les coopératives et les mutuelles canadiennes en développement

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Les coopératives
et les mutuelles
canadiennes en
développement
international Créer de la richesse,
réduire la pauvreté
et construire
un monde meilleur
Préface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
Sommaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
Qu’est-ce qu’une coopérative ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
L’avantage coopératif en développement international
Créer et partager la richesse pour réduire la pauvreté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
L’intercoopération avant tout . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
Une réponse adaptée à la demande . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
Des entreprises résilientes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
Des écoles de démocratie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
11
Un modèle d’affaires inclusif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
Leaders dans l’innovation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
Un appui de taille aux entrepreneurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
Construire la paix. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
Tout n’est pas parfait. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
Les coopératives et les mutuelles canadiennes en développement international
Le caractère unique des coopératives et mutuelles canadiennes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Les coopératives et les mutuelles canadiennes :
une contribution majeure au développement international. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
Présentation des organisations auteures de cet ouvrage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
Préface
Il n’existe pas de recette simple pour combattre
la pauvreté et créer de la richesse.
Certaines des réponses à ces immenses défis
devraient nous apparaître à la suite d’un examen
approfondi des systèmes financier et commercial
internationaux. D’autres devraient plutôt être liées
aux initiatives réglementaires des gouvernements,
et ce, à tous les niveaux. D’autres enfin devraient
venir des communautés locales et des individus, des
villages marginalisés et des bidonvilles urbains qui
sont malheureusement trop répandus à travers le
monde, et tout particulièrement dans les pays en
développement.
Au lendemain des bouleversements financiers qui
ont secoué l’économie mondiale en 2008 et en
cette Année internationale des coopératives, le
moment semble propice pour redécouvrir l’un des
secrets les mieux gardés du monde économique, qui
constitue une réponse particulièrement pertinente et
appropriée au problème de la pauvreté dans les pays
en développement : l’approche coopérative et son
étonnant pouvoir.
L’essence de l’approche coopérative est d’une simplicité
désarmante : accroître le pouvoir des individus et
des communautés afin qu’ils puissent prendre en
charge leur propre développement par l’entremise
d’entreprises dont ils sont les propriétaires et les
décideurs. Cette approche, si on lui donne les moyens
de prendre sa place et de s’épanouir, peut connaître
un succès remarquable en créant de la richesse
économique tout en appuyant la vitalité culturelle,
en encourageant des pratiques démocratiques et en
réduisant la pauvreté.
Il n’est pas surprenant que la production de cet
ouvrage se soit appuyée sur la coopération. Trois
des plus importantes organisations œuvrant à la
promotion des coopératives à l’échelle canadienne
et internationale ont joint leur efforts pour ce faire :
Développement international Desjardins (DID),
SOCODEVI et l’Association des coopératives du Canada
(ACC). Ces organisations doivent leur existence à
la vision et à l’esprit coopératifs qui animent nos
membres d’un bout à l’autre du pays. Et elles doivent
leur succès à la force des partenariats coopératifs
sur lesquels elles s’appuient, dont vous retrouverez
plusieurs exemples dans les pages qui suivent. Nous
sommes très fiers également de la longue et bénéfique
relation qui nous lie à l’Agence canadienne de
développement international (ACDI), active depuis plus
de 40 ans dans l’appui au développement du secteur
coopératif dans les pays en développement.
Avec cet ouvrage, nous souhaitons contribuer à la
reconnaissance, à la visibilité et à l’avancement du
mouvement coopératif – au Canada et partout dans
le monde. Ensemble, nous nous appuyons sur la force
du mouvement coopératif canadien pour participer
à la création et au renforcement de coopératives
dans les pays en développement et en émergence,
avec l’objectif ultime de contribuer à l’autonomie
des communautés et à leur développement
socio-économique.
Anne Gaboury
Réjean Lantagne
Jo-Anne Ferguson
Présidente-directrice générale
Directeur général
Directrice principale Développement international
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international
2
Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
Sommaire
Les entreprises coopératives créent de la
richesse et contribuent à son partage équitable
dans leur milieu. Dirigées par des leaders élus
démocratiquement, elles existent pour répondre
à des besoins réels et clairement exprimés par
leurs membres dans les pays où elles opèrent.
Elles permettent à des millions d’individus
d’avoir accès à des services fondamentaux et
essentiels au maintien de la vie.
Les coopératives existent parce que des individus
croient qu’il est possible de construire des sociétés
plus prospères, plus justes, plus inclusives et plus
adaptées aux aspirations des être humains en
favorisant la collaboration plutôt que la compétition.
Les coopératives sont des entreprises qui valorisent
une saine émulation, le partage des bonnes idées,
la solidarité en cas de crise. Les coopératives sont
constamment à la recherche de nouvelles réponses
pour satisfaire les demandes de leurs membres et de
leur milieu.
Les coopératives sont des entreprises résilientes. Elles
résistent aux crises et traversent l’épreuve du temps
beaucoup mieux que les autres entreprises privées.
Elles sont moins présentes dans les médias financiers
parce qu’elles ne sont pas cotées à la bourse, mais elles
ne sont pas moins présentes et actives dans l’économie
de plusieurs pays. Les 300 plus grosses coopératives
du monde ont un chiffre d’affaires total de plus
1 600 milliards de dollars canadiens.
Elles constituent de véritables écoles de gestion
et de gouvernance pour des millions d’individus
qui apprennent à diriger une entreprise de façon
démocratique en poursuivant des objectifs de
transparence et de développement durable. Ouvertes
à tous ceux et celles qui partagent les objectifs et les
valeurs de la coopération, les coopératives permettent
à des personnes exclues des circuits formels de
l’économie de s’y insérer et d’y contribuer dignement.
Les coopératives sont innovantes. Elles sont capables
d’offrir à leurs membres des technologies ainsi que
des produits et services innovateurs qui contribuent
A u Canada, nous possédons
une riche histoire coopérative dont nous
avons toutes les raisons d’être fiers.
