LES ACTES DU CINQUANTENAIRE DU C.I.L.
Jacques Briard
Chronique de 50 ans de laïcat …………………………………………………………………………..2
Pierre de Locht
Témoignage ……………………………………………………………….............................................9
Brigitte Laurent
Etre chrétien dans une société sécularisée …………………………………………………………….12
Christian Laporte
Du rôle des laïcs………………………………………………………………………………………..17
Résumé des débats …………………………………………………………………………………… 21
Intervention
du Cardinal Danneels…………………………………………………………………………………..29
Conclusions
de Paul Löwenthal …………………………………………………………………………………….32
Le Conseil
Interdiocésain des laïcs
Belgique francophone
Rue Guimard, 1, 1040 Bruxelles
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C o n f é r e n c e é p i s c o p a l e d e B e l g i q u e
B e l g i s c h e B i s c h o f s k o n f e r e n z
2007 - ISBN: 2-87469-010-4
Editeur responsable: Paul Löwenthal, rue Guimard, 1, 1040 Bruxelles
-2-
CHRONIQUE DE 50 ANS DE LAICAT
Jacques Briard
1
On ne pouvait pas finir l’année 2006 sans marquer les cinquante ans d’activités totalisés par le
Conseil Interdiocésain des Laïcs (C.I.L.) et ses prédécesseurs. La façon dont cela s’est fait le
9 décembre 2006, en s’interrogeant avec des éclairages de personnes de qualité sur les défis à relever
par les catholiques, était une bonne manière pour ne pas trop parler du passé et pour penser à l’avenir.
Mais il n’était pas inutile d’accompagner cette démarche d’un survol concernant le travail mené dans
les lieux de rencontre successifs des laïcs catholiques de Bruxelles et de Wallonie. Cela fut fait
brièvement à la même occasion et est prolongé par cette contribution à lire aussi entre les lignes et à
compléter. Car, « nous vivons dans une culture de l’histoire, du mouvement et du progrès », comme
l’écrivait fort justement Philippe Regnier en quittant, juste avant sa mort inopinée, son service de
conseiller théologique de ce qui était alors le Conseil Général de l’Apostolat des Laïcs.
1956-1965 : les débuts
C’est en 1956 que les Évêques de Belgique créent une Commission Générale des Œuvres
d’Apostolat. Elle comprend les évêques et vicaires généraux ayant la responsabilité des œuvres
sociales et apostoliques, mais aussi de laïcs, soit selon une liste datant de 1960 : M
gr
Schoenmaekers
(Archevêché), M
gr
Heuschen représentant M
gr
van Zuylen (Liège), M
gr
Blaimont (Namur), M
gr
Joos
(Tournai), M
gr
De Poorter (Bruges), M
gr
Mampaey, M
gr
Delvaux, M
gr
Dejardin, les chanoines Tasiaux,
De Wil et de Locht, le RP van der Straeten, s.j., M
me
Ch. D’Oultremont, M
lles
E.Braham, S.Schuind et
Fl.Herrier, MM G.Hoyois, André Daue et Jean Bouhy. Cette commission a pour secrétaire le chanoine
Pierre de Locht chargé de la rédaction de l’ordre du jour et, après consultation de l’évêque qui préside
la commission, de son envoi et de la rédaction du compte-rendu. Mais dans ce pays berceau de la
méthode « Voir Juger Agir » qu’est la Belgique, la révision des objectifs et de la composition de
cette commission sont vite demandées. Dès lors, en 1962, Jean Bouhy, le regretté fondateur des
Équipes populaires, et le chanoine Pierre de Locht sont chargés de mettre sur pied un authentique
conseil consultatif, évêques et vicaires généraux puissent vraiment sentir l’état d’esprit des
responsables et aumôniers des œuvres concernées ainsi que préparer les laïcs à accueillir les
conclusions du concile Vatican II.
Ainsi, dans une note de travail échangée en 1962 entre Pierre de Locht et Jean Bouhy, il est
proposé que le but soit de tendre à réaliser la synthèse « sacerdoce – laïcat » et ce, avec pour objectifs :
- La mise en commun des préoccupations fondamentales des diverses formes d’action
apostolique (par exemple la spiritualité du laïc, l’ouverture aux non pratiquants) ;
- L’analyse des conséquences religieuses des événements importants de la vie profane (sociaux,
économiques,…) ;
- La recherche de formes concrètes de témoignages communautaires de la chrétienté (thème
commun, carême de partage, manière de sensibiliser au Concile,…) ;
- L’étude de certains problèmes doctrinaux, comme le pluralisme, le le complémentaire du
sacerdoce et du laïcat dans le monde païen (sic !) ;
1
Jacques Briard a été membre des CGAL et C.I.L. de 1976 à 2005 à divers titres : coopté, délégué de Entraide et Fraternité,
vice-président de 1978 à 1982, président de 1983 à 1989, membre du comité de 1982 à 2005.
