PRESCRIPTIONS DE RACCORDEMENT POUR LA PRODUCTION DECENTRALISEE :
EVOLUTIONS DES CONDITIONS EXISTANTES
ET NECESSITE D’UNE NORMALISATION COMPLEMENTAIRE
Michel Dussart
Electrabel – Distribution
Belgique
Piet Lauwers
Electrabel – EDV
Belgique
Serge Magnus
Electrabel – EDCentre
Belgique
Yves Laperches
Electrabel – EDWal
Belgique
RESUME
Les réseaux de distribution ont été conçus pour
fonctionner avec un flux d'énergie transitant dans
le sens d’une source unique vers les utilisateurs.
Le raccordement de productions décentralisées
modifie cette caractéristique fondamentale.
Les moyens de protection doivent à la fois assurer
la sauvegarde des biens, de l’alimentation et des
personnes.
La sécurité des agents appelés à opérer sur le
réseau est garantie par l’assurance que la mise
hors tension ne sera pas interrompue de façon
intempestive par une production décentralisée.
La sauvegarde des biens et de l’alimentation est
assurée lorsque le réseau est prémuni contre les
enclenchements hors synchronisme et les
alimentations déficientes en cas de
fonctionnement en îlotage. Pour les productions
provoquant des perturbations, la compatibilité par
rapport au phénomène de flicker et aux émissions
de courants harmoniques doit être examinée.
On assiste à une expansion de la production
décentralisée et en particulier une multiplication
de la production éolienne et des très petites
productions notamment à partir de cellules
photovoltaïques.
La présence ou non d’une coupure de sécurité,
l’obligation de mise à la terre et en court-circuit
lors des interventions en réseau, la constitution de
la protection de découplage, l’obligation ou non
d’installer un transformateur de séparation,
l’estimation des émissions de flicker par les
turbines éoliennes sont autant de questions qui
auraient l’avantage de trouver dans les textes de la
normalisation, une solution harmonisée entre les
gestionnaires de réseaux.
On ne peut donc qu’encourager à promouvoir la
normalisation en ces matières.
PRESCRIPTIONS DE RACCORDEMENT POUR LA PRODUCTION DECENTRALISEE :
EVOLUTIONS DES CONDITIONS EXISTANTES
ET NECESSITE D’UNE NORMALISATION COMPLEMENTAIRE
Michel Dussart
Electrabel – Distribution
Belgique
Piet Lauwers
Electrabel – EDV
Belgique
Serge Magnus
Electrabel – EDCentre
Belgique
Yves Laperches
Electrabel – EDWal
Belgique
La production décentralisée s’est fortement
développée ces dernières années. Le phénomène
s’amplifie d’année en année sous l’effet de
l’amélioration des techniques. La volonté de
valoriser toutes les formes d’énergie qui apportent
une économie globale de l’énergie, contribue au
développement quantitatif et qualitatif des
productions décentralisées. Diverses subventions
financières des pouvoirs politiques aident aussi à
l’expansion de son développement.
Les réseaux de distribution ont été conçus pour
fonctionner avec un flux d'énergie transitant dans
le sens d’une source unique vers les utilisateurs.
Le raccordement de productions décentralisées
modifie cette caractéristique fondamentale.
Les moyens de protection doivent à la fois assurer
la sauvegarde des biens, de l’alimentation et des
personnes.
La sécurité des agents appelés à opérer sur le
réseau est garantie par l’assurance que la mise
hors tension ne sera pas interrompue de façon
intempestive par une production décentralisée.
La sauvegarde des biens et de l’alimentation est
assurée lorsque le réseau est prémuni contre les
enclenchements hors synchronisme et les
alimentations déficientes en cas de
fonctionnement en îlotage. Pour les productions
provoquant des perturbations, la compatibilité par
rapport au phénomène de flicker et aux émissions
de courants harmoniques doit être examinée.
Nous allons parcourir les moyens qui sont utilisés
en Belgique pour assurer à la fois la sécurité des
personnes et la sauvegarde des biens.