à accroître leur rendement, leurs revenus et leur
capacité de résister aux crises personnelles et aux
crises naturelles. Les coopératives, en travaillant
ensemble, sont en mesure de partager entre elles
les solutions les plus appropriées pour répondre aux
besoins de leurs membres, mais aussi pour accroître
leur propre performance.
Des millions de membres de coopératives sont en fait
des entrepreneurs, petits ou grands producteurs
agricoles, commerçants, producteurs forestiers,
artisans. Ces chefs d’entreprises peuvent compter
sur les services financiers, les autres produits et
services ainsi que les conseils en production de
leur coopérative pour améliorer le rendement et
la performance de leur propre entreprise et créer
davantage de richesse dans leur milieu.
Les facteurs clés de succès des coopératives sont
aujourd’hui bien connus. Au Canada, nous possédons
une riche histoire coopérative et une large expérience
dans la transmission des meilleures pratiques en
développement coopératif dont nous avons toutes les
raisons d’être fiers.
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
3
Qu’est-ce qu’une
cOopérative ?
Une coopérative est une association autonome de
personnes volontairement réunies pour satisfaire
leurs aspirations et besoins économiques,
sociaux et culturels grâce à une entreprise
gérée démocratiquement et dont ils sont
les propriétaires.
Les premières coopératives modernes sont apparues
au début du 19e siècle en Europe, alors en pleine crise.
Leurs leaders voulaient freiner l’appauvrissement de
la population provoqué par la révolution industrielle
et la disparition d’une multitude de métiers. Ils
luttaient contre les pires formes d’exploitation de
la main d’œuvre, souvent très jeune. S’appuyant sur
l’idée que le capital humain doit dominer le capital
financier et que l’économie doit servir les gens et non
le contraire, ils ont mis sur pied des coopératives de
consommation, de producteurs, de travailleurs, de
services financiers qui depuis n’ont cessé d’innover et
d’offrir des services répondant aux besoins de leurs
membres, de telle sorte que ces coopératives sont
toujours en place.
L’évolution des êtres humains a été possible dès qu’ils ont
réussi à coopérer. Les civilisations où la coopération a été la plus
Les coopératives occupent une
place de première importance
avancée ont pu évoluer plus rapidement et ont pu mieux faire face
aux défis internes et externes.
dans l’économie mondiale.
Les coopératives sont présentes dans tous les secteurs
de l’économie : gestion et exploitation forestière,
production et transformation agricole, génération
et distribution de l’électricité, communications
et téléphonie, consommation, transformation
industrielle, ainsi que dans les services de santé,
financiers, d’éducation, d’habitation et funéraires.
En fait, elles sont actives et rayonnantes là où
s’expriment les besoins de leurs membres.
Dans le secteur agricole, par exemple, les coopératives
jouent un rôle prépondérant dans la production
alimentaire dans presque tous les pays. En Corée
et au Japon, 90 % des agriculteurs sont membres
d’une coopérative agricole. En France, 40 % de la
production agricole transite par une coopérative et
60 % des services financiers de détail sont offerts par
ce type d’entreprise. À l’échelle mondiale, 35 % de la
production de sirop d’érable provient de coopératives
québécoises. Le tiers des Canadiens sont membres
d’une caisse populaire ou d’une Credit Union.
Ensemble, les caisses et autres coopératives
canadiennes cumulent un actif de quelque
370 milliards de dollars.
Les coopératives occupent une place de première
importance dans l’économie mondiale. Plus d’un
milliard d’individus sont membres d’une coopérative.
Cent millions d’hommes et de femmes travaillent dans
une coopérative, soit 20 % de plus que dans toutes les
multinationales du monde. À l’échelle planétaire, la
présence des coopératives est devenue incontournable
et constitue une assise économique essentielle.
Bien que les coopératives prennent plusieurs formes,
elles suivent les mêmes sept principes coopératifs
partout dans le monde : adhésion volontaire et
ouverture à tous, démocratie exercée par les membres,
participation économique des membres, autonomie
et indépendance, éducation, intercoopération et
engagement dans la communauté.
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
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L’avantage coopératif
en développement
International
CC
oopératives
réer et partager la richesse
pour réduire la pauvreté
Toute personne aspire à vivre dignement et
en sécurité. Un certain niveau de richesse est
nécessaire pour créer et maintenir un milieu
de vie propice à l’émancipation individuelle
et collective.
Les coopératives contribuent à créer cette richesse.
En regroupant les actifs, le pouvoir d’achat et les
compétences de leurs membres, les coopératives
réussissent à accroître la valeur ajoutée de la
production individuelle, diminuent les coûts de
transport, améliorent la diversité et la qualité des
produits et services disponibles dans un milieu, en plus
de créer des emplois permanents. Bien organisées,
les coopératives repoussent les limites de l’efficacité
économique en contribuant à hausser la production,
et ce, de façon responsable.
M. Trang Nguyen
possède une parcelle de terre
de 0,5 hectare dans le Delta du Mékong au Vietnam. Travaillant, il a
un excellent rendement avec sa production de riz, mais sa terre étant
trop petite, cela ne suffit pas à nourrir, éduquer et soigner ses deux
enfants. L’arrivée de la coopérative laitière Evergrowth dans sa localité
lui a permis d’obtenir un prêt pour acheter une première vache.
Celle-ci a été inséminée grâce au service de la coopérative.
Après la mise-bas, il a pu vendre le lait de cette vache à la coopérative
et pour la première fois de sa vie, il a commencé à avoir un revenu
régulier à chaque semaine. Une partie de ces revenus a été réinvestie
dans la production laitière, et le reste a servi à reconstruire sa maison.
Cinq ans plus tard, il possède quatre vaches en lactation. Il n’est plus
pauvre. Ses enfants peuvent aspirer à joindre la classe moyenne dans
son pays. Il est l’un des 1 223 membres de la coopérative.
Mais les coopératives permettent bien plus. Elles
deviennent un instrument économique entre les
mains d’individus qui apprennent à devenir maîtres
de leur destinée. Les coopératives diminuent
l’isolement, contribuent à accroître la cohésion
sociale en impliquant de manière dynamique tous les
acteurs d’un milieu donné pour qu’ils puissent choisir
ensemble comment orienter leur développement.