-3-
- La préoccupation de secteurs géographiques ou sociologiques qui ne sont pas recouverts
actuellement par un effort d’évangélisation (centres urbains, centres productifs, immigrations de
l’intérieur,…).
La même note ajoute que « tout en veillant à se consulter et à s’informer, la Commission
flamande et la Commission francophone devraient jouir l’une à l’égard de l’autre de toute l’autonomie
nécessaire pour éviter que le légitime souci d’unité nationale ne se traduise en fait que par un
nivellement par le bas dommageable à l’action de l’Église ». Il est encore proposé que le secrétaire soit
un laïc désigné par les Évêques.
Cependant, en 1963, c’est l’abbé Roger Gosseries qui est nommé secrétaire de la Commission,
alors qu’il l’est déjà au Conseil de la Jeunesse Catholique (CJC). Et tandis qu’un conseil pastoral
interdiocésain, ou I.P.B., est formé du côté néerlandophone, un Conseil Général de l’Apostolat des
Laïcs (CGAL) – et non pas pour les laïcs, selon l’appellation employée au Vatican – est fondé en 1965
pour Bruxelles et la Wallonie.
Cela se fait sous la présidence de Jean Bouhy et avec la participation de Ginette Carlier, Léon
Remacle, Urbain Vanderschraege, Manu Lousberg, Flore Herrier, Claire Delva, Marie Braham, Pierre
de Locht, Nicolas Antoniadis, Marie-Louise Bernard-Vérant, Elvire Boulanger, Jean Delfosse,
Marguerite Fiévez, Amand Vanneste et Lucien Morren. De leurs travaux sortira un bureau du CGAL
composé de Ginette Carlier, Urbain Vanderschraege et Roger Gosseries. Ce dernier sera secrétaire
jusque fin 1972 et signale pour cette période, qu’il qualifie de pleine de dynamisme et d’espérance, la
participation au II
e
Congrès Mondial de l’Apostolat des Laïcs la délégation belge, emmenée par
l’U.C.L., demande que la Hiérarchie ne s’occupe plus des méthodes mais bien des valeurs en matière
de contraception. De même, le CGAL marque un intérêt pour les travaux du Concile à travers des
journées d’études, en faisant (déjà) appel au jeune journaliste qu’était l’auteur de ces lignes pour en
rédiger les textes, bien qu’il ne fasse pas partie des chroniqueurs religieux de Bruxelles et de Wallonie,
comptant d’ailleurs alors peu de laïcs, sauf Pierre Wilvers – Jean Petitjean à « La Cité ».
Au fil des ans, la vie du CGAL (devenu C.I.L. en 1996) est marquée par des élargissements
successifs y amenant, avec plus ou moins de succès, des laïcs engagés non seulement dans les
mouvements issus de l’Action catholique, mais aussi de divers services et milieux, y compris
pluralistes et par la voie de la cooptation, ainsi que des représentants des ordres religieux, du clergé et
des séminaires. Et cela à travers de parfois longues révisions de statuts et discussions concernant
notamment les liens avec les Évêques, etc.
Cela se mène sous les présidences successives de Jean Bouhy, Ginette Carlier, Jacques Briard,
Claude Clippe, Bernard Crespin et Paul Löwenthal. Avec tour à tour à la vice-présidence Urbain
Vanderschraege, Maurice De Backer, Aimé Samyn et Jacques Briard, puis heureusement aussi des
femmes : Chantal France, Jeannette Bertrand, Geneviève Ryckmans, Monique Van Assche et Anne
Brisbois. Et avec pour conseillers théologiques Roger Gosseries, Tony Dhanis, Jacques Vallery,
Philippe Regnier, Paul Tihon et Michel Kesteman..
Années 70 : déjà des enjeux d’Église et de société
Dans le prolongement du concile Vatican II et autres événements des années ’60, le CGAL a,
dans les années ’70, une attention à la fois pour les enjeux de l’Église et pour ceux de la société.
Ainsi, au début des années ’70, des membres du CGAL, spécialement les regrettés Ginette
Carlier, Flore Herrier et Léon Remacle, jouent un rôle actif dans la mise sur pied de Vivre Ensemble,
afin que ce service d’Église en matière de lutte contre les pauvretés et les exclusions mène son action
durant et au-delà de la campagne d’Avent, en appui à des initiatives chrétiennes et pluralistes, ainsi
qu’avec des interpellations des responsables politiques.