LA COUPURE DE SECURITE
Les travaux qui sont réalisés hors tension, la
majorité des interventions, nécessitent d’isoler la
partie sur laquelle on travaille. Les
réglementations nationales le stipulent en général
et la norme européenne EN 50110 ‘‘Exploitation
des installations électriques’’ [1] en fait de même.
L’organe de coupure doit donc exister et de plus il
convient qu’il soit vérouillable et accessible en
permanence par l’opérateur du réseau.
Lorsqu’on est confronté à de petites puissances, la
production par cellules photovoltaïques en réseau
BT par exemple, cette coupure accessible est plus
difficile à incorporer dans des installations
existantes dés lors que ce problème n’a pas été
pris en compte au moment de l’édification des
bâtiments.
Des solutions simples devraient être disponibles.
La protection de découplage à l’intérieur d’un
onduleur compris dans la chaîne d’une
alimentation par cellules photovoltaïques peut-elle
être assimilée à une coupure de sécurité ? Si la
réponse est positive il devrait être notifié dans une
norme que cette disposition offre un moyen de
coupure satisfaisant les exigences de la norme EN
50110.
Sinon en complément, un moyen de coupure
simple, à placer à l’extérieur des bâtiments donc
accessible devrait être proposé. Dans ce cas il est
aussi nécessaire de constituer d’un répertoire à
jour et facilement consultable par les opérateurs,
reprenant toutes les installations en service afin
d’assurer toutes les déconnections nécessaires.
Ceci est vrai pour toutes les productions
décentralisées mais les petites puissances en BT
nécessitent une attention particulière car elles
risquent d’être nombreuses et donc difficiles à
maîtriser.
LA MISE A LA TERRE ET EN COURT-
CIRCUIT
Avec la multiplication des petites productions
dans les réseaux BT, la présence de productions
décentralisées connue ou ignorée rend nécessaire
suivant l’EN 50110, la mise à la terre et en court-
circuit des conducteurs sur lesquels on travaille.
Cela pose un problème avec les câbles souterrains
sans sectionnement. Ils n’offrent pas de surface
libre pour pouvoir y connecter la mise à la terre et
en court-circuit. Un outillage spécial devrait être
développé pour remédier à ce problème.
LA PROTECTION DE DECOUPLAGE
Si la partie du réseau, sur laquelle est raccordé le
producteur décentralisé, n’est plus alimentée en
tension ou que la tension n’est plus normale, la
source autonome doit pouvoir être découplée
automatiquement du réseau dans les plus courts
délais. A cette fin, une protection de découplage
est mise en place. La protection de découplage est
assurée par un ensemble de relais qui contrôlent
les fonctions de tension et de fréquence. Dans le
présent article, la notion de protection de
découplage n’est pas limitée au saut de vecteur ou
à la fonction df/dt.
Les protections de découplages requises dans le
réseau belge sont décrites dans les prescriptions
de la FPE Fédération Professionnelle de
Producteurs et Distributeurs d’Electricité de
Belgique. Ce sont les documents C10/11
‘‘Prescriptions techniques de branchement
d’installations de production décentralisée
fonctionnant en parallèle sur le réseau de
distribution’’ [2] et C10/13 ‘‘Prescriptions
techniques de branchement d’installations
photovoltaïques de production décentralisée < 15
kW fonctionnant en parallèle sur le réseau de
distribution’’ [3].
Tableau 1 Synthèse des protections de découplage en réseau MT
TensionClient
raccordé en
MT
Tension
homopolaire
UO
temporisé
Fréquence
± 0,5 Hz
instantané
maximum
instantané
minimum
supérieur
de 0 à 1,5s
minimum
inférieur
instantané
Saut de
vect. ou
bien
df/dt
Fréquence
± 0,3 Hz
instantané
cas général
<1,2 MVA et petit/réseau
ou bien
ou bien
ou bien
Les exigences requises varient avec la nature de la
production décentralisée, sa taille son mode de
raccordement. Le tableau 1 est la synthèse des
conditions requises lorsque le raccordement est
effectué en réseau MT et le tableau 2 pour les
réseaux BT.
