementales (perte du vol chez plusieurs insectes par exemple), ou
l’adaptation à l’origine marine de leurs ressources alimentaires et au déséquilibre de chaînes
trophiques où dominaient les décomposeurs jusqu’à une période récente.
Par ailleurs, la relative simplicité des écosystèmes subantarctiques rend plus aisées qu’ailleurs
les recherches portant sur les interactions entre espèces et les relations espèces/milieux. Elle
rend également plus facile leur modélisation dans la perspective de leur généralisation à des
environnements plus complexes. Ces îles offrent en outre la possibilité de travailler sur un
gradient allant du subtropical (Amsterdam) au subantarctique au niveau du Front Polaire
(Kerguelen) en passant par le nord de ce front (Crozet). Cette situation est unique pour
aborder les questions relatives aux changements climatiques et leurs conséquences sur la
biodiversité et tout particulièrement pour tenter d’élucider les mécanismes à l’œuvre dans les
trois étapes clés des invasions biologiques - colonisation, établissement et dissémination - et
les interactions qu’entretiennent les espèces introduites avec les espèces autochtones.
Critère (x) : La faune et la flore de ces îles présentent des adaptations originales, résultat de
plusieurs millions d’années d’évolution dans un isolement extrême et des conditions
climatique spécifiques. Les milieux naturels terrestres, n’étant soumis qu’à de très faibles
pressions anthropiques, sont considérés comme « presque intacts ».
Les archipels de Crozet et de Kerguelen abritent les communautés d’oiseaux marins les plus
riches et diversifiées au monde. Les effectifs reproducteurs atteignent plusieurs dizaines de
millions d’individus, soient les biomasses d’oiseaux les plus importantes connues à ce jour.
Ces îles, en raison de leur origine océanique, de leur isolement extrême, de leurs
caractéristiques géologiques, des contraintes climatiques (notamment vents forts et
températures constamment basses), des habitats originaux se sont développés. Ils abritent une
flore et une faune terrestres pauci-spécifiques qui présentent des adaptations originales et un
endémisme prononcé dans certains groupes.
La proximité du front polaire couplé à l’influence du plateau continental, induit une
production primaire extrêmement élevée. Les plateaux continentaux présentent une diversité
spécifique exceptionnelle et les principaux milieux marins constituent un patrimoine
biologique de premier ordre qui n’a pratiquement pas été perturbé.
Les vastes champs d’algues brunes géantes qui frangent le pourtour des îles représentent une
biomasse considérable et constitue une zone de nurserie et de développement indispensable
pour de nombreuses espèces marines côtières et pélagiques.
L’endémisme prononcé, la très forte relation trophique entre les domaines marin et terrestre,
l’isolement extrême et l’éloignement de toutes sources de contamination font de ces îles
subantarctiques des milieux originaux sans équivalent. Elles présentent un intérêt
exceptionnel pour la conservation de la biodiversité.
Oiseaux marins
Les oiseaux qui se reproduisent sur ces îles appartiennent à 5 ordres différents:
38
-les manchots (Sphenisciformes),
-les albatros et pétrels (Procellariiformes),
-les skuas, goélands, sternes et chionis (Charadriiformes),
-les cormorans (Pelecaniformes),
-et les canards (Anseriformes).
38 espèces d’oiseaux se reproduisent à Crozet, dont 3 strictement endémiques de l’archipel
(Canard d’Eaton de Crozet, Cormoran de Crozet, Chionis de Crozet). L’île Cochon abrite la
plus vaste colonie de manchots royaux au monde (1 million de reproducteurs).
36 espèces d’oiseaux se reproduisent à Kerguelen, dont 3 strictement endémiques de
l’archipel (Canard d’Eaton de Kerguelen, Cormoran de Kerguelen, Chionis de Kerguelen).
38% de la population mondiale de grand albatros niche à Crozet et Kerguelen.
8 espèces d’oiseaux marins se reproduisent à Amsterdam, dont une espèce strictement
endémique, l’albatros d’Amsterdam. Espèce emblématique, dont la population est inférieure
à 200 individus. L’Union Internationale de Conservation de la Nature (UICN) considère cet
oiseau comme gravement menacé d’extinction, sa conservation représente actuellement un
enjeu majeur.