-4-
A la suite du débat qui opposa les Évêques et le Centre d’Éducation à la Famille et à l’Amour,
ou CEFA, le CGAL réalise en 1974 un document intitulé « Une Église en dialogue permanent et en
recherche de communion au service du monde ». Il est discuté par les évêques francophones et les
membres du comité du CGAL dans un climat de grande liberté et de totale franchise. Deux ans plus
tard, le CGAL présente des propositions concernant l’exercice de l’autorité dans l’Église. Et lors d’une
nouvelle rencontre « Évêques CGAL », chacun reconnaît la nécessité d’éviter tout juridisme, tout
formalisme dans les rapports évêques – prêtres – laïcs pour arriver à des initiatives plus souples
facilitant échanges et travail.
Cette rencontre est aussi l’occasion de présenter les travaux du IV
e
Forum européen des
Comités nationaux de Laïcs que le CGAL et l’I.P.B. ont accueilli en juillet 1976 à Louvain-la-Neuve.
Ce Forum avait traité de la responsabilité des chrétiens dans l’Europe, avec notamment une
contribution des Équipes populaires qui souligne que, pour être l’Église de tous, l’Église doit être
l’Église des petits, fidèle à l’Esprit et aux aspirations des hommes et des femmes d’aujourd’hui.
A cette époque, le CGAL publie des documents relatifs à l’Année Internationale de la Femme,
relevant les discriminations dont les femmes sont victimes dans la société et dans l’Église catholique.
Ils sont remis aux Évêques et adressés, avec l’accord de ces derniers, aux paroisses, mouvements et
organismes d’Église.
En septembre 1977, le CGAL organise à Namur, sous la conduite de Ginette Carlier, Aymé
Samyn et Tony Dhanis, un week-end d’études sur des situations concrètes dont des exclusions en
relation avec la foi et l’évangélisation, à rencontrer en Wallonie et à Bruxelles. Grâce aux
collaborations du Conseil de la Jeunesse Catholique (CJC) et de la Commission d’Étude de la
Pastorale Ouvrière (CEPO), cette rencontre réunit plusieurs centaines de personnes et permet
d’entendre de poignants témoignages, dont l’auteur de ces lignes se souvient d’autant plus qu’il a eu la
chance de les introduire. Nouvel évêque de Tournai, M
gr
Jean Huard, y est applaudi pour sa
courageuse position publique en faveur des ouvriers de la fabrique de jeans Salik. On ne peut, dès lors
s’empêcher de faire le lien entre ce rappel et l’intervention faite à Bruxelles-Toussaint 2006 par le
dominicain Timothy Radcliffe et dans laquelle il a pointé la « cécité de l’Église » à l’égard « des
femmes, des minorités ethniques, des pauvres et des homosexuels ». Et il en est d’autres à propos des
problèmes économiques et sociaux posés par les licenciements à VW Forest touchant des travailleurs
de toutes les régions du pays et forçant ces dernières à collaborer davantage entre elles, alors qu’elles
revendiquent par ailleurs chacune des pouvoirs plus grands.
Durant les années ’70, le CGAL s’intéresse aussi au monde. Ainsi, dans le contexte tendu de la
guerre froide, il dénonce le coup d’État militaire au Chili, la répression contre les écoliers
sud-africains au départ de Soweto ou encore les procès de militants syndicaux et politiques espagnols.
Par ailleurs, c’est toujours sous la présidence de Ginette Carlier, que le CGAL est reconnu par la
Communauté française pour ses activités d’éducation permanente. Cette reconnaissance et l’appui
financier régulier des Évêques permettent au CGAL et ensuite au C.I.L. de disposer d’un secrétariat
prolongeant l’aide antérieure de Marthe Gressier, secrétaire au CJC, et avec pour responsables
successifs Jean-Paul Snappe, Annie Blondiau et Geneviève Sannikoff qui bénéficient à tour de rôle
d’appuis de bien des membres.
Années 80 : sous le signe d’interpellations
Grâce à ces collaborations, le premier numéro de Antenne CGAL paraît en 1980 et présente ce
conseil « non pas au service de l’Église, mais d’Église au service du monde ».
A cette époque, les contributions du CGAL sont nombreuses et diverses : sur la crise
économique et notre foi, la reconnaissance des droits politiques des immigrés en lien avec
Objectifs ’82, sur les personnes du III
e
Âge, à propos des Élections européennes, de l’Année
-5-
Internationale de l’Enfant, des structures de l’Église catholique de Belgique ou encore sur les
inégalités sociales et l’école ainsi que sur les euro-missiles.
