Lettre Jacques Cœur n°2 LA FIN DES BRICS ? Focus sur l`Inde

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Lettre Jacques Cœur n°2
Décembre 2015
LA FIN DES BRICS ?
Focus sur l’Inde
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Michel Foucher
Ancien Ambassadeur,
Senior Advisor de Cie Financière Jacques Coeur
Patrick Allard
Economiste,
Senior Advisor de Cie Financière Jacques Coeur
LA FIN DES BRICS ? Focus sur l’Inde
Genèse et destin d’une vision du monde
Au début étaient les « marchés émergents ». En 1981: Antoine van Agtmael (Bankers Trust,
New York proposa de créer un Third World Equity Fund pour l’Asie de l’est (Singapour, Taiwan,
Hong Kong, Corée du sud) qu’il dut nommer Emerging Markets Fund. Le concept de marché
émergent était né.
Pour la Banque Mondiale, un marché émergent signe une économie avec revenu/hab.
inférieur à 11 000 US$ et dont la part dans les exportations mondiales avait augmenté de 0,05%
entre 1995 et 2005 (soit les nouveaux membres de l’UE entrés en 2004, les pays de l’Asie de l’est
et du sud, ceux d’Amérique latine et d’Afrique, soit 17% PNB mondial à cette période). La Corée du
Sud en est sortie en 2007 en entrant à l’OCDE. Cela reste une notion floue.
Puis vinrent les BRIC, acronyme forgé par Jim O’Neill (économiste en chef de Goldman
Sachs) le 30/11/2001. C’est un effet du « 11 septembre » au sens de l’interprétation qui suit: la
globalisation va se poursuivre sans être synonyme d’américanisation ni d’imposition des structures
et croyances américaines. Cet acronyme date une bifurcation marquant l’importance croissante du
monde non occidental. Les critères sont : la hausse des échanges internationaux entre pays
émergents (Brésil/Chine), 40% population mondiale, 16% du PNB, un potentiel de croissance. En
2041, leur poids dépasserait les 6 premières économies occidentales: les piliers du XXIème siècle,
puis 2039, puis 2032. La notion de BRIC installait une nouvelle carte mentale pour les décideurs, un
cadre cohérent pour y investir. Elle fut reçue comme une aubaine en Russie, avec indifférence en
Inde et cynisme au Brésil. La Chine sut en faire bon usage en Incluant l’Afrique du Sud au sommet
de Sanya (Hainan, en 2011).
« It was a simple mental prop » (selon O’Neill) mais cette carte
mentale a produit des effets. Ce n’est pas un groupe homogène du
point de vue géopolitique et le sous-ensemble IBAS (Inde Afrique du
sud Brésil) ne regroupe que les pays de régime démocratique, avec des
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effets économiques. Sa formation a eu un rôle international actif avec le passage du G 8 au G 20
(et au sein du G 77). L’interdépendance accrue entre les BRICS explique l’impact du ralentissement
chinois sur le Brésil (moins d’importation de fer et de soja). Une banque de développement sera
instituée en avril 2016 Shanghai avec un président indien. Une réserve de change commune a été
envisagée. La banque est dotée de 100 milliards de dollars, dont 41 versés par la Chine, 18 par
l'Inde, le Brésil et la Russie, et 5 par l'Afrique du Sud. Faut-il y voir un système alternatif au FMI et à
la BM ? C’est aussi un facteur, mineur, d’internationalisation du renminbi.
Enfin des Etats sont candidats et intéressés à ce forum non dominé par les occidentaux
Les pays émergents, du point de vue économique, ne sont pas un « tout ». Pour
l’investisseur, il convient de préciser la liste pour ne pas perdre des opportunités de
développement. Les BRICS comptent pour 30% de l’activité des grands groupes internationaux
(dont 1/3 en Chine).
L’Inde, la dernière des BRIC ?
Depuis la création du sigle et de la classe d’actifs éponyme en 2001 par Jim O’Neil, alors
économiste en chef pour les économies émergentes de la banque d’investissement Goldman
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Sachs, l’Inde a réalisé une croissance très supérieure au traditionnel Hindu rate of growth,
meilleure que celle du Brésil et de la Russie mais que la performance de la Chine a quelque peu
éclipsée. Aujourd’hui, alors que la Russie et le Brésil sont en récession, que l’économie chinoise
ralentit et fait douter d’elle, l’Inde semble échapper aux maux qui frappent ses partenaires pour
apparaître comme la dernière des BRIC.