81% de la population mondiale d’albatros à bec jaune se reproduit dans les Terres australes
françaises (27 000 couples à Amsterdam).
12 espèces d’oiseaux marins se reproduisent à St-Paul, dont une espèce strictement
endémique, le Prion de Mac Gillivray.
Habitats et flore
Au niveau végétal, les îles australes françaises comptent 70 espèces de plantes vasculaires
indigènes dont 24 espèces endémiques à la région subantarctique.
On recense 24 plantes vasculaires à Crozet et 29 à Kerguelen (une endémique strict : Lyallia
Kerguelensis).
La végétation autochtone d’Amsterdam (26 espèces de plantes vasculaires) est d’un tout autre
type et présente des affinités biogéographiques bien différentes et variées.
On recense 4 espèces de plantes vasculaires endémiques sur Amsterdam et Saint Paul.
Les Terres australes françaises accueillent une seule espèce arboré, le Phylica arborea. Il est
endémique d’Amsterdam et l’archipel Tristan Da Cunha.
A Amsterdam, les tourbières à Sphaignes de la Caldeira et du « plateau des tourbières » sont
remarquables et particulièrement intéressantes puisque les autres îles du sud de l’Océan
Indien (Marion, Crozet, Kerguelen, Heard) en sont dépourvues. Elles semblent receler des
espèces de sphaignes encore non décrites (étude en cours).
Invertébrés
A Crozet, 90 % des invertébrés autochtones sont propres à la région subantarctique de
l’Océan Indien et 55 % ne sont présents que sur cet archipel. On y recense 23 espèces de
coléoptère endémiques.
Milieu marin
Situées à proximité du front polaire et de la convergence subtropicale, les eaux associées aux
îles sont particulièrement riches en espèces pélagiques (crustacés, calmars, poissons, etc.) et
constitue l’essentiel des ressources trophiques des oiseaux de mer et des pinnipèdes. De
nombreux cétacés y sont également présents. Crozet et Kerguelen accueillent notamment une
population de grandes baleines bleues, déclarée espèce en danger par l’IUCN. Les orques qui
s’alimentent et se reproduisent dans les eaux subantarctiques viennent chasser les jeunes
éléphants de mer et les manchots le long des côtes. Kerguelen abrite la deuxième population
39
mondiale d’éléphant de mer (après la Géorgie du Sud) ainsi que la sous espèce de Dauphin de
Commerson endémique de l’archipel.
Les eaux qui s’étendent de la côte aux grands fonds de la zone subtropicale hébergent pas
moins de 205 espèces de poissons marins dont les endémiques Bovichthys veneris et
Neomerinthe bauchotae, et celles de la zone subantarctique 125 espèces, dont Notothenia
cyanobrancha, Lepidonotothen mizops, Channichtys rhinoceratus et C. velifer, toutes
endémiques du plateau de Kerguelen. Parmi celles-ci, les deux dernières espèces font partie
du très singulier et intéressant groupe des poissons à sang incolore. Les espèces du groupe des
poissons-lanternes (Myctophidae) sont réputées constituer l’essentiel des ressources
trophiques des populations d’oiseaux et mammifères marins de ces îles. Quelques taxons tels
les mollusques, les crustacés et les échinodermes ont fait l’objet de travaux qui ont révélé la
présence d’espèces endémiques comme Halicarcinus planatus, un petit crabe de Kerguelen,
Abatus cordatus, l’oursin incubeur du même archipel, Jasus paulensis, la langouste des îles
Saint Paul et Amsterdam ou Provocator pulcher, la célèbre volute du Challenger.
Intégrité
Les milieux naturels terrestres, n’étant soumis qu’à de très faibles pressions anthropiques,
sont considérés comme « presque intacts ». L’état de conservation des habitats et des
populations est cependant variable d’une île à une autre, principalement en fonction de la
présence ou non de vertébrés introduits dont l’impact est souvent le plus visible.