En 1982, le CGAL organise aussi à La Marlagne une rencontre longuement préparée sur le
thème du travail. La même année est diffusé un appel aux Chrétiens de Wallonie et de Bruxelles qui
invite à définir des lignes d’action prioritaires. Signé au nom de la Conférence épiscopale, de la
Commission Interdiocésaine du Clergé Francophone et du CGAL, il ne connaît pas les suites
attendues, si ce n’est peut-être à travers Passeport 2000, dont il sera question ensuite, ou diverses
initiatives diocésaines prises au fil des ans, dont Bruxelles-Toussaint 2006.
Fin des années ’70 et début des années ’80, le CGAL a pour conseiller théologique Jacques
Valléry, qui mourut tragiquement en Afrique en 1987. Ce théologien participe au CGAL, alors qu’il
est déjà bien pris par ses travaux au CJC et ses activités de formation (CREFOT) dans le diocèse de
Tournai. Présentant les réponses à une enquête sur la Foi menée parmi les membres du CGAL, il
manifeste bien le double lien, cher à ces membres, à l’Église et à la société, en écrivant : « Lorsqu’on
veut poser des questions qui concernent notre foi, on s’arrête très souvent à quelques thèmes précis
« religieux ». On imagine souvent qu’il est possible de parler de la Bonne Nouvelle, de Jésus-Christ,
de l’évangélisation ou de l’Église sans s’exprimer explicitement avec autant de sérieux à propos de
l’homme, des pouvoirs économiques et politiques,… »
En 1985, c’est bien dans cette ligne que, devant l’accroissement des pauvretés, douze
organisations chrétiennes se joignent au CGAL pour une rencontre avec témoignages et analyses,
présentés ensuite dans la revue « La Foi et le Temps », qui fut un des lieux de rencontre hélas
supprimé – entre clergé et laïcat.
Pour la visite en Belgique du pape Jean-Paul II en 1985 aussi, demande est faite au CGAL
d’intervenir à Liège au nom du laïcat. Ce n’est pas son président, qui est l’auteur de ces lignes, mais
une femme qui est choisie : Anne-Marie Gilson, membre de l’Action Chrétienne Rurale des Femmes
ou ACRF, du conseil pastoral du Luxembourg province non visitée, et de l’assemblée générale du
CGAL. Elle parle avec son cœur, dit son malaise quant au caractère trop officiel de pareille visite et
montre surtout les difficultés et les aspirations des laïcs, spécialement des femmes, pour promouvoir
Paix, Justice et droits humains. Cette franchise suscite des critiques à Coronmeuse, dont des cinglants
« Retourne à tes casseroles » lancés par des gens très distingués. Pourtant, cette contribution avait été
acceptée en haut lieu après avoir été préparée au sein d’un groupe formé de vicaires généraux,
membres des conseils pastoraux et du CGAL. Et une fois prononcée, cette adresse qualifiée de très
franche par La Libre Belgique vaut à Madame Gilson un « Merci Madame pour vos paroles claires »
glissé par le Pape resté indifférent, selon Le Soir, à un chahut bien peu évangélique. La Cité s’était,
elle, demandé s’il n’eut pas mieux valu « une rencontre à huis clos pour pouvoir parler librement au
Pape des problèmes pastoraux, dont les membres du CGAL portent officiellement la charge devant
nos évêques ».
Après cette visite et en lien avec un appel des Évêques, le CGAL mène une réflexion sur la
Nouvelle Évangélisation. Il en retient l’idée de tenir des États généraux de l’Église francophone de
Belgique.
De même, le CGAL élabore des propositions sur la collaboration entre prêtres et laïcs pour le
synode de 1987. Synode à l’issue duquel le cardinal Danneels vient livrer ses réflexions au CGAL.
A la Pentecôte ’89, sur invitation de la Conférence épiscopale, le CGAL fait partie, en la
personne du président sortant qu’était l’auteur de ces lignes, de la délégation belge au
I
er
Rassemblement Œcuménique Européen (ROE), tenu à Bâle sur le thème « Paix, Justice et
Sauvegarde de la Création ». Y compris par le logement dans un abri anti-atomique. Parmi les jeunes
d’Europe de l’Est, c’est une ouverture à la grande Europe, trois mois avant la chute du Mur de Berlin,
et à l’œcuménisme, car si CGAL et C.I.L. comptent des observateurs protestants et orthodoxes dans
leurs assemblées, on ne peut pas dire que l’œcuménisme, cher au regretté Lucien Morren, soit une
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