La promotion de l’Inde doit en partie au discrédit qui a terni le charme des BRIC, discrédit
attesté par nul autre que Goldman Sachs prenant la décision, but novembre 2015, de clore ses
fonds BRIC. Les effets des deux crises originaires des puissances économiques établies, la grande
crise financière (2008-2009) puis la crise de l’euro (2011-2012), sur les performances économiques
et financières des économies émergentes et des BRIC en particulier, ont démenti les promesses
d’essor irrésistible et autonome investies dans les BRIC. Au cours des deux dernières années, une
fois épuisé l‘impact stimulant des puissantes mesures de soutien mises en œuvre par la Chine et
ses partenaires, et devenu manifeste l’impact négatif de leurs corollaires (endettement,
surcapacités, mauvaise orientation de l’investissement, chute de la profitabilité), le modèle de
croissance des BRIC s’est finalement révélé pour ce qu’il est, excessivement dépendant d’un
environnement économique et financier international favorable, lui-même déterminé par la
conjoncture et les politiques économiques des puissances économiques établies.
Pour autant, le report sur
l’économie de l’Inde d’une partie
des espoirs portés naguère par les
BRIC doit principalement aux
mérites propres à ce pays. Elle a
décollé au but des années 1980, à
peine plus tard que la Chine, à
laquelle elle est souvent comparée
et à laquelle elle se mesure. La croissance du Pib est restée certes moins vigoureuse, près de 10%
l’an de 1980 à 2015 pour la Chine, 6.3% pour l’Inde, de sorte que le poids de la Chine dans
l’économie mondiale (15,5% en USD, 17% en PPA) devance nettement celui de l’Inde (3% en USD,
8.5% en PPA). Le niveau de vie a également progressé plus vite en Chine (+8.7% l’an sur la même
période) qu’en Inde (+4.4%) dépassant 8 000 dollars courants en 2015 (soit 15% du Pib par tête
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américain, 25% en PPA) contre 1 700 dollars courants en inde (soit du 3% Pib par tête américain,
11% en PPA). L’inde est classée par la Banque mondiale parmi les pays à revenu moyen inférieur,
comme l’Indonésie, alors que la Chine fait partie des pays à revenu moyen supérieur, comme le
Brésil ou l’Afrique du Sud.
Surtout, depuis la grande crise financière, la croissance de l’Inde s’est montrée plus
résiliente que celle des autres BRIC et que de nombreux pays émergents. Elle est restée positive au
pire moment de la récession (2009) et elle entrée dans une phase de reprise dès 2013, alors que la
croissance des autres BRIC se dérobait, ralentissant fortement en Chine, faisant place à des
récessions marquées au Brésil et en Russie.
L’Inde n’a pas commis les mêmes erreurs que ses partenaires. En particulier, l’endettement
total y est resté stable, en part de Pib entre 2001 et 2014. Au cours des deux dernières années, elle
a entrepris des réformes qui lui ont permis de maîtriser le déficit des comptes publics, de renforcer
la crédibilité anti-inflationniste de la politique monétaire et de capitaliser sur la baisse des prix du
pétrole en abaissant les taux d’intérêt directeurs et, plus généralement, de tablir la confiance
des entreprises et des ménages. Selon l’indice Nielsen, le consommateur indien est actuellement
le plus optimiste au niveau mondial. D’autres réformes sont à l’agenda du gouvernement indien,
notamment la création d’une taxe sur les biens et services, dont l’instauration lèvera un obstacle à
l’existence d’un marché national intégré. L’adoption de la mesure constituera un test sur les
capacités du pouvoir à réaliser les réformes qu’il a annoncé.
A court-moyen terme, les perspectives de croissance de l’Inde sont nettement plus
favorables que celles de ses partenaires : la plupart des prévisions créditent l’Inde d’une croissance
de 7% ou plus pour 2016, supérieure à celle de la Chine et des autres BRIC, et celles d’autres
grands émergents, comme la Turquie ou le Mexique. Comme celle de ses partenaires, la croissance
indienne est confrontée à une demande extérieure mal orientée, mais elle est soutenue par une
demande intérieure robuste, tirée par la consommation, notamment en services, et une amorce
de redressement de d’investissement, public et privé. La prévision d’une croissance robuste
soutient la valorisation des actifs indiens dont le PER moyen anticià 12 mois (plus de 17, début
novembre 2015) est parmi les plus élevés des marchés émergents et est orienté à la hausse.
A plus long terme, l’Inde bénéficie d’atouts qui devraient lui assurer une croissance
soutenue à condition qu’elle surmonte des facteurs de vulnérabilité récurrents. Son principal atout
1 / 8 100%

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