Tableau 2 Synthèse des protections de découplage en réseau BT
TensionClient
raccordé en
BT
Fréquence
± 0,5 Hz
instantané
maximum
instantané
minimum
supérieur
de 0 à 1,5s
minimum
inférieur
instantané
Saut de
vect. ou
bien df/dt
Présence
des
3 phases
(>10 kW)
Fréquence
± 0,3 Hz
instantané
gén.techment
non îlotable
gén.techment
non îlotable et 10 kW
ou bien
ou bien instantané
gén.techment îlotable
ou bien
ou bien
Dans le tableau 1 ‘‘petit par rapport au réseau’’
signifie que la puissance de production, compte
tenu de toutes les productions installées, est petite
par rapport à celle du réseau si elle est inférieure à
la moitié de la charge minimum îlotable suite à
l’ouverture d’un disjoncteur.
Dans le tableau 2, l’expression ‘‘gén. techment non
îlotable’’ signifie que la génératrice est
techniquement non îlotable, c’est une génératrice
de type asynchrone ou par construction incapable
de fonctionner en îlotage, tandis que l’expression
‘‘gén. techment îlotable’’ signifie l’inverse.
Afin de faciliter le développement des systèmes
photovoltaïques, ceux-ci peuvent simplement se
conformer aux prescriptions C10/13 de la FPE.
Ces dernières présentent un allégement des
conditions par rapport aux prescriptions générales
C10/11.
La protection de découplage est intégrée dans le
fonctionnement de l’onduleur. Le gestionnaire de
réseau doit avoir toutes les garanties que les
installations seront bien hors service lorsqu’il
entreprendra des travaux sur le réseau même chez
les clients où il ne lui sera pas possible d’accéder.
Les caractéristiques de fonctionnement de cette
protection sont reprises dans les tableaux 3 et 4.
Tableau 3 – limites tension, fréquence
Essai Valeurs limites
sur une des
phases
Temps de
découplage
minimum
de tension 0,8 Un 0,2 s
maximum
de tension 1,1 Un 0,2 s
fréquence 50 Hz ± 2% 0,2 s
Tableau 4 Déclenchement en îlotage
Charge alimentée par le
système fonctionnant en
parallèle avec le réseau
Variation de la charge
active P et réactive Q
après interruption de la
parallèle avec le réseau
Temps de découplage
P et Q < 0,1 P et Q 5s
0,7 PN < P < PN
P et Q > 0,1 P et Q 0,2s
P et Q < 0,1 P et Q 5s
0,35 PN < P < 0,7 PN
P et Q > 0,1 P et Q 0,2s
P et Q < 0,1 P et Q 5s
0 PN < P < 0,35 PN
P et Q > 0,1 P et Q 0,2s
L’îlotage est provoqué à trois points de
fonctionnement de charge de l’onduleur. Pour
chaque point de fonctionnement deux situations
sont envisagées. D’une part, une situation de
quasi-équilibre, avant et après la séparation d’avec
le réseau, la charge de l’onduleur n’est pas
fortement modifiée. Dans ce cas, le découplage
doit agir en moins de 5 secondes. D’autre part,
une situation où la charge est modifiée de plus de
10%. Dans ce cas, le découplage doit agir en
moins de 0,2 seconde.
La temporisation de 0,2 seconde ne peut pas être
augmentée parce que dans les installations non
accessibles ou ignorées du gestionnaire de réseau,
ce ne sera que la protection de découplage qui
assurera la mise hors tension et il faut garder une
cohérence avec les courbes de sécurité présentées
dans le rapport technique [4] CEI 479-1 « Effets
du courant sur l’homme et les animaux
domestiques »’.
LE TRANSFORMATEUR DE SÉPARATION
Lorsque le raccordement au réseau est effectué en
moyenne tension, les génératrices sont branchées
sur le réseau par l'intermédiaire d'un
transformateur dont les caractéristiques sont
définies par le gestionnaire du réseau; toutefois, la
tension de court-circuit sera au moins égale à 10
%, sauf dérogation du gestionnaire de réseau dans
le cas d’une puissance <1,2 MVA. Ce
transformateur joue pour le moins 4 rôles : il
protège les génératrices du producteur
décentralisé en amortissant les chocs au cas de
mauvaise prise de parallèle; il annule, lorsque la
génératrice présente un défaut à la masse, l'apport
du réseau en courant de terre vers la génératrice; il
atténue dans le réseau les à-coups provenant des
génératrices et enfin, il permet de réduire le
supplément de puissance de court-circuit apporté
par l'installation au réseau MT.