D’une manière générale on peut considérer que les habitats de l’archipel de Crozet sont dans
un bon état de conservation. C’est particulièrement vrai pour les îles difficiles d’accès (île des
Pingouins, îlots des Apôtres) et rarement visitées pour lesquelles les informations sont
d’ailleurs fragmentaires mais soulignent l’absence de vertébrés et le faible nombre de plantes
et invertébrés introduits. Peu de données existent sur l’île aux Cochons et l’île de l’Est sur
lesquelles l’impact des lapins est probablement sensible. Sur l’île de la Possession un seul
vertébré, le rat noir Rattus rattus a été introduit et la majorité des plantes introduites sont
actuellement restreintes à la proximité de la base et des installations portuaires. La
dégradation des habitats de cette île, essentiellement liée aux activités humaines, passées ou
actuelles, est donc localisée (installations portuaires, base, cabanes, chemins fréquemment
utilisés). Une modification profonde des écosystèmes sur une large partie de l’archipel
Kerguelen est liée à la présence du lapin, introduit en 1874. L’impact des rennes, présents
dans toute la partie centrale de l’île principale, est également important. D’autres vertébrés
introduits, par leur impact sur les peuplements d’oiseaux (chat, rat), sur les plantes et les
invertébrés (souris) affectent aussi indirectement les habitats. Plus discrets les effets des
plantes et invertébrés introduits peuvent néanmoins constituer une menace importante pour
l’intégrité des habitats naturels (modifications du couvert végétal par les plantes introduites
envahissantes, prédation sur les invertébrés autochtones avec conséquences sur le
fonctionnement de l’écosystème,...). Comme sur l’Ile de la Possession à Crozet l’état de
conservation des plantes et des invertébrés est lié à l’état de conservation des habitats avec
deux facteurs essentiels en interaction et en cours d’évolution rapide : l’impact des espèces
introduites (plus nombreuses et plus largement distribuées à Kerguelen qu’à Crozet) et
l’impact les changements climatiques (en particulier les déficits hydriques enregistrés dans
l’est de Kerguelen depuis le début des années 1990).
Les rats et les chats ont impact important sur les populations d’oiseaux nicheur des îles sur
lesquels ils sont présents.
Sur les 34 espèces d’oiseaux marins se reproduisant sur ces îles, sept sont classées «
vulnérables », trois « en danger » et une « en danger critique d’extinction ».
40
Malgré un état de conservation encore très favorable, plusieurs menaces pèsent sur ces
territoires :
- du fait de leur insularité, la principale menace est l’impact des changements climatiques.
Ceci est le cas pour l’ensemble des îles subantarctiques.
- le cortège d’espèces végétales et animales qui ont été introduites au cours du temps constitue
également une menace importante pour le maintien des écosystèmes et des espèces indigènes.
- la plupart des espèces d’oiseaux et mammifères marins de ces territoires effectue une grande
partie de leur cycle de vie en mer, elles peuvent être soumissent à l’impact de pêcheries
légales ou illégales. Ceci est le cas pour l’ensemble des îles subantarctiques.
- les activités humaines passées (pêcheries et exploitation des oiseaux et mammifères marins)
ont eu un impact important sur certaines communautés animales.
- les activités humaines actuelles constituent un impact très limité mais peuvent toujours être
vecteur de nouvelles espèces introduites (les mesures de biosécurité actuelles permettent de
limiter ces introductions).
Note : une candidature en série avec l’Afrique du sud pourrait être envisagée.
Dispositifs de protection et système de gestion
Les limites du bien identifiés se confondent avec celles de la réserve naturelle nationale des
terres australes françaises, qui correspond à un outil de protection forte (catégorie IV de
l’UICN). La gestion est confiée à l’administration des terres australes et antarctiques
françaises.
5. Forêt amazonienne (Sud Guyane)
Auteur : Bertrand Goguillon, Parc amazonien de Guyane
Le massif forestier du sud de la Guyane couvert par le parc national crée en 2007, le Parc
amazonien de Guyane (3,4 millions d'hectares dont 2 millions en zone cœur), est représentatif
et contribue à la préservation de la biodiversité amazonienne, en faisant partie du plus vaste
bloc de forêt tropical encore intact (non fragmenté) et protégé de la planète. Il correspond
également aux bassins de vie de communautés humaines autochtones vivant en étroite
interrelation avec leur environnement.