La création d’une coopérative est un processus inclusif
qui contribue à diminuer les causes principales de
la pauvreté.
Le succès des coopératives ne peut exister sans le
succès de leurs membres. En partageant les excédents
entre les membres au prorata de leur engagement
au sein de leur coopérative, celle-ci fait profiter un
grand nombre d’individus de la richesse créée. De
plus, le succès d’une coopérative rayonne au-delà
des membres pour s’étendre à toute la communauté,
dans laquelle la coopérative s’engage à investir dans la
perspective de construire un monde plus juste.
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
7
CL’
oopératives et mutuelles intercoopération avant tout
En Afrique de l’Ouest, six grands réseaux
coopératifs financiers opérant au Bénin, au Burkina Faso, au
Mali, au Sénégal et au Togo se sont réunis en 2007 au sein de la
Confédération des institutions financières (CIF). La CIF est née de la
nécessité de se regrouper face à des préoccupations communes :
Dans un monde qui attache beaucoup
d’importance à la réussite individuelle et à
la performance, on pourrait croire que les
personnes et les entreprises qui réussissent
le mieux privilégient la compétition plutôt
que la coopération. Depuis plus de 250 ans,
les coopératives et les mutuelles ont toutefois
prouvé le contraire. On gagne à travailler
ensemble et à joindre efforts et ressources pour
répondre aux aspirations des gens.
croissance, innovation, partage d’expertise, etc. Les quelque 500
caisses membres de la CIF offrent des services financiers complets
à plus de trois millions de membres, dont le tiers sont des femmes.
Ensemble, elles représentent plus de 70 % du marché de la
microfinance dans leur zone d’intervention.
La CIF et ses six réseaux affiliés sont également membres du réseau
international Proxfin, qui regroupe des institutions de microfinance
désireuses de mettre en commun leurs meilleures pratiques et
La solidarité et l’intercoopération figurent en tête
des principes qui guident l’action des coopératives
et font d’elles des entreprises différentes et plus
performantes. L’intercoopération permet de réaliser
des économies d’échelle, d’atteindre une meilleure
maîtrise de la complexité des processus et des
marchés, d’investir dans des projets de recherche et
développement plus ambitieux, de réduire les risques
et de conquérir de nouveaux marchés. En mettant en
commun leurs connaissances, leurs compétences, leurs
ressources financières, leurs liens avec les fournisseurs
et les clients ainsi que leurs contacts avec les
décideurs, les coopératives et mutuelles augmentent
considérablement leur performance et leur capacité
de mieux servir leurs membres.
de contribuer ainsi à une plus grande inclusion financière
Les entreprises coopératives se regroupent
généralement en réseaux. Ces réseaux permettent
de centraliser et d’optimiser certaines fonctions, tout
en laissant une grande autonomie aux entités de
base. Grâce aux réseaux, les coopératives mettent
en commun leurs ressources, standardisent leurs
systèmes, normes et produits, misent sur la solidarité
contractuelle et établissent des règles de gouvernance
visant à préserver une bonne représentation
démocratique. Les réseaux valorisent le partage,
l’émulation et l’innovation. Les meilleures idées font
plus facilement leur chemin. Les bons coups sont
plus largement reconnus et imités. Les impacts de
développement sont maximisés.
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international
8
Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
à l’échelle de la planète.
CU
oopératives
ne réponse adaptée
à la demande
Les coopératives existent par et pour leurs
membres. Elles visent d’abord et avant tout à
répondre à la demande exprimée par ceux-ci.
Elles y parviennent en proposant des produits et
services de qualité, comparables ou supérieurs à
ceux des autres entreprises, tout en maintenant
un juste prix. Ces produits et services permettent
d’améliorer le sort des membres, de créer de
la richesse et de contribuer au développement
durable du milieu.
Les coopératives sont en mesure d’offrir des produits
et services extrêmement diversifiés et surtout adaptés
aux spécificités des membres d’un milieu donné, et
ce, même si ces produits et services ne génèrent pas
de trop-perçus immédiats ou importants. En s’ouvrant
à une clientèle diversifiée, les coopératives sont des
intermédiaires sociaux de première importance : les
activités qu’elles réalisent auprès de la portion mieux
nantie de la population leur permettent de dégager
des bénéfices qui leur permettent d’offrir des services
de qualité aux moins nantis.
Ancrées dans les réalités locales
Mieux ancrées dans les réalités locales et régionales,
les coopératives sont à même de s’ajuster rapidement
pour innover en proposant une offre répondant aux
priorités et aux exigences locales, qu’il s’agisse des
types d’intrants agricoles ou du moment où ceux-ci
sont mis en disponibilité, ou de la configuration des
politiques d’épargne et de crédit pour répondre aux
contraintes spécifiques auxquelles les entrepreneurs
sont confrontés. Il n’existe pas deux individus
identiques. Chacun est important. Les coopératives et
les mutuelles l’ont compris et en tiennent compte tous
les jours.
L’un des impacts de cette adaptation aux besoins des
membres est la sécurité alimentaire. En effet, dans
les pays en développement, la pauvreté est souvent
concentrée dans les zones rurales et la subsistance
de la plupart des populations qui y vivent dépend
de l’agriculture vivrière et de rente. En répondant
adéquatement aux besoins de ces populations,
les coopératives rurales et agricoles jouent un
En Bolivie, dans le département de Chuquisaca, une
proportion importante de la population rurale n’avait auparavant
pas accès à des protéines animales et affichait donc des carences
alimentaires. La centrale de coopératives AGROCENTRAL a mis en
place des installations qui permettent de mettre à profit les surplus
de maïs pour la production animale et de les convertir ainsi en œufs,
en chair de poulet et en viande porcine. Cette initiative a permis de
stabiliser le prix du maïs pour tous les producteurs agricoles tout en
permettant de diversifier l’offre d’aliments pour la population rurale.
rôle central dans la production et la distribution
alimentaires, aidant les communautés locales à
mieux gérer et s’approprier leurs ressources agricoles
et contribuant directement à la sécurité alimentaire
dans les communautés touchées. Les coopératives y
parviennent notamment en impliquant les femmes,
responsables de près de 80 % de la production
alimentaire dans ces pays.1
1Selon certaines études, si on réduit les inégalités
structurelles entre les sexes, on peut augmenter les
rendements agricoles de plus de 20 % sur le continent
africain, UNIFEM (United Nations Development Fund
for Women)
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
9
CD
oopératives
es entreprises résilientes
Au cours de l’histoire, les coopératives ont
maintes fois démontré leur résilience. Les
coopératives ont traversé des guerres, les
grandes crises économiques, des révolutions.
