L`Essentiel du Droit consitutionnel - Tome 1

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La Constitution
CHAPITRE 2
Conçue initialement comme un moyen pour lutter contre l’absolutisme royal, la
Constitution écrite définit les règles relatives à l’organisation et au fonctionnement
des pouvoirs publics, et énonce – de plus en plus souvent – les droits et libertés
essentiels. La Constitution est généralement écrite, exceptionnellement coutumière. L’élaboration et la révision de la Loi fondamentale donnent lieu à la mise en
œuvre d’un pouvoir constituant « originaire » et « dérivé ». Le contrôle de la
constitutionnalité des lois tend à se généraliser dans le monde : ce contrôle
renforce l’État de droit et protège les droits et libertés des citoyens, que le contrôle
soit exercé par une Cour constitutionnelle spécifique ou par un tribunal intégré
dans la hiérarchie judiciaire, que la juridiction constitutionnelle soit saisie par
la voie de l’action ou de l’exception. La France a connu une grande instabilité
constitutionnelle.
1 La notion de Constitution
■ Une conception militante de la notion
Le mot « Constitution », pour définir le statut de l’État, est utilisé à partir du XVIIIe siècle par les
philosophes du siècle des Lumières. Le constitutionnalisme, avec Locke et Montesquieu comme
chefs de file, est un mouvement qui préconise de substituer une Constitution écrite aux coutumes,
souvent vagues et imprécises, qui laissent au monarque un pouvoir largement discrétionnaire. La
Constitution écrite est donc l’instrument d’un combat en faveur d’un État libéral et modéré, contre
l’absolutisme royal. La Constitution doit limiter les pouvoirs du monarque et préciser les droits du
citoyen.
Le constitutionnalisme « classique » est donc né avec la rédaction des Constitutions révolutionnaires, alors que le constitutionnalisme « moderne » apparaît avec le contrôle de la constitutionnalité des lois. Le constitutionnalisme moderne insiste sur la suprématie de la Constitution (laquelle
est placée au sommet de la hiérarchie des normes) et sur le respect des droits fondamentaux.
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L’ ESSENTIEL
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DE LA THÉORIE GÉNÉRALE DU DROIT CONSTITUTIONNEL
Depuis la Constitution américaine de Philadelphie (1787), les multiples expériences politiques et
constitutionnelles, en France et à l’étranger, montrent que la Constitution n’a souvent été qu’une
barrière de papier contre l’arbitraire du pouvoir politique. Une Constitution, même longue et
détaillée, ne permet pas d’empêcher un éventuel retour du despotisme ou de la dictature : ainsi,
en 1933, le chancelier Hitler a accédé au pouvoir de façon relativement légale, malgré les 186
articles de la Constitution de Weimar (1919).
■ Définition matérielle et définition organique de la Constitution
a) Le critère matériel de la Constitution
Le critère matériel prend en considération le contenu du texte fondateur, à savoir l’ensemble des
règles les plus importantes qui régissent l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics.
Le contenu de la Constitution sera à géométrie variable. Au minimum, la Constitution énonce les
règles relatives à la forme de l’État, au statut des gouvernants, à l’exercice du pouvoir ; au
maximum, elle englobe le droit parlementaire, le droit électoral, le statut des partis politiques et les
droits fondamentaux.
b) Le critère organique ou formel de la Constitution
Le critère organique privilégie le contenant et non plus le contenu, c’est-à-dire la procédure
juridique d’élaboration et de révision de la Loi fondamentale. La Constitution apparaît
alors comme un ensemble de règles juridiques élaborées et révisées selon une procédure
spéciale et supérieure à celle utilisée pour les autres normes juridiques. Norme fondamentale,
« Grundnorm » selon Hans Kelsen, la Constitution se situe au sommet de la hiérarchie
des normes. Elle est privilégiée car elle est unique en son genre. Elle est protégée car elle est
hors d’atteinte des autres règles juridiques qui, par définition, lui sont inférieures : le contrôle
de la constitutionnalité des lois témoigne de cette primauté de la norme constitutionnelle.
c) La coïncidence des deux critères, matériel et organique
Habituellement, les règles les plus importantes de l’État bénéficient d’un régime juridique
supérieur. Exceptionnellement, les deux critères sont dissociés ; ainsi, le Royaume-Uni (malgré
quelques textes) est doté d’une coutume constitutionnelle, donc d’une Constitution uniquement
matérielle ; réciproquement, des dispositions marginales, qui ne sont pas matériellement constitutionnelles, figurent parfois dans une Constitution formelle : les 18e et 21e amendements de la
Constitution des États-Unis relatifs aux boissons alcoolisées, l’article 80 de la Constitution suisse du
18 avril 1999 concernant le mode d’abattage du bétail.
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