Son territoire englobe une mosaïque d'habitats forestiers se distinguant par leur structure
géomorphologique, leurs affinités biogéographiques, leur histoire climatique… Avec ses
milieux particuliers, comme les savanes roches ou les forêts submontagnardes, la forêt sud
Guyane couverte par le Parc amazonien de Guyane offre un panel d’espèces très rares, parfois
endémiques et uniques à ses territoires, avec des enjeux de conservation au plan international.
La composante principale des paysages du Parc amazonien de Guyane est la monumentale
forêt tropicale humide, entrecoupée de grands continuums fluviaux où alternent eaux calmes
et sauts tumultueux. L’immense couvert forestier exubérant est ponctué de reliefs, dont les
plus hauts atteignent près de 850 m d’altitude. Le réseau hydrographique est très dense : l’eau
est omniprésente sur l’ensemble du territoire et fait partie du quotidien de la vie des
populations du Maroni et de l’Oyapock, pour lesquelles le fleuve est à la fois source de
nourriture, voie de communication, support des usages quotidiens ainsi que de valeurs
symboliques et sociales. Implanté sur les bassins versants amont de la quasi-totalité des
fleuves guyanais, le Parc amazonien de Guyane assume en outre la responsabilité de protéger
les sources des fleuves dans l’intérêt de l’ensemble du territoire guyanais.
Enfin, les inselbergs, remarquables sur le plan paysager, pour la richesse et la spécificité des
patrimoines naturels et archéologiques qu’ils abritent, ont joué un rôle important dans
41
l’imaginaire et dans la vie des hommes ayant occupé le territoire. Tout aussi patrimoniales,
les forêts sub-montagnardes ou encore certaines zones de flat recèlent des espèces végétales et
animales, vestiges de couverts forestiers très anciens.
Si l’extrême biodiversité des forêts tropicales est aujourd’hui de notoriété publique – 50 à 70
% des espèces animales et végétales terrestres du globe – celle du massif forestier du Parc
amazonien de Guyane constitue une véritable vitrine des richesses de la flore et de la faune
amazonienne. Loin d’être un espace uniforme, l’hétérogénéité de la géomorphologie, la
variabilité climatique relative d’une région à l’autre ainsi que la diversité et la complexité des
interactions végétaux-animaux génèrent une grande mosaïque d’habitats induisant une
biodiversité remarquable.
La richesse des espèces, toujours en cours d’inventaire en Guyane et ce quel que soit le
groupe taxonomique, peut être soulignée en quelques chiffres au niveau du Parc amazonien de
Guyane :
- On estime que le milieu forestier qui recouvre la plupart du territoire concerné par le parc
amazonien de Guyane abrite entre 4000 et 5000 espèces de plantes vasculaires, soit un
dixième de la biodiversité végétale mondiale. Avec notamment plus de 150 espèces d’arbres
pouvant se retrouver sur un même hectare (soit 10 fois plus qu’en forêt tempérée)
- En termes de faune, on y compte actuellement plus d’une centaine de mammifères, près de
450 espèces d’oiseaux, environ 200 reptiles et amphibiens, plus de 200 espèces de poissons
des criques forestières qui demeurent un milieu encore méconnu… et que dire de l’univers
des invertébrés dont l’exploration n’en est qu’à ses débuts, avec une biomasse 10 à 20 fois
supérieure à celle des vertébrés.
Ces chiffres ne sont que des valeurs très minimales et amenées à augmenter considérablement
en ce qui concerne la petite faune invertébrée (arthropodes), la flore non vasculaire (mousses,
hépatiques, lichens, champignons, algues) et les micro-organismes.
La richesse de la flore du Parc amazonien de Guyane se traduit par la présence d’arbres
géants, de lianes vertigineuses, de plantes aux inflorescences spectaculaires (telles les
orchidées). On trouve dans ces forêt un cortège d’espèces emblématiques et typiques de la
faune amazonienne : jaguar, primates, loutre géante, tapir, caïmans et boas, dendrobates
colorées, coléoptères géants, papillons morpho aux couleurs métalliques… Le massif
forestier sud de la Guyane correspond à une majeure partie de l'aire de répartition du singe
Saki stan, Chiropotes satanas, endémique d'une région très localisée au nord amazone et
extrême sud des Guyanes ; ce qui confère un rôle crucial au Parc amazonien de Guyane dans
la conservation des populations de cette espèce de primate. De même, l'étendue du territoire
protégé par le parc national permet de garantir le bon état de conservation et les équilibres de
fonctionnalité écologique de l'écosystème forestier tropical, avec des populations suffisantes
d'espèces en fin de chaines alimentaires (jaguar, aigle harpie).