Elles n’ont cessé de confondre les sceptiques au
sujet de leur pertinence, que confirme l’espace
qu’elles occupent aujourd’hui. Sans trop faire
de bruit, les coopératives continuent, malgré
les difficultés qu’elles rencontrent, d’occuper de
plus en plus de secteurs de l’économie du Nord
comme du Sud.
Plusieurs études démontrent la résilience des
coopératives. Une étude menée au Québec en 20082
a constaté que le taux de survie des coopératives est
de 62 % après cinq ans et de 35 % au bout de dix ans,
comparativement à 44,3 % et 19,5 % pour les autres
entreprises québécoises du secteur privé.
En 2009, l’Organisation internationale du Travail a
démontré que les entreprises coopératives survivaient
et performaient mieux que la plupart des autres
organisations en temps de crise et qu’elles affichaient
un taux de survie plus élevé.3 En 2011, une étude du
Mouvement Desjardins a confirmé ce constat, notant
que les entreprises coopératives s’en sont mieux sorties
que les entreprises traditionnelles durant la crise
économique mondiale de 2008 et 2009.4
En janvier 2010, les Haïtiens ont été frappés par
un tremblement de terre dévastateur. Les coopératives de crédit
d’Haïti, regroupées au sein de la Fédération Le Levier, ont pu se
soutenir mutuellement et surmonter ainsi cette tragédie en plus de
jouer un rôle clé dans la reconstruction du pays. Les coopératives
épargnées par le séisme ont mis leurs liquidités au service des caisses
affectées. Elles ont également mis en commun leurs ressources et
investi dans la technologie, ouvrant la voie à de nouveaux services
innovateurs comme la carte à puce, la biométrie, les transactions
inter-institutionnelles et les transferts de fonds internationaux.
Malgré la tourmente, les caisses haïtiennes ont su conserver la
confiance de leurs membres et ont continué de répondre à leurs
besoins. Aujourd›hui, la Fédération Le Levier affiche un actif et un
rendement à la hausse par rapport à 2008, et ce,
malgré le ­tremblement de terre.
Dans le secteur financier, les coopératives ont non
seulement mieux résisté que les banques privées à la
crise financière de 2008-2009, mais elles ont même
enregistré une hausse de leur membership, de leur
actif et de leur volume d’épargne et de crédit (alors
que ces variables étaient en décroissance chez les
banques), et ce, partout à l’échelle de la planète.
Plusieurs facteurs inhérents au mode de
fonctionnement des coopératives peuvent expliquer
cette résilience :
• Les pratiques rigoureuses des coopératives et leur
ancrage communautaire agissent comme des
garde-fous contre les dérives, les risques et les
pratiques trop agressives ;
2Étude réalisée en 2008 par le ministère québécois du
Développement économique, de l’Innovation et de
l’exportation (MDEIE)
3 « Resilience of the Cooperative Business Model in Times
of Crisis », étude réalisée par l’Organisation internationale
du travail en 2009
4 Perspective, revue d’analyse économique produite par
Desjardins, volume 21, automne 2011
• Les coopératives utilisent le capital de leurs
membres d’abord : elles sont donc moins tolérantes
au risque tout en affichant une dépendance plus
faible à l’utilisation de ressources externes ;
• Les excédents des coopératives sont avant tout
réinvestis à même l’organisation ainsi que dans
la communauté ;
• La gouvernance des coopératives est exercée par
leurs membres, qui sont ainsi tenus de rendre des
comptes à leurs pairs.
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international
10
Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
CD
oopératives
es écoles de démocratie
Les coopératives sont des organisations
démocratiques dirigées par leurs membres,
qui participent activement aux processus de
décision. Les hommes et les femmes élus comme
représentants des membres sont responsables
devant eux. Chaque personne peut exprimer son
intention, signifier ce qu’elle veut ouvertement
tout en s’engageant à respecter les choix de la
majorité. Chaque vote compte.
Raquel Alfaro est membre d’une des sept
coopératives de production de noix de cajou du Salvador. Ces
coopératives emploient 58 travailleurs (39 sont des femmes).
Tous sont égaux indépendamment des revenus
personnels, de l’origine sociale, du sexe, de la religion
ou du rôle dans l’organisation. L’engagement social
et politique de plusieurs femmes jouant des rôles
important au sein de leur société a commencé au sein
d’une coopérative où elles ont acquis des compétences
de leader et la confiance pour les exercer. « Dans mon
pays, la coopérative est le seul endroit où je peux
voter, où je sens que je peux faire la différence… »5
M Alfaro s’est impliquée dans la gestion de sa coopérative et y a
me
acquis les compétences et la confiance qui lui ont permis de devenir la
première femme maire de Chilanguera. Son engagement a contribué
de façon significative à la construction et l’installation de l’usine de
transformation de fruits et à la mise en place d’un service de garde
pour les enfants des travailleurs impliqués
dans la production de noix de cajou.
Mme Alfaro a inspiré d’autres femmes à devenir administratrices de la
coopérative. « Je me suis dit que je devais continuer, et à la fin j’ai
réussi parce que mon mari me comprenait. Ce fut le plus grand
obstacle pour moi, que de convaincre ma famille que je pouvais le
faire. Que j’étais une femme, mais que oui, je pouvais le faire ! »
En permettant à un milliard d’individus de partout
sur la planète d’apprendre à prendre des décisions
importantes pour eux et pour leur communauté, la
formule coopérative éduque des citoyens pour qu’ils
puissent mieux participer à l’émergence d’une société
démocratique juste et respectueuse des populations.
