AVANT PROJET DE PROPOSITION DE RECOMMANDATION DE LA COP21 destinée à ème 10 CONFÉRNCE MINISTÉRIELLE DE L’OMC (Confidentiel) Résumé La COP21 se tiendra du 30 novembre au 15 décembre. La 10ème Conférence Ministérielle de l’OMC se tiendra à Nairobi du 15 au 18 décembre. Il est proposé ici que la COP21 adresse à la Conférence Ministérielle de l’OMC la recommandation suivante: « que les Membres de l'OMC s'engagent, sur une base volontaire, à informer le Secrétariat de l’OMC, dans le cadre de leurs notifications relatives aux soutiens de la Boîte Verte, des mesures spécifiques mises en œuvre dans l’agriculture pour lutter contre le changement climatique». Contexte A l’issue de la rencontre du G20 des ministres de l’agriculture en mai dernier en Turquie, ces dernier ont reconnu l'enjeu majeur de la prise en compte du changement climatique dans la lutte contre l'insécurité alimentaire et ont dit être attentifs aux résultats de la COP21. Le 28 avril dernier, au cours d’un événement organisé conjointement par l’OMC et le PNUE au siège de l’OMC, sur le thème “20 ans à la recherche de voies vers le développement durable”, le Directeur général de l’OMC Roberto Azevêdo a déclaré que “les questions environnementales sont profondément ancrées dans l’histoire de l’organisation”, notant que le principe de développement durable était inscrit dans le texte fondateur de l’OMC1. Il a également déclaré que, cette année, il était possible de faire un saut qualitatif pour ce qui est de l’articulation commerce-environnement, au moyen d’une coopération plus étroite entre les deux organisations, de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques organisée à Paris, et en faisant progresser les négociations dans le cadre de l’OMC, y compris à la Conférence ministérielle consacrée au Cycle de Négociations de Doha pour le Développement qui se tiendra à Nairobi2. Les négociations du Cycle de Doha pour le Développement (engagées en 2001) portent essentiellement sur quatre domaines : les produits agricoles, les produits non agricoles, les services, les règles. La négociation agricole porte elle-même sur trois volets : l’accès au marché (les droits de douane etc..), le soutien interne et la concurrence à l’exportation. Dans le soutien interne, on distingue globalement deux types d’instruments de politique agricole : ceux qui ont été définis comme étant commercialement non distorsifs (Boîte Verte) et qui répondent à des critères juridiquement bien définis, et les autres instruments, considérés comme commercialement distorsifs (Boîte Orange) du fait qu’ils ne répondent pas à au moins un des critères de la Boîte Verte. L’objectif de chaque cycle de négociation est, depuis celui de l’Uruguay, de négocier la réduction des aides distorsives (Boîte Orange), les Membres de l’OMC restant libres d’utiliser les instruments de la 1 2 Inscrit dans le préambule du texte fondateur de l’OMC Discours: https://www.wto.org/french/news_f/spra_f/spra56_f.htm (temporairement en anglais) 1 Boîte Verte sans limitation de montants. Cela a bien entendu entraîné, depuis le cycle d’Uruguay, le « basculement » d’aides de la Boîte Orange vers la Boîte Verte, si bien qu’aujourd’hui, les montants financiers inscrits dans la Boîte Verte sont assez considérables, non seulement dans les pays développés, mais aussi dans les pays émergeants. Cela étant, chaque Membre de l’OMC est tenu de notifier régulièrement au Secrétariat de l’OMC les montants alloués aussi bien à la Boîte Verte qu’à la Boîte Orange. Tableau 1 : Boîte Verte : Champ couvert Services généraux, Versements directs aux producteurs, y compris: y compris: • Recherche • Soutien du revenu découplé • Contrôle de ravageurs et de • Assurance de revenus et garantie des maladies revenus • Formation • Indemnisation en cas de catastrophes • Services de vulgarisation / conseil naturelles • Inspection • aide à l'ajustement des structures • Marketing et promotion - Cessation d’activité • Services d'infrastructure - Réduction des moyens de production • Stocks publics pour la sécurité - Aides à l'investissement alimentaire • programmes environnementaux • Aide alimentaire intérieure • programmes d'aide régionale Tableau 2 : En vert : les montants