Le massif forestier du sud de la Guyane comprend la majeure partie des forêts
submontagnardes de la région, correspondant à de véritables refuges forestiers par le passé.
Offrant lors de périodes climatiques plus sèches une stabilité dans l'existence de l'écosystème
forestier, ces secteurs ainsi isolés correspondant aux hauts sommets de Guyane se sont
comportés comme centre de spéciation, présentant aujourd'hui une originalité et un taux
d'endémisme notable dans la diversité biologique qui la compose. Les épiphytes et les
fougères sont particulièrement bien représentées dans ces zones, avec des espèces inféodées à
ces milieux, voire certaines présentes sur une station unique.
Dans ces massifs d'altitude, il faut souligner l'ichtyofaune, avec certaines espèces inféodées
aux têtes des cours d'eau, ne peuvent rejoindre d’autres rivières séparés physiquement. Ainsi
isolés depuis de longues périodes, elles ont dérivé génétiquement et fini par former des
espèces nouvelles. C’est pourquoi une ichtyofaune fort originale et méconnue est souvent
42
trouvée dans ces milieux. Elle est une précieuse source d’information pour expliquer le passé
de la région.
Par ailleurs, des étendues ouvertes au milieu de la forêt, les inselbergs, appelés localement «
savanes roches », constituent des milieux naturels remarquables. Les inselbergs peuvent se
présenter comme de simples dalles de granite dénudé mais ce sont le plus souvent de grands
dômes émergeant de la forêt comme des pains de sucre. Les reliefs de la chaîne des TumucHumac, dont le Mitaraka culmine à 740 m, en sont de beaux exemples. Isolés ou disposés en
« archipels » au milieu d’un océan de forêt, ils se trouvent surtout dans l'est et le sud de la
Guyane. Ces pitons granitiques se distinguent dans le paysage par leur volume et leur
végétation particulière. Ils constitueraient des reliques de l’histoire climatique récente de la
Guyane : lors du dernier épisode glaciaire (il y a plus de 11000 ans), une vaste zone de
savane et de forêt sèche reliait peut être les bassins supérieurs de l’Oyapock et du Maroni
jusqu’aux savanes intérieures du Suriname et du Brésil.
Avec le réchauffement planétaire et le retour de la forêt humide sempervirente, les espèces
des habitats plus secs (forêts basses, semi-décidues, savanes) ont trouvé refuge sur les
inselbergs. C'est ainsi qu'est expliquée la présence de plusieurs espèces typiques du littoral
guyanais sur certains inselbergs du sud de la Guyane. On y trouve un grand nombre d’espèces
animales et végétales rares, patri moniales ou endémiques. On rencontre par ailleurs sur les
inselbergs des variétés sauvages d’espèces cultivées comme des ananas (Ananas spp.), des
maniocs (Manihot spp.), des ignames (Dioscorea spp.) ou des vanilles (Vanilla spp.). Ces
plantes constituent une ressource génétique potentiellement utile en agronomie. Le territoire
du Parc amazonien de Guyane correspond à la région où la densité des inselbergs est
maximale.
Valeur universelle exceptionnelle virtuelle
Critère (viii) : Le bien correspond à un ensemble de différents faciès géomorphologiques du
bouclier du plateau des Guyanes (inselbergs et collines granitiques, hauts massifs tabulaires,
grandes plaines alluviales...). Il constitue un témoignage des évolutions géologiques
(séparation de la Pangée avec similitude en Afrique occidentale) et de processus
géomorphologiques typiques (plateaux de cuirasse latéritiques). Les chaînes de massifs
submontagnards de forêt à nuages constituent des refuges forestiers, une zone de spéciation et
d'endémisme, un archipel d'affleurement granitique présentant également des sites d'isolation
spécifique.