La démocratie tient au cœur des coopérateurs non
seulement parce c’est l’un des principes fondateurs
des coopératives, mais aussi parce que la démocratie
est l’un des piliers des organisations et des sociétés
respectant les aspirations des individus.
5Témoignage d’une femme membre d’une coopérative
•
•
•
•
•
•
•
Respect
Droits
Responsabilités
Lois
Citoyenneté
Reddition de compte
Alternance
Ces principes démocratiques mis de l’avant dans les
coopératives s’appuient sur l’éducation offerte par et
pour les membres et la communauté. Cette éducation
porte entre autres sur les rôles et responsabilités des
membres afin qu’ils soient en mesure de les exercer
avec discernement.
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
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CU
oopératives
n modèle d’affaires inclusif
Les coopératives sont des institutions inclusives,
qui ne ferment leurs portes à personne. Ce
faisant, elles se doivent d’adapter leur offre
de services à toutes les catégories de leur
clientèle, incluant les plus pauvres, trop souvent
marginalisés et délaissés par les entreprises
traditionnelles. Les femmes, les jeunes, les
handicapés et les minorités culturelles ou
communautés ethniques sont trop souvent
confrontés à l’exclusion et à des contraintes
qui les empêchent d’échapper à la pauvreté.
La coopérative sait s’ajuster aux besoins de
tous les membres de la communauté où elle est
présente afin de les aider à surmonter les défis
auxquels ils font face.
Les principes coopératifs d’adhésion ouverte à tous,
de pouvoir démocratique exercé par les membres, de
participation économique des membres, d’éducation
et d’engagement envers la communauté constituent la
base de l’inclusion. Le recours au modèle coopératif
permet de mobiliser des ressources en provenance
et au profit des membres les plus marginalisés de
la communauté.
La Fédération des coopératives
de femmes SEWA a vu le jour en 1992 dans l’État
du Gujarat, en Inde, pour aider les femmes pauvres et travailleuses
autonomes à obtenir du travail et un revenu réguliers. Elle fait partie
d’une famille plus large d’organisations parrainées par l’Association
des femmes travailleuses autonomes (SEWA, ou Self Employed
Women’s Association), un syndicat qui a démarré ses activités en 1972
et qui regroupe plus de cinq millions de femmes à l’échelle nationale
dans le secteur informel de l’économie indienne.
Aujourd’hui, la Fédération compte une centaine de coopératives de
travailleuses affiliées, dont la seule coopérative indienne de sagefemmes. Artisanes, agricultrices et commerçantes ont toutes bénéficié
de ses services, s’appropriant ainsi les enjeux et outils propres à
leur secteur d’activité, éliminant les intermédiaires, améliorant leurs
connaissances et leur maîtrise des technologies, et ayant enfin les
moyens de faire entendre leurs préoccupations aux législateurs.
Les coopératives reconnaissent que le succès est
basé sur le développement socio-économique à
long terme de la communauté dans son ensemble.
Elles disposent par ailleurs de mécanismes de
gouvernance qui favorisent l’inclusion à même leurs
conseils d’administration. Des groupes d’ordinaire
vulnérables peuvent ainsi se regrouper pour créer une
entreprise coopérative capable de répondre à leurs
besoins particuliers.
La flexibilité du modèle permet également à différents
types de coopératives de voir le jour. Les travailleurs
du secteur informel peuvent s’unir pour créer des
coopératives de travail ou de service ; des femmes
issues de communautés rurales mettent en place
des coopératives d’épargne et de crédit dont elles
deviennent les propriétaires en même temps que les
membres; dans les villes, des coopératives d’habitation
rendent accessibles des logements à prix décent.
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international
12
Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
CL
oopératives
eaders dans l’innovation
L’innovation est considérée comme un
mécanisme clé pour créer de la richesse, et les
coopératives sont des entreprises innovantes.
Que ce soit grâce à l’introduction de nouvelles
technologies ou la mise en œuvre de partenariats
public-privé où le secteur privé est composé
d’entreprises coopératives appartenant aux
populations locales, les entreprises coopératives
sont constamment à la recherche de solutions
pour répondre aux défis du développement.
À titre d’exemple, les coopératives d’épargne et de
crédit, dont les plus anciennes ont vu le jour il y a
plus de cent ans, ont été les premières à offrir ce
qu’il est maintenant convenu d’appeler des services
de microfinance. Elles l’ont fait en répondant à une
demande exprimée par des populations laissées
de côté par les entreprises financières existantes.
Aujourd’hui, ces institutions essaiment partout dans le
monde et leur offre de service ne cesse de s’accroître :
financement spécialisé (entreprise, habitat, agricole),
assurance (vie, santé, récolte), services de convenance
tels les transferts de fonds, etc.
Il y a plus de 70 ans, les communautés rurales
pauvres n’étaient pas considérées comme un marché
rentable pour les compagnies vendant de l’électricité
et étaient ignorées par les entreprises de services
publics. Ces communautés ont donc mis sur pied des
Mutual Benefits A ssociations (MBA)
regroupe des mutuelles des Philippines qui offrent depuis 2003
des produits de microassurance-vie en lien avec les petits prêts faits
aux femmes membres. Cette assurance, qui coûte quelque 0,80 $
par semaine, couvre les frais de santé jusqu’à concurrence de 50 $
par année, assure un remboursement de 3 175 $ aux membres de
la famille en cas de décès de l’assuré et de 530 $ en cas de décès
du conjoint ou d’un enfant de l’assuré. De plus, si l’assuré contribue
pendant trois ans, 50 % de la prime payée est reversée
dans son compte d’épargne.
Voilà un produit qui diminue considérablement
la vulnérabilité des familles.
coopératives capables de leur fournir de l’électricité à
un coût raisonnable. Aujourd’hui, plus de 100 millions
de personnes dans plus de 40 pays reçoivent de
l’électricité grâce à leur coopérative.