affectés à la Boîte Verte (USA, UE, Chine, Inde) Proposition Certains pays développés (Canada, notamment) ont proposé, sans donner beaucoup de précisions, d’inscrire le changement climatique à l’agenda du Cycle de Doha. Les Membres ont refusé considérant que cela ne ferait qu’alourdir le programme qui contient déjà beaucoup de sujets conflictuels. Les pays en développement y sont les plus opposés, craignant l’usage de ce thème par les pays développés pour mettre en place un « protectionnisme vert » qui consisterait à imposer des « ajustements fiscaux à la frontière » à l’encontre des pays qui n’appliqueraient pas les mesures environnementales relatives au climat. 2 La présente proposition tient compte de cette crainte : elle ne porte pas sur « l’accès au marché » mais sur le soutien interne ; qui plus est, le niveau d’ambition de la Déclaration Ministérielle de la Conférence de Nairobi qui est proposé ici, et que l’on qualifie de « niveau 1 » pourrait être difficilement refusé. Niveau 1 de la Déclaration Ministérielle de la 10ème Conférence OMC de Nairobi « Les Membres cités en Annexe de cette Déclaration s’engagent à informer le Secrétariat de l’OMC, dans le cadre de leurs notifications relatives aux soutiens de la Boîte Verte, des mesures spécifiques mises en œuvre pour lutter contre le changement climatique » En effet, à la différence d’une Décision Ministérielle, une Déclaration n’engage pas juridiquement et comme cela est indiqué, chacun des membres effectuerait une démarche volontaire. Cela étant, cette Déclaration ouvre la voie à de profondes évolutions : elle présente tout d’abord un intérêt « pédagogique » en offrant l’opportunité de progresser dans la conception de politiques agricoles soucieuses du changement climatique, cela, au travers des notifications transmises au Secrétariat de l’OMC. Ensuite, les premiers pas volontaires de certains membres pourraient servir de référence pour ceux qui voudraient s’engager. Surtout, elle ne sollicite aucun financement public nouveau et ouvre la perspective de l’utilisation des financements existant des politiques agricoles pour soutenir des programmes pour le climat. Cette proposition a été « testée ». Le conseiller agricole du Canada (membre Groupe de Cairns qui représente les pays agro-exportateurs en faveur d’une libéralisation ambitieuse des échanges agricoles) a indiqué, non officiellement, qu’aucun pays ne pourrait s’opposer à une proposition ainsi formulée. Le Groupe ACP (Afrique Caraïbes Pacifique), confidentiellement sollicité pour présenter cette proposition, hésite à s’engager alors même que les pays africains sont potentiellement les plus exposés au changement climatique. Selon le Secrétariat de l’OMC, également consulté, une telle proposition pourrait être discutée au sein du Comité Commerce-Environnement ; mais il est à craindre, dans ce cas, quelques blocages de principe de la part des pays en développement. Au final, et selon les principes de fonctionnement des négociations de l’OMC, toute proposition doit émaner d’un membre ou d’un groupe de membres. Identifier le membre ou le groupe de membres le plus approprié reste, à ce stade, une opération délicate. Elle pourrait être conduite, dans un premier temps, dans le cadre d’une concertation entre les autorités françaises en charge de la COP21 et le Directeur Général de l’OMC. Des entretiens informels avec les membres à priori les plus réceptifs pourraient être organisés en parallèle. Dans tous les cas, on est en droit de penser qu’une Recommandation, aussi peu contraignante que celle présentée ci-dessus, et qui serait adressée aux membres de l’OMC à l’issue de la COP21 pourrait difficilement être ignorée par la Conférence Ministérielle de Nairobi. Suivi : il serait utile de formuler des propositions de recommandations à plusieurs niveaux d’ambition en les formulant dans le langage juridique le plus proche de celui pratiqué par l’OMC. Ce travail sera réalisé si la démarche proposée ici est jugée opportune. Le 28 mai 2015 Texte rédigé par Joseph Rocher - Expert Agriculture auprès du Groupe ACP à Genève pour les négociations OMC depuis 2011. - [email protected] Cel. 06 14 82 74 83 Ce texte n’engage que son auteur 3