CEPII, DT n° 2009-36 Les impacts économiques du changement climatique : enjeux de modélisation
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LES IMPACTS ÉCONOMIQUES DU CHANGEMENT CLIMATIQUE : ENJEUX DE MODÉLISATION
RÉSUMÉ NON TECHNIQUE
Les travaux du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) menés
depuis 1988 ont permis d’attester la réalité d’un changement climatique mondial dû aux
activités humaines et de l’urgence d’efforts pour réduire substantiellement les émissions de
gaz à effet de serre. Le choix des actions à engager ainsi que leur calendrier restent cependant
difficiles comme le prouve la lenteur des négociations internationales sur le climat. Cela
s’explique en partie par les divergences considérables qui subsistent sur l’évaluation
comparée des coûts des dommages du changement climatique et des politiques d’atténuation.
Cette évaluation ne peut faire l’économie d’un certain nombre d’hypothèses de modélisation
aussi structurantes que discutables, qui reposent sur un système de valeurs dont il faut avoir
conscience pour analyser les résultats des modèles économiques avec effets
environnementaux.
La plupart des modèles se contentent d’une analyse « coût-efficacité » des politiques
d’atténuation du changement climatique. Cette approche consiste à définir ex-ante une cible
de réduction des émissions de gaz à effet de serre qui permettrait d’atteindre un objectif de
concentration atmosphérique de ces gaz à un horizon donné. Le rôle des modèles est alors de
simuler les impacts économiques des politiques nécessaires pour atteindre ces objectifs afin
de permettre aux décideurs politiques de choisir la plus efficace, à savoir la moins coûteuse.
Nous menons ici une revue critique des modèles existants en nous appuyant sur l’analyse des
quatre principaux modèles existant en France : ENV-Linkages (OCDE), IMACLIM-R
(CIRED), GEMINI-E3 (C-ORDEE et MEDAD) et POLES (LEPII).
Les modèles ont été analysés selon deux critères : la représentation du progrès technique et les
éléments de dynamique. En ce qui concerne le progrès technique, les modèles Bottom-Up
permettent de décrire précisément les technologies du secteur énergétique et de simuler des
trajectoires possibles du progrès technique, mais ces modèles reproduisent mal les effets en
retour sur le reste de l’économie ; à l’inverse, les modèles Top-Down évaluent les impacts des
politiques d’atténuation sur le PIB et le bien-être, mais prennent mal en compte les potentiels
de progrès technique. En ce qui concerne les projections, la plupart des modèles fonctionnent
en dynamique récursive, ce qui ne permet pas de prendre en compte de façon satisfaisante les
anticipations des agents ; cette dynamique amène à se cantonner à des scénarios exploratoires.
Les modèles à optimisation inter-temporelle, qui intègrent les anticipations dans des scénarios
normatifs, impliquent un nombre de calculs très élevé dès que l’on veut représenter finement
les régions, les secteurs et les technologies. L’hybridation entre modèles des différentes
familles tente de compenser les lacunes des uns et des autres.
Notre étude s’appuie ensuite sur les travaux de la Commission Quinet sur « La valeur tutélaire
du carbone », pour étudier sur un exemple – la détermination de la valeur économique du
carbone par les modèles GEMINI-E3, IMACLIM-R et POLES – comment les divergences
théoriques des modèles se traduisent dans la pratique. Dans le modèle hybride IMACLIM-R,