Conscientes que la mise à disposition des innovations
les mieux adaptées à la réalité des populations des
pays en développement est essentielle pour permettre
à celles-ci d’améliorer leur sort, les coopératives
ne cessent de se consacrer au développement et à
la diffusion d’innovations. Plusieurs coopératives
agricoles, par exemple, possèdent des centres de
recherche et développement de classe internationale
où elles développent et améliorent des semences,
la génétique animale, des processus de gestion
environnementale, des processus de transformation
agroalimentaire pour mettre en valeur les productions
de leurs membres, qu’il s’agisse de lait, de fruits, de
noix ou de céréales.
En matière de développement durable, les
coopératives sont parfois au premier rang en termes
d’innovation. Au Québec, dans le domaine des services
funéraires, c’est une coopérative qui, la première, a
reçu la certification d’entreprise écologique.
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
13
CU
oopératives
n appui de taille
aux entrepreneurs
A u Burkina Fa so, le Réseau des caisses populaires
du Burkina (RCPB) a mis en place quatre Centres financiers aux
entrepreneurs (CFE) situés en régions rurales afin d’offrir aux
Partout dans le monde, les micro, petites et
moyennes entreprises constituent ensemble
les principaux employeurs nationaux et jouent
un rôle central dans le développement des
communautés en plus de contribuer à réduire
la pauvreté. Pour se développer, ces entreprises
doivent avoir accès à des services financiers, à
des intrants, à des marchés pour leurs produits.
Mais parce qu’elles sont trop petites et souvent
informelles, ces entreprises sont généralement
ignorées par les institutions financières et n’ont
pas accès à des services conseils adaptés à leur
secteur d’activité.
agriculteurs et autres entrepreneurs de ces régions des services
financiers adaptés à leurs besoins. Cette clientèle n’était auparavant
desservie par aucune institution financière puisqu’elle demande
des services plus élaborés que ceux qu’offrent les institutions de
microcrédit, mais ne répond pas pour autant aux critères imposés
par les banques traditionnelles. Les CFE affiliés au RCPB comblent
ainsi un grand vide.
Ensemble, ces institutions coopératives permettent à
5 400 agriculteurs de financer l’intensification et la diversification de
leurs cultures et de contribuer ainsi à la sécurité alimentaire du pays.
Par leur caractère inclusif, les coopératives offrent
leurs services à toutes les catégories d’entreprises,
incluant les plus petites. Dans le secteur financier,
les coopératives sont d’ailleurs bien souvent les
seules à ouvrir leurs portes à ces petites entreprises.
Les entrepreneurs qui en profitent ont un impact
considérable dans leur milieu. On estime que chaque
prêt fait à une petite entreprise dans un pays en
développement amène la création ou le maintien
de 1,4 nouvel emploi.6
En milieu rural, les coopératives agricoles offrent aux
entreprises de ce secteur des produits et des services
qui leur permettent d’améliorer leur rendement, de
diversifier leur production et de diminuer les risques
techniques et commerciaux auxquels elles font face,
et d’accroître leurs revenus. Souvent, ces coopératives
offrent des conseils en production et appuient la
mise en marché de la production, que ce soit à
l’échelle locale ou internationale. Ces services sont
déterminants pour assurer le succès des entreprises
agricoles familiales.
6Selon le Social Return on Investment (SROI) Calculator
mis au point par Calvert Foundation
(www2.calvertfoundation.org/impact/calculate/index.cgi)
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international
14
Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
CC
oopératives
onstruire la paix
La coopération entre les personnes et les
institutions est essentielle pour espérer
construire des sociétés en paix. Dans un
monde où plusieurs projets de développement
international prennent place dans un contexte de
conflit ou dans des environnements post-conflit,
les coopératives se sont révélées extrêmement
efficaces pour promouvoir cette paix.
Le Guatemala a été affecté par une guerre civile
qui a duré 36 ans et entraîné le décès de 250 000 personnes ainsi
que des destructions aux infrastructures de base nécessaires au
développement. Les accords de paix signés en 1996 ont été conclus
grâce aux travaux de la Commission nationale de réconciliation,
au sein de laquelle la Confédération des coopératives du pays
(CONFECOOP) a joué un rôle déterminant en tant que l’un des
représentants de la société civile.
le soutien mutuel, aident à surmonter les divisions
qui provoquent ou sont le résultat des conflits. Les
tensions qui persistent à la fin des conflits sont par
ailleurs atténuées par le fait que les gens partagent
de nouveaux objectifs communs, et apprennent à
travailler ensemble pour le bénéfice de tous.
La pauvreté et les conflits sont inextricablement liés.
D’une part, les conflits sont souvent causés par la
pauvreté ou la trop grande disparité de revenu entre
les pauvres et les plus nantis. D’autre part, les conflits
entraînent inévitablement la pauvreté et la misère. Le
développement coopératif passe par la mise en place
de solutions à long terme susceptibles de réduire la
pauvreté et donc les frictions à l’origine des conflits.
Les valeurs qui définissent et guident les coopératives,
telles que l’utilisation équitable et le partage des
ressources, le travail en commun et la promotion
du potentiel humain par des actions collectives et
De nombreux exemples démontrent l’efficacité des
coopératives pour atténuer les conflits et apporter
des solutions contribuant à reconstruire la paix.
À Aceh, en Indonésie, après 30 ans de guerre civile,
les coopératives se sont avérées les plus utiles pour
rapprocher les membres des communautés affectées.
Cela n’a pas été un processus facile, ni rapide. Il a
d’abord fallu établir des entreprises coopératives
communautaires pour relancer le dialogue au
sein des villages. Au même moment, de petites
coopératives agricoles et de production ont vu le jour
et se sont éventuellement transformées en véritables
coopératives membres d’une union de coopératives.
Au nord du Ghana, où des conflits fonciers faisaient
fréquemment irruption, la création de coopératives
agricoles a réuni tous les acteurs concernés et leur
a permis de trouver des solutions permanentes. À la
fin de la guerre civile qui a frappé le Salvador, c’est
également grâce aux coopératives que la distribution
des terres aux agriculteurs a été rendue possible.
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
15
CT
oopératives
out n’est pas parfait
Malgré tout ce qui a été mentionné
antérieurement, il faut reconnaître que les
coopératives ne réussissent pas toujours à avoir
l’impact ou l’efficacité souhaités. Certaines
ont dû fermer leurs portes ou sont entrées en
dormance. D’autres ne servent qu’un groupe
restreint d’individus.
