l'homme a vu deux énormes nids dans ses arbres et il les a détruits, pensant que le problème était
réglé. Il ne savait pas que les frelons sexués quittent le nid dès l'automne.» Trop tard. Le mal était
fait. L'invasion du redoutable prédateur pouvait commencer.
Frelons capturés par des chercheurs de l'Inra de Bordeaux afin d'être étudiés. (Jean-Bernard
Nadeau/Look at sciences)
Ce frelon asiatique se comporte comme ses congénères européens. L'appeler «frelon asiatique» est
d'ailleurs impropre, car toutes les espèces de frelons viennent d'Asie. Vingt-deux ont été découvertes
au total sur le continent asiatique et en Océanie, mais seules deux d'entre elles se sont aventurées
beaucoup plus loin. D'abord, le frelon d'Europe, dont l'invasion a été stoppée par l'Atlantique il y a
quelques milliers d'années. Ensuite, le frelon oriental, qui a conquis les rives sud de la Méditerranée,
la Grèce, la Sicile.
Dorénavant, il faudra compter avec Vespa velutina. Cet Attila des hyménoptères, originaire des
zones tempérées du Cachemire et de la Chine, a envahi 39 départements français en moins de sept
ans. «La plupart des pays d'Europe ont un risque non négligeable de voir le frelon à pattes jaunes s'y
acclimater, avec une probabilité plus forte le long des côtes atlantiques et du nord de la
Méditerranée», alerte une étude scientifique dirigée par Claire Villemant et publiée mi-juin par le
journal Biological Conservation.
Malgré le décès survenu en Gironde, le frelon à pattes jaunes ne serait ni plus ni moins agressif que
les guêpes ou les frelons européens qui habitent nos campagnes. Le centre antipoison et de
toxicovigilance de Marseille, en charge d'une étude sur cette question, le confirme. Vespa velutina
reste dangereux dans trois cas précis : des piqûres multiples ou une piqûre simple mais localisée sur
des muqueuses et, surtout, des piqûres sur des personnes allergiques au venin d'hyménoptère.
Comme Marie-Claire Jugla. «Le frelon asiatique n'attaque pas si on se tient à une distance de trois à
quatre mètres de son nid, explique encore Claire Villemant. De plus, il n'est pas attiré par la lumière,
contrairement au frelon d'Europe. Il y a donc peu de risque de le découvrir dans les maisons à la
tombée de la nuit.»
La rapidité de son invasion est malgré tout préoccupante. Les scientifiques ne savent pas comment
la ralentir alors qu'elle commence à avoir des conséquences graves sur les populations d'abeilles,
déjà menacées par ailleurs. L'abeille est en effet un des mets favoris de Vespa velutina. Comme tout
prédateur, il cherche les victimes les plus faciles à trouver et qui résistent le moins. Une
communauté d'abeilles déjà mal en point, victime des pesticides, du parasite varroa ou d'autres
virus, devient une cible idéale. L'hécatombe peut alors commencer. Le frelon reste en vol
stationnaire devant la ruche et attaque l'abeille qui rentre chargée de pollen. Il l'attrape en plein vol et
la décortique pour ne garder que le thorax qui abrite les muscles du vol, riches en protéines. Cette
présence permanente devant les ruches est d'autant plus dangereuse qu'elle perturbe l'activité de
butinage. L'hiver venu, la ruche peut mourir de faim.
Les abeilles chinoises ont appris à se défendre contre les frelons à pattes jaunes. Elles forment une
boule autour d'eux et augmentent la température par frottement de leurs ailes. Au-delà de 45 °C, le
frelon meurt d'hyperthermie. «Nos abeilles ne maîtrisent pas cette technique, regrette Claire
Villemant. Mais des observations récentes semblent montrer qu'elles développent des techniques de
défense efficaces.» Il faudra attendre quelques décennies pour que les abeilles françaises maîtrisent
les techniques de combat de leurs congénères chinoises. La vengeance des abeilles françaises n'est
donc pas pour demain. Le frelon à pattes jaunes, lui, continue sa marche conquérante. Sans état
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