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DIFFICULTÉS EN FRANÇAIS LANGUE ÉTRANGÈRE
LE VERBE ALLER ET LES TERMINAISONS EN IC / IQUE
LES MÉTAMORPHOSES DU VERBE ALLER
Le verbe aller a une conjugaison difficile (trois radicaux : all-, ir-, v-), il peut être utilisé
comme verbe, comme semi-auxiliaire et comme interjection. De plus, il peut être remplacé
par le verbe être et la distinction entre aller et venir pose parfois problème.
ORIGINE ET EMPLOI DU VERBE ALLER
« Le curieux mélange de trois radicaux différents dans la conjugaison de ce verbe (par ex :
vais, allons, irai) s’explique par la conjugaison de trois verbes distincts, dès l’époque
classique : ambulare, ire, vadere. Si la filiation est évidente pour les formes françaises
dérivant de ire (j’irai, j’irais, etc.) et de vadere (tu vas, ils vont, etc.) il reste à expliquer le
passage d’ambulare à « allons, allez », etc. Ces formes viennent en réalité de alare qui est une
forme raccourcie d’ambulare (marcher au pas), raccourci qui est dû à l’influence sur le verbe,
des commandements militaires, ordres brefs et criés de telle façon qu’on ne perçoit plus que
les syllabes accentuées. Ambulate ! (en avant, marche !) est ainsi devenu « alate ! » formant
de ambulare un nouvel infinitif alare. »1
Aller peut s’utiliser comme verbe de mouvement, comme semi-auxiliaire devant un infinitif
(pour former le futur proche) et aussi comme interjection :
- Cet été, j’irai en Grèce (verbe de mouvement).
- On ferait mieux de rentrer, il va pleuvoir (futur proche).
- Allez ! Arrête un peu (interjection).
Lorsqu’il s’agit d’un verbe de mouvement, le verbe aller peut être remplacé par le verbe être.
1 Mathieu-Rosay, J. : Dictionnaire étymologique. Marabout, 1983.
2
ALLER ET ÊTRE
Tu es déjà allé en Grèce ? Oui, j’ai été à Athènes.
Le verbe aller serait tout à fait possible : Oui, je suis allé à Athènes. Le verbe être peut
remplacer le verbe aller, mais uniquement au passé (en général le passé composé) et avec un
complément de lieu. L’emploi du verbe être pour le verbe aller n’est pas possible au présent
ni au futur (le sens serait différent). A un autre temps du passé, comme l’imparfait, les
énoncés n’auraient pas non plus le même sens : J’étais à Athènes (je me trouvais à Athènes) /
J’allais à Athènes (j’étais en train d’aller à Athènes). Mais l’emploi du verbe être est
éventuellement possible au conditionnel passé : Si j’avais eu le temps, j’aurais bien été (serais
bien allé) à Athènes. Ainsi qu’au plus-que-parfait, particulièrement au discours rapporté au
passé :
Avant d’aller au théâtre, on avait été (était allés) au restaurant.
« J’ai été à Athènes. » Il m’a dit qu’il avait été (était allé) à Athènes.
Certains dictionnaires notent une différence de sens, une nuance sémantique 2 :
- Il est allé à Athènes (il n’est pas encore revenu).
- Il a été à Athènes (il en est revenu).
Cette distinction n’est possible qu’aux troisièmes personnes. Aux autres personnes, le sens
serait le même : Es-tu allé à Rome / As-tu été à Rome ?
D’autres considèrent que l’emploi du verbe être implique un séjour (j’ai été à Athènes : je suis
resté, j’ai séjourné à Athènes) alors que le verbe aller peut n’exprimer qu’un court passage (je
suis allé à Athènes : j’ai traversé Athènes, je suis passé par Athènes, j’ai visité Athènes). 3
Une différence stylistique ?
Quoi qu’il en soit, la distinction est plutôt stylistique. L’emploi du verbe être appartient plutôt
au français oral et celui du verbe aller au français standard. Ce qui se remarque
particulièrement lorsqu’un infinitif remplace le complément de lieu : Hier soir, je suis allé
voir un film. Hier soir, j’ai été voir un film (français familier). Toujours dans le registre du
français oral, familier, être remplace parfois obligatoirement aller aux temps composés
lorsque ce dernier est pris dans un sens figuré.
2 Comme le dictionnaire de l’Académie.
3 Un autre verbe peut aussi être utilisé, le verbe faire (avec le sens de visiter et uniquement au passé composé) :
Tu as fait la Grèce ? (Tu es allé en Grèce ? / Tu as été en Grèce ?). Mais avec certaines « destinations », ce
verbe peut aussi signifier participer à une guerre : faire l’Indochine, faire l’Algérie, faire le Vietnam.
3
Salut, Fabio, ça va ? Je viens de passer un examen. Et ça a été (ç’a été) ? 4
Cependant, en littérature classique, l’emploi du verbe être est tout à fait correct, comme le
montrent ces quelques exemples5 :
Je fus retrouver mon janséniste (Pascal). J’ai été à Rueil voir un malade (Molière). Mais
bientôt, je laissai la bonne compagnie et fus me promener seul dans la foire (Rousseau).
On avait été cherché un pâtissier à Yvelot (Flaubert).
C’est l’inverse lorsque le verbe être remplace le verbe aller au passé simple dans l’expression
s’en aller : Il s’en fut est considéré comme plus littéraire que il s’en alla.
Une autre difficulté avec le verbe aller réside dans la confusion avec le verbe venir.
ALLER OU VENIR ?