Il faut reconnaître que les coopératives ne peuvent
pas toujours être considérées comme la meilleure
solution pour réduire la pauvreté. Les entreprises
coopératives, bien qu’appartenant à leurs membres
et étant profondément ancrées dans leur milieu,
sont confrontées aux mêmes contraintes que toutes
les autres entreprises privées. Elles peuvent être mal
gérées, vivre des problèmes de leadership, avoir du
mal à répondre aux attentes de leur marché, manquer
de ressources financières pour accroître leur efficacité,
ne pas disposer de technologies compétitives. Elles
peuvent être affectées par les crises économiques,
l’inflation, les embargos. Si les entreprises coopératives
ne réussissent pas à opérer de façon efficace, elles ne
sont pas en mesure de créer et de partager la richesse
et de réduire la pauvreté.
Gouvernance, réglementation
et appropriation : des défis
Comme les autres entreprises, les coopératives
peuvent éprouver des problèmes de gouvernance.
Des membres peu ou mal informés sont susceptibles
d’élire des dirigeants médiocres, qui mettront en
place des orientations non souhaitables et parfois
non viables. Dans certains cas, des dirigeants élus
vont usurper le pouvoir et diriger uniquement en
fonction de leurs propres intérêts ou de ceux d’une
minorité de membres. Lorsque cela se produit, les
membres n’obtiennent pas les services et les produits
de qualité auxquels ils s’attendent et se désintéressent
de leur coopérative.
Dans certains pays, les politiques gouvernementales
ont largement contribué aux insuccès des coopératives.
Le manque de compréhension du rôle de l’État par
rapport au développement coopératif et mutualiste
s’est parfois traduit par la mise en place de lois et
de règlements inadaptés. Dans d’autres cas, certains
états ont voulu imposer la solution coopérative,
imposer des objectifs aux coopératives et à leurs
membres, ou encore imposer des façons de faire qui
déresponsabilisaient les membres et les dirigeants et
les considéraient davantage comme des bénéficiaires
ou des employés que comme des membres
propriétaires. Les coopératives peuvent aussi avoir
été utilisées à des fins partisanes.
Certaines coopératives créées dans le cadre de
projets de développement international l’ont été sans
respecter suffisamment les attentes et les limites de
leurs membres. Le rythme de croissance a dépassé la
capacité des dirigeants de gérer ces entreprises.
Les coopératives dont les membres sont véritablement
les propriétaires, qui sont gouvernées de façon
démocratique, bien gérées, regroupées en réseau
et qui disposent de plans d’affaires réalistes sont
en mesure de faire face à ces défis et de contribuer
à améliorer les conditions de vie de leur communauté,
à créer de la richesse et à participer au développement
socio-économique local.
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international
16
Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
Les coopératives et les
mutuelles canadiennes
en développement
International
Le caractère unique des
coopératives et mutuelles canadiennes
Les coopératives canadiennes sont un maillon
essentiel de l’économie du pays et ont joué un
rôle majeur dans le développement de notre
société au cours du 20e siècle. Le Mouvement
Desjardins est le premier employeur privé au
Québec et la sixième plus grande institution
financière au Canada. Vancity est la deuxième
credit union en importance au Canada avec plus
de 400 000 membres. La coopérative agricole
Agropur est la plus grosse coopérative laitière
du pays, avec des opérations de transformation
à la grandeur du Canada, aux États-Unis et
en Argentine.
Les coopératives canadiennes offrent des services de
santé et d’habitation, elles produisent de l’électricité,
elles sont les plus présentes pour l’offre de services
financiers sur l’ensemble du territoire, elles offrent
également des services funéraires, entretiennent
et gèrent des forêts et offrent des produits de
consommation, pour ne nommer que ces quelques
dimensions de la coopération à l’échelle canadienne.
Ces coopératives, comme la plupart des coopératives
dans le monde, ont été mises sur pied par des
individus à la recherche de solutions que ni l’État,
ni le secteur privé traditionnel ne pouvaient ou
ne voulaient proposer. Ces leaders ont souvent pu
compter sur l’apport et l’appui des autorités politiques
ou religieuses locales. À d’autres moments, ils ont
travaillé pour que des lois spécifiques aux coopératives
soient adoptées. Ils ont parfois bénéficié de certains
programmes d’appui gouvernemental pour leur
permettre de compléter leurs capitaux propres. Ils ont
pu compter sur les conseils d’un ministère ou d’autres
coopératives. Le succès d’aujourd’hui n’est pas arrivé
du jour au lendemain.
Les coopératives ont pu compter sur les pouvoirs
publics et ceux-ci ont su faire appel aux coopératives
pour mettre en œuvre des politiques de dévelop­
pement économique régional, des politiques
d’industrialisation de l’agriculture, des politiques de
logement et des politiques de développement forestier.
Actrices responsables du secteur privé et partenaires
privilégiées des États souhaitant un développement
impliquant les populations, les coopératives
canadiennes ont, depuis plus de 100 ans, réussi
à maintenir un juste équilibre entre croissance
entrepreneuriale et services aux membres et à
la population, entre exploitation des ressources
naturelles et préservation du milieu.
18 000 000 Canadiens membres d’une coopératives et mutuelles au Canada
8 500 coopératives et mutuelles au Canada
2 700 coopératives d’habitation où habitent 250 000 personnes
1 300 coopératives agricoles
660 coopératives de consommation
900 credit unions et caisses populaires joignant 11 millions de membres
400 coopératives offrant des services de garde
340 coopératives de travailleurs
100 coopératives de santé
150 000 employés
330 milliards $ d’actif pour l’ensemble des coopératives du Canada
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international
18
Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
Les coopératives et les mutuelles canadiennes:
une contribution majeure
au développement international
Les trois principales organisations canadiennes
œuvrant à la promotion des coopératives dans
un contexte de développement international
cumulent 100 ans d’expérience dans le domaine.
Aujourd’hui, l’ACC, DID et SOCODEVI sont des
organisations de référence reconnues comme
telles sur la scène mondiale.