Critère (ix) : Le bien correspond à une vaste aire de plusieurs millions d'hectares
représentative des processus fondamentaux au maintien des écosystèmes amazoniens et de
leur diversité biologique.
Critère (x) : La biodiversité est remarquable, représentative de la grande faune amazonienne
(primates, félins, ongulés…). Il faut souligner la présence d'espèces rares, endémiques (flore)
et emblématiques (Saki satan). La naturalité du site est exceptionnelle, avec une fréquentation
quasi nulle sur la majeure partie du territoire.
La zone cœur et l’aire d’adhésion ont fait l’objet d’une analyse séparée dans l’étude
d’irremplaçabilité des aires protégées, qui souligne que le parc national ne figure pas dans les
100 premiers sites mais chacune de ses zones constitutives est relativement bien positionnée
dans le classement final: la zone cœur est classée 387ème pour l’ensemble des espèces, et
représente une aire importante à l’échelle mondiale pour 17 espèces d’amphibiens et 5
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espèces d’oiseaux, tandis que l’aire d’adhésion est classée en 414ème position. Le site est
également identifié dans plusieurs priorités internationales : il faut partie des aires
amazoniennes de naturalité à haute biodiversité (Amazonia High Biodiversity Wilderness
Area) et est inclus dans une Aire importante pour les oiseaux (GF011). Ces résultats
permettent de justifier le choix du critère (x).
Une candidature pourrait être envisagée comme bien mixte (histoire et systèmes de
connaissances traditionnelles des communautés autochtones).
Intégrité
Le périmètre indicatif du bien pourrait être constitué par la zone tampon du parc amazonien
de Guyane, qui s’étend sur une superficie totale de 3,4 millions d’hectares, en propriété
domaniale. La candidature pourrait être envisagée avec le Parc national des Tumucumaques
(Brésil - Amapa/Para).
La forêt amazonienne de Guyane française (zone sud) constitue avec la partie nord du bassin
amazonien au Brésil le plus grand bloc de forêt tropicale intacte (non fragmenté) au monde et
le plus vaste espace forestier protégé au plan international.
Les principales menaces sont l’orpaillage illégal sur la bordure nord du massif considéré qui
impacte en cumul une douzaine de milliers d'hectares sur 20 ans.
Dispositifs de protection et système de gestion
Statut de protection
Parc amazonien de
Guyane
Zone de droits
d'usages
UICN Type
II, V Réglementaire
Réglementaire
Foncier public
Description
Statut de Parc national, créé en 2007
Existence de zones reconnues pour
l'exclusité d'usages au profit des
communautés tirant leur subistance des
produits de la forêt et du fleuve
La totalité des milieux naturels terrestres
appartient au domaine public, domaine
forestier domanial de l'Etat (inaliénable).
Deux millions d'hectares (60%) sont situés en zone cœur de Parc national, statut de plus forte
protection réglementaire. La nature publique du foncier apporte une garantie à long terme de
la pérennité des espaces naturels dans la zone de libre adhésion du parc national, cette
dernière (1,4 ha) est couverte dans sa gestion par le document de Charte du parc approuvée en
Conseil d'Etat courant octobre 2013.
Les principales structures de gestion du site sont le Parc amazonien de Guyane, les
Communes, l’Office National des Forêts et les autorités coutumières des communautés. Le
système de gestion pourrait s’appuyer sur les documents de planification suivants : Charte du
Parc national, plans d'aménagement forestier en cours d'élaboration et le Schéma
départemental d'Orientations Minières.
Eléments d’analyse comparative
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La forêt amazonienne de Guyane peut être comparée avec le parc national Rio Abiseo au
Pérou, et le Parc national des Tumucumaques, contigü au Parc amazonien de Guyane, et qui
présente en partie les mêmes milieux et biodiversités associées.
Il n’existe pas de sites similaires par ses milieux et son ampleur (superficie) dans l'outre-mer
européen. La situation du site à un carrefour d'influence biogéographique, entre affinité
amazonienne et plateau des Guyanes, fait la richesse et l'originalité uniques de la composition
floristique et faunistique du massif forestier du Parc amazonien de Guyane.
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