Toutefois le transformateur de séparation n’est pas
imposé si l’impédance transitoire X’d de la
génératrice ou la résultante des impédances
transitoires dans le cas de plusieurs génératrices
est supérieure à 40 % exprimés en base de la
génératrice.
PERTURBATIONS DUES AU FLICKER
Les productions décentralisées ne peuvent
produire de flicker. Il faut s’assurer que lors des
prises de parallèle les variations brusques de la
tension soient limitées. Elles sont limitées à une
variation de 6% et cette limite est réduite à 3% si
la prise de parallèle se répète plusieurs fois par
jour.
Les éoliennes constituent un cas particulier de
flicker qui est inhérent à leur fonctionnement. Les
variations de la vitesse du vent, provoquent non
seulement des arrêts et démarrages fréquents des
turbines éoliennes mais aussi une variation
constante de la production. De plus l’effet du mât
contribue à produire des variations
supplémentaires.
Les conditions de raccordement sont liées aux
caractéristiques du réseau sur lequel la production
doit être raccordée.
La future norme CEI 61400-21[5] donnera une
méthode pour évaluer l’impact des productions
éoliennes sur le flicker. Les puissances unitaires
ont augmenté significativement. Elles atteignaient
200 kW dans les années 80 et sont maintenant
1600 kW et on parle d’ici peu de 3000 kW. Cette
évolution rend encore plus nécessaire
l’aboutissement de la norme. Provisoirement, en
Belgique nous nous sommes inspirés des
recommandations de cette future norme.
BESOIN DE NORMALISATION
Il est nécessaire d’établir une réglementation qui
tient compte de la multiplicité des aspects qui ont
été développés. Mieux encore une harmonisation
entre les différentes réglementations élaborées
chacune pour un pays particulier, donnerait plus
de crédibilité à ces règles et apporterait plus de
simplification aux installateurs opérant dans des
pays différents. A cet effet la normalisation peut
fournir un précieux apport. Elle doit donc être
encouragée et soutenue.
CONCLUSIONS
Depuis le début des années 90, le développement
des productions décentralisées dans les réseaux
MT et BT s’est intensifié dans tous les pays. Les
facteurs qui ont favorisé l’essor de ces petites
générations sont d’une part la volonté d’utiliser
rationnellement l’énergie et d’autre part les
progrès de la technologie qui ont permit
d’accroître et le taux de fiabilité et les rendements
énergétiques. On assiste ainsi à une expansion de
la production éolienne et une multiplication des
très petites productions notamment à partir de
cellules photovoltaïques.
La présence ou non d’une coupure de sécurité,
l’obligation de mise à la terre et en court-circuit
lors des interventions en réseau, la constitution de
la protection de découplage, l’obligation ou non
d’installer un transformateur de séparation,
l’estimation des émissions de flicker par les
turbines éoliennes sont autant de questions qui
auraient l’avantage de trouver dans les textes de la
normalisation, une solution harmonisée entre les
gestionnaires de réseaux.
On ne peut donc qu’encourager à promouvoir la
normalisation en ces matières.
REFERENCES
[1] EN 50110 norme CENELEC de 12/1996
[2] ‘‘Prescriptions techniques de branchement
d’installations de production décentralisée
fonctionnant en parallèle sur le réseau de
distribution’’ document C10/11 de la FPE du
02/05/2000
[3] ‘‘Prescriptions techniques de branchement
d’installations photovoltaïques de production
décentralisée < 15 kW fonctionnant en parallèle
sur le réseau de distribution’’ document C10/13
de la FPE du 13/06/2000
[4] CEI 479-1 ‘‘Effets du courant sur l’homme et les
animaux domestiques’’ de 09/1994
[5] future CEI 61400-21 ‘‘Mesure et évaluation des
caractéristiques de la qualité de la tension des
turbines éoliennes raccordées au réseau public’’
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