Elles ont établi des partenariats avec la plupart des
grands bailleurs de fonds privés et gouvernementaux
de la planète, à commencer par l’Agence canadienne
de développement international (ACDI). Au fil de leurs
actions, ces organisations ont réalisé plus d’un millier
de projets dans quelque 80 pays à travers le monde.
Elles ont touché des dizaines de millions de familles et
d’entrepreneurs, améliorant ainsi leurs conditions de
vie de même que leur autonomie et leur capacité de
contribuer activement à l’essor de l’économie locale
et du développement de leur communauté.
Ce qui caractérise chacune de ces organisations,
c’est leur affiliation à un réseau de coopératives actif
sur la scène domestique. Elles peuvent ainsi puiser
à même un vaste bassin de ressources techniques,
humaines et financières qui sont, en raison des
valeurs de solidarité animant ces réseaux, mises au
service de leurs partenaires coopératifs. Au cours des
vingt dernières années, plus de 1500 coopérateurs
canadiens ont donné l’équivalent de 300 annéespersonne pour partager leur expertise avec les
nombreuses institutions coopératives appuyées par
l’ACC, DID et SOCODEVI. Les coopérateurs canadiens
ont aussi donné plus de 40 millions de dollars pour
soutenir le travail des trois organisations. Ces dons
ont permis de mobiliser des appuis additionnels en
provenance d’autres partenaires, notamment du
gouvernement canadien.
Des solutions adaptées aux besoins
Le succès des interventions de ces trois organisations
vient également du fait qu’elles sont soucieuses et
capables de proposer à leurs partenaires coopératifs
des pays en développement des solutions non
seulement concrètes et pratiques, mais par-dessus
tout ancrées dans la réalité des coopératives appuyées
et adaptées aux besoins rencontrés. C’est dire que
les méthodologies et innovations du Nord dont
s’inspirent ces organisations ne sont pas simplement
reproduites, mais plutôt adaptées en partenariat avec
leurs partenaires coopératifs qui sont ainsi en mesure
de s’approprier les solutions proposées. Ces solutions
jouent ainsi un rôle déterminant dans la capacité
des institutions partenaires à surmonter les défis
auxquelles elles font face.
Enfin, les organisations canadiennes actives en
coopération internationale mettent en œuvre le
principe d’intercoopération cher aux coopératives et
collaborent entre elles de façon régulière et soutenue
dans la réalisation de projets communs et dans le
partage et l’enrichissement de leur expertise collective.
Elles multiplient ainsi leur impact et leur portée.
Bien qu’il soit largement reconnu dans les pays en
développement et en émergence, l’engagement
concret des organisations canadiennes œuvrant
dans le domaine de la coopération internationale
demeure à ce jour méconnu de plusieurs sur la
scène locale. Or, les contributions apportées par les
coopératives canadiennes sont loin d’être banales,
tout particulièrement dans un contexte économique
susceptible d’encourager davantage la concurrence et
le repli sur soi que la solidarité et l’ouverture.
La rencontre entre les mouvements coopératifs du
Nord et du Sud rend possible un partage d’expertise
et de savoir-faire, mais surtout, il contribue à une
plus grande équité en termes de capacité de prise
en charge, d’accès aux services et aux ressources
et de participation au pouvoir. Ensemble, les
coopératives et les mutuelles canadiennes engagées
en développement international participent à la
réduction des clivages et des inégalités et donnent tout
leur sens aux valeurs de solidarité canadiennes.
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
19
Présentation des organisations
auteures de cet ouvrage
L’Association des coopératives du Canada
(ACC) appuie la promotion, le développement
et le regroupement de coopératives et de
credit unions au bénéfice des populations
du Canada et de partout dans le monde. Les
membres de l’ACC proviennent de nombreux
secteurs économiques incluant la finance,
l’assurance, l’agroalimentaire, l’habitation,
la santé et le secteur des services. Les
membres de l’ACC imaginent un monde
dans lequel les gens de toutes provenances
puissent prospérer à la fois sur les plans
économique, culturel et social. Depuis plus
de 40 ans, le programme de développement
international de l’ACC contribue à
réduire la pauvreté par la création et le
développement de coopératives, de credit
unions et d’organisations ancrées dans
la communauté.
Depuis plus de 40 ans, Développement
international Desjardins (DID) s’emploie
à partager avec les pays en développement
et en émergence l’expérience et l’expertise
du Mouvement Desjardins, le plus grand
groupe financier coopératif du Canada.
L’objectif poursuivi par DID est de rendre
accessibles aux populations moins favorisées
de la planète des services financiers
diversifiés, sécuritaires et adaptés à leurs
besoins. Pionnier dans le déploiement et le
développement de la microfinance à travers
le monde et comptant sur une équipe de
plus de cent employés, DID est aujourd’hui
un leader mondial dans ce secteur.
www.did.qc.ca
www.coopscanada.coop/id
La Société de coopération pour le
développement international (SOCODEVI)
est un réseau de 26 entreprises coopératives
et mutualistes qui partage son expertise
technique et son savoir-faire avec ses
partenaires dans les pays en développement,
afin d’y créer, protéger et distribuer la
richesse. SOCODEVI mesure son succès
par la capacité des entreprises appuyées à
devenir des références dans leur milieu en
raison de leur durabilité et des retombées
de leurs activités sur leurs membres et les
communautés locales. Depuis sa création
en 1985, SOCODEVI a accompagné plus de
680 entreprises et organisations coopératives
et mutualistes dans une quarantaine de pays
en développement touchant ainsi plus de
12 millions de personnes. Plus de 400 projets
d’une valeur totale de 220 millions de
dollars CAN ont été menés par SOCODEVI.
www.socodevi.org
T i r a g e 1600 exemplaires
I m p r e s s i o n Imprimerie JB Deschamps
D e s i g n Pouliot Guay, graphistes
IS B N 978-2-921777-39-1
Imprimé sur papier recyclé à 100 %
Septembre 2012
Les coopér atives et les mutuelles c anadiennes en développement international
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Créer de la richesse, réduire la pauvreté et construire un monde meilleur
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