L’emploi de « aller à, en, dans » et de « venir de, du, des » ne pose pas de problème. Aller
indique la direction et venir la provenance, l’origine : Fabio va à la bibliothèque (direction), il
vient d’Italie (origine). Mais le verbe venir peut aussi être suivi d’une préposition qui indique
une direction (à, en, chez, dans, etc.).
Fabio vient souvent travailler dans cette bibliothèque.
Fabio va souvent travailler dans cette bibliothèque.
Les deux phrases sont possibles, mais l’emploi du verbe aller ou venir dépend du contexte.
- Aller exprime un mouvement à partir du lieu l’on est vers un autre lieu : Je suis
chez moi ; dans cinq minutes, je vais à la bibliothèque.
- Venir indique un mouvement en direction de l’endroit l’on est : Je suis depuis deux
heures dans un café. Je viens souvent dans ce café.
S’il s’agit de la réponse à une question posée avec le verbe venir, les deux verbes (aller et
venir) sont possibles.
Je serai à Paris pour un mois. Tu viendras me rendre visite ? Oui, je viendrai / j’irai te
rendre visite.
Mais lorsqu’il s’agit de recommencer une action, le verbe aller n’est plus possible, il faut le
verbe retourner :
Je sors faire une course, je reviens dans un quart d’heure.
4 « C’est allé ? » serait impossible.
5 Cf. La nuance, dictionnaire des subtilités du français. A. Duchesne et Th. Leguay, Larousse, 1994, p. 35.
4
J’ai oublié mon téléphone portable au bureau, je retourne le chercher.
Aller et venir, verbes d’accompagnement
Quand aller et venir ont le sens d’accompagner, la distinction ne dépend plus de l’endroit
l’on est mais de la présence ou non des personnes qu’on accompagne.
- Venir est utilisé lorsqu’il s’agit d’accompagner un ou des interlocuteurs.
Nous allons au café. Vous venez avec nous ?
Je vais voir une exposition. Tu peux venir (avec moi) si tu veux.
Ça ne te gêne pas si je viens avec toi ?
- Aller est utilisé s’il s’agit d’accompagner quelqu’un (une ou plusieurs personnes) qui
ne sont pas des interlocuteurs.
Pierre et Luc partent au bord de la mer. J’ai envie d’aller avec eux.
Ton frère va faire les courses. Va avec lui, tu pourras l’aider à porter les sacs.
Dans le cas de réponse à une question portant sur l’accompagnement, Je viens est une phrase
possible, mais pas Je vais, il faut J’y vais 6.
Tu viens avec moi au cinéma ? D’accord, je viens.
Tu vas avec elle au cinéma ? Oui, j’y vais.
Au style indirect, lorsque les pronoms changent, venir peut devenir aller :
« Tu veux venir au cinéma avec moi ? » demande Audrey à Lucie. Audrey a demandé à
Lucie si elle voulait aller (venir) au cinéma avec elle.
Ces difficultés liées au verbe aller n’affectent pas que les étrangers s’il faut en croire la phrase
prêtée au grammairien Vaugelas sur son lit de mort (1650) : « Mes amis, je m’en vais ou je
m’en vas, l’un et l’autre se dit ou se disent »7. Voilà au moins une question (je vais ou je
vas ?) que les étudiants étrangers n’ont plus à se poser. La langue, ça va, ça vient, allez !
6 « J’y viens » est grammaticalement possible, mais le sens est différent : J’y arrive, je vais en parler. Vous
n’avez pas abordé la question. – J’y viens.
7 En français du XVIIème siècle, la forme je vas était jugée préférable à je vais (considérée comme provinciale
ou populaire).
5
LES TERMINAISONS EN IC OU IQUE ?
Certains mots qui se terminent par [ik] peuvent causer des hésitations lorsqu’il s’agit de les
écrire : « ic » ou « ique » ? La distinction entre finale masculine (ic) et finale féminine (ique)
proposée par quelques manuels de français langue étrangère (public / publique, laïc / laïque)
n’est pas suffisante pour traiter le problème.
LES VERBES
Lorsqu’il s’agit d’une terminaison verbale il n’y a pas d’hésitation possible : iquer (astiquer,
piquer, pratiquer, polémiquer, répliquer, revendiquer, etc.).
Elle pratique la natation.
S’il polémique avec toi, ne réplique pas !
LES NOMS
Les noms masculin en [ik] ne s’écrivent pas tous ic, mais tous les noms 8 qui se terminent en
ic sont masculins : l’alambic, l’arsenic, l’aspic, le basilic, le bric à brac, le chic, le cric, le
déclic, le diagnostic, le flic, le fric, le laïc, le loustic, le mastic, le lombric, le pic, le plastic
(l’explosif), le porc-épic, le pronostic, le public, le tic, le trafic, etc.
L’arsenic est un poison souvent utilisé dans les romans d’Agatha Christie.
La police a démantelé un réseau spécialisé dans le trafic de drogue.
Les noms qui se terminent par -ique sont souvent féminins : l’Afrique, la boutique,
l’électronique, la fabrique, la gymnastique, l’informatique, la linguistique, la logique, les
mathématiques (féminin pluriel), la musique, la physique, la plastique, la pratique, la
rhétorique, etc.
Pierre étudie la logique et les mathématiques à l’université.
Pour se détendre, il écoute de la musique ou fait de la gymnastique.
Ils peuvent, hélas, aussi être masculins : le cantique, l’élastique, le lexique, le moustique, le
Mexique, le Mozambique, le panégyrique, le pique-nique, le plastique, le portique, le
téléphérique, le tropique, le viatique, etc.
8 A l’exception de l’anglicisme aérobic (féminin)
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